Chào các bạn! Vì nhiều lý do từ nay Truyen2U chính thức đổi tên là Truyen247.Pro. Mong các bạn tiếp tục ủng hộ truy cập tên miền mới này nhé! Mãi yêu... ♥

1 - Bienvenue à bord.

Port de la pointe des galets — la Réunion.

Gaël

Ciel clair, presque blanc, soleil de plomb éblouissant, brise marine aux parfums iodés. Les éléments semblent s'être accordés à mon humeur.

 D'un pas alerte, sac sur l'épaule, je gagne le point d'amarrage où se trouve mon objectif : la frégate de surveillance « Floréal » de la Marine nationale. Dans une ambiance quasi festive, les membres de l'équipage se saluent sur le quai, heureux de retrouver leurs camarades. Poignées de main, accolades, visages radieux, les plaisanteries sont déjà de mise. Pourtant, nous partons au boulot, quittons famille et maison pour plusieurs mois, mais pour un marin, aucun bonheur n'est comparable à celui de prendre la mer.

Moi, c'est la frégate que je regarde en souriant. Certains la jugent vieillissante, et les longues traînées de rouille sur la coque le laissent penser, même si elles n'ont aucun rapport avec l'âge d'un navire. Une cure de jouvence est programmée à notre retour, simple couche de peinture qui camouflera son vécu. Pourtant, je la préfère aux nouvelles, les furtives, ces concentrés de technologie sans âme. La même peinture grise, le même effet intimidant, mais elles ressemblent à des barquettes flottantes avec leurs parois lisses qui recouvrent les ponts et les dissimulent aux radars.

Les classes Floréal sont à l'ancienne, avec des ponts à l'air libre. Grosso modo de la longueur d'un terrain de foot, surplombée d'un mât encombré de systèmes radars et de la grosse boule du SYRACUSE (1), elle en impose. La tourelle équipée d'un canon de cent millimètres à l'avant et ceux de vingt sur les côtés finissent d'asseoir son autorité. Oui, la dame est âgée, mais a plus que prouvé son efficacité.

Aujourd'hui, une centaine de marins formant l'équipage embarquent, plus vingt-cinq commandos marine divisés en deux groupes ; j'en dirige un. Nous n'allons pas faire la guerre, nous partons faire de la surveillance maritime, une mission qui s'apparente à celle d'une police de la mer.

L'impatience me gagne, après quelques poignées de mains, je hisse mon paquetage sur l'épaule et quitte le groupe pour m'engager sur la coupée, l'étroite passerelle mobile qui relie la frégate au quai. En haut, je m'acquitte du salut aux couleurs, le regard dirigé vers la poupe (2) où flotte fièrement le pavillon français. Je m'enregistre auprès du gradé qui contrôle l'accès à bord et me rends sur la plateforme arrière, où se trouve la piste pour l'hélicoptère Panther, et, le nez en l'air, manque valdinguer en trébuchant sur le rail qui sert à le sortir de son hangar.

— Attention, maître ! C'est plein de pièges sur un navire !

Je ravale ma fierté et adresse un sourire crispé au matelot moqueur, puis m'accorde un instant pour m'imprégner du décor et de cet air iodé qui m'a manqué. Même amarrée, la frégate est vivante. Le pavillon flotte en claquant, les drisses chantent sous la brise, le soleil miroite sur les deux antennes radar qui tournent inlassablement sur elles-mêmes. Je frémis presque d'excitation et ressens chaque pulsation de mon cœur dans mes veines de marin. Paradoxalement, j'ai l'impression de rentrer à la maison chaque fois que j'embarque.

D'ailleurs, il est temps de m'installer. Je franchis la porte contigüe au hangar et m'engouffre dans les entrailles du navire. Je rejoins d'un bon pas le poste, chambrée que nous sommes six à partager. En chemin, signe de tête pour saluer à droite, à gauche, tous les gens que je croise. Le poste est vide et aucun lit n'est fait.

L'espace est réduit, l'éclairage agressif, et aucun hublot ici. Dans un angle, les bannettes (3) superposées par trois ont l'apparence d'une longue boîte pourvue d'un rideau qui nous permet de nous isoler. C'est le seul lieu d'intimité, celui où nous accrochons les photos de nos proches. En face, une suite de caissons en guise de dressing et un minuscule bureau que nous partageons.

Je range mes affaires, fais mon lit, puis sors mes photos de leur enveloppe pour les punaiser. C'est ma grande sœur qui les prépare, elle y tient et les change à chaque fois. Je découvre le type de clichés habituels, tous les membres de ma famille sont là. Au moment de punaiser la dernière, je stoppe mon geste en râlant. Brice de Nice et ses longs cheveux blonds filasses ! Ça, c'est un coup de ma nièce, Chloé. Je me vengerai aux prochaines vacances.

Je froisse l'image dans mon poing, expédie la boulette dans la poubelle, et enfile mon treillis. Enfin, ravi, je pars saluer l'équipage avant de passer à la partie administrative et la prise de consignes.

Un peu plus tard, mon humeur s'est nettement détériorée. Je sors du bureau du Pacha (4) en serrant les dents, puis dévale les échelles et avale les mètres de coursives en marmonnant, le tout saupoudré de colère à peine larvée. Seulement deux heures que j'ai embarqué et j'ai déjà envie de flanquer quelqu'un par-dessus bord ! Nous appareillons demain et cette mission de trois mois dans l'océan Indien promet des merveilles avec une ouverture pareille.

