Chapitre 8
Je suis scotché de découvrir monsieur Sidoine, le CPE. Je me fais tout un roman sur sa présence ici et mon cerveau part complètement en vrille. J'imagine que Clémence m'a menti et qu'elle est bien enceinte. Notre principal est sûrement au courant puisque le test de grossesse a été trouvé dans le lycée. Il est donc chez mon amie pour parler avec elle de sa scolarité et anticiper avec sa mère la suite des évènements. Mais si Clémence est réellement en cloque, qui est le père ? Ma théorie de la capote endommagée est peut-être vraie ? Le sang me monte au visage tant je suis furieux contre Clémence.
— Putain Clem, tu te fous vraiment de ma gueule ? Tu comptais me l'annoncer quand ?
— Écoute, Paul, je t'assure que ce n'est pas simple pour moi ! chuchote-t-elle pour ne pas attirer l'attention de son beau-père, toujours à l'écoute de notre conversation.
Elle me tire à l'angle de sa maison, un peu à l'écart de l'espion, pour que nous continuions cette discussion. De ce côté, il n'y a pas de voisins, seulement une petite place avec un puit au centre, Sidoine ne peut pas nous voir. Les yeux de Clem paniquent, elle n'arrive pas à les fixer et ses mains tremblent. Pour ne pas que je m'en rende compte, elle les planque dans la poche avant de son sweat. Je reste bloqué sur le fait que j'ai couché avec elle, alors qu'elle est peut-être enceinte de moi.
— Non mais tu me dégoûtes là !
Je ne sais plus comment agir, je trépigne sur place, je m'arrache les cheveux, je ne parviens plus à contrôler mes nerfs. De son côté Clémence est confuse, elle se mord la lèvre inférieure et aspire sa petite plaie avant de déclamer, pour essayer de dédramatiser le contexte :
— C'est bon, tu crois que j'ai voulu cette situation et que je suis heureuse de ce qui se passe ?
— Je te pensais sincère !
— Je te rappelle qu'on baise juste ensemble ! Le reste ne te regarde pas, tu me le dis assez souvent...
— C'est exactement ça le problème !
Je suis dans tous mes états, je sors de mes gonds, car je me sens piégé. Je perds la tête et deviens fou. Je me mets à divaguer. Après tout, je ne suis peut-être pas le véritable responsable, avec tous les mecs qui l'ont sautée... Il ne faudrait pas en plus qu'elle essaie de me faire croire que c'est moi qui l'ai engrossé. Est-ce qu'elle s'est protégée avec ses autres partenaires ? Je n'étais pas là pour vérifier ! En revanche, pour ma part, je peux certifier que je n'ai jamais oublié de mettre une capote, je ne suis pas si bête que ça et les chances pour qu'elle soit en cloque avec un préservatif sont tout de même minimes...
Elle marque un temps d'arrêt et prend une mine innocente pour me demander :
— Mais de quoi tu me parles ?
Je pointe mon doigt accusateur vers son nombril et lui lance :
— Du gosse que t'as dans le bide !
— Mais t'es con ou quoi ? JE NE SUIS PAS ENCEINTE, articule-t-elle suffisamment fort pour que tout le quartier le sache.
— Ah ? Mais tu parlais de quoi alors ? lui rétorqué-je totalement perdu.
Le bon point, c'est qu'elle n'est pas en cloque de moi ni de personne. Je suis extrêmement soulagé, je soupire avec exagération quand, en me montrant la fenêtre de l'étage, elle m'indique :
— De mon beau-père... Monsieur Sidoine !
— Sidoine est ton beau-père ?
Putain, c'est la meilleure ! Le responsable du lycée, le mec le plus gavant de toute la terre, celui qui se prend pour le psy ou pire, le père de tous les élèves, vit chez ma sex-friend.
— Il s'est installé avec ma mère depuis la rentrée !
— Oh, bordel ! Ça, c'est une super nouvelle ! rétorqué-je en me passant la main dans les cheveux.
— Si tu crois que ça m'emballe de bouffer avec lui tous les soirs...
J'espère que ce connard garde pour lui tout ce qu'il sait sur moi et ma famille. Je n'ai pas du tout envie de partager mes soucis personnels avec Clem. Alors que je reprends tranquillement mes esprits, j'aperçois à nouveau les bleus sur ses bras. Je balance en tirant sur sa manche pour la relever :
— Mais cela ne me dit pas ce que tu as aux poignets !
