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IV | Monsieur Ackermann

Chapitre 4 : Monsieur Ackermann

   Leslie sortit une feuille et un stylo puis rangea sa trousse dans son sac. Une fois que tout le monde eut sorti une feuille et que le prof eut enlevé son manteau, il tira une table cassée qui traînait dans un coin et vint la mettre devant le tableau. Il alla ensuite chercher la corbeille à papier fraîchement vidée par la femme de ménage l'heure précédente et la posa sur la table. Puis il prit un feutre et commença à écrire sur le tableau blanc : « Monsieur Ackermann » d'une écriture en pâte de mouches. Toute la classe le regarda faire, intriguée.

   — Il est fou ? C'est quoi son délire avec la poubelle ? chuchota Leslie.

   Anie haussa les épaules.

   — C'est peut-être une technique d'enseignement argentine ? plaisanta-t-elle.

   — Bien. Je suis Monsieur Ackermann. C'est ma première année d'enseignement en France, la merveilleuse éducation nationale ne m'a informé de mon poste qu'hier, c'est pourquoi vous avez eu ce remplaçant jusqu'à aujourd'hui. Je suis donc aussi votre professeur principal. J'espère que tout se passera pour le mieux, dans le respect. Bon, vous avez tous une feuille ? Écrivez votre nom sur cette feuille. Oh pas besoin de l'écrire en tout petit dans un coin, vous pouvez l'écrire en plein milieu avec votre écriture la moins soignée si ça vous fait plaisir.

   Leslie écrivit donc son nom en lettres bâtons en plein milieu de la feuille. Après quelques chuchotements et grattements de stylos, le prof continua :

   — Quelqu'un aurait-il un feutre indélébile ? Ou un feutre qui écrive sur du plastique ? demanda-t-il.

   Leslie échangea un regard avec Anie, elle ne voyait vraiment pas où Monsieur Ackermann voulait en venir.

   — Moi j'en ai un, dit Leslie en le prenant dans sa trousse.

   — Très bien, venez au tableau s'il-vous-plaît, demanda-t-il.

   Un peu inquiète d'être au centre de « l'expérience » de ce professeur bizarre, elle vint à côté de lui avec son feutre indélébile, en se sentant empotée, inutile et débile.

   Ses yeux étaient quand même incroyablement noirs... elle aimait bien son regard... Elle se mit trois gifles mentalement.

   — Écrivez le mot « but » sur la corbeille.

   — Hein ? s'exclama-t-elle, totalement perdue.

   — Faites ce que je vous dis, vous comprendrez après.

   — Heu... d'accord... marmonna-t-elle en écrivant donc « But » sur la poubelle.

   — Merci, vous pouvez retourner à votre place, lui dit-il.

   — Déjà ? demanda-t-elle, étonnée d'avoir autant servi à rien.

   Il hocha la tête. Complètement perdue, elle retourna à sa place.

   — Maintenant, écrivez sur votre feuille ce que vous voulez le plus pour l'avenir, votre ambition. Vous avez deux minutes chrono. Personne ne lira cette feuille, pas même moi, alors vous pouvez écrire des choses personnelles.

   Il sortit son téléphone, regarda l'heure puis le posa sur le bureau. Il alla ensuite s'installer sur la chaise du bureau dans une position beaucoup trop virile qui fit glousser les filles de devant. Leslie se retint de le regarder et commença à réfléchir. Qu'est-ce qu'elle voulait faire plus tard ? Est-ce qu'elle était obligée d'écrire un métier précis ? Elle leva la main pour demander.

   — Oui, Miss ? l'interrogea-t-il en nettoyant ses lunettes.

   Il était encore plus beau sans lunettes...

   — Leslie, Monsieur. Est-ce qu'on doit écrire un métier précis ?

   — Ce n'est pas forcément un métier. Ça peut être aussi quelque chose que vous rêvez de réaliser. Mais oui, je vous demande d'être le plus précis possible. Je veux votre rêve le plus fou, le plus cher, même celui que vous pensez irréalisable.

   Leslie hocha la tête et se remit à réfléchir. Et merde elle n'avait absolument aucune idée. Elle aimait aider les gens, ou plutôt leur être utile comme les aider à s'en sortir là où ils coulaient, comme son club anti-stress. Elle aimait la musique et faire ce qui lui plaisait. On ne pouvait pas trouver un métier qui nous corresponde en deux minutes ! Elle voulait juste avoir une vie digne d'être vécue, pour rattraper son enfance dont même une benne à ordures ne voudrait pas. Elle écrivit donc « j'aimerais avoir un avenir qui me prouve que ma vie est digne d'être vécue ».

   — Les deux minutes sont passées. Ceux qui n'ont pas trouvé vous pouvez continuer à chercher. Les autres, faites une boule avec cette feuille.

