Chapitre 24
— Tu ne rentres pas chez toi, Foster ?
Keefe prit Paolina dans ses bras comme une princesse pour l'emmener dans sa chambre, nouvelle décharge désagréable dans mon ventre.
— Non, je voulais te parler. En tête à tête.
— Très bien...
Après avoir bordé celle que je voyais désormais comme victime de son histoire, il m'emmena sous les balancelles et s'y assit.
— Qu'y a-t-il que tu veux me dire ? Demanda-t-il en me désignant l'autre balancelle d'un mouvement de la tête.
Je refusai silencieusement l'invitation, restant debout face à lui.
— Je voulais te dire... déjà, Fitz et moi on n'est plus ensemble, même s'il me semble que tu l'avais deviné avant... tout ça.
Un éclair rapide de joie passa sur les traits de l'empathe mais il ne répondit pas. Il l'avait en effet deviné lors de la réunion avant Loamnore en voyant l'animosité entre moi et Fitz, et en sentant mes émotions défaitistes aussi.
— Et puis, je voulais savoir...
Je pris une grande inspiration, déjà honteuse de ce que j'allais lui demander.
— Sais-tu ce que je ressens concrètement envers toi ?
Cette question me trottait dans la tête depuis un moment, depuis son sommeil de un mois pour être plus précise. Biana était convaincue que mon comportement était beaucoup trop impacté par cet événement. Je ne peux que la suivre sur ce point de vue, mais tout de même, je ne comprends toujours pas ce qu'elle y voit.
— Ouh là... C'est une question piège ? Parce que sinon...
— Je suis on ne peut plus sérieuse, Keefe.
— Voyons... Il fit semblant de réfléchir à voix haute. L'adorable Lady F. me pose une question sentimentale, comment dois-je réagir ?
Je rougis de m'être faite démasquer, quoique bien consciente de n'être pas passée par quatre chemins. Je dois bien avouer qu'il m'intrigue, et qui mieux qu'un empathe peut décrypter mon comportement envers lui ?
— Eh bien je dirais, mademoiselle aux cheveux roses, que même si vous avez tendance à vouloir me tabasser avec un coussin la plupart du temps... Voilà qu'est-ce que je disais ? Ironisa-t-il en sentant l'agacement poindre dans mon cœur.
— Arrête de broder et réponds-moi simplement, marmonnai-je en rougissant, mes yeux partant d'eux-mêmes vers la gauche.
Il m'observa, amusé, et mon regard fut automatiquement aimanté par le sien, me faisant me perdre dans ses grand yeux bleu glacier qui brillaient dans la lueur de la lune d'une façon inhabituelle. Pour le coup, je regrettai de ne pas être empathe pour savoir ce qu'il ressentait, lui, à cet instant.
Il toussota et se reprit, visiblement conscient qu'il venait de s'absenter une seconde.
— Je disais donc... Je disais quoi ?
Je m'esclaffai.
— Je te demandais... Ne m'oblige ps à répéter s'il te plaît.
— Bien sûr bien sûr. Donc, si bien souvent l'agacement naît en votre cœur lorsque j'ouvre le bec, mademoiselle Foster, quelquefois vous avez un autre sentiment, qui s'apparente à de l'amitié, mais- AH C'EST CELUI-LÀ, brailla-t-il exagérément fort en sautillant sur sa balancelle, le doigt pointé sur l'endroit de mon thorax qui abritait mon cœur.
— Euh... Lequel ?
— Il est rose, presque rouge, même s'il possède de nombreuses teintes. Il peut être représentatif de tellement d'émotions différentes qu'il est difficile de le distinguer, mais je le vois souvent en votre cœur quand il s'agit de ma petite personne, très chère.
— Et qu'est-ce que c'est ? M'agaçai-je, ennuyée qu'il parle avec des formules inutilement longues.
— C'est...
Il avait commencé à parler d'un air joueur, mais il ferma la bouche d'un coup sec, une lueur étrange transperçant son regard qui alternait entre le sol et mon visage, songeur.
— Keefe, qu'est-ce qu'il y a ? C'est quoi l'émotion ? Répétai-je en m'approchant d'un pas.
Il attarda son regard sur moi, hésitant. Je m'approchai encore, me mis à sa hauteur et posai ma main sur son genou, ce contact me faisant étrangement frémir. Je me repris, tout de même consciente de lui faire partager chacune de mes émotions en le touchant, et demandai encore une fois :
— Kee-
Il ne me laissa pas finir qu'il me pris dans ses bras et me déposa sur ses cuisses pour que je ne tombe pas en arrière. Je sentis mes joues rougir immédiatement d'être aussi proche de lui, mais je dois quand même avouer que même si la position n'était pas très agréable — pour mon dos notamment —, je voulais y rester. Je m'apprêtai à lui demander de me lâcher, mais il prit les devants, sans pour autant exaucer mon souhait intérieur.
