Je n'ai jamais été douée pour être sage. C'est un fait! Surtout quand mes sentiments prennent le dessus. Comme maintenant. J'enrage et rien ne semble me calmer.

-Pour dire vrai, Monsieur, j'ai quelque chose à régler.

-Tu peux m'en dire plus?

-Un vieil ami à aller voir.

-Oh.

Je n'ai jamais mis tous mes espoirs en Alex. Je n'ai toujours compté que sur moi-même pour résoudre une enquête et je ne vais pas changer de technique. Pourquoi changer une méthode qui marche? Deimos n'a rien de spécial. Il est comme tous les autres tueurs en série que j'ai connu. Je vais finir par l'attraper, quand il s'y attendra le moins et fera une bêtise.

C'est pour ça que je l'ai à l'oeil et que je continu à consulter avec lui. Au début, j'en avais vraiment besoin. Je pouvais passer des semaines sans fermer l'œil. Je me sentais comme emprisonnée dans mon corps et me réveillais en sueur. Ou pire, quand je me réveillais sans le moindre souvenir de la veille. Je ne pouvais tout simplement pas expliquer ce qui m'arrivais. J'avais l'impression de perdre l'esprit!

J'avais beau le détester et le haïr, Deimos a été le seul à avoir pu m'aider et mis un mot sur ce mal dont je souffrais. Les "crises insomniaques" comme il aime les appeler.

Les séances me servaient d'excuses pour l'observer. C'était le seul moment où il voulait bien baisser sa garde. Elles m'ont même permis d'être assez proche de lui...et de coller un traceur sur sa voiture. Pourquoi il serait le seul à garder un œil sur moi?

-Si tu dois aller quelque part, je peux te couvrir.

Un vrai ange ce Mr.Vens...

-Merci. Et...j'aurais besoin d'un moyen de transport.

-Une voiture?

-Ça dépend...

Juste le temps de sortir mon téléphone et d'activer le traceur.

-La belle Mercedes noire, en bas...elle est à vous?

Il sourit.

Voilà comment je me suis retrouvée dans le pétrin: en suivant mon instinct.

Il y a bien quelque chose d'excitant a se faufiler dans l'entre d'un tueur. Au début, on pense juste jeter un regard mais la curiosité prend vite le dessus. On veut toucher ses affaires...les fouiller...Puis, en un clin d'oeil, on s'imagine dans sa tête.

Qu'est-ce qui le passionne? Quelle musique il aime écouter? Qu'est-ce qu'il aime manger? Enfin, si Deimos en trouve le temps....Je pensais le trouver dans son appartement, à se réjouir de ma chute mais non. Il semble occupé à autre chose. Il s'est sûrement trouvé une nouvelle victime qu'il s'amuse à torturer. Mais c'est parfait...j'aurais plus de temps pour fouiller ses affaires.

Son petit studio est très minimaliste. Presque vide. Il n'a presque aucun meuble, si ce n'est qu'un lit, un canapé et un bureau. Il n'a même pas de cuisinière ou de frigo. Comment il se nourrit? Décidément cet homme est bien étrange...

Il y a aussi un large rideau rouge couvrant un mur entier. Il m'attire...Tu vas le regretter. Mais je veux prendre le risque. Et,encore une fois, mon instinct avait raison.

-Bordel...

Des centaines photos de moi placardé. Cet homme est obsédé ! Certaines ont étés prises dans des lieux où je n'ai pas mis les pieds depuis si longtemps...des mois! Maintenant je sais ce qu'il fait de ses journées...mais pourquoi ? Il a perdu l'esprit?

Je n'ai jamais compris cette obsession qu'il avait avec moi. Mais heureusement je n'en ai pas besoin pour le mettre derrière les barreaux. Ce sera chose faite lorsque ce mur sera une pièce à conviction.

En l'observant d'un peu plus près, je remarque également un détail qui me glace le sang. "Suki", ce nom est écrit plusieurs fois avec ce que je soupçonne être du sang. Et lorsque je l'effleure des doigts, et qu'ils prennent une teinte rougeâtre, je me demande à qui il peut bien appartenir.Sûrement au corps que je cherche depuis deux jours.

Si seulement je pouvais en prélever un échantillon. Je sais que ce sera dur d'expliquer sa provenance, surtout vu comment je me le serais procuré mais je veux prendre le risque. Juste quelques gouttes... avant qu'il ne revient. Une si belle occasion ne risque pas de se représenter.

Mais malheureusement pour moi, le destin s'y oppose et j'entends des pas. Ce son familier de bottes en cuir claquant contre le parquet. Merde, il est là!

Je ne pensais pas qu'il entrerait si tôt. Ce maudit traceur a dû planter. Ou pire, se détacher de sa voiture. Je pensais encore avoir un peu de temps. Au lieu de ça, je me retrouve dans le pétrin et dans la pire cachette possible : sous son lit.