   Leslie le comprenait de moins en moins. Personne ne bougea.

   — Allez, froissez votre feuille, faites-en une boule bien serrée, les pressa-t-il.

   Une fois que deux ou trois l'eurent écouté, Leslie fit elle aussi une boule avec sa feuille.

   — Bien, maintenant, lancez votre feuille dans la corbeille.

   — Hein mais c'est pas juste, on est tout au fond ! protesta Max.

   — C'est la vie, dit Monsieur Ackermann en haussant les épaules.

   Max et Alex le regardèrent d'un œil noir.

   — Allez, lancez votre boule de papier ! répéta-t-il en enfonçant ses mains dans les poches de son jean noir.

   Leslie se leva alors et lança sa feuille en ayant peu d'espoir qu'elle tombe dans la corbeille. Toute la classe suivit son papier des yeux et... elle tomba dans la corbeille. Elle était clouée sur place de l'avoir mis. Le prof lui adressa un grand sourire.

   — Bravo, Leslie, dit-il en abandonnant son air sérieux.

   Max et Alex sifflèrent, Anie applaudit discrètement et Leslie sentit ses joues chauffer.

   — J'ai... j'ai pas fait exprès... bégaya-t-elle.

   — C'est le talent, lui dit Anie.

   Leslie se rassit et les autres lancèrent leur papier à leur tour. Elle fut la seule du dernier rang à avoir réussi à mettre un panier. Elvis ouvrit la porte de la salle à ce moment-là. Il regarda les boulettes voler, le prof tranquillement assis à son bureau et la poubelle posée sur la table cassée.

   — C'est quoi ce binz ? demanda-t-il.

   — Ah... Monsieur O'Mara, allez vous asseoir, dit Monsieur Ackermann.

   Il se précipita à la place libre devant Leslie et l'interrogea du regard.

   — Je crois qu'il veut nous faire faire une expérience sur la vie, dit-elle.

   Puis elle lui raconta tout ce que le prof leur avait fait faire jusqu'à présent. Quand ceux qui n'avaient rien trouvé eurent aussi lancé leur feuille (la plupart d'entre eux n'avait rien mis en espérant que le prof ne vérifierait vraiment pas), Ackermann se leva de nouveau et regarda les boulettes dans la corbeille, celles qui étaient tombées à côté et celles qui étaient parties à deux kilomètres.

   — Attendez ! Moi aussi je veux le faire ! s'exclama Elvis qui avait déjà commencé à rattraper le cours.

   Le prof lui sourit pour lui signifier qu'il l'attendait et Elvis se leva pour lancer sa feuille...

   Leslie ne parvint pas à la suivre des yeux mais il y eut un coup de vent qui entra par les fenêtres grandes ouvertes et la boule de papier partit dans la tête du prof. Tout le monde éclata de rire, même le prof souffla un peu du nez, mi-amusé, mi-exaspéré.

   — Et bien heureusement je n'avais pas encore remis les lunettes, commenta Monsieur Ackermann.

   — Je suis désolé ! s'excusa Elvis, qui devait redouter de se mettre encore un prof sur le dos cette année.

   — Ne vous inquiétez pas Monsieur O'Mara, je suis encore vivant.

   Les filles de devant pouffèrent et Elvis se rassit, déçu.

   — Bien. Ceux qui sont devant avaient plus de chance de mettre la feuille dans la corbeille tandis que Leslie, qui était derrière, a réussi grâce à un coup de chance. Mais au départ quand vous vous êtes assis aux places où vous êtes, vous n'aviez aucune idée de ce que j'avais derrière la tête. Dans la vraie vie, vous n'avez pas non plus choisi de naître dans la famille et le milieu où vous êtes nés.

   — Ça c'est sûr, marmonna Leslie pour elle-même.

   — Ceux qui étaient devant avaient plus de chance que tous les autres de viser juste, ils n'avaient presque aucun effort à faire, même pas besoin de se lever de leurs chaises. Pourtant, Mademoiselle... hum...

   — Euphrasie Wautier, dit la fille, toute rouge.

