Première fois
Malgré leurs efforts combinés, ils ne parvinrent pas à effacer leurs défauts d'in coup de gomme unique. Et tout comme Chan ne parvenait pas à réfréner ses élans de jalousie lorsque quelqu'un s'attardait plus que de mesure auprès de son amoureux, Minho se refermait parfois sur lui-même. Aujourd'hui était l'un de ces jours.
Chan avait quitté leur appartement avant que Minho ne se réveille. Il avait rendez-vous avec un potentiel sponsor, il aimait être en avance pour ce genre de tâche professionnelle. Il avait acheté un café sur la route et avait profité de l'air frais mais sec sur ses joues. Lorsqu'il était revenu en fin d'après-midi dans leur cocon, Minho était déjà rentré de la garderie. Il le trouva assis en tailleur sur leur canapé, à feuilleter le journal.
« - Salut, comment s'est passée ta journée ? » Minho ne répondit pas. Chan fronça les sourcils mais ne fit pas de commentaires. Parfois le brun se trouvait happé par la concentration de ses lectures jusqu'en oublier son environnement autour.
Chan s'approcha donc, et s'assit à côté de lui. Les yeux de Minho cessèrent de bouger un instant, avant de reprendre leur lecture. Il remonta ses lunettes sur son nez. Chan se blottis contre son épaule et écouta le rythme de sa respiration.
« - Est-ce que tu veux que je fasse à manger ce soir ? » proposa le blond. Minho hocha la tête. Peut-être était-il simplement fatigué.
Le lendemain Chan eut la confirmation que quelque chose ne tournait pas rond. Ils se levèrent à la même heure, pourtant Minho lui adressa à peine la parole. Le plus âgé dû réclamer son bisou pour que Minho concède à lui embrasser la joue. Lorsqu'il le retrouva dans la soirée, Minho prétexta une migraine et s'en fut sous la couette.
Quelque chose tracassait le plus jeune. Mais Chan savait. Il connaissait ses changements d'humeur et son besoin de solitude. Il lui amena un bol de soupe et le laissa à ses pensées. Il ne prenait plus ce comportement comme une attaque personnelle, car Minho avait appris qu'il pouvait se confier à lui. Et qu'il s'était épanché à demi-mots de trop nombreuses fois pour le compter. Alors Chan attendrait jusqu'à ce que le creux soit derrière lui, ou qu'il aborde lui-même le sujet.
Les jours passaient et Minho continuait d'éviter son regard. Chan dansait autour de lui, laissant assez d'espace entre eux pour que son cadet respire, se tenant assez proche pour qu'il puisse se confier. Pourtant la solitude semblait aggraver son état, et il ne se décidait pas à accepter cette main tendue.
Chan décréta qu'il s'était montré assez patient.
Il décida de le confronter un soir. Minho se tenait au-dessus d'une casserole, une cuillère en bois à la main. Il préparait des pâtes aux légumes avec une crème aux champignons. Il avait les sourcils froncés par la concentration, et rien que ce détail signala à Chan que son copain n'était pas dans son état normal. La cuisine était son remède, son passe-temps, son plaisir. Pas une source de frustration.
Chan s'approcha dans son dos et pressa son torse contre ses omoplates. Minho cessa ses machinations un instant, avant de se détendre. Chan coula son menton à la jointure de son épaule et de son cou. S'il s'avançait un peu, il pourrait embrasser l'arrête de sa mâchoire. Ses doigts se mirent à se mouvoir, tracer des formes abstraites sur le ventre de son compagnon.
« - Est-ce tu veux poser ta cuillère ? » Minho obtempéra et se retourna pour confronter le regard de son interlocuteur. Chan continua à l'envelopper de ses deux bras et Minho ferma les yeux. « Tu veux en parler ?
-Tu vas encore dire que c'est stupide...
-Ce n'est pas stupide si ça te reste autant en tête. » Minho baissa le menton. Chan monta l'une de ses mains pour cueillir sa joue. « S'il te plaît ? » Minho soupira et éteignit le gaz.
Ils se dirigèrent au salon où ils s'assirent sur le canapé, face à face. Minho ramena ses genoux contre sa poitrine et Chan posa sa main sur sa cheville, son pouce traçant des cercles autour de sa malléole pour l'encourager.
« - Tu te souviens lorsqu'on est rentré du concert de DPR IAN ?
-La fois où j'étais tellement malade que tu as dû dormir dans la salle de bain avec moi ? » Minho laissa échapper un petit rire moqueur. Chan accepterait de se rendre ridicule un million de fois si cela apportait du baume au cœur de son copain.
« - Oui cette fois-là.
-Et bien ?
-Dans le métro, tu... » Minho évita son regard. Chan se rapprocha un peu plus, monta sa main le long de son tibia.
« - Me dis pas que je me suis encore ridiculisé ?
-Non pas du tout. C'est juste que, tu te souviens comme on était proche ? Et qu'on discutait ? »
Chan s'en souvenait très bien, presque mieux que le concert lui-même. Minho avait eu les yeux qui brillaient, et un sourire qui lui reliait les oreilles. Il avait été tout autant enivré par l'alcool que par sa présence à lui.
« - Oui ?
-Tu m'as dit à quel point tu me trouvais sexy...
-Oh Minho... Je suis désolé si je t'ai mis mal à l'aise. » Minho secoua la tête de droite à gauche.
« - C'est pas ça, je me suis juste rendu compte... Ça m'a rappelé que je pourrais jamais te rendre complètement heureux. » Les mots étaient comme des pierres dans l'estomac du blond qui l'entraînaient vers le fond.
