Chapitre 6: Kyo
-On peut avoir une déclaration ?
A peine sept heures et les médias sont déjà à l'affût. Ils ne dorment donc jamais? Non, ils préfèrent m'aveugler à coup de flashs intenses. Et pourtant, je suis paré, avec mes grosses lunettes noires. Mais, ce n'est pas suffisant. La lumière traverse les verres et irritent mes pupilles, comme une flèche perçant un ballon d'eau. Autant dire que ça ne sert à rien.
Ces journalistes s'en fichent bien que je lutte contre le sommeil.Ils pensent faire leur boulot. Mais tout ce qu'ils font est de jouer avec mes nerfs. Qui ne tiennent déjà qu'à un fil. Un stalker soûlant m'a déjà vachement énervé. Le cadeau de Deimos d'hier été un cadeau empoisonné. Je ne pouvais pas laissé un chaton seul dans mon appartement, donc j'ai dû adresser la parole à l'unique personne que je déteste dans cet immeuble: mon aimable voisine.
C'est sarcastique,évidemment. Je la déteste. Elle n'est bonne qu'à épié l'immeuble et guetter le moindre ragot à ressortir, pendant les fêtes entre voisins. Une fois, j'ai dû appeler Jay pour qu'il prétexte l'arrêter et qu'elle me lâche un peu. Évidemment, il a ramené Ana et son immense boîte de donuts fourrés. Mais ils ont bien joué le jeu et la vieille a promis de me foutre la paix! C'est le plus important.
Même si Ana a passé plus de temps à manger qu'à suivre mon scénario tordu. Cinq mois de grossesse, ça creuse l'estomac, après tout! Et comme son tempérament de latina ne suffisait pas à la rendre assez folle, les hormones en rajoutent une couche. Mais, heureusement, elle a gardé son sens de l'humour légendaire. « À force de manger, mon ventre pourrait presque rattraper celui de Jay » elle l'avait taquiné.
J'aurais bien aimé qu'ils soient là pour me donner un coup de main. Ils me manquent. Mais ils ne rentrent de mission que ce soir. Un réseau de poker illégal à démanteler. Comme si ça servait à quelque chose! Aussitôt, il sera fermé, aussitôt il se formera un autre. Juste que les prix de pari augmenteront. Comme ça a été le cas avec les paris illégaux de course de coqs, le mois dernier. On se demande où ils vont chercher de telles idées...
Donc c'est à moi seule de gérer les journalistes, aujourd'hui. Je devrais sûrement donner une conférence de presse ou un truc dans le style mais ma patience est bien trop limitée, sans mon café matinale. Donc, à la place, je saisi du bout des doigts , l'un des micro.
-Et si vous nous laissiez faire notre boulot? je lance avec assurance.
Puis je pousse les portes de l'hôpital, sans me retourner.
L'appel de Jay m'a presque fait bondir de mon canapé, ce matin et j'ai du me ramener ici, dès les premiers rayons de soleil. J'ai faim, je suis épuisé et j'ai froid. Cette légèreté brise d'après pluie n'est pas très agréable. À moins que ce soit des frissons dû au bâtiment. J'ai beau ne pas avoir de problème avec les hôpitaux, l'ambiance qui y règne me gêne. Et,surtout, elle me rappelle beaux de mauvais souvenirs. Ça me rappelle ces longues heures où je suis restée, en boule, dans ce couloir, à attendre qu'on me ramène mes parents. Pour qu'au final, on viennent m'apprendre leur mort.
Je le savais pourtant, au fond de moi. J'avais vu tout ce sang couler sur mes mains quand je les secouais dans tous les sens. J'ai sentis leur peau froide sous mes ongles. J'ai vu leurs corps sans vie s'agiter comme des poupées de chiffons. Et, surtout, j'ai vu cette ombre dans la chambre leur tirer dessus. Depuis, cette culpabilité ne m'a pas quitté. J'aurais dû être capable de faire quelque chose. J'aurais dû être moins faible. J'avais quatorze ans, quand-même!
J'aurais dû me lever et faire barrage avec mon corps. Pourtant, je me suis figé, comme si j'étais piégée dans un mauvais rêve. Je n'arrivais plus à bouger, à parler...Je ne pouvais que la fixer, cette grande ombre. Elle a détruit ma vie et profite sûrement tranquillement de la sienne, sans y penser. Après tout, mes parents ne sont qu'un nombre sur sa grande liste de noms.
Je fais ce métier depuis assez longtemps pour savoir que les criminels ne se soucient pas des vies qu'ils détruisent. Ça leur passe au dessus de la tête. Les gamins qu'ils laissent orphelins, comme moi, ne leur peinent pas le coeur. Je dois avouer que j'ai aussi arrêter de verser une petite larme. J'en ai vu tellement!
