–Emily, tu es divine.

Nathaniel Stone, le propriétaire de la galerie d'art contemporain Stone Gallery à Chelsea, salua Emily Bennett avec une effusion qui trahissait son admiration.

Il avait un regard à la fois appétissant et déterminé, comme s'il s'apprêtait à négocier un chef-d'œuvre.

–Ces bijoux que tu portes doivent valoir une petite fortune.

–Une grande fortune, en fait,répondit Emily avec un sourire, passant une main délicate sur le collier de diamants et de saphirs qui ornait son cou, ses doigts effleurant les pierres précieuses avec une tendresse qui trahissait à quel point elle chérissait cette pièce.

–Ces bibelots sont des saphirs de la meilleure qualité, rien de moins.

Nathaniel haussait un sourcil, son sourire s'effaçant lentement comme un nuage obscurcissant le ciel.

–Laisse-moi deviner : un cadeau de papa ? Les bijoux de Bennett doivent prospérer, lança-t-il d'un ton qui trahissait une amertume sous-jacente.

C'est réconfortant de savoir que les affaires de quelqu'un ne sont pas ébranlées par cette terrible récession.

Le ton amer de Nathaniel fit frémir Emily.

Elle avait entendu des rumeurs concernant les difficultés financières de la galerie d'art, qui semblait souffrir d'une chute de l'économie, se heurtant à des ventes qui n'atteignaient pas les prévisions.

Elle avait hésité un moment à lui révéler que les affaires de son père, à la tête de Bennett Jewelers, n'étaient pas au beau fixe, mais elle préféra garder le silence.

Les problèmes financiers de Bennett Jewelers deviendraient de notoriété publique si l'entreprise venait à faire faillite, mais ils n'en étaient pas encore là.

Peut-être était-elle trop optimiste, mais elle refusait de perdre l'espoir que l'entreprise fondée par son père il y a plus de trente ans puisse être sauvée.

Si un sauvetage devait se produire, ce ne serait pas faute d'efforts.

Elle se souvint avec tristesse des sacrifices que ses parents avaient consentis.

Ils avaient investi toutes leurs économies pour maintenir Bennett Jewelers à flot, prenant des risques que beaucoup n'auraient jamais osé envisager.

Chaque centime gagné était crucial, et elle travaillait sans salaire depuis trois mois pour soulager les finances familiales.

Pour alléger le fardeau, elle avait même échangé la voiture de sport que son père lui avait offerte pour son 21e anniversaire contre une vieille voiture d'occasion, tout en gardant son visage souriant, cachant ainsi son désespoir.

Dans un élan désespéré, elle avait dû vendre certains de ses bijoux, ainsi que de nombreux vêtements de marque, pour faire face à la situation.

La robe qu'elle portait ce soir, une création magnifique mais simple, était empruntée à une amie qui tenait une boutique.

Le collier de diamants et de saphirs, bien qu'étant l'une des pièces les plus précieuses de Bennett Jewelers, lui avait été confié par son père avec une instruction spéciale : il lui avait demandé de le porter lors de cet événement, espérant que la pièce tape-à-l'œil attire de nouveaux clients.

Pourtant, elle était terrifiée à l'idée de le perdre et savait qu'elle passerait la nuit à vérifier s'il était toujours autour de son cou, comme une ancre dans une tempête.

Alors qu'elle suivait Nathaniel à travers la galerie, acceptant une coupe de champagne d'un serveur en costume noir, elle observait les invités se rassembler en groupes, admirant les peintures vibrantes de l'artiste Julian Beckett .

Les couleurs éclatantes des toiles s'accordaient avec l'ambiance de la soirée, chaque œuvre racontant une histoire.

Emily hocha la tête en signe de reconnaissance à certains visages familiers, mais brusquement, ses yeux se posèrent sur un homme qui se tenait de l'autre côté de la pièce.

Sa présence était à la fois troublante et fascinante.

Emily sentit son cœur s'accélérer alors qu'elle l'observait.

Les traits sculptés de cet homme, son charisme indéniable, lui prirent un instant la parole.

Il se tenait là, les bras croisés, une légère lueur de défi dans son regard.

Emily ne savait pas pourquoi, mais elle ressentait une connexion inexplicable avec lui, comme si quelque chose, au-delà des apparences, l'appelait.

Les conversations autour d'elle s'estompaient, et tout ce qu'elle pouvait voir, c'était lui.

Son visage était mystérieux, et une aura de danger l'entourait.

Était-ce son regard, empreint de secrets, qui lui donnait cette impression, ou l'intuition qu'il portait un monde de mystères avec lui ?

Alors qu'elle continuait à le dévisager, une vague d'émotions contradictoires l'envahit.

Un mélange d'attirance et d'appréhension. Que faisait-il là, dans cet événement qui semblait anodin, mais qui, en réalité, pouvait changer le cours de sa vie ? La soirée, qui aurait dû être une simple exposition d'art, prenait une tournure inattendue, et elle se sentait piégée entre son désir de découvrir la vérité derrière cet homme et la pression de ses propres responsabilités.

