Chapitre 2
Devant chez nous, j'attendais avec Léana que Salienti vienne nous chercher. Lorsque nous étions sorties de la chambre, Zoé dormait encore. Je ne suis pas sûre que nous arrivions à la défaire de ses grasses matinées ... Une calèche tirée par deux chevaux arrivait.
Amoureusesdes équidés que nous étions, ce mode de transport n'allait paspour nous déplaire. Ainsi, nous nous rendîmes au Conseil.
-Gunera sied tes, saluai-je l'assemblée en entrant.
-Sied tes lieno, répondirent-ils en chœur.
-Tieli Saïeti, terminai-je.
-Bonjour Srilawa Mia, c'est un honneur pour le Conseil de voir siéger avec eux l'une des dernières Srilawas, dit l'un des membres de l'assemblée.
-Tout l'honneur est pour moi.
-Mia va souvent droit au but, alors faites de même et évitez lesdétours, camarades ! lança Salienti.
-Avec plaisir mon ami, nous irons droit au but. Srilawa Mia, vous êtes ici pour prendre une décision : souhaitez-vous que le peuple soit mis au courant qu'une nouvelle Srilawa est arrivée ? Tous s'inquiètent. Deux Srilawas sont en fin de vie et Sheïla n'est plus toute jeune. Elles nous soignent de tous les maux, la peur de les perdre noue tous les ventres mademoiselle. Vous avez entre vos mains le moral de tous les terriens.
La réponse m'était évidente :
-J'accepte ! Que tous soient au courant de mon arrivée !
-Votre cœur est bon Srilawa Mia. Le peuple vous salue. Puissent les étoiles veiller sur vous !
Durant une bonne partie de la matinée, les discussions m'intéressaient moins et je me mis à rêvasser.
Plusieurs heures plus tard, lorsque l'on fut de retour à notre cabane, Gaëtan n'était pas là, ce qui m'étonna un peu. Mais ce qui m'étonna le plus c'est de trouver Zoé en pleurs dans notre chambre. Elle nous fit signe de fermer la porte et de venir. Nous nous asseyâmes sur son lit à ses côtés. Elle commença :
-"Vous étiez parties depuis peu lorsque je pris la décision la plus idiote de ma vie. J'aime Gaëtan. Je décidai donc de jouer la carte séduction. Je l'appelai car j'avais un problème avec mon lit. Une latte était cassée. Il entra et me regarda, et là ....Elle sanglota avant de reprendre :
-Je l'embrassai.
Je retins un cri d'étonnement.
-Les premières secondes, il me rendit la pareille, avant de se dégager furieux et de sortir. Depuis, il ne s'est pas montré ...termina Zoé entre deux sanglots.
-Zoé ... tu sais bien qu'il est notre serviteur, qu'il n'est pas prêt. Et puis, nous sommes en 3020, de ce fait, on ne sait pas comment fonctionne la société de ce point de vue-là.
-Oui Mia, je le sais. Je n'ai pas pu résister.
-Je comprends Zoé, je te promets d'en parler à Sheïla.
-Merci
-De rien, c'est normal. Je demanderai si tu,... vous pouvez venir écouter la réponse, pour que Sheïla ne se doute de rien.
-Il faudrait qu'elle nous instruise sur les coutumes et les habitudes du pays. J'ai peur que cela nous fasse défaut à l'avenir .... commenta Léana.
-Je suis d'accord. Tout a changé. Nous devons nous adapter, nous n'avons pas le choix d'ailleurs, nous sommes ici, bien que malgré nous, et nous sommes obligées d'évoluer.
Lorsdu repas de midi, Gaëtan ne mangea pas avec nous. Il nous servit etrepartit dans sa chambre. Zoé fut très déçue. Après le repas,comme hier, je devais aller chez Sheïla.
Lesfilles m'accompagnèrent et comme la dernière fois, la Srilawa meprit à part et m'emmena dans la même pièce. Elle me dit :
-Bonjour Mia
-Bonjour Zieli Sheïla.
-Aujourd'hui, pas de Bla Bla. En premier lieu, toutes les Srilawas sont liées à des animaux, m'apprit-elle en désignant le corbeauà son épaule, et il est de ton devoir de te lier avec un.
-Qu'est ce ...
-Non Mia, pas de questions. Pas tout de suite, me coupa-t-elle.
Elle m'entraina dans une pièce jardin adjacente. Dans un coin, sur un lit d'herbe, des chatons miaulaient, sur un perchoir une femellec orbeau nourrissait ses petits, dans une mare des grenouilles miniatures sautaient. Plus loin, des cygnes gambadaient au milieu de renards.
Elle me chuchota :
-Ballades toi, trouves le bon et lies toi avec lui. Et elle s'enalla.
