Chapitre 7: Des conséquences inattendues.
Minghao ne prêta pas attention à l'enveloppe rose qu'il déchira d'un coup sec, laissant tomber les lambaux de scotch sur le carrelage.
- Écoute...Je ne sais pas ce que tu trouveras dedans mais j'y suis pour rien... Je ne sais pas qui a fait ça...
- Tais-toi.
- Okay...
Jun n'osa pas insister. Il était en tort et la façon dont Minghao déchirait agressivement le papier ne le rassurait pas du tout. Toujours contre le bureau, il observa les moindres réactions de Minghao, tandis qu'il parcourait la lettre, les moindres mimiques qui auraient pu le trahir. Mais la seule chose qu'il remarqua fut un léger tremblement de ses mains au fur et à mesure qu'il progressait dans sa lecture. Son regard froid restait intact et aucune émotion ne passait sur son visage. Il était alors impossible pour Jun de savoir ce que cette lettre disait. L'appréhension forma un nœud désagréable dans un estomac. Il était si effrayé qu'il aurait pu s'évanouir. Il hésita un instant à lui arracher la lettre pour voir ce qui y était écris mais resta sur plae, tétanisé par le stresse.
Lorsque Minghao releva la tête, son regard croisa brièvement celui de Jun qui remarqua alors que son visage s'était légèrement adoucit. L'expression d'agacement et d'aigreur sur ses traits avait complètement disparu.
- Jun... Jure moi que ce n'est pas toi qui a écrit cette lettre... implora Minghao en serrant le papier contre son torse.
- Mais non! Je t'assure! Je ne sais même pas ce qu'il y a dedans!
- Alors... Qui aurait pu faire ça? C'est forcément quelqu'un qui sait que-
- Que?
- Ne me force pas à le dire s'il te plaît... Et hormis toi... personne n'est au courant.
Jun fronça les sourcils avant de comprendre à quoi Minghao faisait allusion. Aussitôt, il leva ses mains, en signe de défense. Il anticipait déjà les accusations et ne voulait pas avoir à se justifier d'une chose qu'il n'avait pas commise. Jun tenait toujours ses promesses. Alors pourquoi aurait-il brisé celle-ci, pour blesser Minghao?
- Mais... Enfin réfléchis pourquoi j'aurai fait ça hein?! Ce n'est pas moi! s'écria-t-il dans un mélange de rancœur et d'incompréhension.
Dire qu'il était déçu serait un euphémisme. Jun espérait que Minghao ne douterait pas de sa sincérité car dans le cas inverse, il lui aurait fait confiance les yeux fermés. Mais visiblement, ce n'était pas réciproque.
- Peut-être pour te foutre de moi... murmura Minghao, peiné, en baissant les yeux sur le carrelage.
- Mais...
Jun était à court de mot. Il en voulait à Minghao de ne pas le croire et à ceux qui s'étaient amusés à écrire cette stupide lettre.
- Bon donne moi ça que je puisse la lire! s'emporta-t-il.
- Non! N'y touche pas! refusa Minghao en reculant.
Jun, exténué de batailler en vain, se laissa tomber sur une chaise en soupirant.
- Et... tu n'as rien pris d'autre dans mon sac rassure-moi? se risqua Minghao.
- Non... Je n'ai touché à rien et putain je te dis que j'y suis pour rien dans cette histoire de lettre.
- Donc tu peux m'affirmer que tout ce qui est écrit... est faux?...
- Bah évidemment, mais en même temps je sais même pas ce qui est écrit étant donné que tu refuses de me laisser lire!
- T-tiens, céda finalement Minghao.
Jun s'empara du papier qu'il lui tendait et manqua de s'étouffer rien qu'en parcourant les deux premières lignes.
La nuit je ne pense qu'à toi, à tel point que je n'en dors pas. Je n'arrive plus à me contenir quand je te vois...
- Alors?
- Bah non effectivement ce n'est pas moi qui aie écrit ça, confirma Jun en froissant la lettre.
- Non! ne...
- Quoi?
- Rien, laisse tomber...
Jun ignora la remarque de Minghao et jeta la boulette de papier dans la poubelle avant de sortir de la classe, appuyé sur ses deux béquilles.
- Tu viens? lança-t-il du couloir.
- Euh... je te rejoins...
- D'acc.
Minghao entendit les pas boiteux de Jun s'éloigner et après s'être assuré qu'il ne reviendrait pas, se précipita vers la poubelle et récupéra la lettre froissée qu'il fourra dans son sac.
Pourquoi je la garde...?