— Foster, Foster, Foster... Murmura-t-il dans mon oreille. Combien de temps encore vais-je devoir jouer la comédie simplement parce que tu ne vois rien ?
— De quoi tu parles ? Bredouillai-je mortifiée.
Il rit délicatement — quel joli son— et répondit le plus calmement du monde :
— Du fait que tu éprouves des sentiments pour quelqu'un depuis bien longtemps, et que tu ne le remarques même pas.
Sa réponse me coupa le souffle. J'aurais bien dit que c'était Fitz, mais ce serait erroné. Et à part lui, je ne vois pas trop...
— Qui ? Murmurai-je à mon tour.
Je ne le voyais pas, mais je suis sûre qu'il était présentement en train de sourire.
— Je dois être obligé de te le dire en plus ? Je me retiens pour te préserver, pour que tu le découvres avec ta petite tête et ton cœur. J'ai bien failli dire la clé de ce petit mystère d'ailleurs, heureusement que mon cerveau m'a rappelé à l'ordre.
— Eh bien arrête de me préserver et dis-moi ! M'entêtai-je, bornée.
— Tu me fais de la peine Foster, ouvre les yeux ! Gémit Keefe en faisant la comédie, me maintenant toujours contre son torse.
Ouvrir les yeux, ouvrir les yeux, il est marrant lui...
Voyons, pour qui est-ce que mon cœur palpite trop vite depuis longtemps ? F- non. Hm...
Oh non...
— Ah, je sens de la stupéfaction Foster, as-tu trouvé ?
C'est pas possible... depuis... quand ?
Je me détachai lentement de lui, effectivement stupéfaite. Il perdit son sourire en voyant ma tête.
— Qui as-tu trouvé dis-moi ? Murmura-t-il en prenant mes mains dans les siennes.
J'étais trop choquée pour les retirer. Il me fallu beaucoup de force — que j'ai puisée dans ses yeux mais il n'a pas besoin de le savoir— pour lui dire la réponse.
— Toi...
Il sourit à s'en décrocher la mâchoire, ravi que j'aie enfin su voir ce que mon cerveau m'avait caché.
— Mais et toi... Tu... Bredouillai-je, gênée qu'il l'ait su bien plus tôt que moi.
— Crois-tu que je t'aurais tirée vers le haut dès le début si ce n'était pas le cas ? Crois-tu que je t'aurais aidée tout le temps si ce n'était pas le cas ? Crois-tu que j'aurais été aussi proche de toi dans ta chambre ces jours-là si ce n'était pas le cas ? Et enfin, me crois-tu sérieusement assez stupide pour t'avouer tous mes tracas sans qu'il n'y ait quelque chose derrière ? finit-il en un murmure dans le creux de mon oreille.
— Mais... Depuis quand...
— Depuis la première fois que mes yeux ont eu la chance de plonger dans les tiens ce jour-là, Sophie.
Ses murmures dans mon oreille me font frémir plus que nécessaire il me semble. De même que j'ai un peu trop envie de me perdre dans ses bras pour échapper au froid marin.
— Câlin ? Proposa-t-il en écartant les bras, comme s'il avait lu dans mes pensées.
J'hésitai une seconde, mais acceptai tout de même, vaincue par le froid mordant.
Ce câlin avait une toute autre signification que le premier, qui avait presque été timide, réconfortant. Cette fois, j'avais envie de ne plus en sortir, bercée pas les battements du cœur de Keefe.
Keefe...
— J'ai une question.
— Oui Foster ?
— Je... Comment tu le prends si je te dis que j'ai peur de ce que va devenir notre relation ?
Il ne répondit pas. Son cœur battait un peu plus vite qu'avant, mais rien d'inquiétant.
— Je veux dire, avant que je ne le sache, je te considérais comme mon meilleur ami, mais... maintenant...
Il ne me répondit toujours pas. J'eus peur d'avoir brisé quelque chose à cause de ma lourdeur et mon indélicatesse.
Je m'apprêtai à sortir de ses bras, m'excuser et partir très loin lorsqu'il parla enfin.
— Sophie, je veux que tu saches que ce n'est pas parce que j'éprouve des sentiments pour toi et toi de même qu'on est obligés d'être en couple ou ce genre de bêtises. Ce qui compte, c'est ce dont toi tu as envie et toi seule. Qu'est-ce que tu veux à l'heure actuelle ?
— Je veux... Rester avec toi parce que tu me réchauffes.
Il rit doucement, pas vexé pour deux sous, et reprit :
— Mais encore ?
— Je veux... Je ne sais pas... Grognai-je, agacée par mon propre désarroi.
