29.
* * *
Terry ouvrit les yeux en douceur. Il était allongé sur un petit lit dans une pièce sombre. Un petit ventilateur au pied du lit tentait de combattre la chaleur qui pesait dans la pièce. Il avait la bouche pâteuse et avait du mal à garder les yeux ouverts, alors il les referma. Il les rouvrit au bout d'un moment et une forte migraine le saisit.
- Où suis-je, articula-t-il d'une voix essoufflée.
Il fit un effort pour s'asseoir au bord du lit. Il prit sa tête entre les deux mains. Quand sa vision se fit plus claire il chercha son téléphone du regard, il l'aperçut posé à côté d'une Bible sur une petite table de chevet.
Il mit la main dessus et regarda l'heure. Il était 11h13. Pourtant aucun signe extérieur ne laissait présager qu'il faisait jour. Aucun bruit ne lui parvenait de l'extérieur. Il avait plusieurs appels manqués : de sa mère, de Mala et d'un numéro inconnu. N'ayant pas encore les idées totalement claires pour pouvoir leur parler, il ne rappela aucun d'entre eux. Il lui fallait d'abord savoir où il se trouvait.
Il alluma la torche du téléphone et regarda tout autour de lui. C'était une modeste chambre bien rangée où une armoire en bois blanc trônait contre l'un des murs. Au dessus d'une grande table étaient superposées des affaires. Sur une plus petite table, quelques marmites étincelaient par leur propreté.
Il examina sa tenue, son boubou trois pièces avait été troqué contre un pantalon ample de couleur noir et un débardeur. Il repéra la porte et se leva du lit. Bien qu'il eut encore la tête qui tourne, il était beaucoup plus sûr dans sa démarche que la veille.
Quand il ouvrit la porte, il fut si ébloui par la lumière du jour qu'il la referma tout de suite. Comme un vampire. Il la laissa entrouverte pour éclairer la chambre. Ses yeux s'habituèrent peu à peu à la lumière qui filtrait dans la chambre à travers l'entrebâillement. Il put enfin sortir sans courir le risque de devenir aveugle.
Il cligna des yeux pour s'adapter à la luminosité dehors. Il se retrouva dans une petite cour sur laquelle donnait huit chambres. Ses habits pendaient sur l'une des nombreuses cordes qui traversaient la cour. Il les toucha et constata qu'ils n'étaient pas encore totalement séchés.
Près de la chambre de laquelle il venait de sortir se trouvait un puits. La vue de l'eau lui rappela à quel point il avait soif. Mais il n'était pas question pour lui boire de l'eau du puits. C'est trop de risques, pensa-t-il.
- Il y a quelqu'un ? s'écria-t-il en avançant vers le fond de la maison d'un pas méfiant.
Il n'obtint pas de réponse alors il continua son exploration.
- Est-ce qu'il y a quelqu'un dans cette maison ? répéta-t-il en haussant la voix.
Une minute plus tard, il entendit un déverrouillage de porte derrière lui à sa droite. Il se retourna à temps pour voir une jeune femme sortir de la chambre en face de celle où il avait dormi. Ça se voyait tout de suite à sa mine qu'elle venait de se réveiller.
Terry la détailla du regard. Elle était ronde, avec un beau visage qui faisait penser à celui de la chanteuse Adele. Elle avait un pagne noué au dessus de sa robe de nuit. Le jeune homme put quand-même deviner les courbes que cachaient le pagne.
- Vous êtes enfin réveillé, fit-elle en faisant quelques pas vers Terry.
- Où suis-je et...qui êtes-vous ?
- Je m'appelle Faith et voici mon humble demeure, répondit-elle en désignant la chambre où avait dormi Terry.
- Comment...
Il s'interrompit au début de sa question.
- Je ne me rappelle plus trop ce qui s'est passé, reprit-il, mais avant tout je tiens à vous remercier de m'avoir secouru. Je devais être dans un sale état.
- J'ai juste fait ce qu'il fallait, un peu comme tout le monde. Et votre état était pas terrible !