   — Voilà, Euphrasie était devant et n'a pas réussi à le mettre. Ce n'est pas parce que vous pensez que vous n'avez pas d'effort à faire dans la vie, que vous n'échouerez pas. Et, inversement, ce n'est pas parce que vous pensez que tout est perdu que vous ne pouvez pas réussir. Vous me direz, avec de l'entraînement, ceux du fond pourraient réussir à mettre un panier. C'est vrai aussi dans la vie. Ceux qui sont au dernier rang, qui auront mis toute leur âme dans leur ambition, auront mérité bien plus que les autres leur place. Ils auront aussi deux fois plus envie de s'entraîner et d'y arriver que ceux qui n'ont pas réussi mais qui sont au milieu. Quand vous êtes au milieu vous vous sentez normal, vous pensez rester au milieu toute votre vie. Ni tout en bas, ni tout en haut, vous êtes ceux qui travaillent pour les rêves des autres, parce que vous n'en aviez pas ou parce que vous avez cru les vôtres impossibles à réaliser ou encore parce qu'on vous en a dissuadé. Il y a des milliards de choses à dire sur l'expérience que je viens de vous faire faire, je n'aurais pas le temps de tout synthétiser, l'heure est presque finie à cause de ce Monsieur Hernandez. Chacun pensera à des choses que je n'ai pas dites. Le but était uniquement de vous lancer sur une voix de réflexion. Si vous voulez, vous pourrez réfléchir à tout ça pour mercredi et me faire un compte-rendu écrit de ce que vous en avez pensé et conclu. Je ne vous oblige à rien, je ne donnerai aucun bonus à ceux qui le feront, mais ça peut simplement être intéressant pour vous de faire ça.

   Elvis se tourna vers Anie et Leslie, il semblait se retenir d'éclater de rire.

   — Qu'est-ce que tu vas encore sortir comme connerie ? demanda Leslie qui s'attendait déjà au pire.

   — Le prof... on dirait... on dirait que c'est Sherlock Holmes qui s'est mis au métal, dit-il avant d'éclater de rire.

   — T'es fier de tes conneries hein ? dit Leslie en échangeant un regard avec Anie.

   — Attends... imagine avec une redingote, des lunettes, des chaussures cirées et qui joue de l'air guitare sur un violon désaccordé, insista Elvis.

   Finalement, elles commencèrent à rire elles aussi. Le pire c'est qu'il avait raison, se dit Leslie. Le fou rire les gagna vite. Leslie ne savait même plus si elle riait des conneries d'Elvis ou parce qu'au départ il était tout seul à rire. Et c'était tellement peu drôle que ça en devenait drôle. Voir les deux autres essayer de se retenir lui donnait encore plus envie de rire. Elvis commençait à en pleurer et Leslie éclata de rire. Anie avait caché sa tête dans ses bras et on voyait son dos secoué par le rire.

   — Je crois qu'il y a certaines personnes qui perdent leur self-control, dans le fond ! lança Monsieur Ackermann d'un ton désapprobateur. Je peux savoir ce qui vous fait rire ?

   Maintenant qu'ils étaient lancés, ils ne parvenaient plus à s'arrêter. Leslie voyait des larmes couler sur les joues écarlates d'Elvis qui n'arrivait même plus à respirer. Leslie prit sur elle pour se calmer mais Elvis continuait de mourir sur sa table et elle dut se mordre la lèvre pour éviter de rire à nouveau.

   — Et bien Leslie, comme tu as réussi à tirer dans le panier, tu vas venir devant n'est-ce pas ? Euphrasie, tu veux bien aller à la place de Leslie ?

   Euphrasie hocha la tête, apparemment trop contente de s'éloigner du prof et vint se mettre à côté d'Anie.

   — S'il-vous-plaît, Monsieur ! Je veux pas être devant ! Prof' Lennon m'a déjà mise devant en Français ! Et je suis aussi devant Anglais parce que la prof me connaît et qu'elle avait pas confiance en moi si je me mettais au fond...

   — Au moins vous vous mettez en conditions pour travailler.

   — Mes conditions de travail étaient meilleures au fond !

   Plus elle était loin de cet homme, mieux ça valait.

   — Ah oui ? Au milieu de vos amis ?

   — C'est bien les amis, pour une fois que j'en ai...

   Sa réflexion déclencha quelques rires.

   — Et bien vous n'avez qu'à vous faire des amis qui se mettent devant.

   — Mais devant y a que des glousseuses !

   — Qu'est-ce que vous entendez par là exactement ?

   — Bah... elles gloussent quoi... quand les mecs jouent au basket elles gloussent, quand vous souriez elles gloussent, quand vous vous asseyez à votre bureau elles gloussent, enfin elles gloussent tout le temps quoi...

   Monsieur Ackermann lui adressa un rictus amusé et la considéra de la tête aux pieds.

   — Et vous vous ne gloussez pas, peut-être ?

   Leslie fronça les sourcils : qu'est-ce qu'il entendait par là ? Pourquoi cette question la déroutait tant ? Ça ressemblait un peu à une phrase de drague, surtout avec son air si sûr de lui et sa manière de la détailler de la tête aux pieds...

   — Non, répondit-elle d'un ton catégorique.

   — Jamais ?

   — J'ai pas le souvenir de l'avoir fait quand j'avais leur âge, ni avant, et c'est pas dans mes projets de m'y mettre.

   — Je vois, allez vous asseoir, lui demanda-t-il en revenant devant le tableau.

   Leslie fut alors l'objet de nombreux regards noirs de la part des filles de devant après ce qu'elle venait de dire. Y a que la vérité qui blesse...