Le fait est que j'avais envie de plein de choses à l'heure actuelle, mais j'étais si perturbée d'avoir découvert mon amour naissant pour lui que j'étais complètement perdue.
Je nous pénalise tous les deux, réfléchis !
— ...Je vois, déclara Keefe après un silence. Je sais où est le problème, Sophie. Tu te poses trop de questions. Laisse-toi porter, ne réfléchis pas aux conséquences, qui arriveront de toute façon. Si tu veux me dire que tu en as marre de voir ma tête, dis-le tout de suite, je ne me vexerai pas.
— Non, c'est que... je...
AAARGH, MAIS C'EST PAS POSSIBLE ! POURQUOI ÇA N'ARRIVE QU'À MOI CE GENRE DE CHOSES ?!
Keefe se détacha de moi, le regard soucieux, et observa ma pupille longuement. Je me surpris à faire la même chose.
— Ferme les yeux, lâcha-t-il brusquement, dans un souffle qui se perdit sur le bout de mon nez.
— Euh...
— Sophie, fais-moi confiance.
J'obéis, ravalant mon scepticisme, quand je sentis quelque chose se poser sur mes lèvres doucement. Je voulus rouvrir les yeux, surprise et à peu près sûre d'avoir couiné à ce contact, mais avant que j'aie pu le faire, il posa sa main sur mes yeux et chuchota contre mes lèvres :
— Calme-toi et profite.
J'eus envie de lui rétorquer quelque chose, mais il effleura ma joue de la main, faisant taire tout mon organisme, sauf mon cœur qui partit bien plus vite.
Ce moment me sembla durer une éternité, mais aussi trop peu de temps. Mon estomac jouait aux montagnes russes et me paraissait s'envoler, sensation étrange mais pourtant terriblement agréable.
Quand il se sépara de moi, je pris conscience que j'avais complètement arrêté de respirer et que je suffocais, même si mon record de temps à Exillium avait été bien plus long.
Lentement, j'enlevai la main de Keefe de mes yeux et ce que je vis termina de me faire fondre. Keefe me fixait, les joues un peu rouges et le souffle court. Il attendait ma réaction en se mordant la lèvre, ayant peur d'être allé trop loin sans doute. Tout son visage était en attente de l'explosion. Explosion qui n'eut bien sûr pas lieu.
Je lui souris doucement pour le rassurer et approchai mon nez du sien pour lui faire un bisou esquimau. Il sourit à son tour, gêné, et m'avoua :
— Désolé, j'ai toujours eu envie de faire ça. Maintenant, je peux mourir en paix, finit-il en ayant un mouvement pour partir, sauf que j'étais toujours sur ses cuisses et qu'il ne bougea pas d'un pouce.
— Je suis trop lourde, tu restes ici.
— Que tu crois, ironisa-t-il en soulevant mes cuisses et se levant, m'emportant avec lui.
— Keefe, lâche-moi !
— Niooon !
— Mais-
Je tournai ma tête vers lui, puis remarquai la proximité nouvelle entre nos deux corps. Un peu trop proches. La balancelle laissait un peu d'espace entre nos bassins, qui étaient désormais plaqués l'un contre l'autre. Mon envie de m'éloigner fut plus forte que jamais, mais je me forçai à ne pas bouger et me penchai sur le visage de Keefe, comme attirée par ses lèvres. Avant de l'embrasser pourtant, je lui posai la question silencieusement, en croisant son regard. Il me murmura en réponse :
— Fais-moi ce que tu veux Foster, je suis tout à toi.
C'était le signal que j'attendais pour me pencher sur ses lèvres pâles, un peu rêches mais tellement douces... Même si c'est contradictoire, c'est ce que je ressens à cet instant précis. Je n'ai pas envie de quitter sa bouche, ou même de changer de position ; je dois avouer que c'est plutôt agréable de se faire porter de la sorte.
Je me sentis observée tout à coup ; j'ouvris les yeux et vis que Keefe était en train de me regarder.
— Oups, démasqué, plaisanta-t-il en rougissant.
— Chut...
Je m'emparai encore une fois de ses lèvres en cachant ses yeux avec ma main. Je le sentis sourire contre moi, et rien que ça me fit sourire aussi. Nous devions avoir l'air bien bêtes, là, à s'embrasser en souriant comme des andouilles, moi lui cachant les yeux.
Prise d'un élan de folie, je m'aventurai à mordiller sa lèvre inférieure, pour voir sa réaction ; il se décrocha de moi, narquois.
— Eh bien, mademoiselle Foster s'aventure à faire des choses osées, elle que je croyais si timide avec les garçons...
— Je voulais juste savoir ta réaction... Bougonnai-je pour de faux, un sourire menaçant de poindre sur mes lèvres.
