Alec fut le premier à quitter le dortoir. Les domestiques passaient la matinée à préparer le petit déjeuner des enfants, certainement le premier vrai repas depuis qu'ils étaient ici. L'odeur des petits bains faillirent faire changer de direction au garçon. Le simple goût du chocolat avait disparu de sa mémoire. Mais aujourd'hui plus que jamais, il devait rester concentré sur sa tache.

Alec descendit les escaliers en pierre pour rejoindre le grand hall du troisième étage. Comme il s'y attendait, aucun membre du personnel ou de sa famille s'y reposait. La cloche avait déjà sonné quelques minutes plus tôt, à l'arrivée du jeune descendant. Tout le château s'était agglutiné devant la coursive Est pour accueillir leur protégé. Alec s'approcha de la fenêtre, à petits pas. D'ici, il apercevait le jeune garçon qui tenait la main de sa gouvernante, en lançant des regards inquiets à tous ces visages inconnus.

- Quel trouillard, se moqua-t-il.

Alec posa sa main salie par les combats de la veille sur l'un des petits carreaux. Ses doigts, très longs pour son âge, recouvrirent le corps du descendant, qui faisait la taille d'une fourmi depuis le petit salon. Son allure de campagnard, gauche et svelte, lui fit rabattre ses épaules. Il aurait aimé voir devant ses yeux un garçon similaire au Général, impitoyable et dangereux, là au moins, il n'aurait pas culpabilisé de le détester. Sa simple existence l'empêchait, lui et sa sœur, de vivre libre et heureux. Ce petit monstre, descendant de Zeus, n'avait rien demandé lui aussi, mais il ne pouvait tout simplement pas l'aimer. C'était impossible.

L'horloge sonna sept heures trente. Il était temps.

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Dortoirs du château, huit heures.

Aria fut à son dixième tour. Depuis que son frère était parti, elle tournait en rond, touchait par-ci par-là les meubles et objets qu'elle avait sous la main, tout cela sous le regard agacé de Rose.

- Tu vas faire ça encore longtemps ? Pose tes fesses, lui intima-t-elle en désignant une chaise.

- Et s'il ne revient pas ? Si les domestiques trouvent son comportement suspect, ils vont sûrement ...

- Tu ne réfléchis pas, la coupa-t-elle. D'après mes calculs, il y a seulement 30% de chance qu'Alec échoue à la première étape. Le bruit court déjà au château qu'il a été choisi. Sans oublier qu'ils sont tous obnubilés par le gamin qui vient de débarquer.

- Peut-être, mais je n'aime pas l'idée qu'il soit parti seul.

- Attendons encore un peu de temps, je suis sûre qu'il trouvera un moyen de piquer un chariot en peu de temps.

Rose eut raison de faire confiance à Alec. Celui-ci revint quelques minutes plus tard muni d'un chariot de domestique recouvert d'un drap blanc. Chacun sût alors ce qu'il leur restait à faire.
Aria monta dans le chariot, puis se cacha derrière le drap. Rose et Harry se munirent de leurs armes, une hache et un sabre aiguisé. Alec fut le premier à briser le silence.

- La voie est libre pour le moment, mais n'oubliez pas que le Général devra sortir pour accueillir le descendant de Zeus. Il faut absolument qu'on se rejoigne à la chambre avant, compris ?

Les enfants acquiescèrent. La tache de Rose et Harry semblait simple comme ça, mais le risque était bien plus grand que celui d'Alec et sa sœur. Si jamais les domestiques le croisaient dans le chateau, ils le laisseraient certainement tranquille. Après tout, il s'agissait bien du futur chef des Walker. En revanche, pour les autres enfants, c'était une autre paire de manche. Ils ne devaient en aucun cas se faire repérer.

- Si jamais on ne se retrouve pas avant la fin de l'après-midi, on arrête, ordonna Rose en attachant ses cheveux. Et si quelqu'un réussit à avoir la clé, mais qu'il se retrouve seul, il part sans nous.