   — Nous allons désormais passer à l'Histoire. Notre heure d'EMC est terminée. Nous avons deux heures encore n'est-ce pas ? s'assura Monsieur Ackermann.

   — C'est ça, grogna Leslie.

   — Ça n'a pas l'air de tous vous réjouir. Bon j'avoue que je ne suis pas super content non plus de finir à six heures moins le quart... marmonna-t-il en se dirigeant vers son bureau.

   Leslie sourit. Non... quoi ? Pourquoi elle souriait... pff quelle conne elle faisait... Elle ne pouvait empêcher ses yeux de détailler le prof. Donc elle regarda la poubelle, c'était mieux. Plus moche, c'est sûr, mais moins déconcentrant. Si un jour on lui avait dit qu'elle aurait besoin d'une poubelle pour se concentrer !

   « No one wants to be defeated

Showin' how funky and strong is your fight

It doesn't matter who's wrong or right

Just beat it, beat it

Just beat it, beat it

Just beat it, beat it

Just beat it, beat it »

   — C'est quoi ça ? demanda le prof.

   — La sonnerie... soupira Leslie en griffonnant un petit dessin moche sur la table avant de le gommer.

   — Quand j'étais au lycée on avait un truc qui ressemblait à un klaxon de bateau comme sonnerie, les choses ont changé... commenta-t-il.

   — Ils changent de sonnerie toutes les semaines, dit la fille à côté de Leslie.

   — Au moins je suis prévenu. Les deux filles devant là, Leslie et...

   — Kate. Kate Emora.

   — Amora, pour l'amour du goût ! lança Max.

   — Oh ta gueule, Max ! s'exclama Leslie.

   — Leslie ! Faites attention à ce que vous dites, la reprit le prof.

   — Nan mais ça va, il m'a fait le « Ça me dit quelque chose », il a sorti « Presley » à Elvis et maintenant la moutarde... On a compris, il aime bien associer les noms de famille à des trucs, mais c'est mieux quand il le fait dans sa tête.

   — Calme-toi, Leslie, je te sens sur les nerfs, dit le prof.

   « Arrête de parler de mes nerfs, ça m'énerve encore plus ! »

   — Nooon si peu, marmonna-t-elle sans desserrer les dents. Vous alliez me demander quoi ?

   — Ah oui, vous pourriez ramasser les boules de papier et tout mettre dans la corbeille, s'il-vous-plaît ?

  Kate et Leslie marmonnèrent des protestations assez bas pour qu'il ne l'entende pas mais le firent quand même.

   — Merci, leur dit-il en les gratifiant d'un adorable sourire.

   « C'est ça use de tes charmes, chuis pas ton éboueur » pensa Leslie.

   — Bon, je voulais faire ça pendant l'heure d'EMC, mais finalement on va devoir empiéter sur l'histoire, j'ai reçu les fiches de renseignements que vous aviez remplies avec Monsieur Hernandez dans mon casier... et j'en ai fait des feuilles de brouillon après en avoir lu trois.

   Il commença alors à écrire d'autres questions au tableau de son écriture en pâtes de mouche pendant que Kate et Leslie ramassaient les boules de papier.

   — Et comme par hasard c'est aux filles qu'il demande de faire le ménage... marmonna Leslie.

   Malheureusement le prof l'entendit.

   — Je vous ai prises toutes les deux parce que vous étiez devant moi. Mais Max et son copain vont se faire une joie de venir vous aider pour mettre un peu d'équité là-dedans, dit-il avant de recommencer à écrire.

   Les deux mecs arrivèrent et Leslie leur fit un petit sourire moqueur.

   — On s'est fait avoir là... dit Alex.

   Ils ramassèrent tout assez vite, puis retournèrent s'asseoir. Leslie prit rapidement une feuille et commença à recopier la première question. Il ne demandait rien sur les parents à part leur nom et leur profession. Pas de coordonnés. Plutôt sympa, ça voulait dire que ce n'était pas dans ses projets de faire la police entre les parents et les élèves. Il y avait même une question « Où préférez-vous être assis dans la salle ? » et Leslie songea avec nostalgie à sa petite place étriquée tout au fond avec Anie et Elvis. Il cherchait à connaître ses élèves, tout simplement. Ça avait l'air d'être un bon prof, mais Leslie n'arrivait pas à savoir s'il était conscient de son charme et s'en servait, ou s'il ne faisait pas exprès.

   Au bout de cinq minutes, il les pressa un peu en commençant à ramasser. Il posa tout sur son bureau puis s'appuya dessus en baissant la tête et des mèches noires tombèrent devant son visage, de sorte que plus personne ne pouvait voir son expression. Il resta un moment comme cela et Leslie s'aperçut que ses mains tremblaient. Elle vit aussi un tatouage très fin en forme d'éclair sur le dos de sa main... bon il avait le droit d'avoir des tatouages après tout. Il ne paraissait pas aller très bien... Il se redressa soudain et s'avança devant le tableau.