— Je dois rentrer ! me coupe-t-elle en touchant du bout des doigts sa lèvre entaillée.
— Je ne te lâcherai pas avec ça !
Debout, face à elle, je l'affronte du regard, déterminé à comprendre, quand un bip de mon téléphone m'indique que j'ai reçu un nouveau message.
Benji : Je t'ai vu raccompagner Clem, tu peux lui demander ce qu'elle pense de moi stp.
Mais qu'est-ce que Benjamin a aujourd'hui avec Clémence ? Leila a raison, il est vraiment en crush sur elle ! Pas question que j'intervienne maintenant pour lui. Ce n'est absolument pas le moment. J'ai d'autres préoccupations, d'autant plus que j'ai décerné une pointe d'angoisse chez mon amie à ma dernière interrogation. Je sais qu'il se passe quelque chose et je suis terrorisé par ce qu'elle est sur le point de me révéler.
Elle se laisse tomber sur le trottoir et cherche une cigarette dans la poche de son sac. Elle me présente son paquet et je saisis moi aussi une clope pour l'accompagner avant de m'asseoir à côté d'elle. Je l'allume puis lui tends mon briquet pendant que je recrache la fumée devant moi.
— Alors ? C'est quoi ?
— Tu lâches jamais l'affaire, toi ?
— Non !
— Putain, Paul, tu fais chier ! râle-t-elle en posant ses coudes sur ses genoux.
Le dégoût se dessine sur son visage pâle. J'aperçois même une larme qui se forme au coin de son œil, elle semble désorientée. Son regard noir fixe le trottoir tandis qu'elle tourne entre son pouce et son index le filtre de sa cigarette. Je veux l'attirer contre moi pour l'encourager, mais elle me refoule. Elle a le visage d'un petit animal fragile qui perçoit un danger.
— Dis-moi !
— Ne me touche pas ! m'ordonne-t-elle en me repoussant brutalement.
Elle renifle et s'essuie le bout du nez d'un revers de manche puis tire sur sa clope. J'ai tellement envie de savoir ce qu'il se passe...
— Dis-moi !
— C'est Ken !
— Ken qui ?
— Le nouveau ! Le gitan ! me précise-t-elle.
Notre région accueille régulièrement des communautés de gens du voyage et depuis plus d'un mois, nous avons dans notre classe un mec plutôt sur la défensive. Il a une grande tendance à être agressif dès qu'on le regarde un peu trop...
— Qui, le boxeur ?
C'est le surnom que les garçons du lycée ont donné à Ken en raison de ses nombreuses bagarres. Il a eu des embrouilles avec une bonne partie de mes coéquipiers de rugby.
— Ouais !
— C'est lui qui t'a fait ça ? Mais quand ?
J'inspecte les bleus qu'elle accepte enfin de me montrer sur ses poignets. Elle a les traces des serrements de Ken, il n'y est pas allé de main morte, ce con.
— Hier matin, il était à la morgue en même temps que nous !
Bordel, ce mec était à côté de moi, pendant que je prenais mon pied avec Clémence. Je n'arrive pas à le croire !
— Quoi ? Mais c'est impossible !
— Qu'est-ce que tu en sais ? Il faisait noir ! Il était là et quand tu es parti, il m'a sauté dessus !
— Putain, Clémence ! Il t'a violée ?
Elle prend sa tête dans ses mains pour se cacher le visage.
— Non, non, il ne m'a pas violée. Il m'a juste frappée, jusqu'à ce que je lui file un coup bien placé !
Je m'imagine aussitôt la scène : Clem qui est en train de se rhabiller quand je lui claque la porte au nez. Le voyeur qui lui saute dessus et qui désire profiter d'elle. Il la tripote, l'embrasse et veut abuser d'elle. Cette dernière se débat, mais ne peut pas crier pour ne pas être prise en flag dans la salle interdite. Il lui fait mal, la maintient de force et lui broie les poignets. Il s'accapare de sa bouche et lui abîme la lèvre jusqu'à ce qu'elle lui mette un coup de genou entre les jambes. C'en est trop, je me lève d'un bond, balance ma cigarette de l'autre côté de la rue et déclare sûr de moi :
— Je vais le détruire ! Clémence, je te jure, je vais le tuer !
— Paul, s'il te plaît, reste en dehors de ça !
— Jamais de la vie !
Sans l'écouter davantage, je charge mon sac sur l'épaule et pars avec l'envie folle de pulvériser ce mec. Je vais lui défoncer la gueule, lui faire regretter chacun de ses gestes !
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