La dernière option entra dans l'oreille d'Alec, pour en ressortir aussitôt. Hors de question qu'il abandonne sa sœur.

Harry ouvrit la porte, et les enfants se dispersèrent sur-le-champ.

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Hall du château, neuf heures.

- Nous n'avions jamais vu un aussi beau jeune homme que vous, jeune Zeus, susurra une domestique.

Leith lança un regard taquin à sa gouvernante, qui se retenait d'éclater de rire. Le spectacle des Walker s'éternisait, mais leur ténacité en valait le coup d'oeil. Tous les domestiques, agglutinés en face du portail, ne quittaient plus des yeux Leith. Ces regards l'intimidèrent au début, mais il s'en accommoda très rapidement.

- Leith est fatigué, déclara Sophie, j'aimerais que vous nous meniez à nos quartiers.

- Bien sûr !

La domestique s'exécuta, puis ordonna à tout le monde de se disperser au plus vite. Les dortoirs des enfants faisaient grise mine face aux quartiers utilisés par les précédents descendants. La pièce, spacieuse et lumineuse, comptait les plus beaux meubles d'époque d'Angleterre. Un lit à baldaquin presque aussi grand que Leith, des coussins aux motifs denticulés et à dentelles, sans oublier la fresque murale qui symbolisait l'arrivée de Zeus et ses compagnons sur terre. L'odeur du vieux chêne et des roses accrochées au plafond n'échappèrent pas à Sophie, qui dilata ses narines pour en profiter davantage. Ce style contrastait avec celui des Etats-Unis, où leur demeure était bien plus moderne et épurée.

- Dis, Sophie, après la sieste ça te dit de visiter le château ? Imagine le reste de la résidence ! s'extasia-t-il en touchant les perles bleues d'une chaise.

- Si tu veux, mais n'oublie pas qu'il faut rejoindre le chef de famille à dix-neuf heures.

- Rooh ! Je l'aime pas celui-là, il a presque le même regard froid que papa. Toi, tes yeux sont toujours plissés, comme ça, imita Leith en souriant, tu vois ?

- J'imagine oui, ria Sophie, mais c'est ton devoir, et tu sais ce que j'en pense.

- « Tout ce qui est fait, n'est plus à faire » oui, oui, répéta le garçon en levant les yeux au ciel.

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Quartier du Général, seize heures.

- Tu penses qu'ils ont pu récupérer assez de vivre ? demanda Aria à son frère.

- Chut ! Tu parles trop fort.

Alec poussa plus vite le charriot qui fit des bruits étranges une fois sur la tapisserie du grand salon. Aria, toujours cachée, se retenait de vomir sous les secousses.

- Je l'espère bien. Les domestiques avaient quitté les cuisines quand j'y suis allé ce matin. À cette heure, ils doivent certainement préparer le repas de ce soir, un grand festin à ce qu'il parait, reprit-il avec un sourire dégouté.

- Et donc ? C'est quoi ton plan pour voler cette clé ?

- Je n'en ai pas pour le moment, mais ...

Alec ne finit pas sa phrase. Des bruits de pas firent écho dans le couloir. Croiser le Général à ce moment précis était tout sauf souhaitable. Alec courut alors à toute vitesse tout en poussant le chariot, qui resta coincé maintes fois à la moquette rouge.

- Eh ! Ce n'est que nous !

La voix de Rose ralentit sa course. Il se retourna, tout en continuant de trottiner, juste au cas où. Rose et Harry se précipitèrent à sa suite, accompagnés de quatre sacs en toile rempli à ras bord de nourriture, couverture et autres objets nécessaires à leur survie en dehors du château.

- Vous n'avez pas été vu ?

- Normalement, non, répondit Harry essoufflé. Nous sommes partis pile poil au moment où les domestiques retournaient travailler. La plupart sont dans la salle de réception et en cuisine.