   — Bien. Nous allons commencer l'année avec de l'histoire. Hum... donc en premier lieu nous allons voir la révolution française et l'empire, l'ampleur de la rupture avec l'Ancien Régime et... (il ferma les yeux, comme pour essayer de se souvenir)... et la... les tentatives de reconstruction d'un ordre politique stable...

   Sa voix était légèrement tremblante. Leslie regarda les filles autour d'elle : elles portaient toutes leur attention sur lui, mais elles ne semblaient pas vraiment faire attention à ce qu'il disait. Elle se retourna alors pour voir si Elvis avait capté quelque chose et elle vit à son regard que oui. Elle se tourna alors de nouveau vers Monsieur Ackermann. Il y avait définitivement un problème. Qu'est-ce qui lui arrivait d'un coup ? Et en plus personne ne captait rien... personne ne l'écoutait vraiment, en fait. Il paraissait faire un tel effort de concentration pour qu'au final... personne ne l'écoute. Son regard croisa celui du prof, on aurait dit qu'il appelait à l'aide. Mais il paraissait si sûr de lui quelques minutes plus tôt ! Avec son expérience étrange, là ! Comment pouvait-il devenir si... si mal d'une minute à l'autre ?

   Elle hésitait à relever son trouble, parce que peut-être qu'il serait encore plus mal après... elle continua de le fixer car lui ne détournait plus son regard d'elle. Leslie commença à se douter qu'il était simplement stressé. Mais elle ne comprenait pas comment il pouvait perdre ses moyens comme ça... peut-être qu'il n'aimait pas enseigner l'histoire ?

   — Monsieur, il faut vous concentrer sur vous, sur ce dont vous devez parler, pas sur nous, lui dit Leslie, incapable de se retenir.

   Elle avait l'impression de se retrouver avec les petits mecs timides de troisième qui venaient à son club parce qu'ils avaient peur de rater leurs oraux. Sauf que là c'était un adulte plus vieux qu'elle, et ça faisait bizarre. Jamais encore une personne plus âgée qu'elle n'était venue à ses clubs. Et puis comment avait-il pu devenir prof s'il pouvait perdre ses moyens d'une minute à l'autre ?

   — Je peux pas, lui répondit-il enfin.

   Toute la classe était redevenue attentive et écoutait leur échange. Pourquoi Leslie était-elle en train de le comparer à un enfant dans sa tête ? C'était sûr qu'elle lui aurait fait un câlin s'il n'avait pas ce physique si ténébreux. Ce type était perturbant en cet instant : il avait un air vulnérable, tout en gardant ce petit côté inaccessible et intimidant. Au final, Leslie ne savait plus si elle devait l'aider ou le laisser se dépatouiller, d'autant plus que ça la rendait mal à l'aise de le faire devant toute la classe. Elle se retourna discrètement vers Elvis pour voir son expression, mais pour une fois il paraissait très sérieux et attentif. Même lui ne pouvait pas détourner ce moment gênant avec un peu d'humour...

   — Si vous pouvez, Monsieur. Vous inquiétez pas, on ne va pas se moquer de vous si vous vous trompez ou si vous faites quelque chose de travers, déclara Anie.

   Leslie la remercia silencieusement... elle haïssait ces moments où elle était le centre de l'attention. Le prof se mit à tortiller ses doigts.

   — C'est... c'est gentil... balbutia-t-il.

   « C'est pas gagné, il ressemble de plus en plus à une victime » se dit Leslie. Il ne tenait plus les reines de la classe, il était là, à tortiller ses belles mains... Belles ? Non elle n'avait pas pensé ça quand même ? Elle se traita d'abrutie dix fois dans sa tête avant d'essayer à nouveau de trouver un moyen de sauver ce prof.

   — Sinon on pourrait ne pas faire cours, proposa Max.

   Celui-là n'en ratait pas une...

   — Pendant deux heures ? Non, j'ai quand même des choses à vous apprendre... et...

   — Vous êtes notre prof principal, on pourrait faire de la vie de classe pour faire un bilan sur la rentrée, proposa Elvis.

   — De la vie de classe pendant deux heures ? Je ne sais pas si...

   — On peut faire une heure de vie de classe et puis on verra après si vous vous sentez d'attaquer la révolution et les régimes politiques, proposa Leslie.

   — Oui... c'est vrai, on peut faire ça... céda-t-il.

   — Ouais on pourrait faire l'élection des délégués, comme ça c'est fait, dit Kate.

   Le prof sourit.

   — Vous êtes des élèves géniaux... marmonna-t-il.

   — Ouais on sait, s'exclama Alex en se frappant le torse.

