Chapitre 50
-J'aurais voulu que tu sois là, Angel. Je le pense. Mais...
-Ce n'était pas le cas.
-J'étais seule. J'ai dû me sortir de cette situation seule. Ma mère n'arrêtais pas de me rabaisser, de me rappeler chaque jour que je ne valais rien. Je la décevais et...qui la blâmerait ?
-Tu as été violée...
-Tu crois que je ne le sais pas? Mais je vais t'apprendre un truc. Les gens s'en fiche de ça! Ils ne restent pas assez longtemps pour entendre toute l'histoire. Dès le moment où la nouvelle s'est abruitée, j'ai eu tous ces regards braqués sur moi. C'était affreux...
-Je suis désolé.
-Pourquoi ? Ce n'était pas de ta faute.
Je baisse la tête mais il me la relève.
-J'aurais dû rentrer plus tôt dans ta vie.
Je souris, malgré moi. Comment il fait pour toujours trouver les mots justes? C'est son super pouvoir. Ce petit truc qui me fait fondre pour lui.
-Merci de m'avoir écoutée, je glisse en l'embrassant.
-Tu avais besoin d'en parler. Je serais toujours là pour t'écouter quand tu en as besoin.
-C'est noté. Allez et si on rejoignais Chacha et ta mère?
Mais quand j'essaye de me lever, il retient mon bras. Je me rassois, confuse.
-Attends!
-Oui?
-Tu n'as pas répondu à ma question.
Merde!
-Laquelle?
Je souris mais il a l'air si faux et vide d'assurance.
-Tu le sais, princesse.
-Non, je...
-Qu'est-ce qui est arrivé à ce bébé?
-Je l'ai avorté...à...à l'hôpital.
-Tu mens!
Les larmes perlent de nouveau alors qu'il se rapproche encore plus près.
-Angel...je t'ai parlé de choses dont je n'ai parlé à personne avant toi. On peut s'arrêter là? S'il te plaît?
J'essaye de sourire mais mes larmes ne trompent personne.
-Ecoute-moi!
-S'il te plaît...
-Ok mais écoute d'abord ce que j'ai à te dire.
Je tend l'oreille.
-Si tu ne veux pas en parler parce que tu es arrivé à ta limite, je n'insisterais pas...
Ouf.
-Mais si tu le fais parce que tu as peur de ma réaction ou que je te juge de quelque manière que ce soit...je ne lâcherais pas l'affaire.
-Pourquoi ?
-Parce que tu n'es pas sensé te sentir fautive ou avoir peur de la réaction de quique ce soit.
-Mais...
Et il explose.
-Ils peuvent tous allé se faire foutre! Ta mère inclut!
Mon cœur se brise.
-Tu as le droit de crier ta rage au monde entier sans que ces connards se plaignent ou remettent en question ce que tu as vécu!
J'aimerais lui sauter dans les bras mais mon corps tremble trop pour ça. Il comprend si bien ma peine. Comment ? Parce qu'il écoute.
-Alors dis-moi, princesse. On est dans quel cas?
Je baisse les yeux.
-Le deuxième c'est ça?
Je relève le regard et hoche la tête. Je sens sa main se poser sur mes cheveux et les caresser de nouveau.
-Ne t'inquiète pas, je ne te jugerais pas. Celle qui devrait me craindre n'est pas dans cette pièce...
Je souris.
-Reprend calmement.
Je prends une grande respiration avant de continuer.
-L'argent que ma mère a reçu n'a finalement pas été nécessaire.
-Pourquoi ?
-J'étais enceinte de quatre mois quand je l'ai appris. Ma mère a cru que je le savais depuis longtemps et que je l'avais caché. Mais...mon ventre était ridiculement petit.
-Je te crois.
-Mais j'ai commencé à m'attacher à ce bébé. J'avais réussi à me convaincre qu'il était ma punition et j'avais accepté d'être puni de la sorte. Et surtout, je ne pouvais plus avorté.
-Alors comment tu l'as perdu?
Je me remets à pleurer avec la même intensité que tout à l'heure. Angel comprends.
-Viens là !
Il m'ouvre ses bras et j'y plonge sans la moindre hésitation. Il m'enlace et me serre fort contre son cœur. Moi, je m'agrippe à lui comme si ma bien dépendais. Ce qui n'est pas tellement faux. J'ai placé tant de confiance en cet homme que ma vie, comme ma santé émotionnelle, dépend de lui. Si lui m'abandonne, il ne restera qu'à me ramasser à la petite cuillère.
Chacha ne suffira pas à me remettre debout. Et pourtant, je prends le risque. De toutes les personnes à qui j'ai fais confiance, il est le seul avec qui j'ai envie de prendre le risque. S'il me déçois, ce n'est pas grave. Au moins j'aurais aimé...J'aurais aimé à m'en rendre folle!
C'est bien ça qu'on appelle « vivre », non? Et puis il est trop tard pour reculer. Maintenant que je suis bien en sécurité entre ses bras, mon cœur a envie de s'ouvrir à lui et de tout lui dire. Son parfum m'a déjà enivré et ses lèvres déjà charmée.
-Malgré la grossesse, j'ai dû allé en cours. Le principal a recommandé des cours à domicile mais ma mère a refusé.
-Tu m'étonne!