Emily se força à détourner le regard, essayant de se concentrer sur les conversations qui l'entouraient, mais son esprit était captivé, tiraillé entre le monde glamour de l'art et l'angoisse de la situation précaire de sa famille.

La musique flottait dans l'air, douce et envoûtante, mais elle ne pouvait s'empêcher de ressentir une tension grandissante à l'intérieur.

Ce soir, elle ne cherchait pas seulement à protéger le collier de son père, mais aussi son cœur, tout en sachant que chaque seconde qui passait la rapprochait un peu plus de cet inconnu qui la troublait tant.

–Qui est-ce ? demanda-t-elle, le cœur battant la chamade.

Dans un salon rempli d'hommes aux ambitions diverses, la beauté saisissante et le charisme indéniable de cet homme en particulier le faisaient briller comme une étoile dans la nuit.

–Je suppose que tu parles du Grec en costume Armani ? répondit Nathaniel, son regard suivant la direction où Emily fixait l'inconnu.

–C'est Dimitris Nikolaidis, le propriétaire milliardaire de Nikolaidis Enterprises.

Nathaniel énonça le nom avec une certaine admiration, comme s'il parlait d'une légende.

–Il possède plusieurs hôtels cinq étoiles à travers le monde.

Attention, chérie, tu baves, ajouta-t-il avec un sourire moqueur.

–Juste un petit avertissement : il a la réputation d'être un coureur de jupons.

Ses conquêtes sont discrètes, mais nombreuses... et souvent de courte durée.

L'engagement n'est pas vraiment un mot qui lui correspond... sauf quand il s'agit de l'engagement à faire encore plus d'argent pour ajouter à sa fortune déjà enviable.

–Les coureurs de jupons accros au travail ne sont certainement pas mon genre, murmura Emily, détournant le regard de l'homme, tout en prenant une gorgée de champagne.

Cependant, malgré son intention de l'ignorer, ses yeux furent irrésistiblement attirés vers lui à nouveau.

Elle se sentit étrangement satisfaite de constater que Dimitris Nikolaidis, lui, fixait la blonde accrochée à son bras, ce qui lui laissait le champ libre pour l'observer sans être remarquée.

Grand et mince, avec des épaules larges et un corps athlétique, il avait un charme fascinant.

Emily réalisa qu'elle n'était pas la seule dans le salon à ressentir cela.

Avec ses traits sculptés, sa peau bronzée et ses cheveux noirs brillants, il incarnait la beauté classique.

Mais ce n'était pas seulement son apparence qui captivait.

Il dégageait une aura indéfinissable... un magnétisme et une assurance qui le distinguaient nettement de tous les autres hommes présents.

–Il dirigerait n'importe quelle situation,pensa-t-elle, un frisson d'excitation parcourant son échine.

Elle pouvait percevoir l'arrogance innée qui émanait de lui, ainsi que des signes de son impatience face à la conversation un peu trop enjouée de la blonde à côté de lui.

Ce constat fut rapidement confirmé lorsqu'il se détourna d'elle, se dirigeant vers la galerie attenante, comme s'il cherchait une échappatoire.

Merveilleux, mais hors de ma portée, se dit Emily, réalisant alors à quel point elle avait été frappée par l'effet que ce Grec séduisant avait sur elle, malgré la distance qui les séparait.

Il ne l'avait même pas remarquée.

Elle ne se souvenait pas avoir jamais été aussi consciente de la présence d'un homme... pas même de Ethan.

Sa mâchoire se contracta à cette pensée.

Il y a six mois, sa relation avec Ethan s'était achevée de manière choquante et explosive, laissant des blessures encore béantes.

Depuis lors, Emily peinait à recoller les morceaux de son cœur brisé.

La rancœur qu'elle ressentait à l'égard de Ethan était toujours aussi vive que la nuit où elle avait découvert sa trahison, une blessure qui ne semblait jamais guérir.

–Emily, chérie, c'est du champagne que tu bois, pas de l'eau pétillante, dit Nathaniel, la ramenant brusquement à la réalité.

Puis-je te servir un autre verre ?

Elle grimaca en regardant sa flûte vide, réalisant qu'elle avait ingurgité son contenu sans même s'en rendre compte.

–Non, merci.

Il vaut mieux que je m'arrête là, répondit-elle, la voix teintée de résignation.

Nathaniel lui lança un regard impatient, comme s'il ne pouvait pas comprendre pourquoi elle se refusait à profiter de l'instant.

–Vis dangereusement pour une fois. Quelques verres de champagne t'aideront à te détendre. Tu pourrais même rencontrer quelqu'un d'intéressant.

–Correction, quelques verres me feront rire sans raison, rétorqua Emily, un sourire ironique aux lèvres.

Et, après les histoires de la presse récente à mon sujet, je ne veux vraiment pas attirer l'attention négative des paparazzis.

Elle savait qu'elle devait rester prudente, surtout maintenant.