   — C'était une généralité, précisa le prof en jetant un regard oblique à Alex qui se renfrogna tandis que les autres éclataient de rire.

   — Coup dur pour Alex, dit Max en lui tendant ironiquement un paquet de mouchoir. Tu peux pleurer en paix, j'ai deux paquets, lui dit-il.

   Alex prit le paquet de mouchoir pour le lancer dans la tête de Max. Celui-ci fit un mouvement brusque pour se protéger le crâne et tomba de sa chaise.

   — C'est pas possible, soupira Monsieur Ackermann.

   — Donc on peut faire l'élection des délégués, s'il-vous-plaît ? insista Kate en se levant.

   — Oui oui. Vous voulez vous présenter, je suppose ?

   Kate acquiesça d'un air sûr d'elle.

   — Qui d'autre ? demanda Ackermann.

   Max leva la main et tout le monde pouffa de rire.

   — Bon j'ai l'impression que nous ne sommes pas beaucoup à croire en tes talents de délégués, mais bon, tout le monde a droit à sa chance... soupira le prof.

   Finalement, Elvis leva la main aussi.

   — Oui, Elvis, personne d'autre ? Dans les filles ?

   Leslie haussa les épaules. Ce genre de trucs, ce n'était pas pour elle. Mais Anie serait une super déléguée, elle était sérieuse, elle aimait travailler mais elle était à l'écoute, sympa et drôle. Elvis essayait apparemment de la persuader de se présenter. Anie leva finalement la main, à moitié forcée par Elvis.

   — Bon alors, vous quatre, essayez de préparer un peu votre discours pendant que je fais un bilan de la rentrée avec les autres.

   Il balaya du regard l'ensemble de la classe.

   — Alors ? C'est vous qui avez proposé ça, c'est donc que vous avez des choses à dire !

   Une des filles devant leva la main.

   — Oui Mademoiselle...

   — Élie Fontannaz, Monsieur.

   Leslie attendit une remarque sur le nom de la part de Max mais il ne dit rien.

   — Donc... vous alliez dire quoi ? la pressa Monsieur Ackermann.

   — Qu'on a des supers profs, ça je trouve que c'est bien. Surtout maintenant qu'on n'aura plus Monsieur Hernandez, vous avez l'air d'être un prof génial, Monsieur ! dit-elle avec un air admiratif, appuyée sur ses coudes.

   Monsieur Ackermann rougit légèrement. Quelle lèche-cul celle-là. N'empêche qu'il était super mignon à rougir comme ça.

   — Merci Mademoiselle... Oui, Elvis ?

   — Bah moi je voulais dire que le lundi et le jeudi on a moins de trente minutes pour manger, que y a pas de magasins ou de snacks autour du lycée pour aller s'acheter un truc, que tu prends vingt minutes à faire la queue à la cantine et que la cafét est toujours bondée, y a jamais un seul coin libre. Et hier j'ai pas eu le temps de manger vu que j'ai dû régler un truc à midi.

   — C'est clair la bouffe c'est sacré, dit Leslie et les autres approuvèrent.

   — Ah et bien je ne peux pas y faire grand chose, vu que je viens d'arriver, mais je suppose que les futurs délégués s'en occuperont... Vous vous connaissez tous dans la classe ?

   Il y eut un non général.

   — Moi je connais que Leslie, Thibot, Max et Alex qui étaient dans ma classe l'année dernière et Elvis qui était dans mon collège. Tout le monde reste par deux ou trois depuis mercredi, dit Anie.

   — Bah pour faire connaissance avec tout le monde, on pourrait faire une soirée ou un truc du genre, dit Max.

   — Il y a d'autres moyens plus simples et rapides de faire connaissance, démentit le prof.

   — Peut-être mais moi si chuis délégué je ferais des teufs le vendredi de chaque vacance, dit Max.

   — C'est pas tellement le rôle d'un délégué ! protesta Anie.

   — Bah si. Faut bien s'amuser dans la vie, dit Max.

   — Je dis pas le contraire. Mais délégué c'est pas DJ !

   — Y a un débat politique, là ! lança Alex.

   — Ta gueule Alex. Et j'ai pas dit que j'allais faire le DJ. Moi chuis un type sympa, c'est pour faire plaisir aux gens !

   — C'est vrai que ça fait bien plaisir ce genre de soirée où tu finis tout habillé dans la piscine !

   — Avec un gâteau à la fraise écrasé sur ta gueule, ajouta Max.

   — Ça sent le vécu, ça, commenta Elvis.

   — Mais Anie ça fait des souvenirs communs ce genre de trucs ! insista Max.

   — Bon ! Anie et Max ! Rasseyez-vous et calmez-vous, s'il-vous-plaît, demanda le prof.

   Anie haussa les épaules et se rassit. Max se laissa retomber sur sa chaise.

   — Bon du coup je peux parler moi aussi pour défendre ma pomme ? demanda Elvis.