Je n'aime pas trop les oiseaux, je les exclus donc de mon choix. Les grenouilles .... je n'ai rien contre les grenouilles mais ... non, pas de grenouilles pour moi. Il reste les renards et les chats. J'hésitai longuement avant de décider d'aller tous les caresser. Les chatons remuaient lorsque je les caressais, mais rien de spécial ne se passa. J'allai voir les renardeaux. Je les caressai également tous, mais rien ne se passa non plus. J'allai repartir lorsque j'aperçu une petite femelle roulée en boule dans un coin. Je m'approchai d'elle, posai ma main sur son petit front quand je fus traversée par une vague d'émotions. Au bout de quelques secondes, je compris que c'était les émotions de la renarde.
*****
-Bonjour, lança une petite voix dans ma tête.
-Bonjour, comment t'appelles-tu ?
-C'est à toi de choisir Mia.
-Comment tu connais mon nom ?
-Je suis toi comme je suis moi. Être deux en un.
-Hum, hum d'accord ... Nalla, en prononçant ce nom, une vague de bonheur m'envahit.
-Merci, ce nom est parfait. Mia, arrêtes de stresser pour Zoé, tout ira bien. Ne fais pas l'étonnée, j'ai accès à ta conscience comme toi tu as accès à la mienne.
-Tu es la dernière de la portée ?
-Oui, et aussi ...
-La seule fille.
-C'est ça. Ça fait bizarre de partager sa conscience avecquelqu'un.
-Ce n'est pas moi qui vais te dire le contraire, mais bon, je vaisdevoir y aller, le soleil décline.
Je me retirai de la conversation mentale. Je commençai à m'en aller quand je vis Nalla à mes côtés.
-Que fais-tu ? lui demandai je.
-Bah, tu as dit que c'était l'heure, donc on s'en va.
Je dus avoir l'air surprise, car elle ajouta :
-Où tu iras, j'irai.
Cela me parut suffisant et je continuai mon chemin. Je sortis de la pièce jardin suivie de ma moitié. Sheïla et mes amies discutaient en buvant ce qui m'a semblé être un thé, quand j'entrai dans le salon, tous les regards se sont tournés vers moi et Nalla. Un sourire s'étira sur le visage de la Srilawa. Mes amies semblèrent contentes et Zoé fixait mon front. Interceptant mon regard, Sheïla me dit que mon front était marqué du signe des Srilawas. Je me tournai vers la glace qui ornait l'un des murs. Sur le haut de mon visage, un signe aussi complexe qu'étrange était apparu. Je demandai :
-Sheïla, j'ai donc exactement le même symbole que vous.
-Oui et non Mia, si tu le souhaites, je peux trouver sur le tien sa particularité. Je trouverai en même temps, les lignes véritables de tes intérêts, ton amour, ton caractère. La base de tous les signes est semblable, mais, en raison de son lien avec ta personnalité, il est différent à chaque fois. Bref, revenons au point de départ. Souhaites-tu que je découvre qui tu es ?
-Hum .... dis-je en réfléchissant, non, je ne veux pas.
-Très bien. Bon choix Mia. Il se fait tard, je ne vous retiens pas davantage. Bonne nuit !
-Bonne nuit, nous lançâmes en franchissant la porte.
-Dis Mia, comment as-tu appelé ta renarde, me demanda Zoé.
-Je m'appelle Nalla, répondit dans nos trois têtes l'intéressée.
-Elle parle ? s'étonnèrent mes deux amies.
-Oui, elle parle à vos consciences. Comme je peux le faire, pour prouver cette remarque, je m'ouvris à leur mental et lançai :
-Me voilà ! Vous m'entendez ?
Leurs visages extrêmement surpris parlèrent pour elles.
Je fus contente d'avoir réussi. Il n'y eu plus un échange sur toutle retour.
Je portais toujours mon sac à dos depuis mon arrivée ici. Ce monde regorge de secrets et j'avais pensé qu'il serait pratique. Lorsque je le vidai, comme tous les soirs, sur mon lit, je vis avec stupeur qu'il contenait un livre. Je le sortis précautionneusement et soufflai sur la couverture empoussiérée. "Coutumes de Gaëlia". Sheïla sait donc tout. Je souris. Ce manuel était épais, mais j'avais un désir fou d'en savoir plus.
-Fais comme tu veux, mais moi je dors, lança Nalla dans ma tête.
Ah oui, je l'avais presque oubliée.
-Dors Nalla, repose-toi. Je lui répondis avant de plonger dans le livre.
Je passai toute la nuit à lire. J'y appris une quantité astronomique de connaissances. Vers minuit, je passai à un chapitre que je me dis qu'il faudrait que je le lise à mes amies :
"Aimer à Gaëlia". Il y expliquait le rituel du lien, comment faire et surtout il y détaillait le fait que Gaëlia est une cité libre et que quelle que soit la caste des amoureux, rien ne les empêcherait de se lier. Néanmoins, de ce que Sheïla m'avait informée, je savais que les serviteurs restent souvent célibataires, car leur métier ne leur permet pas de fonder une famille. Voilà d'où venait la peur que j'avais ressentie en Gaëtan. Il aime Zoé, mais il a peur que son métier l'empêche de la rendre heureuse.