Il lui suffirait de se pencher pour me voir. Même si, pour l'instant autre chose occupe son attention. Pas ses vêtements trempés, mais un corps qu'il traine par le col. Il le jette au sol et je le reconnais: Monsieur Min. Qu'est-ce que Deimos fabrique encore?

-Wow. Je ne pensais pas que tu survivrais!

Il ne peut pas lui répondre, encore trop sonné. C'est à peine si ses yeux arrivent à rester ouverts. Mais, surtout, il est à bout de souffle. Il a du mal à respirer. Comment je le sais? Ses joues ont pris une nuance de rouge cramoisie. Et aussi il est étrangement calme.

Peut-être parce que Deimos n'a pas encore coupé le tissu qui lui comprime la gorge. Pourquoi ? Il n'en avais sûrement pas envie...

-C'est ton jour de chance, Min. Je n'ai rien de prévu ce soir. Je suis tout à toi...

Voir son visage s'écraser contre le parquet de mon immeuble doit lui être si satisfaisant pour lui. Il doit y prends goût. Il doit presque en oublier le froid et la pluie qui se sont abattu sur sa belle voiture. Tout ça pour un salaud qui ne le mérite pas. Heureusement, la joie qu'il ressens en ce moment même en vaut largement la peine! Elle fait palpiter son cœur et trembler ses doigts. L'excitation est telle que...il a du mal à fermer la porte de son appartement.

Pourtant, dès qu'il la referme, tout disparaît. Cette joie qu'il ressentais...ses scènes ensanglantées sur lesquelles son esprit divaguait...tout semble s'envoler.

Il doit le sentir que son appartement a quelque chose de différent. Et il n'aime pas ça. Quelqu'un l'a touché. On a marché sur son sol avec de fins talons noires... Je confirme qu'ils n'étaient pas très confortables. J'ai bien faillit tomber à deux reprises, sûrement épuisée de les avoir porter toute la soirée. Pas étonnant! Mais il continu de faire comme si de rien n'était.

Il ne s'énerve pas. Puis il sort son téléphone de sa poche.

-C'est bien ce que je pensais...Elle dîne encore avec sa belle famille.

Cela confirme mes doutes: lui aussi me suis. Il a dû poser un traceur sur ma voiture. Heureusement, j'ai pensé à en prendre une autre. Un vrai coup de bol. Elle ne risque pas de bouger jusqu'à mon retour. Enfin, si je reviens...

-Pauvre petite Kyo...Rester assise des heures et faussement rire aux blagues de cette vieille mégère de Madame Vens doit être si épuisant...

Il me plaint? C'est nouveau ça...

-...puis elle a sûrement dû l'écouter blablater pendant des heures sur sa collection de porcelaine qui lui tient tant à cœur... acheté en puiser dans les retraites de ses fidèles employés...

Il y a du vrai.

-...cette femme pourrira en enfer, avant même que je n'y mette les pieds. Je ne l'ai croisé qu'une fois et j'en garde un souvenir clair. Elle est exécrable...comme son fils.

Il sourit. Un petit sourire que j'écraserais bien sous mon talon noir. Pour entendre de petits cris aigus s'échapper de ses cordes vocales. Il est si énervant...

-Pourtant, j'ai cru avoir senti son parfum, en entrant.

Il se tourne si brusquement. Mon coeur ratte un battement en voyant le couteau qu'il teint.

-Je dois surement réver...

Un coup sec de lame près de la gorge de Mr.Min. Je dois retenir un cris. Il m'a prise par surprise. J'ai cru qu'il allait la lui trancher pour de bon. Mais non. Il est juste imprévisible, comme d'habitude. Heureusement, je ne pense pas qu'il m'ai entendu. Il est trop occupé à fixer sa proie et à voir la peur s'emparer, peu à peu, de son visage, jusqu'à complétement la consumer. 

Oh, qu'est-ce que Deimos aime ça...terrifier. Voilà pourquoi il déteste croiser mon regard. Dans le mien, il ne voit que du mépris et du dédain.

-Prêt à s'amuser un peu, Monsieur Min?

Je devrais intervenir...Oui, mais je ne peut pas. Je ne serais pas très utile s'il me découvre et me poignarde aussi. Non, pour l'intant, je vais rester calme et attendre son prochain mouvement. C'est ce qu'il y a de plus sage à faire.

-Personne ne va nous déranger.

-Ayez pitié...

Le pauvre est terrifié. J'ai de la peine pour lui. Je sais ce que ça fait d'être à la merci de Deimos. On se sent si...démuni et seul.

Comment Kyo fait pour être aussi dévouée? Moi j'aurais fuis depuis longtemps😂😂😂