   Le prof hocha la tête.

   — Okay donc en parlant de pomme, vous avez compris que bah ma priorité c'est la nourriture parce que si tu manges pas, tu meurs. Sinon... que dire de plus... je suis pas trop sérieux, mais je fais pas le fou non plus, donc je pense que j'suis un juste milieu voilà. Et votez pour moi parce que pas d'voix, pas d'chocolat.

   — Très bon slogan ! lui lança Leslie.

   Elle était certaine qu'il allait se faire élire. Ce mec était assez populaire, à l'aise avec les autres, et il avait des bons slogans.

   — Kate ? Tu n'as pas parlé ? dit le prof.

   Elle se leva, rejeta sa longue chevelure noire en arrière dans un geste théâtral et déploya ses longues jambes épilées avec élégance pour se lever, ce qui rappela à Leslie qu'elle avait des jambes de yéti.

   Kate prit une feuille en faisant attention de ne pas abîmer son verni et se dirigea vers l'espace devant le tableau avec une assurance trop surjouée. Leslie savait déjà d'avance qu'elle n'allait certainement pas voter pour elle. En plus, à quel moment on vient au lycée en mini-jupe ! (non, elle n'était pas du tout jalouse de son corps...) Kate commença alors à parler en faisant bouger sensuellement ses lèvres.

   — Alors. Bonjour à tous. Je m'appelle Kate Emora, je suis une fille très populaire et je suis à l'aise avec les autres, on me connaît bien dans tout l'établissement. Vous pouvez venir me parler si vous avez un problème, je serai très à l'écoute de chacun. Ensuite, j'essaierai d'améliorer la vie au lycée grâce à vos suggestions. Je rapporterai précisément et exactement ce qui se dit aux conseils de classe et je serai très impliquée dans mon rôle de déléguée. C'est tout, j'espère que vous voterez pour moi.

   Elle alla se rasseoir. Leslie éprouva tout de suite un dégoût prononcé pour cette fille. Elle n'aimait pas les gens « qui se la jouent ».

   — Anie ? Vous voulez prendre la parole ? demanda le prof.

   — Heu... non, c'est bon, j'ai rien à dire... marmonna Anie.

   — Vous êtes sûre ?

   Leslie leva la main.

   — Je peux parler à sa place ? demanda-t-elle.

   — Je ne sais pas... c'est à elle de le faire, dit le prof.

   — Peu importe. Anie elle était dans ma classe l'année dernière donc je la connais. C'est pas parce qu'elle est très sérieuse dans son travail qu'on ne peut pas rire avec elle. Elle est marrante, elle est super sympa et on peut lui faire confiance. Pour moi c'est la meilleure déléguée qu'on puisse avoir. Voilà, dit Leslie en se rasseyant.

   Anie était toute rouge, tassée sur sa chaise et essayait de disparaître derrière Elvis.

   — Bon vous allez donc pouvoir voter, excusez-moi de vous presser mais l'heure tourne vite. Prenez un bout de papier et écrivez les deux noms de ceux que vous voulez voir délégués. Alex, tu peux aller faire quatre colonnes au tableau et écrire les noms des candidats, s'il-te-plaît ?

   Alex sourit, fier de sa mission, alla se servir un feutre sur le bureau du prof et commença à faire des colonnes démesurément grandes. Le prof lui jeta un coup d'œil exaspéré mais ne releva pas.

   Leslie n'eut même pas à réfléchir : elle écrivit les noms d'Elvis et d'Anie puis plia son petit papier et le laissa sur un coin de la table.

   — Pourquoi t'as pas voté pour moi ? demanda Kate qui avait lu par-dessus son épaule.

   Leslie la regarda mais ne trouva rien d'autre à répondre que « Parce que je t'aime pas » donc elle ne répondit rien et l'ignora. Kate la regarda lui mettre un vent d'un air outré. Elle ne devait pas avoir l'habitude qu'on l'ignore, et bien il y avait un début à tout ! Quand les conversations reprirent, M. Ackermann demanda :

   — Leslie, tu veux bien aller ramasser les papiers de tout le monde ?

   Leslie s'imagina lui répondre « Ben voyons, embauche-moi comme assistante, ça ira plus vite et au moins je serais payée ! » mais elle obéit quand même. Quand elle arriva au niveau d'Anie, celle-ci la retint par la manche pour l'empêcher de s'éloigner.

   — Pourquoi t'as dit ça ? demanda-t-elle.

   — Parce que c'est vrai, dit Leslie.

   — Merci, grâce à toi je vais sûrement avoir quelques voix...

   — Moi je suis sûre que tu vas tous les défoncer, l'assura Leslie.

   — Et moi alors ? protesta Elvis.

   — T'inquiète, j'ai voté pour toi.

   Il lui adressa l'un de ses sourires trop chou.

