— Pour des novices qui découvrent le Blund, même concentrer son aura dans une zone pour attaquer est déjà considéré comme une prouesse, bien que ce soit courant, reprit Rose-Marie. Cependant, la puissance déployée par Mademoiselle Caetano reste surprenante. Elle a aussi été la première à subir les conséquences de l'abus de son aura, en dehors de la fatigue. 

Elle prit une pause. 

— Natalia, que t'est-il arrivé après avoir utilisé cette attaque ? demanda Rose-Marie.

— J'ai ressenti des vertiges au début, mais ç-cela s'est amélioré avec le temps. Ensuite, le soir, lorsque nous avons... l-lorsque nous avons fui, nous avons combattu avec la faune. Plus les combats duraient, plus il était difficile d'esquiver les monstres.

— Et ensuite, que s'est-il passé ?

— J'ai saigné du nez... Madame.

— Vous voyez, le Blund n'est pas quelque chose à prendre à la légère. Son nez s'est mit à saigner après avoir utilisé sa technique à pleine puissance une fois, et encore une autre fois après une courte période de récupération. Sans Blund, vous mourrez. Croyez-moi. Et ce ne sera pas comme lors de votre arrivée. Cette fois-ci, vous mourrez. Pour de vrai et pour de bon.

Les avertissements de Madame Windel avaient une profondeur à la fois informelle et empreinte de douleur personnelle. Les exemples qu'elle partageait semblaient être issus de ses propres expériences, transformées en leçons précieuses. Sa vie n'avait sans doute pas été facile, mais elle utilisait ses épreuves pour offrir des enseignements significatifs aux Élus.

— Vos auras vous permettent d'améliorer diverses capacités, chacune renforçant quelque chose de spécifique. Cela peut être une de vos qualités ou bien une faiblesse.

Les Élus se dispersèrent autour de l'arène alors que Madame Windel leur indiquait la marche à suivre. Elle leur demanda d'utiliser la détection de Blund pour percevoir l'énergie environnante, une étape que chacun réussit avec succès.

Ensuite, elle les invita à sentir leur propre Blund intérieur et à tenter de le libérer par la pensée. Comme prévu, très peu d'entre eux arrivaient à accomplir cette tâche parfaitement. Tous sauf une. Une jeune Élue aux cheveux noirs et soyeux : Tashi Shehata.

Son aura blanche se matérialisait autour d'elle de manière fluide. Madame Windel demanda alors à la jeune femme de désactiver son aura, puis de la réactiver rapidement, ce qu'elle fit avec aisance.

Rose-Marie Windel, voyant la maîtrise impressionnante de la jeune indienne, lui lança :

— Attaque-moi.

Cette demande, bien que surprenante pour les Élus, avait une logique claire du point de vue d'un guide. Un blunn capable d'activer et de désactiver son aura sur commande n'avait pas besoin de prouver qu'il pouvait le faire dans une zone spécifique. 

Déployer une aura de Blund de manière contrôlée revenait à tisser une toile complexe et solide, tandis que concentrer le Blund dans une zone précise du corps, comme un bras, pouvait être comparé à verser de l'eau dans un réservoir étroit, créant une pression et une accumulation d'énergie concentrée.

La jeune fille timide se prépara à faire face à Rose-Marie Windel. Les autres Élus observaient, intrigués par cette demande inattendue. Malgré sa jeunesse et sa réserve, elle affichait une détermination manifeste. Son aura blanche, bien que encore fluctuante, se matérialisait autour d'elle.

Rose-Marie Windel, elle, activa son aura avec une maîtrise impeccable. Son énergie se diffusait harmonieusement, sans la moindre fuite, démontrant une compétence hors du commun dans l'art du Blund. Elle décida de relever le défi en désactivant son aura, plongeant l'ambiance dans un silence respectueux, seulement perturbé par le murmure discret des auras qui s'éveillaient autour d'elles.