-Et puis j'ai atteint le sixième mois. Vu mon état, je ne pouvais pas participer aux cours de sport. Donc j'allais me balader dans les couloirs. Ça me faisait marcher et je ne dérangeais personne.
-Ils t'ont suivi?
-Oui. Plusieurs fois. Ils aimaient me jeté des ordures à la figure. Ils me tiraient aussi les cheveux et m'écrivais « salope » sur la figure. C'était à l'encre indélébile. Ça restait toute la semaine sur ma peau. Je pouvais passé mes soirées à l'essuyer à l'eau chaude.
Je sens son regard sur moi mais je continu à le fuir. Je préfère me concentrer sur la douceur de sa chemise.
-Ils venaient s'assoir avec moi à la cantine, me vider mon plateau sur la tête. Les petits pois dans les cheveux, ça passe encore. Mais la bouteille de miel ou la confiture...c'est affreux!
-Et personne ne disait rien?!
-Non.
-Tu étais entouré de lâches!
-Oui...ils ne m'ont pas non plus aidé quand...mon ex et sa bande me sont tombé dessus. Dans un couloir sombre, alors que je rentrais chez moi.
Les images sont trop vives pour que je ferme les yeux. Donc je les gardent ouverts. Angel est là ! Angel est là ! Je le serre plus fort.
-Ils t'ont frappé?
-Ils m'ont fait avalé une bouteille d'eau de javel.
-Quoi?
Sa voix est si faible que l'entends presque pas.
-Ils m'ont tellement donné de coups de pieds que le bébé n'a pas survécu.
Cette fois il me lâche et me force à le regarder.
-Pardon?!
Mes larmes coulent de plus belles.
-J'ai quand-même du l'accoucher!
Ma voix se casse quand une larme coule sur sa joue.
-J'ai dû accoucher mon bébé mort, je me répète! Et on me l'as mis montré. Il était si petit que...j'avais peur de le prendre.
Un ris nerveux m'échappe.
-Pourtant c'est ridicule! J'avais peur de le lâcher...alors qu'il était mort...
Son regard me fend l'âme.
-Je suis tellement désolé.
-J'avais juste envie de...le serrer contre mon cœur et de pleurer toutes les larmes de mon corps. J'avais enfin trouvé un moyen d'être en paix avec ce qui c'était passé. Mais, même là, le destin a continuer de s'acharner...ma mère aussi!
Je fonds en larmes devant son regard compatissant.
-Qu'est-ce qu'elle t'as encore dis?
-Que c'était de ma faute...
Sa mâchoire se contracte.
-Elle est sérieuse?
-Elle me l'a pris des mains et la rendu à la sage-femme, en disant de le mettre à la poubelle. « Un problème de régler!». Elle l'a dit avec tant de légèreté et si peu d'émotion. Puis elle a encore dis que c'était de ma faute. Tout! Le viol, les coups, le bébé...Mais, et si elle avait raison?
-On verra comment elle réagira quand je lui ferais pareil...
-Quoi donc?
-Lui faire avaler une bouteille d'eau de javel et la rouer de coups!
Ça sonne presque comme une promesse. Mais je n'ai pas besoin de ça. Je ne cherche pas à me vanger de quique ce soit. Je suis aussi fautive que ma mère. J'ai laissé faire parce que je ne pouvais pas faire autrement.
-Ne t'inquiète pas, je tente de le rassurer. Tout s'est bien fini.
-Tu as porté plainte?
-Non.
-Non? Alors quoi?
-Ma mère a trouvé un arrangement avec ses parents.
-Oh. Encore un? Heureusement qu'elle est là, alors...
Il a l'air peu convaincu.
-Lequel?
-Je devais changer de lycée et ne parler de toute cette histoire à personne.
Il s'écarte légèrement.
-Je ne comprends pas. Tu as quitté ton lycée?
-Dans tous les cas, je ne m'y sentais pas si bien...
-Et lui? Quelle a été sa partie du deal?
-Je crois qu'il a payé ma facture d'hôpital...
Angel bondit si vite que j'ai un mouvement de recule. Son regard prend une teinte plus foncée et je vois qu'il se retient d'exploser.
-Ne t'inquiète pas, je répète. Tout est réglé.
Il laisse couler une dernière larme et, la seconde d'après, il enfonce son poing si violemment dans le miroir, qu'il se brise sous l'impact. Et je regarde les morceaux de verre tomber dans l'évier.
-Angel...
Je ne l'ai jamais vu ainsi.
-Comment tu peux dire que tout va bien? Tu m'étonne que tu sois aussi apeuré...ils...ils t'ont brisés !
-Ne pleure pas pour moi, je vais bien...
-Ça ne leur a pas suffit de te briser en morceaux. Ils se sont assurés d'en réduire chacun en fine poussière.
-Angel...
-Non! Arrête de me dire que tu vas bien! On ne peut pas aller bien, après ça...
Je me rapproche de lui et l'enlace par derrière. Mais ça ne suffit pas à le calmer.
-Pourquoi tu pleure, Angel?
-Parce que...parce que personne ne l'as fait! Personne n'a pleuré pour toi, princesse!
Bon dernier chapitre sur le passé de Jess. On va revenir à des choses plus heureuses là ❤️
Bạn đang đọc truyện trên: Truyen247.Pro