-Hé, hé » chuchota Chan en se rapprochant de son cadet jusqu'à le tenir dans ses bras. Il ne pouvait résister à Minho lorsqu'il avait cette expression perdue au visage, lorsque sa lèvre inférieure se mettait à trembler et que ses yeux s'embuaient. « Tu me rends complètement heureux Minho.
-Tu sais ce que je veux dire.
-Oui je sais, et on en a déjà parlé de nombreuses fois. Le sexe ne me manque pas.
-Je ne veux que tu te frustres pour moi. » Des larmes transparentes s'échappèrent des yeux de Minho, comme deux mers en pleine tempête. Parfois Chan admirait sa capacité à se montrer vulnérable, souvent cela lui brisait le cœur.
« - Tu ne me frustres jamais Minho. Tu m'apportes bien plus que n'importe qui pourrait m'offrir.
-Comment peux-tu le savoir ? Comment peux-tu être sûr que tu ne veux pas autre chose ?
-Il n'y a rien d'autre que je veuille Minho. » Le plus jeune se mit à pleurer de plus belle. Chan le serra plus fort contre lui, jusqu'à risquer de l'étouffer dans sa poitrine. Il resta silencieux, se contentant de caresser le brun dans le dos, jusqu'à ce que ses sanglots s'estompent.
« - J'ai eu tout le temps de réfléchir Minho. Ne pense pas que je prends cela à la légère. Je sais que ça te tient à cœur, je sais que tu ne veux pas que je me force à l'abstinence pour toi, mais je t'assure que je ne veux rien d'autres que ce que tu as à m'offrir.
-J'aimerais pouvoir t'offrir plus.
-Pas moi. Je t'aime comme tu es, parce que tu es ainsi. Est-ce que tu as confiance en moi ? » Minho releva les yeux et confronta ceux de Chan. Timidement, il hocha la tête. « Alors crois-moi lorsque je te dis que rien ne manque à ma vie. Je t'aime toi, pour ton honnêteté, pour ta gentillesse, pour les petits plats que tu cuisines, pour ta générosité, pour ton humour noir et pour ton asexualité. Je ne voudrais changer cela pour rien au monde. Parce que ça fait partie de toi, et c'est pour cela aussi que tu es aussi unique, singulier et incroyable. Tu portes un regard sur le monde qui ne manque jamais de m'étonner. Tu as des opinions que personne, mis à part toi, pourrait avoir. Je suis tombé amoureux de toi pour cette facette-là aussi, alors ne t'en prend pas à toi-même, s'il te plaît. Ça, ça me rendrait triste. » Chan remis une mèche de cheveux derrière son oreille.
Les yeux de Minho étaient rouges, mais secs. « - Tu ne dis pas ça pour me faire plaisir ?
-Tu me connais mieux que ça.
-J'ai toujours peur que tu vives frustré par ma faute. Je sais que tu as des besoins que je n'aie pas.
-Ne t'inquiète pas, j'ai d'autres moyens de me satisfaire. » Chan surprit le bout des oreilles du brun qui rougissaient. Il laissa son sourire s'étendre avant de reprendre un ton sérieux. « Je ne vais pas te dire de plus y penser, parce que c'est important pour toi, et je sais que tu es toujours en train d'apprivoiser cette partie de toi. Ce que j'aimerais, c'est que tu continues à te confier à moi lorsque tu as des doutes. Cela me fait de la peine de te voir te torturer l'esprit seul dans ton coin. Je suis là pour toi, tu sais ?
-Je sais.
-Je t'aime tellement Minho. » Ce dernier hocha la tête.
***
La question du sexe ne s'était jamais vraiment posée dans leur couple. Pour Chan, cela allait de soi que Minho viendra à lui lorsqu'il serait prêt. Le brun lui avait avoué, au tout début, lors du premier été, qu'il n'avait jamais couché avec personne. Et qu'il n'était pas sûr d'être prêt. Chan l'avait embrassé sur le front en lui disant qu'il était heureux que le plus jeune se confie à lui, mais que ce n'était pas une préoccupation pour le moment. Il préférait sans commune mesure le serrer contre sa poitrine et profiter de l'air qui rafraichissait leurs tempes. Minho avait souri et enterré le sujet.
Minho était rentré à la fac. Ils disposaient désormais de bien plus d'occasions de se croiser, de manger ensemble le midi, pouvant s'attendre à la sortie du campus, prendre le bus ensemble, grapiller une heure par-ci pour partager un café. Jisung et Changbin avaient accueilli le plus jeune à bras ouverts. Changbin racontait à qui voulait bien l'écouter qu'ils avaient adopté le brun, qu'il était leur précieux cadet, leur mascotte. Minho été resté silencieux, déstabilisé par cette invitation trop chaleureuse. Il avait fait le dos rond, Changbin avait tendu la main, s'était laissé mordre, avait persisté jusqu'à ce que Minho ronronne à ses côtés.
Une année était passée. Minho s'ouvrait au monde et aux expériences. Il était parvenu à abandonner ses rêves de beaux-arts et son avenir de gouache, décidant que l'art ne nécessitait pas sa personne à plein temps. Un hobby suffirait. Il s'était construit un nouvel objectif, une ligne de mire : travailler dans la petite-enfance. En garderie, instituteur, il ne savait pas encore. Mais il avait un projet, le cœur de Chan en débordait de fierté.
Il était passé en troisième année, et Minho en deuxième. Chan se demandait toujours comment ça se faisait, quelle bonne étoile l'avait pris sous sa protection pour qu'il ait la chance de le voir tous les jours. Parfois, ces mots lui échappaient, et Minho lui frappait l'épaule en soupirant. Pourtant il les pensait. Profondément. Chaque fois que son regard se posait sur les yeux insondables de Minho, sur ses longues mèches qui lui tombaient en haut du cou, sur ses doigts graciles, sa respiration se bloquait un instant et il souriait à la personne, aux cieux ou ailleurs, qui avait décrété que sa route croiserait celle du plus jeune.
