— Alors tu viens de Suède aussi ? demanda Aell en resserrant son écharpe autour de son cou.

— Exact ! Pourtant Finn et moi ne nous sommes pas rencontrés en Suède. Il faut dire qu'il était très éloignés l'un de l'autre, dans notre pays ; je viens du grand Nord et lui du Sud.

— J'ai toujours rêvé d'aller en Suède, ça promet d'être un pays magnifique.

— Ça l'est. Il y a des points communs avec les paysages irlandais, mais il y a quelque chose de plus rustique en Suède. C'est ça qui m'a poussée à m'installer ici plutôt que là-bas, d'ailleurs, c'est plus doux ici. Le climat a joué dans la décision, aussi.

— Je m'en doute ! Les températures extrêmes de t'attirent pas ? Pourtant moins vingt degrés en hiver, c'est une partie de plaisir ! plaisanta Aell.

— Viens fêter le solstice d'hiver avec nous, si ça t'amuse, rétorqua Krista. On le passe toujours là-bas, dans un chalet à la campagne. On s'emmitoufle dans des couvertures, on allume des bougies, et on boit des chocolats chauds en discutant de l'année passée toute la nuit. C'est toujours une nuit très agréable ; je serais heureuse de la passer avec toi cette année.

— Oh, c'est trop d'honneurs ! Je ne voudrais pas m'immiscer dans vos traditions.

— Ne sois pas bête. Ça fait deux ans que tu vis à moitié avec nous : que tu le veuilles ou non, tu fais partie de la famille maintenant.

Aell rougit et enfouit le nez dans son écharpe pour se cacher le visage. Krista lui donna un léger coup à l'épaule :

— Allez, je prends ton billet avec les nôtres. On en profitera pour te faire visiter.

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Comme prévu, Aell embarqua avec Finn et Krista l'avant-veille du solstice d'hiver. Ils avaient prévu de visiter Stockholm dès leur atterrissage et de faire leurs dix heures de route le lendemain, en faisant des pauses pour admirer les paysages suédois et se dégourdir les jambes au bord de lacs gelés. Viendrait ensuite la nuit du solstice, suivie d'une journée sans rien de prévu histoire de récupérer. Ils feraient ensuite la route en sens inverse et attraperaient un vol dans la soirée.

Aell était nerveuse de prendre l'avion pour la deuxième fois seulement, cependant la présence d'Archie à ses pieds l'aidait grandement à se calmer. Une amie proche de Krista avait pour mission de s'occuper du petit Thomas et des deux chiens de Finn durant leur absence.

Deux bonnes heures après l'atterrissage, après avoir récupéré leur voiture de location, Finn et Krista emmenèrent Aell visiter les recoins de la ville en évitant les coins touristiques – à cette époque il n'y avait de toute manière pas beaucoup de visiteurs. Ils mangèrent des bullars et louèrent des vélos, prirent des photos et eurent des fous rires. À la fin de la journée, Aell était aussi heureuse qu'épuisée. Elle alla se coucher à l'hôtel sans même dîner et dormit comme une masse.

Une douce mélodie au piano la tira de son sommeil aux aurores : il était temps de se mettre en route. Lorsqu'elle les retrouva dans le couloir, Finn et Krista n'avaient pas l'air plus réveillés qu'elle. Elle retint un rire devant leurs yeux bouffis, et eut un regain d'énergie pour motiver les troupes :

— Allez, on y va ! Comme ça on aura le temps de se promener tout à l'heure. Et je suis certaine qu'on aura un super lever de soleil sur la route !

— Tu parles ! grommela Finn. Avec ce brouillard, aucune chance de voir quoi que ce soit.

Effectivement, ils ne virent pas grand chose du lever de soleil. D'ailleurs, Aell eut l'impression qu'il ne se levait pas du tout. Elle eut beau se tordre le cou pour observer le ciel à travers la fenêtre de la voiture, elle ne vit rien d'autre que la masse sombre du ciel, entre l'anthracite et le marine. Et plus ils se rapprochaient du Nord, moins ils avaient de chances d'entrevoir un rayon de soleil.

— Tant pis, soupira Aell. La nuit perpétuelle, c'est chouette aussi.