Tu le sais très bien! Arrête de faire l'innocent! le gronda sa petite voix intérieure. Son cœur tremblait d'excitation. Il n'arrivait même pas à être déçu que ces mots ne lui soient pas vraiment destinés car l'infime possibilité que Jun ait pu les penser était suffisante pour combler le vide qui l'habitait. Un sourire de détraqué lui fendit la face. Il ne parvint pas à s'en débarrasser même en quittant la salle.
Minghao dut se rendre à l'évidence. Il était amoureux de Jun. Et cela allait grandement lui compliquer la vie. Tout allait si vite. Tout était tellement intense. Et tout paraissait invraisemblable. Mais il ne s'en soucia pas. Il voulait y croire. Rien que pour être heureux, juste une fois.
Au pas de course, il rejoignit Jun qui l'attendait, et réalisa bel et bien que des papillons boxaient dans son ventre à la vue de son visage impatient. Malgré tout, il tenta de garder une contenance et de ne pas laisser ses émotions l'emporter sur sa raison.
Un silence pesant s'était installé entre eux et Jun ne supportant pas les vides, le rompit rapidement :
- Pourquoi tu m'as demandé si c'était moi qui avait-
- Bah parce que ton nom était marqué plusieurs fois.
- Et tu penses que ça pourrait être qui?
- Je... Je ne sais pas... bafouilla Minghao.
- Tu aurais réagis comment si ça avait été moi qui l'avait écrite?
- P-pourquoi c'était toi? s'affola-t-il en plantant son regard fiévreux dans les yeux surpris de Jun.
- Non! Non! Bien-sûr que non! le contra Jun, mais je voulais savoir si tu m'en aurait voulu...
- Bah évidemment que non... Bien au contraire... marmonna-t-il en espérant ne pas être entendu.
C'était sans compter sur l'ouïe fine de Jun qui se figea.
- Hein !?
Son cri étranglé résonna dans la rue déserte. Il n'avait pas l'intention de paraître aussi affecté mais tout son corps avait réagi violemment en entendant ce petit bout de phrase murmuré. Jun s'arrêta un instant et dévisagea Minghao qui dansait d'un pied sur l'autre.
- Qu-quoi? demanda-t-il en sentant ses joues le brûler.
- Tu... enfin...Je... J'ai dû mal comprendre excuse-moi...
- Tu as compris quoi exactement?
- Bah que t'aurais aimé que ce soit moi l'auteur de cette lettre et puisque c'est une lettre d'amour, que en fait tu ne me vois pas comme un ami, déballa Jun d'une traite.
Face à la soudaine prise de conscience de son ami, Minghao resta interdit, la bouche entre-ouverte. Ses jambes ancrées dans le sol, menaçaient de se dérober sous son poids, tant la panique le gagnait.
Jun, remarqua la gêne de son interlocuteur et tenta de le rassurer :
- Hahaha, je rigole, t'inquiètes.
Minghao lui fit face pendant quelques secondes et sentit son sang affluer dans ses tempes. Jun était vraiment pâle mais sa blancheur le faisait rayonner au milieu de ce ciel gris. Minghao trouva son regard profond, mystérieux. Il hésita à le lui dire mais conclut que ce n'était vraiment pas approprié. Il ferma un instant les yeux pour tenter d'oublier la douleur qui lui lancinait la poitrine et souffla doucement/
Je ne peux pas le laisser partir comme ça... Je m'en voudrai toute ma vie... Si je ne le fais pas maintenant je... je n'aurais jamais le courage. Je ne l'ai jamais eu.
Ses pensées s'entrechoquaient dans son esprit tandis que les larmes s'accumulaient au coin de ses yeux. Il savait qu'il n'aurait pas l'audace de le faire. Il sentait déjà son courage s'évanouir et son impulsion embarrassante s'évaporer.
Mais lors qu'il réfléchissait à l'attitude qu'il devait adopter pour ne pas paraître affecté par cette situation incongrue, une sensation étrange envahit son corps. Il lui fallut ouvrir les yeux pour réaliser que... l'impensable était en train de se produire. Ses lèvres étaient scellées à celles de Jun. Il n'avait pourtant pas eu le courage de l'embrasser alors comment était-ce possible? C'était irrationnel. Minghao tenta de faire abstraction de toutes les pensées qui envahissaient son esprit en ébullition.
Jun l'embrassait. C'était un baiser maladroit, grossier, peut-être désagréable. Mais c'était leur premier baiser. Et Minghao aurait pu pleurer s'il n'était pas dans cet état de transe qui séparait son âme de son cœur.
Jésus Marie Joseph, dites moi que je suis en train de rêver...
Le baiser se prolongea alors que les premières gouttes de pluie tombaient. Jun appuyait un peu trop fort contre ses lèvres sèches, mais Minghao ne l'aurait arrêté pour rien au monde. Il passa ses mains dans ses cheveux et les laissa là, sans vraiment agripper ses mèches. Simplement pour les toucher.