Chan était heureux. Il n'avait pas besoin de plus, il n'y pensait pas.
C'est pourquoi il fut si surpris quand, ce matin-là, Minho vint l'inviter chez lui.
« - Ma mère est pas là, on sera tranquille.
-Okay, cool ! Tu voudras qu'on continue Haikyuu ? Je peux apporter du brownie, je crois que ma mère en fait cette aprèm. Oh ! et aussi de la boisson aux pommes qui pique et que tu adores, j'en ai dans mon frigo.
-Je me disais que... Pour une fois qu'on était seuls... » Minho laissa sa phrase en suspens dans l'air, jusqu'à ce que se forme une révélation dans l'esprit du blond.
« - Oh ! » Il se reprit vite. « Tu es sûr ? » Minho hocha vivement la tête, sans croiser son regard. Chan se rapprocha du plus jeune, collant son front contre le sien. Minho n'appréciait pas les démonstrations d'affection en public, Chan en était bien conscient. Mais il était aussi conscient que c'était la meilleure manière de confronter son cadet. « On n'est pas obligés si tu n'en as pas envie. »
Minho redressa le menton, une pointe de défi au coin de lèvres. « Tu n'en as pas envie toi ?
-Tu ne sais pas de quoi tu parles. » Chan était heureux, profondément heureux. Il n'avait besoin de rien d'autre que de la main du plus jeune dans la sienne et de son rire à ses oreilles.
Mais bon dieu que ce que son corps l'appelait ! Cela non plus, il ne pouvait l'ignorer.
« - Alors c'est décidé. » Minho lui planta un baiser sur la joue avant de s'échapper de sa prise. Chan resta planté quelques secondes sur le trottoir devant les portes de sa fac, le sourire béat et l'esprit ailleurs.
Le soir arriva vite, à son plus grand bonheur. Toute la journée, il ne put s'empêcher de penser aux heures suivantes. Qu'est-ce que Minho aimera ? Est-ce qu'il considérait sa première fois comme importante, ou juste quelque chose dont il voulait se débarrasser ? Quels préliminaires, quelle position ? Est-ce qu'il préfèrerait commencer par des caresses, par se déshabiller lui-même, se toucher seul, ou bien voudra-t-il que le plus âgé s'en charge ? Chan se rendit compte d'à quel point ce sujet avait été abandonné par eux deux. Cela n'avait jamais posé de problème, mais désormais il regrettait. Peut-être devraient-ils avoir une discussion sérieuse avant de passer à l'acte ? Certainement. Non, définitivement. Chan voulait savoir où est-ce que Minho désirait être touché, s'il avait des craintes ou des attentes, des fantasmes. Comme n'importe quel sujet, il voulait tout savoir de ce dont en pensait Minho.
Mais surtout, il voulait connaître ses limites. Ne pas dépasser cette barrière qui le mettrait mal à l'aise, qui le blesserait. Parce que Minho se renfrognerait, rentrerait dans sa coquille, se courberait et disparaîtrait sur lui-même, et que Chan voudra alors s'enterrer vivant.
Le cœur battant à la chamade, il toqua à la porte rouge de sa moitié. Il avait envie de se rabrouer, de se donner une claque. Ce n'était pas un inconnu, ce n'était pas un premier rendez-vous ni une demande en mariage ! C'était Minho, son copain depuis deux ans et demi, le prolongement de lui-même. La fébrilité ne devrait pas contrôler son être de la sorte.
C'était aussi son corps enchanteur, son contact, son plaisir. La porte s'entrouvrit. Il espérait ne pas être devenu rouge pivoine et chassa ses pensées impies.
« - Hey.
-Hey.
-J'ai quand même emmené des brownies. » Le visage de Minho se fendit d'un sourire éclatant.
« - Tu es le meilleur. »
Chan se faufila à l'intérieur. Il n'avait que rarement l'occasion de s'inviter chez la famille Lee. Durant de longs mois, il n'avait osé aborder le sujet, redoutant de confronter Minho, d'être déçu ou d'être maladroit. Mais il avait craqué, et demandé si sa mère le détestait à ce point. Minho avait détourné le regard, et d'une voix plate, lui avait expliqué que sa mère ne le considérait que comme une passe. Une phase dont il se lasserait. Qu'un jour, il se rendrait compte que ce n'était pas sérieux et qu'il se trouverait une fille, fondrait une famille. Chan n'avait rien dit, l'avait bercé dans ses bras jusqu'à ce que les embruns de tristesse quittent ses yeux.
Il lui semblait donc redécouvrir la maisonnée pour la première fois. Le carrelage gris clair, les meubles imposants en bois, l'escalier en colimaçon. Seulement, son attention se reportait toujours sur Minho. Minho et son air carnassier, Minho et ses mains dans le dos, Minho, Minho, Minho.
Débarrassé de ses chaussures et de son menton, le brun l'entraîna jusqu'à sa chambre.
« - Je me disais, peut-être on pourrait en discuter- » Minho ne le lui laissa pas le temps de finir sa phrase. Son dos se retrouva plaqué contre le mur et ses lèvres prises en otage. Loin de lui l'idée de s'en plaindre. Il répondit au baiser avec presque autant d'ardeur, définitivement plus d'affection. Minho était vorace et félin, Chan voulait le recouvrir de ses membres et le protéger jusqu'au bout du monde.
Leurs visages se séparèrent, juste assez pour respirer. « Qu'est-ce que tu préfères ? » Chan profitait du peu de lucidité recouverte pour formuler ses questions. « Est-ce que tu veux qu'on y aille doucement, qu'on s'assoit, que je te touche quelque part en particulier, ou...
