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            Bad-doum. Bad-doum.

Le sang me battait les tempes, rythmait la cadence de pensées indomptables.

Bad-doum. Bad-doum.

Mes yeux dans le vide, mes bras amorphes.

Bad-doum. Bad-doum.

BAD-DOUM BAD-DOUM BAD-DOUM.

⸺ Laisse-moi t'raconter une histoire, fille aux dragons.


*


Il était une fois, un gamin quand il y en avait tant d'autres vivant au large de la Baie de Cendre – alors appelée sous un autre nom – dans un pauvre hameau de pêcheurs.

Si la vie y était loin d'être opulente, elle y était simple et confortable.

Le môme, cela dit, n'aspirait qu'à une chose (quoiqu'il soit bien incapable de mettre un nom dessus) : partir. Non pas qu'il détestait la vie là-bas, loin de là ! mais la curiosité sans limite que sa caboche abritait le dévorait de l'intérieur, et la seule solution qu'il avait trouvée pour étancher sa soif de découvertes était de repousser chaque jour un peu plus les bordures des terres inconnues. Tout petit, déjà, il s'esquivait à la tutelle des anciennes pour aller rôder aux alentours, au mépris de tout danger qui pouvait le guetter.

Un enfant, somme toute.

Mais là où les autres s'en retournaient au village sitôt la nuit tombée, lui pouvait errer longtemps sous le couvert des trois lunes, jusqu'à ce qu'un pêcheur ne le débusque et le ramène à sa chaumière.

Quelque part, ce furent ses escapades qui le sauvèrent ; car une nuit, l'existence telle qu'il l'avait toujours connu fut réduite à néant.


C'était une belle soirée. La pêche avait été bonne, sa mère avait réussi à dompter un each uisce – ce qui n'était pas mince exploit. Pour fêter cette prouesse, les pêcheurs s'étaient réunis sur la baie, à danser et rire au son du luth et du tambourin, bercés par le remous des vagues se désagrégeant sur le sable de la plage.

Lui, comme à son habitude, s'était éclipsé pour aller prêter oreille aux cancanages des Créatures.


Une nuit festive, une nuit de joie.

Qui tourna rapidement au cauchemar.


À la minuit, alors que les trois lunes volaient haut dans le ciel, une ombre dissimula leur éclat.

Plusieurs ombres.

En moins de temps qu'il n'en fallait à la pluie pour tomber, un Vol de dragons s'abattit sur le village et ses habitants. Ils brûlèrent les murs et déchiquetèrent les chairs, avant de s'en aller comme ils étaient arrivés ; ne laissant de leur souvenir que les cendres des corps calcinés et le charbon des ruines effondrées.


*

*Hana*


⸺ Cette nuit-là...

⸺ ... T'est familière ? Même les planqués d'Arkën Soa ont dû en entendre parler, ce massacre a laissé un goût amer dans les mémoires...

Jusqu'alors trop banale pour recevoir un quelconque sobriquet, la Baie de Cendre avait gagné le sien dans le sang : des dizaines et des dizaines de patelins détruits, en l'espace d'une seule nuit.

⸺ Je t'avais dit que mon village avait été détruit... souffla Aaron, regard bas et lèvres pincées.

⸺ Je croyais... je croyais... je croyais qu'il n'y avait eu aucun survivant !

L'exclamation se perdit au fond de ma gorge ; le choc lui bloquait l'accès à l'air libre.

⸺ Et il y en pas eu un seul, confirma Jorgh, la mine soudain dépourvue de sa morgue précédente. Mais ce gars-là n'était pas sur les lieux, dit-il en posant son énorme paluche sur l'épaules du Renard.

Celui-ci se crispa, sans plus. Ses démons l'arrachaient à l'emprise de la réalité, le ramenaient à la nuit, cette nuit où il avait tout perdu.

Le voir ainsi me tordait le cœur, presqu'à m'en faire oublier les mots fatidiques que Jorgh s'était délecté à prononcer. Presqu'à m'en faire oublier l'ire qui écumait aux rebords de mon esprit.