Les enfants se regardèrent tour à tour. Malgré leurs habits trempés par la sueur et la peur, leurs yeux brillaient d'une lumière nouvelle, celle de l'espoir et de la liberté bientôt retrouvée. Après avoir rangé les affaires dans le chariot, tous les quatre s'engagèrent dans l'escalier de la tour, tentant de se dépêcher au plus vite malgré leurs charges afin d'atteindre le bureau du Général. Si ils étaient réellement chanceux, le Général serait déjà parti et aurait laissé la clé en évidence sur son porte clé en bois. Mais ce miracle ne trottait même pas dans l'imagination d'Alec, qui s'attendait à devoir sacrifier sa vie pour libérer sa sœur. Si il devait mourir pour elle cette nuit, il le ferait, sans hésitation.

Le silence s'abattit dans l'étroit passage en pierre. Les tableaux accrochés au mur représentant les précédents descendants semblaient leur jeter des regards inquisiteurs. Alec n'y fit pas attention, bien déterminé à mettre la main sur cette fichue clé. La porte de la chambre semblable à celle des enfers, les attendait de pied ferme. Aria fut la première à s'en approcher, mais son frère lui tint fermement la main.

- Tu comptes rentrer comme ça ? la gronda-t-il en lâchant son poignée.

- Quoi ? Tu préfères toquer ? se moqua-t-elle en dirigeant sa main de nouveau vers la poignée.

Alec voulut l'arrêter, mais elle fut plus rapide.

- Aria ! crièrent en chœur les enfants.

La porte s'ouvrit en silence. Les enfants observèrent la pièce en retenant leur respiration. Ils s'attendaient à voir surgir de l'ombre le Général, muni d'un couteau pour punir l'affront qu'ils osaient commettre, en particulier Harry. Mais après quelques secondes à fixer le bureau en métal qui leur faisait face, Aria fut la première à pénétrer les lieux.

- La porte est ouverte et il n'y a personne? remarqua Alec avec une mine dubitative. C'est presque trop beau pour être vrai.

- Tu penses à un piège ? s'inquiéta Rose en fouillant la paperasse d'une commode.

- Profitons en pour trouver la clé, on avisera plus tard, leur intima Aria en ouvrant tous les tiroirs de la table de nuit.

Alec resta immobile, persuadé que le Général les attendait au portail. En grand stratège et chef de famille, il ne laisserait jamais sa porte ouverte, encore plus lorsqu'il n'était pas présent.

- Je l'ai ! s'exclama Rose en brandissant une petite clé ovale. On va pouvoir partir !

Tous chantèrent de joie et se mirent à sautiller de partout pour fêter leur petite victoire, sauf Alec, qui n'en croyait toujours pas ses yeux.

- J'ai un mauvais pressentiment, commença-t-il, vous trouvez pas ça bizarre ? On nous offre cette clé sur un plateau d'argent.

- Arrête de jouer les rabat-joie ! râla Harry en grimaçant. Allez, on se bouge de partir d'ici.

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Portail du château, dix-sept heures.

La gouvernante, Sophie, était partie prendre l'air en attendant que Leith se réveille. En allumant sa cigarette, elle s'amusa à réciter ses sortilèges de protection. En tant que sorcière émérite, elle assurait la protection du descendant de Zeus depuis sa naissance. Son rôle de gouvernante lui avait été assigné juste pour ses dons de sorcières que tout le monde savait extrêmement puissants.

Au départ aux ordres de Vlad, l'une des divinités qu'elle admirait le plus au monde, elle avait très vite déchanté en découvrant son vrai visage. Le petit, qu'elle considérait comme un affront à sa carrière durant les premiers jours, fut finalement le seul être le plus cher à ses yeux, celui qui l'avait changée. Seul comptait son bonheur aujourd'hui, quitte à mentir et se rebeller contre Vlad.

- Mais arrêtez de vous chamailler, vous voulez que le Général nous tue ou quoi ?