-Toi. Je veux juste toi. » C'est à cet instant que le cerveau de Chan disjoncta. Ces mots dans sa bouche, suivis de ses lèvres dans son cou, juste en dessous de son lobe d'oreille, cela suffit à ce que sa conscience chavire.
Chan gémit et reposa ton son poids contre le placo. Les mains de Minho s'activèrent sur sa taille, sortant son T-shirt de l'emprise de son jeans maladroitement. L'esprit de Chan pétillait comme du champagne. Enfin, Minho parvint à libérer le tissu et le blond l'aida à le faire basculer au-dessus de sa tête. Minho ne perdit pas une seconde et entraîna le plus vieux dans un nouveau baiser fébrile. Chan perdit ses doigts dans la chevelure de jais de son amant. Il sentait la poitrine de ce dernier se soulever et s'abaisser à un rythme inquiétant.
Lorsqu'il put enfin se reconnecter à la réalité et cesser de voguer à vue dans son océan de sensations, il tira doucement sur le haut noir de son cadet. Minho s'écarta et se débarrassa avec aisance de son col-roulé. Il eut peu de temps pour le contempler puisque Minho vint de nouveau perdre son visage au creux de son cou. Il remonta ses mains dans son dos, sentit le plus jeune frissonner à son contact, sa respiration haletante contre sa peau nue. Il était comme ivre.
Chan descendirent ses mains au niveau de son jeans. Chan était certain que Minho marquait actuellement sa taille de ses ongles tant il les enfonçait dans sa peau. Il était incapable de s'en plaindre. Il s'attaqua à la boucle de la ceinture du plus jeune, grogna alors qu'il ne parvenait à la libérer. Enfin, il ressortit victorieux de cette lutte.
Minho attrapa ses poignets d'une force qu'il ne lui connaissait pas. Il les écarta de sa ceinture, de son jeans, de lui, les planquant contre le mur. Son coude cogna brutalement contre la paroi, et la douleur ramena Chan à la réalité. Minho était tétanisé, son regard fixé au sol, haletant comme une proie traquée.
« - Minho... ? »
L'intéressé le lâcha comme si sa peau était soudainement devenue incandescente et Chan cru qu'il allait perdre l'équilibre. Le brun récupéra son T-shirt tombé au sol, le revêtit et s'enroula dans sa couette, dos à Chan.
C'était la douche froide. Durant une seconde, Chan sentit ses genoux se verrouiller, son cœur tomber au fond de son estomac, rouler au sol, pourir sur la moquette, son monde entier s'effondrer.
Il l'avait blessé. Il avait dépassé les bornes. Il avait tellement été obnubilé par son propre plaisir, par ses propres sensations qu'il n'avait pas remarqué le mal-être du plus jeune. Et maintenant, Minho allait mal à cause de lui. Se refermait, s'oubliait. Souffrait.
Chan ne prit même pas la peine de se revêtir alors qu'il tomba au pied du lit.
« - Minho, je suis désolé, terriblement désolé. Je sais pas ce qu'il m'a pris, j'aurais dû te demander si tu étais d'accord pour que je te touche, j'aurais dû te demander ce que tu voulais. Je suis tellement désolé. »
La masse de couverture tressauta alors, agitée par les soubresauts qui devaient animer Minho. La vision de Chan s'assombrit un peu plus, et le froid se répandit sans tout son corps.
« - Je n'ai aucune excuse, je m'en veux tellement. S'il te plaît, dis-moi ce qu'il n'allait pas, je ne veux plus jamais te faire du mal. » C'est à cet instant que Chan perçut les sanglots du plus jeune. Il crut devenir fou. « Est-ce que c'était la ceinture ? Les mains dans le dos ? Est-ce que je t'ai mis la pression pour quoique ce soit ? Je t'en prie Minho, parle-moi. »
Sauf que les seuls sons qui s'échappaient d'entre les lèvres de Minho étaient des pleurs étouffés. Chan resta immobile, tétanisé. C'était donc ça, l'impuissance ? Le doute ? Le regret ? Il se sentait rongé, bouffé de l'intérieur, un parasite omnivore ayant élu domicile dans son intestin. L'équilibre fragile de son bonheur était rompu, et il ne pouvait s'en prendre qu'à lui.
Il fit un pas en arrière, sonné. « Je ne sais pas quoi faire Minho. Est-ce que tu préfères que je m'en aille ? Sûrement qu'il vaut mieux que je parte, je n'arrange rien du tout, je te fais du mal. Je... Je vais partir. » Cela le tuait de prononcer ces mots, car il sentait que s'il se détournait maintenant, alors il ne pourrait jamais faire machine-arrière.
Mais Minho était plus important que lui-même, et la plus belle preuve d'amour n'est-elle pas parfois d'abandonner ?
Chan se retourna, prêt à disparaître, résolu à contempler l'étendu de sa culpabilité sans possibilité de rédemption. Une main autour de son poignet le retint. « Reste. » La voix de Minho était étouffée derrière ses couvertures, mais claire comme de l'eau de roche aux oreilles de Chan. Le plus âgé reprit immédiatement sa place assise au pied du lit. Il ne lâcha pas cette main tendue.
« - Qu'est-ce qui ne va pas ? Dis-moi, s'il te plaît. Est-ce que tu t'es senti forcé de retirer ton T-shirt ? Est-ce que c'était le jeans ? » Minho secoua la tête de gauche à droite. « Est-ce que tu n'en avais plus envie ? » Ses sanglots reprirent de plus belle, et seulement ses doigts dans sa main permit à Chan de garder un semblant de lucidité.