Jun se demanda si... tous les amis éprouvaient ce genre de chose l'un pour l'autre. Il se demanda s'il était normal que son corps en réclame encore plus et que son cœur batte à cette vitesse. Si Minghao ressentait la même choses, si toutes ses terminaisons nerveuses s'enflammaient, s'il avait l'impression qu'il allait exploser. Jamais il n'oserait le lui demander.
Minghao manquait cruellement d'air. Il ouvrit la bouche pour inhaler une goulée d'oxygène mais ne sentit que le souffle chaud de Jun sur ses lèvres. Dans un geste désespéré, il le repoussa et reprit son souffle, le visage rouge.
Jun perdu, ne comprit pas le geste de Minghao et se confondit en excuses:
- Pardon! Je... Je sais pas ce qu'il m'a pris... Je... Je ferais mieux de rentrer... Je ne voulais pas te forcer je sais que tu ne m'aimes pas mais... J'avais envie et...Pardon! Je dois te dégoûter... déblatéra-t-il à toute vitesse alors que les larmes, mélangées aux gouttes de pluie, inondaient son visage.
Confus Minghao secoua la tête en l'écoutant bafouiller et saisit fermement les poignets de Jun pour l'obliger à lui faire face. Sa peau était fraîche mais ses lèvres brûlantes avaient laissé une empreinte indélébile sur sa peau. Minghao voulut le marquer à son tour et déposa symboliquement sa bouche au coin de son poignet. Jun refusa de le regarder et fondit en larme. Tout était trop difficile à encaisser. Il ne comprenait même pas ses propres actions alors analyser celle de Minghao était impensable.
- Je ne te parlerai plus s'il le faut, j'ai tellement honte...s'il te plaît...Ne m'en veux pas, explosa-t-il dans un concert de sanglots douloureux.
- Jun, Jun, Jun! Calme toi! lui ordonna Minghao en le rapprochant de lui.
- P-pardon...
- Arrête de t'excuser... Putain... Tu me donnes envie de recommencer là... Si c'est la seule façon pour faire disparaître ces vilaines larmes...
- Q-quoi... Je... Je comprends? osa Jun d'une voix timide.
- Je peux?
Minghao ne lui laissa pas le temps de répondre. Il posa ses mains de part et d'autres de son visage et unit à nouveau leurs lèvres dans un contact humide et doux. Jun n'osait plus bouger, trop gêné pour tenter quoique ce soit. Alors Minghao interrompit leur baiser et murmura plus pour lui même que pour son interlocuteur:
- Maintenant j'en suis certain, je veux être avec lui...
Joignant le geste à la parole, il enroula son bras autour de la taille de Jun, qui, après avoir récupéré ses béquilles, tombées sur le macadam, se blottit contre Minghao.
- Qu'est-ce que... ça veut dire?
- J'en sais trop rien... Ça veut tout dire et rien dire, sourit Minghao en caressant tendrement sa joue rouge d'angoisse. Jun baissa la tête et se remit en route en sachant pertinemment que Minghao ne le quitterait pas du regard.
Le chemin fut long et tortueux. Jun savait que cette difficulté n'était pas uniquement due à sa blessure, mais bien à la pression grandissante dans son bas ventre qu'il n'avait jamais ressenti avant.
Alors c'est ça que ça fait quand on est amoureux?
Un sourire stupide se dessina sur ses lèvres. Il tenta vainement de masquer sa gêne en parlant de tout et de rien. Le terme plus juste serait en monologuant.
- Jun...l'interrompit Minghao.
- Ouais?
- Tu parles trop.
- Ah-ah b-bon? bégaya-t-il en rougissant à nouveau.
La pluie ne faisait rien pour masquer son malaise. Il ressemblait simplement à un chiot trempé.
- Ne sois pas gêné...s'il te plaît... ça me donne juste envie de t'embrasser à nouveau, lâcha Minghao sans avoir la moindre idée de l'effet que ses mots avaient sur Jun.
Pris au dépourvu, Jun balbutia d'une voix honteuse:
- T-tu peux...
- On est presque devant chez toi et... je n'aimerais pas que tes parents nous voient...
- Ah...je comprends...répondit-il une pointe de déception dans la voix.
Minghao regretta aussitôt sa décision et ne résista pas face à la mine boudeuse de Jun. Sans réfléchir, il déposa un baiser furtif sur sa joue avant de l'abandonner devant sa porte d'entrée.
- Bonne nuit, lança-t-il avec un clin d'œil.
- Il est à peine dix-huit heures trente, lui rappela Jun.
- Je sais mais...si tu es comme moi... Tu n'arriveras probablement pas à fermer l'œil de la nuit.
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