vingt et un
Ils avaient attendu une ou deux longues heures avant de capituler, verrouillant la porte du commerce derrière eux avant de partir en courant sous une pluie certes moins lourde qu'auparavant mais toujours aussi peu agréable. Mark avait dit qu'il n'habitait pas si loin que ça, prétextant qu'au pas de course ils ne prendraient que cinq courtes minutes avant de se retrouver au rez-de-chaussée de son immeuble.
C'était mal connaître Donghyuck et sa condition physique plus que limite. Au bout de deux minutes il s'était retrouvé pantelant, regrettant amèrement d'avoir séché 70% de ses cours d'éducation physique au lycée tout en observant Mark qui semblait s'activer sans grande difficulté. Le fleuriste avait grogné, attirant l'attention de l'autre qui lui empoigna la main afin de lui faire accélérer la cadence.
Le noiraud tenait fermement sa paume contre la sienne, imprimant presque sa poigne sur la peau immaculée du plus petit ; tant que, si Donghyuck n'était pas aussi concentré sur le rythme peu régulier de son souffle court, il aurait certainement rougi.
Finalement, les deux jeunes hommes pénétrèrent un immeuble serré entre deux autres un peu plus haut perchés. Leurs respirations lourdes, ils ne dirent mot ; le plus jeune regardait les alentours même si la lumière jaune qui éclairait l'endroit lui agressait la rétine tandis que l'autre passait sa main gauche dans la poche arrière droite de son pantalon.
Mark aurait pu lâcher la main de son ami afin d'avoir meilleur accès à ses clés dissimulées dans cette fameuse poche et bien que Donghyuck l'avait également remarqué, il garda son opinion pour sa propre personne. Au fond, le commerçant aurait fait tout et n'importe quoi pour garder les phalanges de son aîné coincées entre les siennes.
Toujours aussi essoufflés, ils entrèrent dans un couloir les menant jusqu'à une pièce portant une cage d'escalier ainsi qu'un ascenseur, portant rapidement leur choix sur ce dernier qui les mena au troisième étage en un rien de temps. Ils n'osaient parler, se volaient des regards et des sourires discrets. Au bout de quelques courtes secondes remplies d'agréable silence les portes de métal s'ouvrirent, les deux amis évoluèrent dans un autre corridor et Mark déverrouilla le battant surmonté du nombre 34.
Le bois grinça, les épaules du brun se tendirent tandis que l'autre semblait alerte. Les lumières étaient étrangement tamisées, l'espace réduit et le calme peu présent. Quelques voix s'élevaient au coeur de ce qui semblait être la salle de séjour. Donghyuck se pinça les lèvres alors que son esprit s'ébranlait seul à la simple pensée de rencontrer les colocataires de son nouvel ami.
Mark dû sentir l'appréhension qui secouait déjà les organes du brun, il adressa une douce pression contre sa paume, attirant donc son attention avant de pouvoir croiser son regard. Il lui offrit un fin sourire apaisé, laissant ses yeux tendrement se plisser de joie et ses pommettes s'élever légèrement.
« Ils sont pas méchants. »
Donghyuck acquiesça et ils évoluèrent en direction du salon. Le parquet tiède craquait sous leurs semelles humides, ce qui annonça leur arrivée avant qu'ils ne puissent le faire eux-même de vive voix.
« Mark c'est toi ? on demanda.
- T'en a mis du temps, on a cru qu'on t'avait perdu. »
L'espace était sommairement décoré, le sol couvert d'un simple tapis anthracite, deux sofas, aux teintes un tantinet plus sombres, situés aux cotés d'une table basse noire sur laquelle jonchaient deux tasses vides alors que plus loin se tenait un meuble court sur pattes surmonté d'une télévision à écran plat vachement grande pour un appartement loué par des étudiants universitaires.
En parlant d'étudiants, les deux affalés sur les canapés regardaient le fleuriste d'un drôle d'air, leurs pupilles dilatées vagabondant du visage de ce dernier à celui du noiraud jusqu'à leurs mains toujours entrelacées. Mark ne semblait d'ailleurs pas prêt à lâcher prise bien que de fins sourires penchés s'installaient sur les lèvres mordues des deux locataires.
« Dis donc Mark, on perd pas de temps.
- La ferme.
- Eh parle bien à Jeno
- Renjun, j'vais t'en mettre une »
Le susnommé leva les mains, présentant ses larges paumes au plus vieux avant d'hausser les épaules.