« - C'est moi, tu y es pour rien, c'est moi qui... » Minho ne parvint à finir sa phrase, entrecoupé de hoquets. Ne sachant s'il pouvait se permettre de se rapprocher du plus jeune, Chan s'agrippa de toute ses forces à cette main qu'il lui confiait.
« - Chut... » Chan contemplait le visage de son cadet devenu flou et la vermine dans son ventre d'agita de nouveau. Pouvait-il tendre une main, entourer le visage du brun, sécher ses larmes ? Est-ce qu'il serait insistant ? Est-ce que Minho était dégouté de son contact ? Si seulement il avait pris la peine de remettre son haut sur ses épaules ! Il ne savait comment se comporter, et Minho souffrait, et il voulait hurler.
« - Je suis désolé.
-Enfin Minho, tu n'as pas à t'excuser, tu n'as rien fait de mal.
-Si je croyais... Je croyais... » Minho ne termina pas sa phrase.
« - Est-ce que je peux te toucher ? » Un son, entre le sanglot et le rire, sortit d'entre les lèvres du brun. Chan se tenait aussi immobile que lorsqu'il avait 6 ans et jouait à 1, 2, 3, soleil dans la cour d'école.
Minho souleva le bord de sa couette et se décala de quelques centimètres, invitant Chan à s'y glisser. « Tu es sûr ? Si je te mets mal à l'aise, je peux juste rester là, tu n'avais pas l'air-
-Je suis sûr. Tu ne me mets pas mal à l'aise. Ce n'est pas ça. » Chan n'était pas convaincu mais il accepta néanmoins la proposition silencieuse.
À peine installé, Minho vint se blottir contre le torse du plus âgé. Chan en eut la respiration coupée. Son corps comme changé en glaçon, il n'osait plus se mouvoir. Minho l'avait fui une fois, il ne commettrait pas la même erreur.
« - Je croyais que j'en avais envie, je le croyais vraiment. » Minho chuchota si bas que Chan crut imaginer l'entendre.
« - Tu n'avais pas à te forcer. On a tout notre temps.
-Tu ne comprends pas. » Minho renifla de nouveau. Chan osa enfin plier son coude et vint chatouiller la base du cou de son compagnon. La zone que Minho préférait. Il tentait sa chance, son esprit déchiré entre le besoin viscéral de réconforter son cadet et la terreur de le blesser.
Minho sembla se détendre à son contact, mais garda le silence. Chan n'en eut cure, tout du moins un instant. Parce que Minho était dans ses bras et que ses larmes s'étaient taries. Parce que sa respiration profonde se répercutait contre son épiderme et qu'il ne sentait pas de tension dans ses épaules. Car il constituait encore son refuge.
Mais c'est aussi parce qu'il connaissait si bien Minho qu'il lui posa la question : « - Qu'est-ce que je ne comprends pas ? » Car si Chan ne le demandait pas maintenant, Minho n'aborderait pas le sujet, et ce non-dit gonflera dans sa poitrine jusqu'à ce qu'il se renferme sur lui-même de nouveau. Cet aveu avorté se transformerait en poison, lentement, participant à son malheur. À leur malheur.
« - Je ne suis pas sûr d'avoir un jour envie. » Les gestes que Chan lui administraient cessèrent un temps, durant une expiration, avant de reprendre leur design aléatoire.
Une esquisse d'hypothèse se formait dans l'esprit de Chan. Seulement l'avouer à haute voix risquerait de braquer Minho.
« - Est-ce que tu veux en parler ?
-Je ne sais pas quoi dire.
-Je ne sais pas, peut-être est-ce que tu peux m'expliquer ce que tu ressens ? Maintenant, tout à l'heure, comment est-ce que tu te sentais ? »
Chan sentit Minho soupirer. Le plus jeune redressa la tête pour confronter le regard du blond, et Chan le contempla comme on découvre la 8ème merveille du monde. Minho détourna les yeux.
« - Oppressé. » Chan retira immédiatement sa main. « Pas maintenant, gros bêta, tout à l'heure. » Chan repris ses massages. Si Minho pouvait se moquer de lui, alors il n'allait pas aussi mal qu'il le pensait.
« - C'est moi qui t'aie fait te sentir comme ça ?
-Oui. Non. C'est compliqué.
-Est-ce que tu veux essayer de m'expliquer ? » Minho se redressa sur le matelas. Chan le rejoint en position assise. Le genou de Minho tressautait fébrilement, alors Chan y apposa sa main.
« - Tu ne vas pas t'enfuir en pensant que je suis trop étrange ?
-Minho, tu m'as rencontré alors que je dormais dans des toilettes que tu repeignais. Je ne suis plus étonné de rien. » Le brun sourit. Chan aurait pu recevoir un Grammy qu'il n'aurait pu être plus heureux.
« - Je voulais vraiment coucher avec toi. Je pense. Je crois ? C'est important pour toi...
-Ce n'est pas important pour moi.
-D'accord, alors disons que c'est quelque chose que j'ai envie de partager avec toi. Tout le monde raconte que c'est une connexion plus intime, que c'est l'étape la plus intéressante d'une relation car on se voit sous un jour nouveau, que l'on partage alors tout.
-Il ne faut pas croire ce que tout le monde raconte.
-Sauf que je veux ça, je veux tout partager avec toi. » Malgré l'étrangeté de la situation, le cœur de Chan se gonfla de bonheur à ces mots. « C'est juste que... Que lorsque tu avais tes mains dans mon dos, et que je pensais à la suite... Je ne pouvais juste pas. C'était au-dessus de mes forces.