Presque.

Mais pas tout à fait.

⸺ On l'a r'trouvé roulé en boule au fond d'un terrier d'lapin, recouvert de cendres. Un véritable souillon !

Il racla un rire du fond de sa gorge, un son aléatoire et dissonant, qui écorchait les oreilles.

⸺ Et après ?

Le Dragonnier me mira avec une attention nouvelle, surpris par le tranchant soudain de ma voix.

⸺ Après ? Ce p'tit salopard a la chasse dans le sang, gamine ! Le meilleur tueur de lézards qui m'ait jamais été donné de voir... Enfin, avant qu'il se barre comme une garce de fantôme !

Fantôme.

Dragonnier.

Tueur.

Le meilleur.

Une boule m'obstruait la gorge, une boule qu'aucune déglutition ne semblait parvenir à déloger.

Mais peut-être était-ce mieux ainsi ? Si le bouchon sautait, plus rien ne m'empêchait de hurler... ou de mordre.

Mordre.

Déchiqueter entre mes dents la chair de ces meurtriers, ces menteurs... Un prêté pour un rendu. Un cycle.

Ce n'est pas ton combat.

Une évidence, déposée comme telle, imposée dans ma cervelle.

Un mensonge. Qui que soit celui ou celle à qui appartenait cette voix... un mensonge.

Je me sentais perdre pied, observais impuissante le monde trembler sous mes pieds, les couleurs onduler dans mes rétines, le son vibrer dans mes tympans.

⸺ Hana...

Comme une seconde main, la voix d'Aaron me caressa la joue tandis que la première effleurait la courbe de mon épaule.

Je me défilai à son contact, me hérissai à la douceur de sa peau.

Ne me touche pas, lui ordonnai-je d'une voix blanche.

Monstre.

⸺ Hana...

⸺ Comment oses­­-tu ?

Mon timbre partait en vrille ; mais sur le coup, je m'en fichais pas mal.

Une foule de Chasseurs de Nuit profitait du spectacle : ça aussi, je m'en fichais bien.

La seule chose qui comptait, le seul qui importait... c'était lui.

Lui.

⸺ Tout ça, tous ces mensonges... mais à quoi bon ? Hein ? À QUOI BON ?

Il ouvrit la bouche pour répondre, en vain : déjà je m'esclaffai comme une forcenée, mon rire hystérique entrecoupé de soupirs et de sanglots.

⸺ J'ai quand même pas de chance, si ? Doublement orpheline ; d'abord abandonné sur le pas d'une porte, la porte réduite en cendres à son tour, ma sœur d'écailles tente de me brûler vivante, mon meilleur ami est un parfait inconnu, et le garçon que j'ai embrassé est le plus grand meurtrier de Gaërwhenn ! Quelqu'un d'autre, peut-être ? Non ? Lola, un mot pour moi ? Une dernière petite trahison pour clôturer la journée ?

Où que mon regard se pose, les regards étaient hésitants, honteux, désemparés.

À quoi bon ?

Alors que je fendais la foule en direction de la sortie, deux iris de pierre s'accrochèrent à moi, deux malheureux cailloux dont l'empathie surpassait pourtant celle de tous les badauds réunis.

⸺ Hana... !


*

*Liam*


⸺ Hana !

Double cri du cœur : sitôt ma bouche ouverte, mon cri se mêla à celui d'Aaron.

Il se précipita à la poursuite de Hana, mais je le retins par le biceps.

Ses yeux contre les miens, un or vulnérable contre un acier trahi.

⸺ Un mot à dire pour ta défense ? m'enquis-je en brandissant l'étoffe d'un rouge sali sous son nez.

Je voulais mes intonations froides, menaçantes : elles n'en ressortaient que plus lasses, résignées.

J'en ai assez de toujours me battre contre mes alliés.

Aaron regarda l'écharpe sans la voir et se dégagea, paniqué.

