Ces mots m'apportent une joie indescriptible. Mais aussi une peur toute aussi grande.

-Et si...et si ça fini mal?

-Prend le risque avec moi.

Il repose ses lèvres sur les miennes et je répond à son baiser. Ça ne calme pas cette tempête d'émotions qui m'envahit, ou les pulsations déchaînées de mon cœur. Et pourtant, pour une fois, j'ai envie de tout risquer. De mettre toutes les cartes sur la table et d'arrêter de jouer. Je veux arrêter de jouer avec ma chance et, surtout...arrêter de jouer avec mon bonheur.

-Je t'aime aussi, Angel.

Je le murmure contre ses lèvres.

Mes peurs ont fait tout ce qu'elles ont pu pour l'éloigner mais rien n'a fonctionné. Rien ne l'effraie. A moins qu'il soit totalement inconscient ! Mais quelqu'en soit la raison, il reste. Alors j'ai deux possibilités. Soit continuer de trouver des excuses ou faire ce dont j'ai envie: rester dans ses bras. Le choix est vite fait.

Je n'ai pas envie de me retrouver comme dans ces films tristes, à réaliser vingt ans plus tard que je suis passée à côté d'une belle histoire d'amour. Juste pour ne pas souffrir. Mais si c'est Angel, il peut bien briser mon cœur en mille morceaux. Je passerais le temps qu'il me restera à en recoller les morceaux. Et le lui redonnerait, pour qu'il le brise de nouveau.

Je me sens bien et en sécurité avec lui. Un sentiment que je n'ai pas connu depuis longtemps. Chaque larme, chaque peine s'envole quand il me sourit. C'est...magique. Et, ça a beau semblé insensé, je veux sauter à pieds joint dans cet océan d'insécurité. Je veux rentrer dans son monde et m'y perdre.

-Je t'aime, je répète en l'enlacant.

Sa main caresse tendrement mon dos et c'est assez pour me faire sourire. Le moindre contact avec cet homme est assez pour me faire sourire, comme une gamine.

-On va s'occuper de tes cheveux. Puis on rejoint les autres.

-Ok.

Je le lâche et le regarde retourner dans la « chambre ». Il revient avec un petit sac très mignon. Blanc avec un noeud rouge.

-Quelqu'un a fait des emplettes à l'aéroport..., je le taquine.

-Comment j'aurais pu? J'ai dû te porter de la maison à l'avion.

Pourquoi je ne m'en rappelle pas?

-Désolé...

-Faut pas! Ma mère a proposé que les gardes te prenne. Mais...je ne voulais pas voir les mains d'un autre sur ton corps.

-Tu es si possessif ?

-Possible...

Il ne sourit pas et son regard intense me donne des frissons. Je l'aime ainsi. J'aime me sentir désiré. Et, encore plus le taquiner.

-Qu'est-ce qui se passera si...je laisse un autre homme me porter? Tu le tue?

Il sourit.

-Ça t'amuse, princesse?

-Oh que oui!

-Hum.

Il lève un doigt et je comprends de suite. Premier avertissement. Mais s'il les donne aussi facilement, la punition risque d'arriver à la vitesse de la lumière.

-Et les avertissements, ils ont une dates de péremption ? Si j'en obtiens deux aujourd'hui et un demain, j'ai quand-même une punition?

-Non, malheureusement...

-Cool.

Je lui offre un sourire malicieux. Enfin une règle que j'aime bien. Donc je peux le taquiner ou contredire ses ordres autant que je veux. Mais il faudra être maligne et étendre les bêtises sur la semaine.

-Attention, princesse. A trop jouer avec le feu, tu risque de te brûler.

Pourquoi ça sent la menace? Angel avance et me prend la main. J'attends la suite de sa menace mais elle ne vient pas. A la place, il me tire jusqu'à un petit tabouret et me fait assoir dessus. Je croise mon reflet dans le miroir et regarde de nouveau la catastrophe capillaire.

Mais Angel n'a pas l'air aussi inquiet. Il est calme...trop calme.

-Ça va faire mal? je panique

Il rit un moment, avant de redevenir sérieux. Puis il se penche vers moi.

-Oui, il lance en fixant mon regard.

-Tu plaisante, n'est-ce pas ?

Il rit de nouveau. Il plaisante! Sinon, j'aurais déjà fuis.

-Ce ne sera pas plus douloureux qu'hier...

Ça me rassure. Et je décide de me laisser faire.

-Tu as déjà démêlé des cheveux crépus?

Vaut mieux vérifier ses connaissances. Je tiens à mes cheveux.

-Hum, pas vraiment...mais ça ne doit pas être si compliqué.

Alerte général! Tu vas finir chauve, miss! Mais, à ma surprise, il est d'une délicatesse impressionnante. Même si ça ne devrait pas vraiment me surprendre. En dehors du lit, ses doigts de fée sont douces et aimantes.

-Tu es d'une patience qui force le respect, je remarque.

Même quand il croise des noeuds, il les démêle doucement avec ses doigts.

-Merci mais il en faut bien avec toi!

-Qu'est-ce que tu insinu?

-Moi? Rien du tout...