-Chut... » Chan sentait que son petit-ami était à deux doigts de pleurer de nouveau. Il cueillit la joue du brun dans sa paume de main, et Minho s'y reposa. « Ce n'est pas grave. Il n'y a rien de grave.
-C'est grave pour moi, parce que je ne sais pas pourquoi je ressens ça. C'est comme si d'un coup, j'étais dégoûté de toi, de ton contact. » Chan retira ses mains en contact avec le plus jeune. « Ne me lâche pas maintenant ! » Ce cri du cœur, cet appel de détresse, Chan y répondit en embraquant le brun dans une étreinte puissante.
Chan ne comprenait pas tout. Il ne savait toujours pas exactement comment se comporter envers le plus jeune, ce dont il avait besoin lui restait inconnu. Mais il voulait que Minho se livre, étale ce poids que son cerveau oppressé renfermait, qu'il se décharge de cette enclume dans son cœur.
« - Est-ce que tu veux me décrire plus comment tu t'es senti ? Pour qu'on comprenne mieux tous les deux ?
-Je... C'est comme si dans cette situation précise, ton regard et ton contact me terrifiait. Pas maintenant, jamais autrement, tu es mon refuge, tu le sais ? » Chan le savait. « Mais dans une perspective sexuelle, je me sens malade. » Chan lui embrassa le front, l'encouragea à se confier encore plus, à tout déballer. « J'y pensais souvent pourtant, je nous imaginais dans cette scène. Je nous visualisais toi et moi dans mon lit, et puis j'ai toujours été incapable d'imaginer la suite. C'était un écran noir, et je pensais à autre chose. J'ai l'impression d'être un gamin à être dégoûté du sexe comme ça.
-Tu n'as rien d'un gamin.
-C'est frustrant. Je suis désolé.
-Ne t'excuse pas Minho, je t'en prie. Ne t'excuse pas, pas pour ça.
-Tu imaginais passer une autre soirée.
-Oui. Mais elle n'aurait pas été mieux, parce que toutes mes soirées passées avec toi sont parfaites.
-Comment est-ce que tu trouves toujours les bons mots pour me rassurer ?
-Je fais de mon mieux. » La respiration de Minho s'était calmée. Sa joue était collée contre la poitrine de Chan, et il sentait son souffle sur ses pectoraux à chaque expiration du brun. Comme les vagues marines, il se laissa bercer par ce rythme régulier.
« - Est-ce que tu as pensé être asexuel ? » Minho se raidit contre son torse. « Je sais que tu n'aimes pas les labels, tu as toujours refusé d'être assigné à une orientation sexuelle. Mais parfois cela libère de mettre un nom sur ce que l'on ressent, de trouver une communauté qui te ressemble. Et de ce que tu me racontes, peut-être que tu tombes sous cette expérience ? »
Minho resta si longtemps immobile que Chan cru qu'il ne l'avait pas entendu. « - Je pense pas être ace.
« - Pourquoi ? » Chan ne remettait pas en cause son jugement. Après tout, c'était Minho qui savait le mieux s'il tombait sous cette appellation. Mais il voulait juste savoir pourquoi il ne pensait pas y correspondre.
« - Parce que j'ai des désirs sexuels.
-D'accord.
-Et que je me masturbe.
-Asexualité ne veut pas dire aucune expérience sexuelle tu sais ? Cela signifie juste que tu n'as pas de désir envers une autre personne. » Minho fronça les sourcils et serra les lèvres. Chan respecta son silence, jusqu'à ce qu'il perçoive des sanglots qui s'échappaient de nouveau d'entre ses lèvres.
« - Hé, je disais juste ça pour te rassurer ! Si cela ne te convient pas, alors peut-être que c'est autre chose. Je ne t'impose rien !
-Je sais, je sais » hoqueta Minho. « Et c'est ça le pire.
-Pourquoi ?!
-Parce que peut-être que c'est ça, moi. Que je suis asexuel.
-Ce n'est pas grave, il n'y a rien de mal !
-Si ! Parce que tu ne l'es pas, que tu as des désirs, que je vais te frustrer, que je serais encore un boulet pour toi. »
Le peu qui restait du cœur de Chan s'effrita en un tas de cendre. Qu'il le blesse, c'était une chose qu'il ne se pardonnerait jamais. Que Minho pense qu'il pouvait se lasser de lui, qu'il serait un jour pas à la hauteur, cela le détruisait tout autant.
« - Tu ne seras jamais un boulet pour moi Minho, tu peux me croire sur cela. » Chan compris que cela ne serait pas assez pour convaincre le plus jeune. « Oui j'ai envie de coucher avec toi, je ne peux pas te mentir là-dessus, cela ne servirait à rien. Mais j'ai envie de coucher avec toi si tu en as aussi envie. J'ai envie de partager ça avec toi car, pour moi, c'est une manière de me livrer à toi et de partager du plaisir. Mais ce n'est pas plus important que lorsque l'on passe la soirée à discuter ou à regarder un film. Ce n'est pas primordial à ma vie, et surtout je n'ai aucune envie, mais alors aucune envie que tu t'y forces. Cela ne me procurerait aucun plaisir. Je veux partager avec toi toutes les choses qui me rendent heureux, et qui te rendent heureux. Si le sexe n'en fait pas partie, alors je m'en passerais. »
Chan n'avait jamais véritablement songé à cela. Naïvement, et parce que la société le poussait à le voir sous cet angle, il avait pensé que Minho était un peu impressionné et que le sexe ne l'intéressait pas pour l'instant, qu'il était « en retard » pour son âge. Cela avait été sa première erreur. Mais il se rendait compte aussi que ce n'avait jamais été sa préoccupation, et que si le sexe n'intéressait jamais Minho, alors il vivrait avec, parce que Minho était plus important que quelques secondes de fun et un feu d'artifice dans la tête. Minho, c'était la chaleur du soleil dans son dos, la première gorgée d'un chocolat bien chaud après une journée de ski, la première brise de printemps, et rien, pas même le sexe, ne pouvait rivaliser avec ce qu'il ressentait en sa présence.