- Non, tout le monde n'aurait pas fait la même chose.
- Tout le monde n'a pas Christ. Et encore moins son amour.
- Vous voulez dire... Jésus-Christ ?
- Oui !
Il demeura silencieux pendant un moment. Analysant le "oui" énergétique de son hôte.
- Je suis chrétien moi aussi. Enfin quand je me rappelle le chemin de l'église. Mais ce n'est pas pour autant que je recueillerai chez moi, un soulard croisé au milieu de la nuit. Ce monde est dangereux pour une jeune fille seule. J'en sais long à ce sujet.
Elle secoua la tête en affichant un sourire rassurant.
- Un chrétien doit certes aller à l'église, mais aller à l'église ne fait pas de vous un chrétien. Ce n'est pas à l'église qu'on est chrétien. Mais dans la vie de tous les jours. Et c'est vrai que ce monde est dangereux, bien plus que vous ne pourrez l'imaginer.
- Alors c'est quoi la différence entre vous et moi ?
- J'ai reçu Jésus-Christ en tant que Seigneur et Sauveur personnel. C'est ça la grande différence.
- N'est-ce pas ce que font tous les chrétiens ?
- Beaucoup se contentent d'une relation de surface où ils se comportent comme des chrétiens, mais négligent leur Sauveur. Ils se disent enfants de Dieu, mais ne lisent jamais la Bible, ils préfèrent se reposer sur des humains ou des petits dieux plutôt que sur le Père Céleste. Allant à l'église les dimanches juste pour l'image et pour impressionner les autres, négligeant complètement la seule personne à impressionner : le Saint-Esprit. Proclamant haut et fort aimer Dieu, avec un cœur rempli de haine et de mépris envers leur prochain. Qu'est-ce donc l'amour pour Dieu si tu n'en as pas pour ton prochain ? C'est comme dire à une mère que tu l'aimes pendant que tu méprises et malmènes son enfant. Ils suivent des règles établies par des hommes, espérant que c'est par ces règles qu'ils seront sauvés. Mais ce n'est pas par nos actes que nous sommes sauvés...
Terry écouta la jeune femme en silence, hochant la tête par moment.
- Est-ce que je peux avoir un peu d'eau ? demanda-t-il quand elle eut terminé.
- Bien sûr, j'aurais dû y penser.
Elle alla lui chercher un grand verre d'eau dans la chambre de laquelle elle venait de sortir. Quand il eut vidé le verre, il la remercia et répondit enfin à ce dont elle lui parlait.
- Je vous admire pour votre engagement envers Dieu. Je connais quelques lois et principes bibliques mais franchement, je ne pourrais pas toutes les suivre parce que tout cela ne s'adapte pas vraiment à la vie du vingt et unième siècle. C'est devenu de plus en plus compliqué de pouvoir suivre toutes ces lois.
Elle sourit à nouveau.
- Ce n'est ni par la puissance, ni par la force mais par mon Esprit, dit le Seigneur.
- Je tâcherai de ne pas l'oublier, écourta Terry. Il me faut rentrer à présent.
- Je pense que ta tenue doit être presque sèche.
Elle alla retirer son boubou trois pièces et le lui remit. Avec sa permission, Terry retourna se changer dans la chambre où il avait dormi.
Quand il ressortit, Faith le raccompagna jusqu'au portail.
- Maintenant vous avez retrouvé toute votre classe, le complimenta Faith.
Terry fit la révérence en souriant.
- Par simple curiosité, que faisiez-vous devant chez le commissaire à 3h du matin ?
Terry fut pris au dépourvu par la question.
- C'est là où vous m'avez retrouvé ? s'enquit-il, s'arrêtant pour regarder la jeune femme en face.
Elle opina du chef.
- Eh ben !
Il la serra brusquement dans ses bras. La jeune femme fut interloquée par un si soudain élan d'affection mais se laissa faire.
- Vous m'avez sauvé deux fois la vie, lui apprit-il. La première de l'alcool et la deuxième du commissaire Akue.
- Vous étiez venu voir Jessica ?
- Vous la connaissez ?