« Bouge pas, je vais chercher mon autre coloc' il te ramènera d'accord ? »
Sans savoir trop quoi faire, Donghyuck se contenta de doucement acquiescer même si il ne voulait pas vraiment que Mark le laisse tout seul. Sa main désormais étrangement froide, il l'enfonça dans une des poches de son large manteau.
Il fit de son mieux pour se faire oublier, mais les yeux des autres garçons perçaient des trous à travers son corps frêle. Le fleuriste se sentait exposé, comme si ils le connaissaient, comme si ils savaient des choses dont lui n'était pas au courant. Cependant il n'osa demander quoi que ce soit, se contentant de leur voler l'un ou l'autre regard discret malgré l'épaisse couche de rose qui recouvrait certainement l'étendue de ses joues bombées.
Renjun n'avait pas l'air bien méchant : petit, mince, des orbes en amande et un amas châtain bouclé par dessus son crâne. L'autre, Jeno, était un peu plus grand. Des cheveux de jais bien coiffés exposaient une partie de son front lisse et le commerçant laissa ses iris noisettes glisser du sourire de ses yeux, le long de la courbe de son nez droit jusqu'à s'échouer sur ses lippes roses fendues en un fin sourire amusé.
Donghyuck le fixait et il n'était pas assez bête pour ne pas s'en rendre compte mais il n'y pouvait rien en même temps, Jeno était un garçon affreusement séduisant, bien que loin d'être le genre du brunet.
« Hyuck ? Viens, on y va ! » appela finalement Mark.
Sans attendre, le susnommé se dirigea immédiatement vers le couloir dans lequel se tenait son noiraud et un autre garçon accroupi qui semblait se chausser. Il avait les cheveux gris et secs, portait un simple t shirt blanc bien trop grand pour sa fine silhouette et quand il leva la tête, le brun sentit ses genoux faiblir. Il était également plutôt joli garçon en plus de puer l'intimidation. Donghyuck n'osait croiser son regard jusqu'à ce qu'il lui sourisse gentiment.
Un chiot. C'était la première chose qui traversa l'esprit du brun.
Le grand jeune homme ressemblait à un chiot quand les traits de son visage se retrouvaient distordus sous la force d'un adorable rictus.
Une fois debout, l'argenté se présenta. Il s'appelait Taeyong et ouvrit la porte pour Donghyuck comme un vrai gentleman le ferait avant qu'ils ne descendent tout deux le long des escaliers accompagnés de Mark qui trottinait doucement sur leurs pas après avoir fermé le battant derrière lui.
La voiture possédait cinq portes mais n'était pas bien grande. Mark tint absolument à s'installer sur la banquette arrière aux cotés du fleuriste qui ne savait plus vraiment ou donner de la tête. Son coeur battait la chamade, il n'avait pas prévu de voir autant de nouvelles têtes et savoir que ces dernières faisaient partie du quotidien du noiraud ne les rendait qu'encore plus importantes.
Donghyuck aurait voulu faire bonne impression. Il aurait désiré pouvoir s'y préparer et avoir le plus de temps possible afin d'appréhender de telles rencontres. Cependant, il s'était retrouvé là, dans l'appartement du jeune homme qui le rendait de plus en plus confus jour après jour mais dont il appréciait ridiculement la douce compagnie.
Au fil du trajet, le fleuriste ne dit mot, trop occupé par les pensées qui lui trituraient l'esprit et Mark ne dit rien, se contentant de laisser le bout de ses doigts tièdes jouer au fil de la surface du dos de la main froide de son voisin de siège. Les lumières citadines jouaient sur leurs visages juvéniles, tracant des dessins incertains qui, selon le plus vieux, ne faisaient que décupler la beauté singulière de son cadet.
Enfin, le véhicule s'arrêta.
Taeyong croisa le regard du brun à travers le rétroviseur et lui dit doucement qu'ils venaient d'arriver à bon port. Mark se détachait déjà, prêt à accompagner Donghyuck jusqu'au pied de sa porte mais ce dernier ne lui laissa même pas le temps de faire quoi que ce soit, l'étudiant se retrouvant tout aussi surpris qu'hébété tandis que le fleuriste filait déjà dans la pénombre après avoir claqué le battant.
De doux picotements lui mordaient la peau de la figure. Avant de s'extirper de la voiture noire, Donghyuck avait écrasé ses lèvres couvertes de baume contre la joue pâle du noiraud.
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