Chapitre 71
-C'est ta nouvelle occupation, Jess?
-Je...
-Faire la pute?
En vrai, j'aurais préféré qu'elle me gifle. J'aurais préféré qu'elle se lève de sa chaise et me saute à la gorge. Ça m'aurais fais moins mal, que de la voir exposer toutes mes erreurs. Parce que, oui, j'en fais. J'en ai fais quelques une....beaucoup...mais Angel....Angel n'en ai pas une. Il est la seule personne qui arrive à me faire sourire. Et ça faisait bien longtemps que je n'en étais plus capable.
Il est cette bulle d'oxygène dans ce long couloir sombre qu'est ma vie. Et même si ça peut paraître ridicule, pathétique de compter sur quelqu'un, j'en ai besoin. Et, surtout...ça fait du bien. Je ne l'ai pas volé.
-C'est ta distraction du moment? Ton prof?! Un autre homme assez idiot pour se faire manipuler par...
-Il n'est pas une distraction, maman! Je l'aime.
-Oh...
Je lis une légère amertume dans sa voix. Mais pas assez pour effacer son sourire.
-De mieux en mieux...Il est marié j'imagine.
-Que...non!
-Mais assez vieux pour être ton père!
-Il a neuf ans de plus!
-Neuf de trop!
-Je ne vois pas en quoi ça te dérange. Tu n'as rien à me dire et ma vie ne te regarde pas.
-Pardon?
Elle bondit carrément du fauteuil. Si vite, que je sursaute presque.
-Répète ça!
-Tu n'étais pas là. Tu ne l'as jamais été. Lui il a pris soin de moi.
-En t'attachant et en t'utilisant comme un vulgaire objet sexuel?
Elle explose de rire et mon coeur se brise. Je sens ma poitrine céder en mille morceaux, tel un vase balancé au sol.
-Il m'aime.
C'est tout ce que j'arrive à dire.
-Ce n'est pas de l'amour et tu le sait bien.
Puis elle récupère des feuilles et me les balance au visage. Il me faut quelques secondes pour réaliser que ce sont des photos. Surtout, elles m'égratignent la peau et je me focalise sur cette douleur. Ça m'évite d'entendre ces mots encore plus blessants. Du moins, c'est ce que je me dis...en vain. Ma mère a toujours été si doué pour m'atteindre. Malheureusement pour moi.
-Ce vieux pervers s'est servi de toi. Tu m'en veux parce que tu sais que tu as été stupide et aveugle.
-Arrête...
-Pourquoi? Tu ne veux pas entendre la vérité?
-Maman!
C'est à son tour de s'emballer.
-Mais, je ne devrais pas être surprise. Tu as toujours été ainsi, Jess.
-Comment?
-Faible.
-Oh...
Je dois sacrément faire pitié parce que, même Monsieur le proviseur se sent gêné et tourne la tête. Ce qui n'est évidemment pas le cas de ma génitrice, bien trop occupé à me malmener. Tout pourrait s'arrêter si cet homme prenait enfin ses responsabilités et l'arrêtait mais il préfère se cacher. Au fond, je ne lui en veux pas. Je fuirais aussi, si je le pouvais. Mais, pour l'instant, je me prends une autre gifle. Je me demandais quand elle viendrait...
-J'imagine que c'est,encore, de ma faute.
-Exactement! Il suffit qu'un homme t'accorde un minimum d'attention pour que tu cours vers lui.
-Tu es injuste...
Mes yeux larmoient.
-Vraiment?
-Oui...
-Tais-toi avant que je ne...
Sa main est déjà levé, prête à m'en rajouter une autre.
-Ne dis pas un mot, Jess. Je t'assure que ma patience a atteint sa limite.
-La mienne aussi...
Je le murmure si bas. Je doute qu'elle l'entende.
-Pardon?
-J'ai passé ma vie à te craindre alors que...tu ne le mérite même pas.
Je le dis en pleurant à chaudes larmes. Mes mains tremblent et mon coeur ne bat presque plus. Du moins, je ne le sens presque plus. Mais ça n'a rien d'inquiétant. Parce qu'en relevant le regard et en croisant ses pupilles, je me rappelle...à quel point je l'ai détesté. J'ai détesté vivre avec elle. J'ai détesté la croiser chaque matin et sentir son odeur.
Devoir lui offrir un large sourire, chaque jour et lui dire que je l'aime...je devais attendre de m'enfermer dans la salle de bain pour craquer. Pendant tant d'années...
Pourtant, j'ai trouvé un moyen de lui pardonner, au fond de mon coeur. Je lui ai pardonné toutes ces larmes que j'ai pleuré à cause d'elle. Je lui ai pardonné toutes ces nuits blanches cachée sous mon lit, à essayer de me réconforter, seule. Je lui ai pardonné d'avoir été une mauvaise mère et d'avoir ruiné ma vie. Je lui pardonne encore de se tenir, là, avec son chignon parfait et son costume jaune, à me juger.
Mais il y a une chose que je ne peux pas lui pardonner.
-Comme tu fais, maman?
-Comment je fais quoi?
-Comment tu fais pour être aussi en paix, après tout ce que tu m'as fais?
-Moi? Je ne t'ai rien fais!
-Comment tu peux dire ça?