De retour au poste, j'y trouve Marc, mon adjoint, en train de coller des photos dans sa bannette, juste au-dessus de la mienne. Nous bossons ensemble depuis quatre ans, dans une entente idéale, autant sur le plan humain que professionnel. Comme avec les autres membres de mon équipe, nous sommes des collègues, mais surtout des amis. En revanche, nous sommes physiquement opposés. Il est aussi svelte que je suis trapu, aussi blond que je suis brun, des yeux marrons rieurs quand les miens sont verts et inquisiteurs. Marc est d'un abord jovial, moi plutôt distant. Pas méchant, juste méfiant de nature.

Mon énervement ne rend pas mes déplacements discrets, il tourne la tête à mon arrivée.

— Salut, Gaël ! Houlà ! Tu m'as l'air en rogne.

— Et pas qu'un peu. Attends de savoir pourquoi, et je t'assure que tu me rejoindras illico dans le club.

Piqué au vif, il s'éjecte de sa bannette.

— Explique. Tu m'intrigues.

Il est dressé face à moi, les poings sur les hanches et presque à poil. Tout à coup, je suis partagé entre continuer à râler ou éclater de rire.

— Toi aussi, explique. C'est quoi ce calbut ?

— Cadeau de ma mère. Elle trouvait ça mignon les petits cochons.

— Elle a vu ce qu'ils font ?

— Bien sûr que non et avec mon père, nous n'avons pas osé le lui dire. Laisse mes cochons copuler sur mon caleçon et raconte.

— Alors, figure-toi que... non, mais enfile ton futal ! C'est trop ridicule ton truc !

— OK ! Je ne voudrais pas risquer de t'exciter, tu n'es pas mon genre, se moque-t-il en fouillant dans son sac.

Pendant qu'il recouvre d'un pantalon le bout de tissu qui empêcherait n'importe qui de se concentrer, je lui explique la situation :

— Je viens d'apprendre que nous embarquons un passager de dernière minute.

— Encore un journaliste pour un reportage ?

— J'aurais préféré pour une fois. Non, c'est plus complexe, mais surtout très flou. C'est ce qui m'agace d'ailleurs. Accroche-toi bien : on nous colle le gars dans les pattes et nous devons en assurer toute la responsabilité sur le bâtiment.

— On joue les nounous ? C'est quoi ces conneries ?

— Attends, ce n'est que le début.

— Je crains le pire.

— Patience, il arrive. Ce type, on ne sait rien de lui, c'est un fantôme. Les seules informations fournies sont de le placer sous surveillance, car potentiellement à risque.

Stupéfait, il en oublie de remonter sa braguette.

— Pardon ? Risque pour lui ou pour nous ?

— Je penche pour nous puisqu'il sera enfermé. D'ailleurs, nous devons débarrasser le local d'entretien qui deviendra sa cellule.

— C'est une blague ? C'est contraire à toutes les règles de le laisser monter à bord ! Et pourquoi dans un local ? Nous avons des cellules disponibles.

En enfilant son t-shirt, un courant d'air lui fait baisser la tête, et remonter aussi sec sa braguette.

— Je l'ai fait remarquer, mais c'est un ordre. Dangereux ou pas, on le prend en charge et dans le local. Le Pacha ne m'en a pas appris plus, si ce n'est que la requête vient de haut et qu'il l'accepte. Ah si ! Autre détail qui a son importance : silence radio autour du gars.

— Notre chef n'a rien dit ?

Il fait référence à mon supérieur direct, l'officier responsable du détachement des commandos marine sur la frégate. Est-ce qu'il s'est opposé au Pacha ? La bonne blague.

— Si, bien sûr. Il a précisé que c'était désormais notre problème et qu'il ne voulait pas en entendre parler. Avant que tu ne le demandes, j'ai tenté de refiler le bébé au second groupe, mais il a refusé.

Pensifs, nous analysons les faits en silence, puis concluons à notre impuissance en soupirant de concert. Cette situation est totalement hors-norme, jamais vécue, et nous avons des missions bien plus importantes à remplir que se coltiner celle de matons.

Une heure plus tard, je réunis mon équipe dans notre local pour annoncer la bonne nouvelle. Arrivés joyeux et plein d'enthousiasme, les dix gars ravalent leur sourire puis ronchonnent, aussi emballés que nous à l'idée d'assurer la fonction de geôlier. Malgré tout, je passe les consignes :

— Vigilance permanente. On ne doit jamais le quitter des yeux quand nous le sortons de son local, pour l'emmener se laver ou autre. Pour les repas, on les lui amène et il mange devant nous. On ne laisse rien, ni verre ni couvert en repartant.

Tous acquiescent, il est inutile de leur rappeler la dangerosité potentielle d'un tel individu sur un bâtiment armé.

— Des questions ?

— Oui. L'équipage est au courant ?

— Le Pacha les informera pendant le rapport demain matin. À mon avis, ils n'en sauront pas plus que nous. Une autre ?

— On sait combien de temps on doit le garder ?

— Non, deux jours, une semaine, ou plus. Nous nous relaierons pour sa garde, tout en assurant nos tâches habituelles, intervient Marc.

Nous décidons ensuite de nous acquitter de la réception du colis tous les deux, afin de le jauger et de lui transmettre les consignes à respecter. Elles seront concises : tu bouges une oreille et on te la coupe ! Nous en profiterons également pour l'interroger afin d'en apprendre plus sur son compte.

En attendant, nous avons encore du matériel à ranger, alors nous nous mettons au travail en vidant les caisses d'équipement.

Plus tard, nous passons cette première soirée à bord dansune ambiance festive, les deux groupes commandos ravis de se retrouver et avecplein d'anecdotes à s'échanger. La nuit sera courte.


***

1 SYRACUSE : Système de communication militaire par satellite.

2 Poupe = arrière. Proue = avant.

3 Bannettes : couchettes.

4 Pacha : surnom donné au commandant d'un bateau dans la Marine nationale.

Bạn đang đọc truyện trên: Truyen247.Pro