   Une fois qu'elle eut tout ramassé, le prof lui montra son bureau et elle laissa le tas de papiers là.

   — Leslie tu liras les noms et Alex tu compteras les points au tableau.

   Alex sourit, tout content.

   — Ça m'aurait étonnée s'il choisissait quelqu'un d'autre... marmonna Leslie d'un ton qu'elle pensait inaudible.

   — Il y a un problème, Leslie ? demanda-t-il.

   — Non, non, c'est bon, répondit-elle précipitamment.

   — Sachez que ça ne sert à rien de marmonner des choses dans votre coin car j'entends tout, dit-il en enfonçant de nouveau ses mains dans ses poches.

   Leslie déplia le premier papier.

   — Kate et Max, dit-elle, dégoûtée de voir que quelqu'un avait voté pour elle.

   Elle déplia le deuxième papier.

   — Kate et Max aussi, soupira-t-elle.

   Celle-ci affichait un sourire confiant.

   — Max et Kate. Max et Anie. Max et Elvis. Kate et Elvis. Kate et Elvis. Elvis et Kate. Max et Kate. Max et Anie. Max et Anie. Max et Anie. Elvis et Max. Elvis et Max. Max et Kate. Anie et Kate. Anie et Max. Anie et Elvis. Elvis et Max. Anie et Max. Kate et Max. Kate et Anie. Anie et Max. Anie et Kate. Max et Anie. Heu... y a écrit « je suis polygame, je mange du gruyère et je vote Max et Kate. ».

   Alex eut une tête de coupable et tout le monde devina que c'était lui.

   — Normalement, on ne compte pas ce genre de vote... mais bon, va pour cette fois, accorda Monsieur Ackermann.

   — Merci Monsieur ! s'exclama Alex en mettant un point en plus à Max et Kate.

   — Bon moi je continue. Alors... Anie et Max. Kate et Anie. Anie et Max. Et le dernier... Anie et Kate !

   — Alors ça fait... quinze pour Kate ! dit Alex.

   Celle-ci sourit largement et Leslie se mit à compter les voix d'Anie.

   — Seize ! s'exclama Leslie. Anie a seize !

   Le sourire de Kate disparut aussitôt. Elle paraissait ne pas comprendre comment on avait pu lui passer devant comme ça. Anie plaqua ses deux mains sur sa bouche puis enfouit son visage dans ses bras pour se cacher. Elvis lui caressa le bras pour essayer de la réconforter.

   — Et Max a dix-neuf ! s'exclama Alex, tout content.

   Leslie ne comprenait rien. Comment Max avait-il pu battre tout le monde comme ça ? Et pourquoi Elvis n'avait que huit ? Elle avait l'impression d'avoir manqué un truc.

   — Et bien mes félicitations aux deux délégués. J'espère que vous remplirez correctement vos devoirs, dit Monsieur Ackermann en regardant Max avec insistance.

   — C'est promis, Monsieur ! s'exclama Max.

   — Anie, est-ce que ça va ? demanda le prof.

   Elle se cachait toujours la tête dans les bras et la releva en entendant son prénom.

   — Je... oui... mais... enfin... j'aurais jamais pensé que...

   Max lui tendit son fameux paquet de mouchoirs et elle lui lança un regard noir.

   — Nous avons donc nos délégués : Max et Anie ; ainsi que nos suppléants : Kate et Elvis. Vous pouvez aller vous rasseoir, ajouta-t-il à l'adresse d'Alex et Leslie.

   Michael Jackson résonna dans le couloir.

   — Vous pouvez prendre cinq minutes de pause, leur dit Monsieur Ackermann.

   Tout le monde se leva et Leslie se précipita vers Elvis.

   — Je comprends absolument pas que si peu de monde ait voté pour toi ! Je comprends pas ! Tu... enfin... tu es populaire quand même, non ?

   — C'est gentil de dire ça, Leslie, mais je m'en doutais un peu.

   — Pourquoi ?

   — Les huit personnes qui ont voté pour moi ça doit être des filles. D'ailleurs tu es une fille.

   — Eh oh j'ai pas voté pour toi parce que t'es beau !

   — Donc tu le reconnais ?

   — Mais... enfin... rho, abruti ! s'exclama-t-elle en lui frappant l'épaule.

   Il se mit à ricaner et elle le re-frappa.

   — Aïyeuh ! protesta-t-il en se protégeant la tête avec les mains.

   Elle sentit quelqu'un lui tapoter l'épaule et se retourna pour se retrouver nez à nez avec Monsieur Ackermann.

   — Leslie... je peux te dire un mot ?

   — Heu... oui...

   Il fit signe à Elvis et Anie de partir. Ils sortirent à la suite des autres et Leslie se retrouva seule avec le prof. Il ferma la porte puis revint tranquillement vers elle.

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