-J'ai même été une bonne mère.
-Wow...
Je réalise enfin que toute cette discussion n'a pas d'intéret. Elle est encore plus dans le déni que je le pensais. Elle est encore plus pathétique que je le croyais. Pendant longtemps j'ai cru que des excuses de sa part m'apaiseraient. Mais ça n'arrivera pas. Elle en est incapable, c'est évident. Ca ne sert à rien de continuer.
-On est ici pour cette vidéo donc parlons-en...
-Jess!
-...tu n'as pas à t'en faire. Ca ne risque pas de t'impacter plus que ça. Elle a fuité. On me traitera de tous les noms puis ça se calmera.
-Jess!
-Je ne compte pas arrêter de le voir et je m'en fiche des conséquences. Ca te va?
Je n'attends pas sa réponse et tourne les talons. Ce n'est pas comme si l'idiot de proviseur pourrait m'en empêcher. Et j'ai besoin de sortir. J'ai l'impression d'étouffer ici.
-Je t'ai amené ici pour étudier et réussir. Je n'arrive pas à croire que...
-Que quoi? Que tu ai perdu autant d'argent sur moi? Que tu ai cru en moi?
Puis elle saisi violemment mon bras et me force à lui faire face.
-Qu'est-ce que tu veux maman?
-J'ai été une bonne mère! Je veux te l'entendre dire!
-Une bonne mère?
-Oui!
-Une bonne mère ne ridiculise pas sa propre fille. Tu ne m'as pas défendu.
-On ne vas pas reparler de ton présumé viol! Pas ici! Pas devant...
-Le proviseur? Ça te dérange, d'un coup?
Apparemment...Mais, à vrai dire, elle n'a pas si tord.
-Dans tous les cas, je n'ai pas non plus envie d'en parler...
Je préfère me dégager et essuyer mes larmes.
-Pour une fois, on est d'accord.
C'est une première.
-Bien. Je m'en vais, alors...
-On n'en a pas fini,Jess!
-Quoi encore?
-On doit encore régler cette situation.
Elle s'avance, à grand pas. Puis elle prend mon visage, plein de larmes, entre ses mains dégoûtantes.
-Maman va s'occuper de tout.
La bonne blague.
-Non.
Une autre gifle me fait taire.
-Tu as juste eu un moment d'égarement, Jess.
Ça arrive à tout le monde. Maman va régler ça. D'ailleurs...je sais déjà quoi faire.
Je crois que mon stress et ma panique n'ont jamais autant augmenté en si peu de mots. Comment ça elle sait quoi faire? Il n'y a rien de plus inquiétant que de la savoir aux manettes. Ma mère ne sait que détruire et humilier. Et, surtout, elle a toujours une volonté bien cachée. Juste que je ne sais pas encore laquelle. C'est impossible qu'elle soit devenu une mère parfaite, se souciant du bien-être de sa fille, en une semaine. J'en doute.
-Je peux m'en occuper, seule, maman...
-Désolé mais j'en doute fort.
-Je ne veux pas de ton aide.
C'est plus clair?
-Tu penses avoir le choix? Je crois que tu ne réalise pas bien ce qui se passe. Une vidéo de toi, te faisant attacher et sauter par ton prof d'art dans la bibliothèque à fuité. Et elle fait le buzz sur Internet.
Sur Internet ?
-Alors, à moins que tu n'ai des pouvoirs insoupçonnés ou des amis vachement bien placés, elle va y rester un bon moment. La moitié de la planète risque bien de te voir nu, avachie sur cette table.
-Je...je ne savais pas...
-Oui mais, ça, on s'en fiche.
-« On s'en fiche »?
Elle ne peut pas être sérieuse.
-C'est tout ce que ça te fait?
-Oui. Tu l'aimes non? Et...je me doute bien que c'est réciproque. Enfin, espérons...
-Tu en doutes?
-Un peu. Mais, s'il tient à sa réputation, il trouvera une solution pour régler ce « petit » soucis.
-Évidemment...tu comptes sur lui pour régler ça.
-Non. Enfaite, je compte sur sa mère. Sofia...Sophia Saint. Ça dépend si on garde la prononciation française ou italienne. Mais...c'est un joli prénom!
Je me fige. Merde!
-J'ai fais des recherches sur elle. Une femme extraordinaire...ment riche et puissante. Je suis bluffé par son parcours. Tout semble lui réussir. Même si, son mari a l'air particulièrement agaçant...
-Et si on ne parlait pas d'elle?
-Pourquoi ? Elle s'occupe de toi, elle aussi?
Elle relâche enfin mon visage et retourne s'assoir sur sa chaise. Et son large sourire réapparaît. Je n'ai pas ça. Mon corps n'en plus, qui me fait bien comprendre que j'ai raison de m'inquiéter.
-Tu ne pars plus, Jess? elle lance amusée.
Voilà exactement le moment que je voulais éviter.
-Non...je vais rester.
-Oh. Tant mieux. On va peut-être enfin avoir une discussion intéressante.
Le chapitre tant attendu. Je fais au mieux avec mes examens en cours. Mais ne vous inquiétez pas, c'est bientôt terminee(hourra🥲). J'espère que vous avez aimé le chapitre et le prochain devrait être avec le point de vue d'Angel. Voilà❤️
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