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Pris d'un soudain élan de lucidité, Felix grogna. Ses yeux s'agitèrent sous ses paupières avant qu'il ne se décide à les ouvrir. Il fronça les sourcils, ébloui par la lumière vive du Soleil qui s'infiltrait sans scrupules par les grandes baies vitrées.
─ Wouah, fit-il en portant une main à sa tête.
Les battements de son cœur pulsaient violemment dans son crâne, il eut bien l'impression qu'il pouvait exploser d'un instant à l'autre. Il n'arrivait pas à réfléchir, ni ne serait-ce qu'à comprendre pourquoi il avait aussi mal. Et puis, il avait chaud. C'était incroyable à quel point il bouillonnait. Il sentait déjà les gouttes de sueur perler sur sa nuque.
Le temps que ses muscles se réveillent et que d'autres douleurs se manifestent, il comprit qu'il n'était pas dans son lit mais bien vautré contre le carrelage froid qu'il supposa être celui de sa cuisine. Pas étonnant qu'il ait autant mal au dos, mais la chaleur qui irradiait de son corps nu restait un mystère, comment pouvait-il suffoquer dans ces conditions ? La joue écrasée contre le sol, il tenta de déglutir mais le manque de salive le fit s'étouffer. Il toussa fort, tellement fort qu'il crut bien cracher ses poumons et le contenu de son estomac au passage.
Quand sa quinte de toux fut enfin calmée, le jeune homme décida finalement de se redresser. La première tentative fut un échec, il tomba tête la première dans la flaque de bave qu'il avait alimenté toute la nuit.
─ Putain.
Il s'essuya tant bien que mal la joue et le menton puis essaya de nouveau, plus concentré. Sa tête lui tournait tellement, c'était comme si la gravité avait cessé de fonctionner. Un grognement guttural fila entre ses lèvres tandis qu'il s'aidait de ses chaises de comptoir pour se lever. Il avait beau être seul, il se sentait pitoyable de se trouver dans un état pareil, incapable de tenir sur ses jambes.
Mais il ne pouvait s'en prendre qu'à lui-même, personne ne l'avait forcé à boire autant, il l'avait fait de son propre chef.
─ Plus jamais, se promit-il en se dirigeant vers les placards. Doliprane, doliprane, doliprane...
La vue de la petite boîte jaune fut une délivrance. Il la prit dans ses mains comme s'il s'agissait du Saint-Graal, puis, avec toujours aussi peu d'élégance dans sa démarche, il s'activa pour se verser un verre d'eau.
En s'enfilant le contenu cul-sec, Felix se revit hier au comptoir d'un bar, un shot d'alcool fort entre les doigts pour tenter d'oublier son quotidien. Avant ce soir-là, il n'avait jamais tenté de noyer son chagrin dans la boisson, et encore moins en public. C'était d'ailleurs formellement interdit pour lui. Son travail le lui interdisait.
Felix était mannequin pour l'une des agences les plus renommées de la capitale. Il était populaire, surtout auprès du jeune public. Son physique avantageux, son calme et sa voix grave l'avaient instantanément rendu très célèbre. Felix ne s'en était jamais plaint car après tout, il aimait se trouver au centre de l'attention lors des shootings photos, cependant, il devait bien avouer être plutôt mal à l'aise pendant les interviews.
Mais ce n'était pas ça qui le tracassait ces jours-ci. Non, ça il s'en fichait, il en avait prit l'habitude. Ce qui lui pesait sur le cœur, c'était le fait qu'il soit constamment entouré. On ne lui lâchait jamais la grappe, ne serait-ce que pour aller aux toilettes lors des évènements. Un membre du personnel attendait toujours devant la porte le temps qu'il termine sa petite affaire et quand il prenait trop son temps, on ne manquait pas de le lui faire savoir en frappant contre la cloison. Voilà déjà trois ans qu'il devait subir ce supplice et à la longue, il commençait sérieusement à saturer.
Surtout que Felix avait toujours été un grand solitaire. Il aimait réellement se retrouver seul, ce n'était pas pour autant qu'il était insociable. Non, c'était différent. Il avait besoin de ressentir cette intimité avec lui-même, sans personne d'autre, au mimimum le temps de quelques heures. Mais son travail le poussait constamment à franchir ses limites et il n'en pouvait plus. C'était pour cette raison qu'il avait décidé de boire, mais il n'aurait jamais cru finir aussi mal en point.
D'un geste, il passa une main dans ses cheveux cendrés pour les mettre en arrière. Il frissonna, le volcan en lui qui était entré en éruption ne répandait plus que de la lave glacée dans son corps. Sans trop bouger du plan de travail sur lequel il s'était appuyé, il jeta un coup d'œil à la grande pièce à vivre pour espérer trouver les vêtements portés la veille. Malheureusement, ces derniers avaient disparus, il ne voyait que la casquette noire qu'il avait enfoncée sur sa tête pour ne pas qu'on le reconnaisse. Car bien sûr, même s'il avait décidé de passer outre les interdits, il n'avait pas été fou au point de se montrer au grand jour en train de se saouler. Il avait fait attention. Après tout, il savait être responsable !