⸺ Plus tard ! me promit-il brièvement avant de foncer vers la sortie par laquelle Hana s'était sauvée.

À l'instar des autres Chasseurs de Nuit présents, je l'observai se volatiliser sans remuer un orteil, avant de me remettre à penser.

L'écharpe n'était plus entre mes doigts.

Krâl, pestai-je en prenant à mon tour congé de la foule restante en quête des deux premiers zouaves.


*

*Hana*


Hana ?

... Hana, est-ce que tu m'entends ?


... Je sais que oui. Que se passe-t-il ?

Tu savais.

Je savais... ?

Tout. Eux. Lui.

Oh... oui.

Pourquoi tu n'as rien dit ?

Je t'ai averti de ne pas t'approcher de lui. À plusieurs reprises.

Tu n'as jamais expliqué pourquoi ! À quoi tu t'attendais ?

Tu aurais dû me faire confiance.

« Te faire confiance » ? Te faire confiance ? La dernière fois que je suis venue te voir, tu as manqué de transformer mon bras en charbon d'Ishaa, et je devrais te faire confiance ? Tu m'ensevelis sous tes mensonges en prétendant que c'est pour mon bien, tu refuses de me donner la moindre once d'explication à tous les secrets que tu me caches, mais j'ai mérité ce qui m'arrive ? Va au Kraôl, Reyja.

⸺ Hana ?

Je me figeai. Emportée par la rage, j'avais hurlé mes derniers mots... et quelqu'un les avait manifestement entendus.

⸺ Hana ? Je sais que tu es là.

Mes doigts se refermèrent sur la crosse de mon poignard.

⸺ Écoute, je... je suis désolé.

La voix d'Aaron se tut un instant, hésitante. Puis repris, avec plus d'aplomb :

⸺ Désolé que tu l'aies appris comme ça, désolé de ne pas te l'avoir dit plus tôt... désolé que tu sois la Fille aux Dragons.

Perchée sur mon promontoire, je scrutais sa démarche gauche, tâtonnant tandis qu'il me cherchait du regard.

Comme une remontée de bile, la rage me brûlait la gorge, brouillait mes réflexions : sa chaleur était telle que je ne pouvais- m'en détourner. S'il s'avançait un peu, je pourrais alors lui sauter dessus, planter mon poignard entre ses omoplates, laisser son sang gicler sur...

⸺ C'est... je n'aime pas raconter ma vie, mon passé. Pas celui-là. Il est trop sombre, trop... dur, intime, pour être déballé au premier venu... mais jusqu'à peu, je n'en ai jamais eu honte. Jusqu'à ce que je te rencontre. Jusqu'à ce que je vous rencontre, Liam et toi... Au départ, vous n'étiez que deux planqués, du genre à se pavaner sans avoir jamais rien traversé. Mais rapidement – plus que ça, même –, j'ai compris que ce n'était peut-être pas tout à fait le cas. Et puis, plus j'apprenais à vous connaître, plus mon passé ressurgissait, plus cette foutue écharpe me narguait... ! (il agita le poing qui enclavait ledit vêtement avec hargne) Plus je voyais dans mon ombre celles de tous les dragons que j'ai...

Une larme se forma sur la bordée de mes cils. Dans ma position, celle-ci ne coulerait pas sur ma joue : elle chuterait jusqu'à embrasser ses congénères qui dormaient à la surface du bassin.


Ploc.


À peine la note retentit-elle qu'Aaron fit volte-face, tout droit dans ma direction.

⸺ Han...

Je lui tombai dessus avant qu'il ne termine de souffler mon prénom.

Surin en main, je l'entraînai dans une danse mortelle ou chaque faux pas l'exposait au tranchant effilé de la justice.

Rapidement, mes assauts fougueux finirent par nous emporter au sol, mais le baroud ne s'en termina pas pour autant : il se poursuivit même avec une fièvre accrue ! Mais s'il était complexe de deviner à qui appartenait quoi dans cet imbroglio de coudes et de genoux, un observateur avisé aurait pu dénoter un certain retrait d'une part, complètement absente dans l'autre.