— Sache que ma réaction te surprendrait, très chère, me chuchota-t-il dans l'oreille en raffermissant sa prise sur mes cuisses.
Ces mots me firent rougir plus que nécessaire, comprenant le sous-entendu.
— Je découvre des facettes de ta personnalité Keefe.
— Cela me prend bien rarement ne t'inquiètes pas, s'esclaffa-t-il. C'est pas trop le truc des elfes de parler de ça.
— C'est vrai que personne ne fait de sous-entendus stupides, constatai-je avec stupéfaction.
— Tu t'attendais au contraire ?
— Disons que les humains aiment à être lourdeaux sur le sujet.
— Et je suppose que ça te gêne plus qu'autre chose, suggéra Keefe en levant un sourcil.
Je rougis pour toute réponse. Je posai mes coudes sur ses épaules pour l'observer tout à loisir, tandis qu'il faisait de même sans me lâcher, en traçant de petits cercles sur le bout de mes cuisses.
Ses lèvres étaient légèrement coincées entre ses dents inférieures, signe qu'il réfléchissait. Ses yeux, toujours aussi clairs, cette pâleur magnifique étant exacerbée par la clarté de la lune. Il m'observait comme moi je le faisais, ses yeux s'attardant sur mes lèvres une seconde. Je m'amusai à tracer du bout du doigt le contour de son nez, sa mâchoire, l'un de ses sourcils, puis ses tempes et ses pommettes.
Une brise glaciale brisa le flot de mes pensées sirupeuses à souhait — que je n'avais même pas conscience d'avoir—, me faisant frissonner. Keefe aussi frissonna mais c'était léger, et seulement parce que j'avais passé mes bras autour de sa taille pour me réchauffer, la tête sur son torse.
— Tu veux qu'on rentre Foster ?
— Hm... Je suis bien dans tes bras, avouai-je en riant nerveusement.
— Oui moi aussi, mais il me semble que Grady et mon père ne seront pas ravis si tu dors ici cette nuit.
— Certes, reconnus-je en m'écartant de sa chaleur bienfaitrice à regret.
— Attends avant de partir, j'ai une question, m'interpela-t-il en me faisant descendre.
— Oui ?
De retour sur le plancher des vaches...
— Sommes-nous en couple ou préfères-tu prendre des précautions ?
— Si ça ne te dérange pas... Je préférerais que l'on ne dise rien. Mais on est en couple.
Ses yeux s'écarquillèrent de surprise tant il ne s'y attendait pas.
— Pardon ?
— Je t'ai dit... Ne m'oblige pas à le répéter s'il te plaît, soupirai-je. Je sais que tu as compris.
— Je suis donc en couple avec la légendaire Sophie Foster... Se gaussa mon petit-ami.
— N'en fais pas trop quand même, marmonnai-je en rougissant.
— Non non. Quand je pense que demain tu seras comme d'habitude, s'esclaffa-t-il.
— Comment ça ?
— Sera de retour la timide Sophie Foster, celle qui rougit... exactement comme ça, mais surtout celle qui ne me laisserait jamais au grand JAMAIS l'approcher plus que nécessaire.
— Dis pas ça... Fis-je en rougissant effectivement.
— Si si. Si quelqu'un s'était trouvé dans un rayon de 50 mètres je suis sûr que tu ne m'aurais jamais embrassé. On est d'accord ?
— Bon d'accord, soupirai-je. Tu as raison. Mais aujourd'hui c'était exceptionnel.
— Et en quel honneur je te prie ?
— Je ne savais pas ce que je ressentais pour toi... Maintenant je sais. À demain Keefe !
— Et mon bisou ?
Je ris — je ne me ressemble plus du tout c'est incroyable, j'ai l'impression de me transformer en guimauve — mais m'approchai tout de même pour lui déposer un petit bisou sur la joue. Il n'en fut pas content visiblement, et m'attira à lui pour me lécher la joue.
— Ark, c'est dégoûtant !
— Je sais, merci Foster. Et à demain !
Plus bête tu meurs. Mais qu'est-ce qu'il est beau !
Je souris puis sautai, déjà lassée du sermon que me réserveraient Grady et Sandor en rentrant. Ils ne sauront jamais que j'ai embrassé Keefe.
Et surtout, ils ne sauront jamais que j'ai aimé ça.
[<>] [<>] [<>]
Hey.
Aujourd'hui j'étais avec mes amis, dsl de pas avoir posté.
Sinon, petit moment sokeefe, j'espère que vous avez aimé !
Moi en tout cas, j'ai adoré l'écrire...
Les sophitz, c'est le moment où jamais pour partir...
À plus mes pommes de terre !
Date de la NDA: 20/07/2020
Date de réécriture : 08/04/2021
Date de réécriture finale : 04/10/2021
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