Les deux adversaires échangèrent un regard chargé de détermination, et l'affrontement débuta. La jeune fille concentra son Blund dans ses poings, augmentant sa force physique. Elle lança un coup de poing puissant en direction de Rose-Marie, testant la résistance de la guide. Malgré son accoutrement imposant, celle-ci esquiva avec une agilité remarquable, contre-attaquant avec une précision irréprochable.

Le combat se poursuivit, la fluidité des mouvements de Rose-Marie contrastant avec la puissance brute des assauts de sa jeune élève. La guide usait de son expérience pour anticiper les mouvements de son adversaire. Elle semblait être une fée capable de voir l'avenir, évitant chaque attaque avec une grâce presque surnaturelle.

Pour les novices, changer de dynamique de combat, comme passer des poings aux jambes, trahit souvent l'accumulation de Blund dans les membres, rendant les attaques prévisibles.

Malgré l'écart de puissance et de maîtrise flagrant, la jeune combattante ne se laissa pas abattre. Elle augmenta quantité de son Blund, le rendant presque deux fois plus intense qu'au début du combat. Concentrant son énergie dans ses jambes, elle se propulsa vers Rose-Marie, déterminée à porter un coup décisif.

En vol, elle se retourna pour utiliser ses pieds, confirmant les intentions de son attaque. Son coup de pied, bien que puissant, fut facilement esquivé par Madame Windel.

Au corps à corps, l'Élue aux cheveux noirs et soyeux enchaîna une série d'attaques avec une détermination farouche. Ses poings fusaient dans l'air, tentant d'atteindre son adversaire, mais Rose-Marie restait imperturbable, esquivant avec grâce. À chaque coup, l'agilité de la guide semblait prédire le mouvement suivant, rendant les efforts de l'adolescente frustrants.

Pour casser le rythme, la jeune Élue intégra des coups de pied rapides dans ses enchaînements, espérant déstabiliser son adversaire. Mais là encore, Rose-Marie déjouait chaque assaut avec une facilité déconcertante, s'écartant à la dernière seconde, insaisissable.

L'agacement montait en flèche dans l'esprit de l'adolescente indienne. Son visage se crispait à chaque échec, sa concentration vacillait sous le poids de la frustration. Cette colère la poussa à agir instinctivement : elle concentra son Blund dans sa jambe et frappa violemment le sol. Un geste qui, pour certains spectateurs, ne pouvait être qu'une perte de sang-froid.

Contre toute attente, Rose-Marie, la guide imperturbable, recula de quelques mètres. Cette réaction inattendue de la part de la femme fit naître l'incompréhension parmi les spectateurs. Pourquoi reculer face à ce qui semblait être un simple accès de colère ? Avait-elle perçu un danger caché, une menace latente que personne d'autre n'avait remarquée ? 

Tashi, quant à elle, n'avait jamais été une combattante. C'était une jeune fille timide qui, comme beaucoup, adorait les films d'action. Elle s'était souvent imaginée dans des scènes de combat, imitant mentalement les gestes des héros à l'écran. Mais, étonnamment, depuis qu'elle était entrée dans ce nouvel univers, son corps semblait assimiler bien plus rapidement ce qu'elle avait vu auparavant.

Chaque mouvement, chaque enchaînement de techniques qu'elle avait regardé des centaines de fois lui revenait comme une deuxième nature. Pourtant, malgré cette aptitude à « copier » les gestes, son corps restait celui d'une frêle adolescente. Ses muscles, peu habitués à un tel niveau d'effort, commençaient déjà à se tendre douloureusement. Elle ressentait une pression croissante dans ses bras et ses jambes, chaque coup devenant un peu plus difficile à porter.

Voyant cette ouverture, l'Indienne, l'esprit concentré et les muscles en feu, ne perdit pas une seconde. Elle se lança à pleine vitesse vers Rose-Marie, son aura vibrant autour d'elle. Ses mouvements n'avaient rien de la précision d'une guerrière expérimentée, mais la rapidité avec laquelle elle enchaînait ses attaques était stupéfiante. Son poing fendit l'air à plusieurs reprises, cherchant à briser la défense de la guide.