Nouveau fous-rire. Cet homme n'arrêtera donc jamais de me taquiner? Non. Il est bien trop heureux ce matin, pour ça. Pourtant, moi, j'ai moins le sourire. Beaucoup de choses me trotte dans la tête. J'essaye de me focaliser sur lui, sur la sensation de ses doigts dansant dans mes cheveux mais...je pense à autre chose. Et, comme d'habitude, il le remarque. Il s'arrête un moment et me fixe, dans le miroir.

-Ça va?

Je ne répond pas tout de suite. Et il n'insiste pas. J'aime qu'il respecte mon choix de garder certaines choses pour moi, même si je sais qu'il aimerais que je me confie à lui. Il m'aime et veut partager ma peine avec moi. Il veut être cette épaule sur laquelle je peux m'appuyer. Et je veux qu'il le soit. Mais c'est si dur de me confier.

Même si j'ai confiance en lui. Je sais qu'il n'utilisera jamais mes peines pour me blesser. Mais il y a toujours ce « et si » qui hante mes pensées. Je n'en peux plus de l'écouter. Alors pourquoi c'est si dur de me laisser allé? Pourquoi j'ai l'impression que mes lèvres sont cousues? Parce que je réfléchis bien trop. Certaines fois, il faut juste se lancer...

-Angel...

-Oui?

-Je veux en parler.

Il lève la tête, surpris. Mais, quand il voit les larmes perler, elle laisse place à de l'inquiétude.

-De quoi tu veux parler?

-Lui...je veux parler de lui.

-Ok.

Et pour la première fois, je sens du doute dans le ton de sa voix. Il doit se demander s'il est prêt à entendre cette histoire. Mais j'en ai marre de la voir tourner dans mon esprit. Donc je baisse la tête et regarde mes pieds. Je ne veux pas croiser ses pupilles, quand je débuterais. Si je ne le fais pas maintenant, je n'en aurais peut-être jamais la force.
Je sais que ça va être douloureux. Voilà pourquoi je prends une grande inspiration...

-On allait au même lycée. Il était plus âgé que moi, de deux ans mais arrivait à me comprendre. Et puis, à l'époque, je n'avais pas vraiment d'amis. Tu sais ce que c'est...Personne ne veut traîner avec la fille un peu étrange, qui a de bonnes notes et écoute de la Kpop.

Je ris nerveusement. Pas lui.

-C'était bien, au début. On aimait sortir en douce et aller au cinéma. Parce qu'à l'époque je n'avais que seize ans et ma mère m'empêchait de voir des garçons. Elle était si stricte qu'elle m'enfermait à clef dans ma chambre. Mais je sautait par la fenêtre. Ça m'a valut un beau paquet d'ecchymoses sur le corps. Le genre que même tes fouets ne pourraient pas reproduire.

Toujours pas la moindre réaction de sa part.  Je commence à m'inquiéter mais pas assez pour relever la tête. Donc je continu...

-Un jour, il m'a vu parler à un inconnu. C'était juste un touriste un peu perdu. Mais ça l'a énervé...

-Qu'est-ce qu'il a fait?

Enfin une réaction.

-Il m'a envoyé une vidéo, de lui se tapant mon harceleuse de l'époque. Malheureusement , je ne connaissais pas encore Chacha. Sinon il m'aurait conseillé de le larguer. Et pourtant, j'ai trouvé la force de le faire! Je lui ai dis que c'était fini et qu'il pouvait allé se faire voir! Puis...les choses ont prises des proportions...et...je ne peux pas!

Je prends mon visage dans mes mains.

-Quelle idée j'ai eu? Je n'aurais jamais dû en parler!

Je ne peux pas gérer ces sentiments qui me poignardent le coeur. Je ne peux pas sentir de nouveau cette peine.  Je n'en ai pas la force.

-Ça va aller, princesse. Prends un moment.

Sa voix a beau me rassurer, elle n'est pas suffisante pour calmer mes larmes. Même quand je les essuie, d'un revers de main, elles continuent de couler avec vigueur.

-Dans tous les cas, cette histoire est ridicule! je lance en essayant de me lever.

Mais ses mains fermes me forcent à me rassoir.

-Si ça l'était, ça ne te mettrait pas dans cet état!

Il a raison. Je le sais...

-Tu l'as quitté. Qu'est-ce qu'il a fait ensuite?

Je ne peux pas faire ça!

-Jess!

-Il...il est resté avec elle.

-Ensuite.

-Ils ont formé un petit groupe d'amis qui aimait bien me...taquiner.

-Te taquiner? Comment?

Je pose mon regard sur mes mains. Elles tremblent.

-Princesse.

Mon corps ne veut pas s'en rappeler et me le fait clairement comprendre. Je veux tout oublier mais certaines peines ne s'effacent pas. Elles vous torturent à l'infini. Vous tentez de les étouffer dans votre cœur, mais elle trouvent un moyen de s'y propager. Et vous tue de l'intérieur. Vous laissant vide. Au point de ne plus avoir la force de pleurer. Et, une fois que c'est le cas, vous êtes piégé. Je suis piégé et cette peine me tue lentement...

Ces deux chapitres ne vont pas être facile à lire mais il faut bien passer par là pour comprendre les peurs de notre Jess. J'espère que vous avez aimé ce chapitre❤️