Minho vint chercher sa main. Il la serra, fort. « Je t'aime. »
Cette journée était une véritable attraction de foire pour Chan, il ne savait pas s'il y survivrait. À commencer par la proposition du plus jeune ce matin, suivit de son excitation, de sa terreur, de son incompréhension, de sa peine, de sa sollicitude et maintenant ça ? Minho l'aimait, bien que la petite voix vicieuse dans sa tête tente de le persuader du contraire parfois. Le fait était qu'il ne l'exprimait que rarement, contrairement à Chan qui prodiguait des déclarations et démonstrations d'affection à tour de bras. Minho était réservé, presque timide, et les signes de son amour étaient aussi rares que précieuses. Chan n'était pas sûr qu'il resterait sensé à la fin de cette journée.
Mais avant qu'il n'ait le temps de rétorquer quoi que ce soit, Minho reprit la parole : « Je t'aime et je ne veux pas que tu te forces à l'abstinence pour moi.
-Je t'aime et je ne veux pas que tu te forces à coucher avec moi.
-Avec des arguments pareil...
-Je sais, c'est difficile d'avoir le dernier mot contre moi. » Minho le lui laissa volontiers, ce dernier mot.
Chan eut soudainement une illumination. « Ça te dirait qu'on fasse des tests sur internet ?
-Des tests ?
-Oui, tu sais, des tests du style 'am i gay ?'
-Ça ne marche pas comme ça.
-C'est vrai. Mais ça peut-être hyper fun. Et tout de même, lorsque j'avais 12 ans, cela m'avait bien aidé à me trouver. » Minho haussa les épaules. « Ça peut être amusant, c'est tout ce que je dis. »
Minho croisa ses bras sur ses genoux et plongea son visage dedans. Chan attrapait déjà l'ordinateur de son compagnon abandonné sur le sol. « D'accord » concéda Minho, alors que Chan tapait frénétiquement dans la barre de recherche.
« - Sexual orientation test ? Vraiment ?
-Il faut bien commencer quelque part. » Minho râlait pour la forme, mais un sourire naissait déjà sur ses lèvres.
« - Qu'est-ce que tu dis de lui ?
-Puisqu'il faut commencer quelque part...
-Alors : 'Combien de fois au cours des 6 derniers mois vous vous êtes imaginé nu avec une personne du même genre ?' » Minho fronça les sourcils.
« - C'est pas comme si je tenais le compte.
-C'est pas comme si c'était une science infuse. C'est juste pour s'amuser, dis ce que tu penses être le plus proche de la réalité.
-Alors met 'parfois'. » Chan obtempéra.
« - 'Combien de fois au cours des 6 derniers mois vous avez fantasmé sur une personne du même genre ?' » Chan roula des épaules. « Tu peux me le dire que toutes les nuits tu penses à mon corps de dieu, je ne te jugerais pas.
-C'est vrai que tu n'es pas trop mal dans ton genre. » Chan sentit son visage le brûler. C'était une chose de taquiner Minho, c'en était une autre lorsqu'il répondait. « Met 'parfois'.
-'Combien de fois au cours des 6 derniers mois, combien de fois avez-vous pensé à être dans une relation longue avec une personne du même genre ?'
-Etrange ces questions, je suis actuellement dans une relation longue.
-Alors je mets 'très souvent'. La prochaine : 'Avez-vous déjà eu des relations sexuelles avec des personnes du même genre ?'
-Tu connais déjà la réponse. » Chan cocha jamais.
« - 'Combien de fois au cours des 6 derniers mois avez-vous pensé à toucher une personne du même genre de façon intime ?'
-Jamais. » Chan fit glisser le curseur sur la réponse choisie sans un commentaire.
« - 'À quel point êtes-vous séduisant pour les personnes du même genre ?'
-Qu'est-ce que j'en sais moi ?
-Crois-moi, tu peux cocher la case 'très séduisant'.
-Absolument pas. » Chan le fit tout de même. « C'est mon test ou c'est pas mon test ? Coche 'peut-être pour certain'. » Et bien que Chan sache fort bien que ce n'était pas la vérité, il suivit son indication. Il voyait bien les regards que Jisung lui jetait, les attentions de ses camarades de classe. La jalousie était cet animal dans son ventre qui grognait dès que l'on s'approchait trop près de son partenaire. Bien qu'il tente d'endormir la bête, Chan avait adopté ses instincts.
Chan cliqua sur la suite, et des question très similaires mais sur le genre opposé apparurent.
« - 'Combien de fois au cours des 6 derniers mois vous vous êtes imaginé nu avec une personne du genre opposé ?'
-Jamais.
-Tu peux le dire si tu t'es imaginé avec quelqu'un, je ne vais pas être jaloux. C'est normal.
-J'ai du mal à m'imaginer nu avec toi, tu penses bien que je ne vais pas m'amuser à m'imaginer nu avec une fille. Clique 'jamais'. » Chan eut du mal à réfréner le sourire qui grignotait ses joues.
-'Combien de fois au cours des 6 derniers mois avez-vous pensé à une personne du genre opposé en vous masturbant ?'
-Parfois.
-'Combien de fois au cours des 6 derniers mois avez-vous pensé à toucher une personne du genre opposé de façon intime ?'
-Jamais.
-'Combien de fois au cours des 6 derniers mois avez-vous regardé du porno avec des personne de genre opposé ?'