La dernière chose dont elle avait besoin était de se retrouver sous le feu des projecteurs pour les mauvaises raisons.

Pourtant, alors qu'elle observait Dimitris Nikolaidis s'éloigner, un frisson d'intrigue et d'excitation s'éveilla en elle, une tentation qu'elle n'aurait jamais cru pouvoir ressentir si rapidement après une déception si cuisante.

Nathaniel lui jeta un regard amusé, ses yeux pétillants de curiosité. 

–Oui, les journaux semblent avoir vraiment dépassé les limites, concéda-t-il avec un sourire en coin, qui trahissait à la fois amusement et désapprobation.

Le titre "Emily Bennett, la fille aux bijoux, coupable de la fin du mariage de l'acteur Lorenzo Vargas était particulièrement frappant, n'est-ce pas ?

Emily sentit ses joues s'empourprer à l'évocation de son nom dans une telle affaire.

Son cœur battait un peu plus vite, un mélange d'indignation et de honte l'envahissant. 

–Ce n'est pas vrai, protesta-t-elle, sa voix teintée d'indignation.

Je n'ai rencontré Lorenzo Vargas qu'une seule fois, lors d'une soirée de lancement de livre dans un hôtel.

Comment peuvent-ils faire de moi une coupable alors que tout cela n'est qu'un malentendu ?

Elle se remémora cette soirée, une bouffée de souvenirs l'enveloppant.

Les bulles de champagne qui explosaient dans son verre, les rires résonnant autour d'elle, et l'acteur, si charmant, qui semblait la séduire par son simple sourire. 

— Il a bu du champagne toute la nuit et m'a draguée, confia-t-elle, sa voix tremblant légèrement à cette pensée.

Je l'ai repoussé poliment, mais il a insisté.

Le lendemain matin, il est même venu à ma table au petit-déjeuner pour s'excuser.

Nous avons discuté, et il m'a avoué qu'il s'était saoulé la nuit précédente après une violente dispute avec sa femme, qui avait refusé de l'accompagner à la fête.

Quand je suis partie, il a proposé d'amener ma valise jusqu'à la voiture... d'où cette photo de nous deux quittant l'hôtel ensemble.

L'irritation grandissait en elle à l'idée que Lorenzo Vargas avait sûrement été au courant de la présence des médias ce jour-là.

Elle se remémorait le moment où un journaliste l'avait accostée pour lui poser des questions sur leur prétendue liaison. 

–Je suis restée choquée quand un journaliste m'a interrogée sur notre relation, mais Lorenzo Vargas m'a promis qu'il expliquerait à la presse que nous n'étions que des amis, une simple rencontre fortuite.

Mais au lieu de cela, le bel acteur avait créé une myriade de mensonges sur leur incroyable nuit de passion , pensa Emily amèrement, la douleur de la trahison se mêlant à la colère.

Si l'intention de Lorenzo Vargas avait été de rendre sa femme jalouse, cela avait sans doute fonctionné à merveille.

Elle se souvenait de la déclaration dévastatrice de la femme de Lorenzo Vargas à la presse, qui l'avait qualifiée de hystérique , affirmant que la fêtarde Emily avait volé son homme.

C'était le genre d'histoire qui se vendrait comme des petits pains, une intrigue savoureuse pour les tabloïds, et personne ne semblait se soucier de savoir si c'était un mensonge ou si la réputation d'Emily était désormais ternie. 

–Ce type de publicité défavorable est l'un des inconvénients de me laisser exposer au public, soupira-t-elle, le regard perdu dans le vide.

Pendant des mois, la presse m'a dépeinte comme une femme promiscue et superficielle, apparaissant à tous les événements.

C'est le prix que j'ai dû payer pour promouvoir Stone Gallery.

Emily grignota sa lèvre, perdue dans ses pensées.

Elle se remémorait le moment où elle avait obtenu son diplôme universitaire il y a trois ans.

À cette époque, elle avait été pleine d'espoir, rêvant d'un avenir où elle pourrait briller dans le monde de l'art.

Elle était devenue partenaire de l'entreprise de son père, qui lui avait confié la direction des relations publiques.

Cependant, la récession mondiale avait frappé  Bennett en plein cœur, et dans une tentative désespérée d'augmenter le profil de l'entreprise, elle avait accepté de participer à une campagne publicitaire.

Elle avait alors été mise en avant dans des magazines, assisté à divers événements sociaux, exhibant les diamants et les pierres précieuses fabuleuses de la collection  Bennett.

Mais avant de partir pour la galerie ce soir, elle avait découvert que tout son travail acharné avait été vain.

Elle se sentait submergée par la situation, désespérée de récupérer une image qu'elle avait tant de mal à construire.

Les murmures et les rumeurs l'entouraient, et elle se sentait comme une proie au milieu d'un monde implacable où la vérité était souvent déformée par des intérêts personnels.

Dans ce tourbillon médiatique, Emily se demanda si elle pourrait un jour se libérer de ces chaînes invisibles qui la tenaient captive.