Cependant, à chaque coup, Tashi sentait ses muscles se contracter douloureusement. Ses épaules, tendues à l'extrême, commençaient à brûler sous l'effort inhabituel. Elle grimaçait de douleur entre chaque attaque, ses lèvres se crispant alors qu'elle luttait pour maintenir le rythme. Son souffle devenait court, ses jambes tremblaient sous l'effort soutenu. Chaque coup porté lui coûtait de plus en plus cher, son corps ne parvenant plus à suivre l'intensité imposée par le Blund.

Malgré sa détermination, il devenait évident que son endurance était sur le point de s'effondrer. Son physique n'était pas encore adapté à ce nouveau pouvoir qu'elle découvrait.

Les poings et les pieds fusaient, cherchant désespérément une faille dans l'armure invisible de son adversaire. Cependant, malgré la férocité de l'attaque, les efforts de la jeune Élue furent en vain. La supériorité de Rose-Marie en matière de maîtrise du Blund devenait de plus en plus évidente.

À mesure que le combat avançait, la fatigue de l'adolescente se faisait de plus en plus apparente. Son souffle devint plus lourd, son aura vacilla, témoignant de l'épuisement qui gagnait peu à peu son corps. Mais la combattante n'était pas prête à abandonner. Plus maintenant. Dans un ultime effort, elle décida de concentrer tout le Blund qui lui restait dans sa jambe.

La jeune fille, épuisée mais résolue, ne prêta pas attention au changement subtil qui se produisait dans son aura. Ce mélange de blanc pur, caractéristique du Blund, se teintait désormais d'une nuance brune, presque terreuse, comme si une force nouvelle, inconnue, s'invitait dans le combat. Ignorant ce signe avant-coureur, elle serra les dents, ses muscles tendus à l'extrême, et rassembla toute l'énergie qu'il lui restait dans sa jambe.

Puis, dans un cri silencieux, elle frappa le sol avec une force désespérée. Ce coup résonna comme un tonnerre, non seulement par l'impact, mais par la vague d'énergie qu'il libéra. Le terrain tout entier sembla retenir son souffle avant de se fracturer dans une explosion de roche et de poussière. Un rugissement sourd parcourut la terre sous leurs pieds, et des pics de roche jaillirent brutalement de la surface comme des lames acérées, déchirant l'air avec une violence inouïe.

Le sol se fissura dans un craquement sinistre, créant une onde de choc qui se propagea en cercles, faisant trembler les fondations mêmes de la zone d'entraînement. Des éclats de pierre furent projetés dans toutes les directions, comme si la terre elle-même se rebellait sous l'assaut de l'adolescente. Chaque pic de roche s'élevait avec une vitesse fulgurante, perçant l'air dans un fracas terrifiant, et certains se dressaient aussi haut que des murs, créant un véritable champ de bataille chaotique.

Les spectateurs, figés par la stupeur, reculèrent instinctivement devant cette démonstration de pouvoir incontrôlé. Même Rose-Marie, d'ordinaire si calme et maître de la situation, fut forcée de s'éloigner, un sourire énigmatique sur les lèvres, mais l'éclat dans ses yeux montrait qu'elle ne sous-estimait plus la jeune indienne.

Des fragments de roche volaient dans tous les sens, heurtant le sol avec des éclats sourds. L'air semblait lourd, chargé d'une énergie brute, presque primale. La terre elle-même vibrait encore, comme si elle se remettait à peine de l'assaut titanesque qu'elle venait de subir.

Ce n'était plus simplement une démonstration de force. C'était la manifestation de quelque chose de plus profond, de plus personnel, une force qui se réveillait dans la jeune adolescente, qui elle-même restait figée au centre du chaos qu'elle avait créé, le souffle court et les jambes vacillantes. 

Le choc de l'explosion terrestre n'était pas seulement physique, il était mental. Autour du terrain, les Élus, figés, échangeaient des regards pleins d'incompréhension. La poussière se dissipait à peine que déjà des murmures s'élevaient. Beaucoup se demandaient comment elle avait pu réussir cela. 