-Parfois. » Chan adorait compléter ce test avec Minho. Pas seulement parce qu'il le sentait se détendre contre lui, sa respiration plus profonde et ses yeux secs. Mais aussi parce qu'il découvrait une facette de lui qu'il lui avait toujours été cachée. L'autre côté de la lune. Une partie de Minho plus timide encore, mais aussi intrigante, et Chan n'avait plus qu'une idée en tête : en découvrir plus, encore plus, de lui.
-'À quelle fréquence pensez-vous au sexe ?'
-Jamais. »
Ils terminèrent le test.
« - Tu es donc 33% homosexuel et 18% hétérosexuel, sur le spectre de l'asexualité.
-Comment est-ce que je peux être 33% quelque chose ?
-Ce n'est qu'un test stupide.
-À toi de faire ce test stupide. » Chan aurait préféré ne pas s'afficher ainsi devant son petit copain et lui montrer toute l'étendue de sa débauche et de son attirance pour les hommes, mais il perçut chez Minho une détresse de ne plus voir s'afficher ce pourcentage et ce point sur le côté gris du cadran représentant l'asexualité, alors il excepta.
Chan tenta de compléter le test de la manière la plus silencieuse possible, mais c'était sans compter sur Minho qui prenait un malin plaisir à l'enquiquiner. « - Alors comme ça tu trouves les hommes 'très attirants' ? Il n'y a pas que moi dans ta vie ?
-J'ai le droit de les trouver séduisants » ronchonna Chan.
« - Alors qui ça ? Changbin est bien musclé, je peux comprendre. Ou alors Hyunjin dans ma classe, tu l'as vu plusieurs fois, il est beau à couper le souffle, je suis sûr que tu l'as remarqué. Non je sais ! Comment il s'appelle déjà... Hongjong dans ta classe, il est très, très stylé.
-Chut ! » Pour rien au monde Chan avouerait qu'il avait effectivement pensé aux trois. Et à bien d'autres.
« - Tu regardes très souvent des porno homo ?
-On ne slutshame pas ici ! » s'offusqua Chan.
« - Je ne te culpabilise pas, mais appelle-moi la prochaine fois, on en regardera ensemble. » Chan ne sut si c'était une blague ou une véritable proposition. La deuxième solution lui envoyait une déflagration de chatouilles dans le bas-ventre, ce n'était définitivement pas le moment d'y songer.
Sans surprise, le test lui révéla qu'il était à 80% gay, et 15% hétéro. « Tout ça juste parce que je trouve certaines filles attirantes.
-Pas besoin d'être bougon, il n'y a pas de mal à être un peu hétéro. » C'était vrai, mais Chan avait eu tellement de mal à s'assumer en tant qu'adolescent homosexuel qu'il ne supportait pas que l'on lui dise, encore à cet âge, que peut-être, dans certaines conditions particulières, il pourrait aimer une fille. Ce serait donner raison à son père et ses anciens 'amis'.
Ils continuèrent à compléter ces tests les uns après les autres. Minho prit pour un challenge d'être le plus asexuel possible, et Chan sourit à ce revirement de situation. Chan eut aussi la surprise qu'un test lui annonce qu'il était graysexuel. Et bien qu'il ne s'arrêtât pas plus à cette supposition, il se fit la réflexion qu'en effet, le sexe n'avait jamais été primordial à sa vie. Malgré sa grande attirance pour les hommes et ses heures passées à consommer du contenu pornographique, le sexe en soit ne manquait pas à sa vie.
Leurs ventres les rappelèrent à l'ordre, et ils dévorèrent les pizzas surgelées et les brownies de la mère de Chan devant Haikyuu. Et cela confirma à Chan ce qu'il pensait auparavant : il était tout aussi heureux de passer sa soirée dans les bras de son cadet, à se goinfrer de cochonneries devant un animé plutôt que d'en faire, des cochonneries. Parce qu'il était avec Minho et que celui-ci était heureux, cela lui suffisait.
Le lit de Minho était conçu pour une personne et demie, drôle d'idée. Mais Chan l'adorait, parce qu'il lui donnait la parfaite excuse pour venir se coller tout contre le brun. C'est aussi pour cette raison qu'au cœur de la nuit, ce manque de présence à ses côtés le tira des griffes du sommeil. Il entrouvrit les yeux, frissonnant du manque de chaleur, et, attiré par la lumière, se tourna de l'autre côté. Minho était assis devant son bureau, ses yeux fixés sur son écran d'ordinateur. À la lumière artificielle, Chan distingua ses yeux brillants.
Il se libéra des couvertures tellement accueillantes pour se tenir à côté de son cadet. Minho faisait défiler une foule de témoignages sur l'asexualité, l'expression hagarde.
Chan passa ses bras par-dessus ses épaules et prit ses mains dans les siennes. « - Il est tard. Tu devrais venir te recoucher. » Minho lui laissa manipuler ses mains hors de son clavier. Chan éteint son ordinateur et l'accompagna jusqu'à son lit. Là, le plus jeune cacha son visage dans sa poitrine.
« - Je ne veux pas être seul » chuchota-t-il. Et Chan savait. Il connaissait Minho mieux que personne, mieux que lui-même parfois. Il savait qu'il paraissait associable et morose, solitaire et fier de l'être. Peut-être qu'il le fut à une époque. Dorénavant, il avait gouter au partage, à la compagnie, il avait rencontré Hyeju et lui-même, il avait partagé ses œuvres avec Jisung et rit aux blagues de Changbin, dansé avec Hyunjin. Il se demandait si sa découverte l'éloignerait de tous ces gens.
Chan n'avait qu'une réponse à lui fournir.
« - Je suis là. Tu ne seras plus jamais seul. »
***
J'ai oublié de poster hier oupsi
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