Five / Chapitre 4
Ça fait une semaine que je viens, que je l'observe. Plus je la connais, plus je suis intrigué.
Elle sert dans ce restaurant de bas étage, qui sent le graillon, les frites mal cuites et dont le sol colle de bières renversées. Elle prend les commandes, parle, évite les remarques graveleuses de certains, les mains baladeuses des autres.
Il y a autour d'elle une bulle de solitude qu'elle ne remarque pas. Elle semble l'avoir érigée depuis si longtemps qu'elle en a oublié sa présence. Elle sourit rarement, parle avec ses collègues encore moins. Son attitude n'est pas froide à proprement parler. Elle n'est pas indifférente aux problèmes de ceux qui lentourent.
Je l'ai vu servir des frites à une femme accompagnée d'un enfant. Elle n'avait commandé qu'un seul repas pour deux. Par manque d'argent sans doute. Elle lui a dit que la maison les offrait car elles étaient en surplus. Que la cuisine en avait trop cuit d'avance et qu'ils étaient obligés de les jeter. Elle s'était fait rabrouer par son patron. Il lui avait passé un savon et avait retenu sur sa paie la somme due. Elle avait haussé les épaules, indifférente et repris son travail. En passant elle avait ébouriffé les cheveux du petit.
Pas d'indifférence, juste des barrières, des murs élevés haut pour s'éloigner loin du monde.
Elle m'ignore délibérément. Cette petite maligne fait en sorte que ce soit une de ses collègues qui me serve.
Mais aujourd'hui, j'ai décidé de mettre un terme à cette comédie. Je n'aime pas cette attitude.
-Alors, tu as des informations ? Je demande à Shane, mon bras droit.
Nous sommes assis dans un coin, place stratégique pour avoir une vue imprenable sur les points d'entrée et les dangers potentiels. Je suis de dos au mur du fond et mon compagnon est face aux vitres.
-Elle se fait appeler Evy Hunname. Vingt et un, vingt-deux ans, pas de famille, pas de mec, pas d'ami. Elle vit dans ta rue, ça, tu le sais déjà. Pas de passé non plus. Elle est apparue subitement il y a un peu plus d'un mois. Avant, je ne trouve rien. J'ai cherché et je pense qu'elle utilise un faux nom.
-Je me doutais qu'il y avait quelque chose de pas clair.
Il l'observe en terminant son gâteau. Ses yeux brillent d'une lueur que je reconnais. Il est en train de la déshabiller en pensées.
-Tu arrêtes ça tout de suite, je lui dis. Tu n'y penses même pas. Si, il y en a un qui la mettra dans son lit, ce sera moi.
-Allons Noah ! Tu pourrais lui laisser le choix, non ?
Je lui jette un regard noir. Il se marre. Qu'il aille se faire foutre.
-Je ne plaisante pas. Vas voir ailleurs si j'y suis. Et fais ce pour quoi je te paie.
-Tu sais, dès que je trouve, ne serait-ce que le début d'un indice, je te préviens. On va LA retrouver. Et tu te débarrasseras de Lyons une bonne fois pour toutes.
Il me parle d'un ton solennel. Il est un des seuls que j'autorise à m'appeler par mon prénom. Nous avons connu pas mal de galères ensemble. Il sait à quel point j'ai besoin de retrouver une partie de mon passé. Il peut me chambrer sur mon obsession du moment mais quand on revient aux choses sérieuses, il est présent. Il se lève et s'en va, non sans me jeter un regard quand passant près d'Evy, il lui glisse un mot à l'oreille.
Je la vois hésiter un instant puis se diriger vers le comptoir.
-Je prends une pause, je l'entends dire au gérant.
Il hoche la tête.
-Dix minutes, pas plus.
Elle vient dans ma direction, j'ai le temps de la scanner de haut en bas, bien ouvertement.
Sa tenue de service couvre à peine ses courbes. Ses jambes semblent interminables avec cette jupe vulgaire qu'elle doit porter. Le débardeur peine à tenir ses seins. Ils ne sont pas énormes mais il y a de quoi tenir en mains. Hmm, je n'attends que le moment où je pourrais vérifier s'ils sont aussi doux qu'ils le paraissent.
Elle s'installe devant moi.
-Salut, fait-elle simplement.