Après tout, il s'agissait de terre, de roche. Comment une simple attaque de Blund pouvait-elle entraîner un tel bouleversement du sol ? Pour eux, les pouvoirs enseignés, les capacités que Rose-Marie démontrait si souvent, relevaient d'une maîtrise de l'esprit, de la télékinésie, du contrôle des forces invisibles qui les entouraient. Mais là... c'était autre chose.

— Mais qu'est-ce qu'elle a fait ?  demanda l'un d'eux, la voix tremblante de stupeur.

— Elle... elle a manipulé la terre ? Mais ce n'est pas possible... on parle d'aura, de Blund, pas de géomancie ! 

Leurs esprits, enfermés dans des explications simples, peinaient à saisir l'ampleur de ce qu'ils venaient de voir. L'adolescente n'avait jamais montré de signes de ce genre de capacités auparavant, et pourtant, là, devant eux, la terre avait obéi à son commandement comme si elle en avait toujours eu le pouvoir.

C'est alors qu'une voix s'éleva, calme mais lourde de sens. Une question, presque rhétorique, qui résonna dans l'esprit de Marcus.

— Mais c'est vrai ça... . Qui est-ce qui m'a dit qu'on était limité à de la télékinésie ? 

Le silence qui suivit fut presque assourdissant. Les Élus se regardèrent, perplexes. Il n'était pas le seul à avoir remarquer ce détail. Jamais personne ne leur avait dit qu'ils devaient se limiter à ce qu'ils avaient vu ou cru comprendre. Jusqu'ici, ils s'étaient contentés d'observer ce que leur guide faisait, pensant que leurs pouvoirs se bornaient à cette imitation. Mais personne ne leur avait réellement fixé de limites. 

Cette simple question bouleversa leurs certitudes. Chaque Élu, chaque personne ici, portait en elle une force unique, façonnée par son essence, ses expériences, ses émotions. Tashi venait de briser cette illusion collective d'uniformité. Peut-être qu'ils n'étaient pas limités à ce qu'ils pensaient savoir. Peut-être qu'ils étaient bien plus que des télékinésistes, plus que ce que l'on leur avait montré jusque-là.

Et tandis que cette vérité s'ancrait dans leurs esprits, les regards se tournèrent de nouveau vers la jeune fille, encore essoufflée, au centre du champ de bataille qu'elle venait de créer. Elle n'était plus simplement une Élue parmi d'autres. Aux yeux de ses camarades, elle venait de devenir la preuve vivante que tout était possible. 

Madame Windel, qui observait la scène avec un sourire subtil, ne se laissa pas surprendre par cette démonstration de puissance brute. En un instant, elle activa de nouveau son mystérieux pouvoir, comme si elle contrôlait parfaitement chaque parcelle d'énergie autour d'elle. 

D'un geste fluide et calculé, elle repoussa les pics de roche avec une maîtrise impressionnante. L'attaque de la jeune Élue, bien que puissante, ne parvint pas à percer la défense de la guide. Puis, dans un mouvement presque imperceptible, la guide disparut.

Les secondes semblèrent s'étirer. Les spectateurs, tout comme la jeune combattante, se demandaient où elle était passée. Puis, environ quinze secondes plus tard, la guide réapparut soudainement devant l'adolescente, comme un spectre surgissant de nulle part. 

L'instant suivant, avant même que l'adolescente ne puisse réagir, Rose-Marie s'approcha d'elle, son expression calme et posée. Avec un geste d'une simplicité désarmante, elle leva la main et toucha légèrement le nez de la jeune indienne du bout de son doigt.

Ce geste, en apparence inoffensif, déclencha une onde invisible. La jeune fille fut projetée en arrière, comme happée par une force qui dépassait son entendement. Son corps traversa l'air avant de s'effondrer lourdement dans les bras de ses camarades. Un filet de souffle lui échappa. Ses muscles tremblaient, vidés de leur énergie. Elle ne pouvait plus se relever. Le combat était terminé.