*****
Au sujet de ma découverte sur Gaëtan, j'ai décidé de ne rien dire à Zoé. Elle est très impulsive et ça ne serait pas sympathique de lui donner ces informations-là. Par contre, j'ai trois mots à dire à Gaëtan. Le jour se lève. Mes amies et Nalla dormaient encore. Je pris le parti de réveiller ma moitié.
-Pourquoi me réveilles tu si tôt, grommela-t-elle
-Parce que j'ai besoin de toi, je lui répondis.
-Très bien, j'arrive.
Je sortis, suivie de Nalla, à pas feutrés. Je trouvai Gaëtan dans le salon, assis par terre en tailleur, les yeux fermés. Il dut m'entendre arriver car il se leva en vitesse. Je lui fis signe de me suivre dehors.
Une fois un peu éloignés, je lui dis :
-Gaëtan, Zoé t'aime.
-Ce n'est pas nouveau, grogna-t-il
-Et tu l'aimes aussi, je l'ai senti.
Cette fois il me fixa avec stupeur.
-Co..... comment ?
-Je te l'ai dit ! je l'ai senti !
-Bon OK, se reprit il, cela n'arrange pas ma situation, mais que sais-tu d'autre ?
-Je sais aussi que tu as peur. Peur de ne pas la rendre heureuse à cause de ta profession.
-Oui ... soupira-t-il, en prenant ce métier, je ne pensais pas rencontrer une Zoé. Elle est si belle, si impulsive...
-J'ai compris. Maintenant, explique-moi la relation maître-serviteur.
-D'accord. Lorsqu'un serviteur entre au service d'un maître, il doit loger avec lui et lui obéir. Un maître peut, s'il le souhaite, renvoyer son serviteur. Néanmoins pour celui-ci, se faire renvoyer signifie qu'il perd tout moyen de subsistance.
Dans ces cas-là, peu sont ceux qui ont réussi à retrouver une vie normale après.
Certains sont mariés. Mais très peu, car si le maître prend l'envie de renvoyer le serviteur, les deux perdent tout. Je n'ai pas envie d'imposer çà à Zoé.
-Mais le maître ne peut pas simplement vous permettre de partir sans pour autant vous renvoyer ?
-Non. Quand tu te mets au service d'un maître, les seuls moyens de le quitter sont : la mort ou le renvoi.
-Cruel ! Qui a imposé cette règle ?
-Le maître Guyan. Lors de repeuplage de la terre en 2954, Maître Guyan souhaitait la mise en place d'une dictature. Les autres maîtres refusèrent. Tous étaient pacifistes et voulaient une égalité parfaite. Pour ne pas énerver de trop Guyan, qui une fois agacé était très cruel, ils lui accordèrent la création du service-maître. C'est donc lui qui créa les règles que je subis aujourd'hui.
-Maître Guyan est mort non ?
-Oui
-Il serait simple de changer les règles alors ?
-Non. Guyan avait des partisans, la plupart encore présents. Si les premiers sont morts, leurs descendants ont pris la suite.
Il avait menacé le Conseil de lourdes représailles s'ils s'avisaient de changer les règles. Du coup le Conseil n'y touche pas.
-Car cela déclencherait sûrement une guerre civile.
-Exact. Voilà tu sais tout.
-Gaëtan. Je ne te renverrai jamais. Si tu veux bien, je souhaite que Zoé ne soit pas au courant de quoi que ce soit. J'ai peur qu'elle ne fasse de grosses bêtises en sachant. Je ne veux pas la voir souffrir.
-Moi non plus. De ce fait, j'accepte. Je ne lui dirais rien.
-Bien. Tu devrais y aller.
J'attendis qu'il soit rentré pour aller dans le jardin, monter m'installer dans un grand arbre. De là-haut je voyais une bonne partie de la ville-cabane. Je questionnai Nalla :
-Je suppose que tu as entendu et comprit toute la conversation.
-Tu supposes bien.
-Cette règle est cruelle !
-Je suis d'accord.
-Ce maître Guyan et ses règles aussi débiles qu'insensées vont pourrir la vie de Zoé et Gaëtan !
-Que veux-tu faire ?
-Changer cela !
-Comment ?
-Je ne sais pas trop. D'abord, il faut que j'en sache plus sur la "caste" créée par Guyan. Tu m'aideras ?
-Bien sûr, mon amie.
-Merci.
La savoir avec moi dans toutes les circonstances était très réconfortant.
-Selon le soleil, il me reste à peu près trente minutes avant 9heures. Pendant ces trente minutes, il faut que je ferme cette conversation dans un coin, dans l'espoir que Sheïla ne sache rien.
-Tu es sûre ? Je pense que tu devrais plutôt lui exposer le problème. Elle serait d'une aide précieuse.
-Je ne veux pas qu'elle sache tout ce qui m'arrive ?!
-Ce n'est pas ce que je dis, mon amie, je te dis que sur ce point-là, elle serait d'une aide précieuse.
-Tu imagines si elle n'approuve pas notre quête.
-Sheïla a le cœur bon.
-Hummmrrr... le pire c'est que tu as raison. Bon très bien, j'en parlerai à Sheïla.
-Merci, mon amie, tu as fait le bon choix.
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