-Bonjour ma belle, je lui réponds.
Elle se fige une microseconde. C'est furtif, si je ne l'observais pas si scrupuleusement, je l'aurais raté. Elle n'aime vraiment pas ce que je viens de dire. Ce n'est pas juste un refus de croire qu'elle est jolie. Non, j'ai senti un froid glacial s'installer, un vrai recul, comme si je l'avais frappée au lieu de lui faire un compliment.
-Ne m'appelle pas ainsi. Jamais.
Sa voix est devenue impersonnelle, comme morte.
-Ok, je dis quoi alors ? Tu es jolie et bandante. J'aime donner des petits noms à celles qui vont partager mon lit.
-Tu es bien imbu de toi-même. Tu crois ou tu espères que je vais avoir envie de toi.
-Tu étais chaude, il y a une semaine quand tu me matais, je lui rappelle. Je suis certain que je te baiserai un jour.
-Pff Qui baisera qui ? Ce sera peut-être moi. Tu serais surpris.
-Tu peux quand tu veux, ma jolie. Mais j'ai une préférence pour être au -dessus.
Je lui souris en haussant un sourcil. Elle lève les yeux et se détourne un instant. Elle n'est pas aussi à l'aise qu'elle voudrait le faire croire. Je ne dirais pas qu'elle est timide. Mais elle n'a pas l'habitude de flirter. Si on peut donner le nom de flirt à notre conversation. Je ne prends pas de gants, j'appelle un chat un chat. En l'occurrence, ici, ce serait plutôt une chatte. Avec des jolies petites griffes. Voilà, mon imagination s'est mise en route. Je la vois déjà me lacérer le dos de ses ongles. Je commence à me sentir à l'étroit dans mon jean.
-Si je décide de coucher avec toi, tu regretteras tes paroles, me fait-elle en jouant avec une de ses mèches.
Ses cheveux brun foncé, attachés en queue de cheval, excitent beaucoup mon imagination. Je me vois la tenir, les doigts enfouis dans ceux-ci, la pilonnant par-derrière. Elle, à moitié pliée sur une table, les jambes écartées et moi lui serrant une hanche ou une fesse de ma main libre.
-Arrête de me regarder ainsi.
Elle gigote sur sa chaise. Elle a vu mon intérêt. Je dois la dévorer du regard.
-Je stopperai quand je le voudrai. Et ce n'est pas maintenant. Toutes les choses que j'imagine...
-Tu pourrais imaginer ailleurs ? Me coupe-t-elle.
-Oh non. Je suis bien ici. J'attends la fin de ton service et je te raccompagne. Nous avons à parler.
-De quoi ? Maintenant, c'est bien.
-Non, je veux causer de Kenny et de tes motivations. Tu ne m'as pas convaincu.
-Ok, si tu veux. Tu vas te faire chier, j'en ai encore pour deux bonnes heures. De toute façon, je voulais te voir pour que tu me rendes mon pistolet.
-Et pourquoi je te le restituerais ? J'ai quoi à y gagner, je lui rétorque comme un gros lourdaud.
Jaime lui faire croire que je suis qu'un pauvre mec qui ne pense quavec sa bite. Il y a un peu de vrai mais pas complètement.
-Quoi ? Elle baisse le ton en remarquant que nos voisins se sont retournés. Je t'ai sauvé la vie et un flingue ce n'est pas donné. J'en ai besoin.
-Oui, je suis d'accord. Et merci au fait. Je ne te l'avais pas encore dit. Un oubli de ma part. Mais, je reprends, je veux une rétribution.
-Tu es un sale type, Five !
-Oui, tu le savais non ? Tu m'as dit connaître ma réputation.
Elle soupire et je la vois faire signe à son chef. Il lui montre l'horloge. Sa pause est finie.
-Tu veux quoi ? Soupire-t-elle.
-Je te le dirai tout à l'heure. J'ai du temps pour réfléchir. Maintenant, va bosser et ramène-moi de la tarte. Un bon morceau, j'ai faim.
Elle se lève en râlant. De dos, elle me fait un doigt en s'éloignant, ce qui me fait bien rigoler. Je lorgne son cul jusqu'au comptoir. Deux heures,... si je dois perdre mon temps autant l'utiliser à la mater sous toutes les coutures.
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