Punir. Il faut punir.

Ce mantra tournoyait en boucle dans ma tête tandis que je luttai avec mon adversaire, déterminée à venger ceux qu'il avait laissé derrière lui.

En quelques mouvements, Aaron réussit à éjecter le poignard accroché à ma pain – à moins que cela ne soit l'inverse –, l'envoyant valser à quelques pas de là. En réponse, je lui assénai un crochet du droit qu'il n'évita qu'à moitié.

Poings, pieds, dents... toutes les armes étaient bonnes pour le faire souffrir.

⸺ Hana, Hana !

Je le martelai de coups sans discontinuer, ignorant ses appels.

⸺ Espèce... de... croqueur d'œuf ! haletai-je entre deux envois.

⸺ Hana... me supplia-t-il en levant les coudes pour se protéger.

⸺ Tu... m'as... menti... tout du long ! Droit dans les yeux !

Il tenta d'attraper mes poignets.

⸺ Comment... tu as pu... me faire ça ? hurlai-je, essoufflée.

Maintenant, je pleurais aussi.

⸺ Meurtrier ! braillai-je, le visage embourbé de morve et de larmes.

Je levai mon poing une nouvelle fois, il le saisit au vol.

Trois grains de sables plus tard, je me retrouvai plaquée au sol, poignets tirés derrière le crâne et un monstre au-dessus de moi.

⸺ Hana...

Mon mollard l'atteignit droit sur la cornée.

Il n'avait pas le droit de prononcer mon prénom. Pas comme ça. Comme si ça lui importait.

Il me relâcha aussitôt et s'écarta d'un bond, les paumes levées et le timbre doux que l'on utilisait pour apaiser les bêtes.

Mais de nous deux... ce n'était pas moi, la bête.

D'abord il ne fit rien, supposant probablement que je lui sauterais dessus s'il essayait quoi que ce soit.

À raison.

Attente.

Un premier pas dans ma direction, craintif.

Attente.

Un autre.

Voyant que je me raidissais et que ma main cherchait le fantôme de mon poignard, Aaron fit une pause de sa progression et se mit à fredonner quelque mélodie aux accents familiers, une mélopée tranquille qui vint chatouiller la corde de ma nostalgie.

Tout à coup, je me sentais indolente, indifférente aux conflits intérieurs et extérieurs. Désertées, la peine et la rage qui se disputaient ma tutelle ! Ne restait plus que la musique, qui me berçait doucement.

Je n'eus cependant pas le temps de m'émouvoir du fait que cette chanson sifflotée dans une langue étrangère et que j'étais certaine de n'avoir jamais entendue auparavant réveille en moi des ébauches de souvenirs disparates, que déjà la réplique devenue tristement familière d'Aaron m'arrachait à mon cocon :

⸺ Hana...

Je pris alors note de notre soudaine proximité.

Le croqueur d'œuf l'a réduit pendant qu'il chantait.

Je me rebiffai à l'approche de sa main sur mon épaule.

Docile, il replia son poignet.

⸺ Est-ce que tu peux au moins me donner une chance de m'expliquer ?

⸺ Expliquer quoi ? aboyai-je. Tes crimes ? Tes mensonges ?

Il ne répondit pas.

Parce qu'il croit que je vais l'écouter ?

Ah ! Il était là, le problème : j'aurais beau le nier dans tous les sens, je voulais savoir. J'en avais besoin. Je voulais comprendre pourquoi, même mon esprit rationnel me rabâchait sans répit l'inutilité de la démarche.

Rageuse, je me détournai de ses prunelles vulnérables et partis m'installer dans un recoin de la grotte, là où la luminosité du bassin battait en retraite. Là où il ne pourrait pas déceler les humeurs de mon visage.

⸺ Vas-y, le sommai-je, je t'écoute.

Il avala sa salive.


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