Rose-Marie Windel s'avança lentement. Son regard, perçant, n'exprimait ni triomphe ni pitié. Elle s'accroupit à la hauteur de la jeune fille et, sans un mot, lui tendit la main. L'adolescente leva les yeux, y cherchant une explication. Dans l'irisation de l'aura encore flottante autour de sa guide, elle ne vit que la maîtrise absolue, celle qui lui avait manqué. Elle saisit la main tendue et tenta de se redresser. Ses jambes cédèrent aussitôt. Une goutte chaude glissa de son nez et s'écrasa sur sa paume. Elle saignait.

Un silence pesa sur les Élus. Aucun d'eux ne prononça un mot. Le combat venait d'illustrer une leçon brutale : posséder un don ne suffisait pas. Sans contrôle, sans discipline, il devenait un fardeau plus qu'une force.

Rose-Marie s'écarta et observa son élève un instant avant de déclarer, d'un ton neutre :

— Tu n'as plus besoin d'assister aux sessions d'initiation. À partir de maintenant, ton entraînement devra se faire autrement.

Le message était clair. Tashi avait franchi une limite que peu atteignaient à ce stade. Mais au lieu de la soulager, l'idée laissa un goût étrange dans sa bouche. Elle hocha simplement la tête avant de tourner les talons, consciente du poids des regards derrière elle.

L'entraînement fut écourté ce jour-là. Malgré la tension qui continuait de vibrer dans l'air, Rose-Marie invita le reste du groupe à poursuivre leur propre exploration de l'aura. Leur progression dépendait désormais d'eux seuls.

Lorsque l'exercice prit fin, Natalia proposa un repas ensemble. Une chaleur réconfortante dans sa voix, comme une tentative de dissiper la tension.

— Giulia ne vient pas ? demanda Marcus en remarquant son absence.

— Ni Elias, d'ailleurs, ajouta Natalia avec un sourire en coin.

Aucune réponse immédiate. Juste un silence, ponctué d'un regard échangé entre Natalia et Marcus. Un battement trop long, trop lourd. Puis Natalia haussa les épaules, l'air de rien.

— Mangeons, déclara-t-elle simplement.

Le réfectoire était étrangement calme. Trop calme. Marcus balaya la salle du regard. Les chaises restaient vides, les conversations feutrées à l'extrême. Une sensation diffuse d'absence s'infiltra en lui, sans qu'il parvienne à en identifier la source. Les murs semblaient plus vastes, l'écho du moindre bruit plus prononcé.

Il fronça les sourcils.

— Où sont passés les autres ?

Personne ne répondit. Chacun se concentra sur son assiette comme si la question n'avait pas été posée. L'atmosphère pesa un instant de plus avant que Felix ne brise le silence d'un ton faussement enjoué :

— J'ai une idée. Allons à la bibliothèque.

Marcus lui lança un regard sceptique.

— Quelle bibliothèque ?

Un sourire énigmatique passa sur le visage de Felix. Sans un mot, il se leva. Les autres suivirent. Une légère tension sous-jacente animait leurs mouvements, comme si l'inconnu les appelait.

Ils franchirent la deuxième porte du salon, dissimulée à gauche de l'entrée principale du manoir. Marcus ne l'avait jamais remarquée auparavant. Elle s'ouvrit sur un couloir sombre, étroit, où l'air semblait plus dense, plus ancien. Au bout, une autre porte. Felix l'entrouvrit du bout des doigts, et une brise invisible caressa leurs visages.

Devant eux s'étendait une salle impossible. Une cathédrale de livres aux étagères s'élevant bien au-delà de ce que le manoir aurait dû contenir. L'espace se courbait d'une façon qui défiait la logique, comme si chaque rayon s'étirait vers l'infini.

Marcus retint son souffle.

— C'est...

— Bienvenue dans la vraie bibliothèque du manoir, souffla Natalia.

Une sensation étrange parcourut l'échine de Marcus. Quelque chose, ici, n'était pas normal.