D'un coup, ses sourcils se froncèrent et le doute l'ébranla.
Avait-il vraiment fait attention ?
Une sensation désagréable souleva son estomac. Quelque chose le rendait étrangement nerveux.
Même si ses méninges le faisaient souffrir, Felix se concentra pour se souvenir du déroulement de la soirée. La tâche fut plutôt laborieuse, il ne pensait pas avoir bu au point d'avoir des trous de mémoire. Et puis, à force d'acharnement, des images lui vinrent en tête. Elles n'étaient pas vraiment agréables... Le jeune homme se figea une seconde avant de légèrement secouer la tête ; il était sûr qu'il s'agissait d'un rêve qu'il avait fait et certainement pas de la réalité.
Un petit rire lui échappa. N'importe quoi ! Bien sûr, c'étaient seulement ses pensées qui lui jouaient un mauvais tour. Quel sacré farceur son cerveau ! Toujours à plaisanter !
Jamais il n'avait entamé un strip-tease en se déhanchant contre un lampadaire. Non, jamais. Voyons, ce n'était pas son genre.
Il pouffa avant d'ingurgiter une autre gorgée d'eau et quand il détacha le verre de ses lèvres, son sourire s'effondra.
– Non... C'est pas vrai ?
Ni une ni deux, Felix se précipita dans son loft jusqu'aux escaliers qui reliaient le rez-de-chaussée à la mezzanine. Malgré les douleurs lancinantes qui se manifestaient de toutes parts et l'envie monstrueuse de vomir tripes et boyaux, il grimpa les marches quatre par quatre. Arrivé dans sa chambre, son souffle était court et son coeur battait si fort qu'il le ressentait battre jusque dans la chair de ses lèvres. Il fouilla comme un fou entre les différentes tenues étalées sur son lit qu'il n'avait pas rangées hier soir. Finalement, la pulpe de ses doigts entra en contact avec une surface lisse qu'il devina être l'écran de son téléphone. D'un geste vif, il l'empoigna, les paupières papillonnantes. Le stress était à son paroxysme. Si ses doutes s'avéraient véridiques et que ses flashs n'étaient pas un rêve, il pouvait signer son arrêt de mort. Il resta une seconde devant son portable sans oser l'allumer mais finit par se résoudre à le faire.
Et le monde sembla s'écrouler sous ses pieds.
Les icônes affichées sur l'écran d'accueil indiquaient des centaines d'appels manqués et de messages non consultés.
Incapable de prononcer le moindre mot, Felix laissa filer un geignement en portant une main à sa bouche. Le smartphone glissa entre ses mains, heurtant le sol de plein fouet. Puis en écho, un autre bruit se manifesta : la porte d'entrée venait de s'ouvrir.
– Lee Felix !
Ce cri résonna dans tout le rez-de-chaussée, faisant sursauter violemment le concerné. C'était la voix de son manager, Lee Minho, et le ton qu'il venait d'employer ne trompait pas ; il était furieux.
– Felix ! répéta-t-il férocement, les chaussures claquant contre le sol. Montre toi tout de suite où je te jure que-
Ses paroles se stoppèrent net lorsqu'il avança suffisamment pour apercevoir Felix en haut des marches de la mezzanine.
Il était vêtu d'un gros hoodie noir et non d'un de ses habituels costumes impeccables, et quand Minho préférait le confort à l'élégance, ce n'était vraiment pas bon signe.
Son regard acéré se posa sur le corps nu du mannequin. Il le scruta des pieds à la tête dans une lenteur déconcertante. Ce n'était pas la première fois qu'il le voyait en tenue d'Adam, mais à cet instant là, le plus jeune aurait voulu disparaître six pieds sous terre. Sans vêtements sur le dos, il se sentait terriblement impuissant. Les sourcils courbés et les lèvres tremblantes, Felix était paralysé par la peur, en proie à la pire des mortifications.
– Ça fait une éternité que j'essaye de te joindre.
Le mannequin ravala sa salive. Ses cuisses se serrèrent l'une contre l'autre alors qu'il remontait ses mains contre son torse dans l'espoir de le dissimuler un minimum.
– J-je dormais... fit-il d'une petite voix.
– Tu dormais ?
– Oui je-
– Tu as le culot de dormir alors que je me casse le cul pour essayer de trouver une solution à tout le bordel que tu as causé ?!
Le plus jeune bondit une nouvelle fois. Le noeud dans sa gorge semblait s'être serrer encore un peu plus.
– Felix, putain ! hurla l'autre. Qu'est-ce qu'il t'as pris ?
– Désolé... mais je ne me souviens plus très bien de ce que j'ai fait...