Et pourtant, en voyant ses deux petits assis dans ce couloir sombre, j'ai un léger pincement au cœur. Ils ne doivent pas avoir plus de sept ans. C'est si triste qu'ils aient été témoin de ça. Ça va laisser une marque...
J'ai un planning chargé. Je dois mener cette enquête, après tout. D'ailleurs, dès qu'ils me voient, deux officiers accourent vers moi. Je vois bien qu'eux aussi n'ont pas beaucoup dormi.
-Madame Minato, le chef vous attend dans...
-J'arrive, je le coupe. Laissez moi deux minutes et je vous rejoins.
-Bien, Madame.
Je m'arrête un moment et m'accroupi devant eux. Ils ont l'air apeuré, les jours remplis de larmes. D'aille, ils sursautent et reculent dès que je tant le bras. Mais je peux comprendre. Ils sont perdus et ne savent pas vraiment à qui faire confiance.
-Salut.
Les deux me sourient tristement.
-On a contacté votre tante, elle ne devrait pas tarder.
Aucune réaction. WoW, la tâche s'annonce plus ardu que prévu. Je réessaye.
-Ça fait longtemps que vous êtes là, on peut vous trouver quelque chose à manger.
Toujours rien.
-Attendez...
Je fouille mon manteau, à la recherche des deux sucettes que j'ai pris le temps d'acheter. Même si ça n'a pas été facile d'en trouver en venant ici. Tous les magasins autour ont étés fermés. Mais quand je retire ma main, le plus âgé des deux la frappe et les sucettes tombent violemment au sol. Je recule légèrement. Lui aussi. Mais une main agrippe soudainement son col et le force à approcher. Je me tourne et croise le regard énervé d'Alex.
-Pour qui tu te prends, sal gosse?
Je me redresse et pose ma main sur la sienne.
-Arrête.
-Quoi?
-C'est qu'un enfant. Il a peur et tu n'arrange pas vraiment la situation.
-Tu rigole j'espère!
Mais il le lâche enfin.
-On essaye de résoudre le meurtre de son père et de soigner sa mère. Alors il peut au moins...
Les pleurs des petits garçons le coupe dans son élan.
-Merci pour la délicatesse! je lance agacé. Et d'ailleurs, ce sont les médecins qui essaye de la soigner. Toi, à part les traumatiser, tu ne fais pas grand chose! D'ailleurs, tu étais où hier?
J'ai l'impression de plus voir Deimos que lui, des fois.
-Moi...euh je...
Les habituels bafouillements. Mais, à la limite, je m'en fiche. Je me rapproche assez de lui, sans lâcher ses pupilles brunes des yeux.
-Écoute Alex, tu pourrais te taper la terre entière et je m'en foutrais totalement. Mais si tu me laisses encore gérer une situation aussi tendue que celle d'hier, toute seule, je...
-Tu quoi? Je suis ton supérieur et ton fiancé, tu t'en rappelles?
-Oui, de justesse. C'est ça le problème!
-Oh...parce que je ne viens pas te faire l'amour le soir? J'ai du boulot, tu le sais.
-Me faire l'amour?
Je manque d'exploser de rire.
-Tu parles de tes cinq secondes de planche sur mon corps? Non, je n'en ai pas besoin. Mais daigne au moins te pointer quand un tueur en série braque une putain d'arme sur moi.
Il lève les yeux aux ciel. Je déteste quand il fait ça. C'est impossible pour lui d'être sérieux plus d'une minute.
-Tu es sensé être mon coéquipier, tâche d'agir comme tel ou barre-toi.
-De ton équipe ou de ta vie?
-Des deux! je répond, sans la moindre hésitation.
Il semble enfin comprendre que je suis vraiment énervé et tente de me calmer. Il est long à la détente, comme sa queue!
-Je suis désolé, d'accord? Je ne pensais pas que...
-A la limite j'aurais préféré que tu sois caché derrière un buisson. Le courage n'a jamais été une verrue chez toi. Mais me laisser seule?
-Tu...tu étais bien accompagné et puis, au pire, tu aurais pu appelé Deimos à la rescousse.
Il est sérieux?
-Deimos?!
-Quoi? Il a une arme, il sait tiré.
-Tu as confiance en lui, Alex?
-Oui.
-Bien, je l'appellerais la prochaine fois. Je suis sur qu'il sait mieux l'utiliser que toi.
-Quoi? Son arme?
-Sa queue!
Puis je me rapproche des deux petits et leurs tends mes mains. Ils se relèvent et les prennent, volontiers. Alex saisi mon bras mais je me dégage.
-Venez les garçons, on va vous trouver quoi manger. Ici, il n'y a que des incapables, je lance en sa direction.
Ça change beaucoup pour moi d'avoir une héroïne badass mais ce n'est pas pour me déplaire. J'adore Kyo☺️❤️
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