- On a grandi ensemble, répondit-elle. On était les meilleures amies au monde à une époque pas si lointaine.
- Qu'est-ce qui s'est passé entre vous ?
- Rien, on a juste grandi, répondit-elle en haussant les épaules. Chacune est devenue ce qu'elle doit être. Ça s'est fait si naturellement que, de nous deux, personne n'en a souffert.
Terry hocha la tête en signe de compréhension.
- Laisse moi te dire une vérité que tu n'as pas demandé. Son père l'aime beaucoup et la surprotège mais ce n'est pas quelqu'un de compliqué. Il aime juste savoir ce qui se passe dans la vie de sa fille pour pouvoir mieux la protéger. Un peu comme tout bon père. Aussi si tu espères sortir avec elle, fais les choses dans les règles de l'art. Ça montrera le respect que tu as pour elle et pour sa famille. Te pointer devant chez elle au milieu de la nuit, complètement ivre, franchement c'est le meilleur moyen de ne jamais rien avoir avec elle. Rends la fière et elle sera fière de te présenter à ses parents. Comme ça tu pourras passer à la maison quand ça te dit, d'accord ?
Il hocha la tête, ne sachant trop quoi ajouter. Les conseils de Faith lui auraient été précieux si tout n'était pas perdu d'avance auprès du commissaire Akue. Il n'espérait plus grand chose de sa fille à présent. Il se contenterait désormais de ce qu'elle daignera lui accorder comme attention. Même s'il voulait toute son attention, il savait qu'il avait tout fait foirer en ne se pointant pas comme prévu au Paradise.
- On avait rendez-vous et je ne suis pas venu à l'heure, c'est pour ça que j'étais devant chez elle à une pareille heure de la nuit. Je voulais lui expliquer pourquoi je n'étais pas venu mais elle ne décrochait pas alors... Sur le moment, ça me semblait être la meilleure des choses à faire. Mais maintenant je me rends compte que c'était une grave erreur. Heureusement que tu as été là pour me sauver.
Pendant ce temps chez les Akue...
Jessica se réveilla enfin. Elle chercha son téléphone à tâtons. Elle ouvrit tout de suite les yeux quand elle ne le trouva pas à sa place habituelle. Persuadée que c'était Arnaud, son frère, qui l'avait pris pendant qu'elle dormait, elle bondit hors de son lit telle une furie, prête à l'étrangler si elle lui met la main dessus. Mais à sa grande déception, la chambre de son frère était vide.
Elle commença à dévaler les escaliers mais se ravisa. Les samedis, son père avait l'habitude de recevoir des gens. Elle devait donc être présentable avant de descendre dans le salon.
Elle rebroussa alors chemin pour faire sa toilette avant de descendre. Elle prit une douche, se brossa les dents, remplaça son pyjama par un jean et un crop top puis descendit enfin dans le salon. Elle trouva ce dernier vide. Aucune trace de sa famille, ni dans la cuisine, ni dans la salle à manger. Elle sortit sur la terrasse et trouva son père assis dans son canapé favori, le regard perdu devant lui. Sur la petite table basse de la terrasse reposait côte à côte deux téléphones : le sien et celui de Jessica.
- Bonjour papa, fit cette dernière en venant prendre son téléphone.
La jeune femme se dit qu'il l'avait sûrement pris à son frère alors elle ne posa pas de questions sur le pourquoi du comment son téléphone se retrouvait là au lieu d'être à son chevet.
- Bonjour Jess, répondit son père. Tu as bien dormi ?
Elle hocha la tête.
- Si si. Merci de m'avoir laissé dormir autant, j'en avais vraiment besoin après la journée folle que j'ai eu hier.
- Tu l'as bien mérité.
- Merci papa. Je vais me faire un petit déjeuner, tu veux quelque chose ?
- Je veux surtout te parler. Assieds-toi un moment.
Elle tiqua. Cette phrase n'a jamais rassuré personne. Mais elle obéit. Elle s'assit sagement dans le canapé à côté de celui de son père.
- Terry va bien ? demanda le commissaire.
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