Minho lâcha un râle de frustration.
– Il manquait plus que ça, tiens !
–Désolé...
– J'en n'ai rien à foutre de tes excuses à la con, cracha-t-il en montant les escaliers, l'allure nerveuse. T'es vraiment qu'un enfoiré qui pense qu'à sa gueule !
Lorsqu'il se planta devant lui, la mine renfrognée et la veine du front gonflée, il vit du coin de l'oeil le téléphone du mannequin qui gisait par terre. De rage, il l'écrasa avec son talon avant de lui donner un coup de pied, le propulsant à l'autre bout de la pièce.
– Je ne vois pas à quoi il te sert, tu n'es même pas capable de répondre.
S'il n'était pas nu comme un ver et que Minho n'était pas Minho, Felix ne se serait pas laissé marcher sur les pieds de la sorte. Il avait péché, certes, mais il ne méritait pas d'être traité comme un chien. Cependant, les éléments jouaient en sa défaveur et il se trouvait contraint de subir ce supplice. Blessé dans son égo, il baissa la tête en attendant de se faire sévèrement remonter les bretelles.
– Regarde ça, ordonna le plus vieux en le forçant à lever le menton.
Il lui présenta son propre portable sur lequel il fit défiler différentes photos. Malgré leur piètre qualité, on pouvait aisément distinguer la touffe de cheveux cendrée du mannequin qui se donnait en spectacle au beau milieu de la rue, le torse nu, une bouteille à la main et une cigarette entre les lèvres. Felix se mordit la lippe, se rendant compte de l'ampleur de sa bêtise.
– Merde, laissa-t-il filer.
– Attends, j'ai mieux !
Le manager activa ses pouces sur l'écran avant de lancer une vidéo. Felix n'avait même pas encore posé ses prunelles sur l'image qu'il entendit déjà des cris stridents parvenir à ses oreilles. Ce n'était pas vraiment rassurant ... Et quand il vit le contenu de l'enregistrement, ses yeux s'arrondirent comme deux billes rondes.
La voilà, la preuve. Les flashs qui lui étaient apparus un peu plus tôt n'étaient pas le fruit de son imagination.
Il se vit dans une ruelle mal éclairée, à moitié nu ; son t-shirt accroché autour du front et le pantalon un peu trop bas sur ses hanches. Il se tremoussait autour d'un réverbère en riant aux éclats, invitant les passants à le rejoindre. Alors qu'il pensait que ça ne pouvait pas être pire, il se mit à frotter son arrière-train contre le poteau alors que de petits sons à peine audible qui se rapprochaient fort de gémissements s'échappaient de sa bouche. Puis, il commença à descendre la fermeture de son jean ...
– Stop, supplia-t-il en se détournant, une main sur sa bouche. Arrête ça s'il te plaît.
C'était tellement humiliant, il était à deux doigts de vomir.
– Ne tinquiètes pas, quelqu'un t'as arrêté avant que tu n'ailles plus loin, l'informa Minho d'une voix étonnamment calme. J'en ai aussi une de toi en train de pisser dans des poubelles, ça te dit ?
Cette fois-ci, le haut-le-coeur se fit bruyant mais rien ne sortit. Le corps secoué par les sueurs froides, le jeune homme cala ses paumes contre ses genoux en s'appliquant à respirer à plein poumon.
– Je suis fichu ?
– Au moins, tu ne t'es pas fait arrêté par la police. Mais j'espère pour toi qu'il n'existe pas d'association de protection des lampadaires.
– Minho, s'il te plait.
Le plus vieux haussa les épaules.
– J'ai tout essayé mais c'est trop tard. Les photos et vidéos ont tournées rapidement, personne n'a pu arrêter leur diffusion.
Sentant ses forces le quitter, Felix s'assit sur son lit en empoignant ses cheveux. Il ne parvenait même plus à respirer correctement, il suffoquait. Son image était détruite, comment allait-il bien pouvoir faire ?
Minho lui jeta un vague regard compatissant mais ne lui laissa pas plus de temps pour s'en remettre, mieux valait arracher le pansement d'un coup sec.
– J'ai appris tout à l'heure qu'on avait perdu tous tes contrats publicitaires avec les marques, et les sponsors s'enfuient au compte-gouttes.
– Ça veut dire quoi concrètement ?
– Tu es viré.
Le choc fut si grand qu'il rendit aussitôt la bile jaune qui lui brûlait l'œsophage.
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Moi ? J'ai dit que ça serait un threeshot ? Mais pas du tout, où allez vous cherchez ça... 🙄
Bon très clairement ça part en minific... je pensais pas que la mise en place de l'histoire serait aussi longue.
J'espère que cette partie n'est pas trop nulle 😅 mais l'action arrivera plus tard. Be patient.
(si jamais vous voyez des apostrophes manquantes, signalez le moi svp, wattpad arrête pas de me les enlever 😡)
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