La voix de la jeune fille ne lui avait pas échappé, malgré le son des cloches. Curieuse de découvrir le descendant d'Hadès, elle suivit la voix de la gamine qui provenait de derrière l'épais buisson.

- Ouais, ben c'est toi qu'on dénoncera en premier si ça tourna mal !

- Arrêtez un peu !

Sophie se cacha derrière les feuillages, et observa silencieusement les quatre gamins qui se disputaient une clé. Elle ignorait que les enfants des domestiques seraient laissés dans le jardin, mais cela la rendit heureuse. Ils pourraient jouer avec Leith dès son réveil.

- Qu'est-ce que vous faîtes ?

Les gamins se retournèrent immédiatement avec de grands yeux apeurés. Seul Alec se jeta sur Sophie en dégainant le sabre que tenait plus tôt Rose. Sophie para le coup en se décalant sur la gauche, mais le choc lui mit plus de temps à réagir.

- Et toi, t'es qui la vieille ? On t'a jamais vu par ici.

- La vieille ? s'amusa Sophie en ricanant. Est-ce que tu sais à qui tu t'adresses, petit ?

- J'en sais foutre rien, mais si t'es là pour nous empêcher de partir, je vais pas me gêner pour te tuer.

Le regard de ce garçon lui fit rappeler le sien, avant qu'elle ne fasse la rencontre de Leith. Ses gamins n'étaient certainement pas des enfants de domestique. Ils avaient suivi la même formation que Leith, et si ils étaient aussi nombreux, la suite n'était pas bien compliquée à imaginer.

- Le Général veut seulement garder l'un d'entre vous, c'est ça ? Vous devez être ses enfants.

Les trois autres gamins se regardèrent tour à tour. Les cheveux blonds de Sophie virevoltaient au rythme du vent, Aria l'a trouva bien plus cool que son frère à ce moment précis.

- T'es venu nous en empêcher oui ou merde ?

Alec s'impatientait.

Le portail n'était qu'à quelques centimètres de lui, et lorsqu'il voulut intimer à Harry et les autres de fuir sans lui, une balle fusa dans les airs.
Le garçon se jeta alors instinctivement sur sa sœur pour la protéger des balles qui ricochaient sur le mur. Des cris stridents déchirèrent ses tympans, mais il ne bougea pas d'un centimètre. Lorsqu'enfin le silence revint, une véritable scène d'horreur se déroula sous ses yeux. Rose et Harry gisaient au sol et baignaient dans leur propre sang. Leurs visages n'étaient même plus méconnaissables tant les balles les avaient déformé.

- Alors comme ça, on veut s'échapper ? se moqua le Général en crachant sur les cadavres de Rose et Harry. Oser trahir Zeus ... quelle honte !

Aria voulut se relever, mais son frère plaqua son visage sur le sol.

- Non ! Ne regarde pas !

Sophie se redressa avec difficulté. Elle avait utilisé sa magie pour protéger les enfants, mais cela n'avait pas suffit. Ce massacre faillit lui faire régurgiter son repas.

- Comment pouvez-vous faire ça à des enfants ? s'insurgea-t-elle en postillonnant.

Le regard du Général était livide, sans vie. Il n'avait certainement plus conscience de ce qu'il faisait.

- Écartez-vous de mon chemin, la petite Aria doit mourir.

- Jamais !

Sophie s'interposa devant les deux enfants.

- Il faudra me tuer pour ça.

- Très bien, tous les traitres méritent un sort pire que la mort.

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Et bonjour !

J'ai encore du raccourcir le chapitre, sinon vous auriez du lire plus de 4000 mots. Le début est assez lent, mais je me voyais mal commencer directement par des scènes d'action 😂 Bref, le chapitre est mal fichu, mais je le réécrirai sûrement plus tard.

À votre avis, comment tout ça va se terminer ? 😈

Passez une bonne semaine !