
Chapitre 19
Savannah
À peine avais-je senti ce contact ferme dans mon dos et cette main sur bouche qu'une furieuse envie de mordre la paume en question et de balancer mon coude en arrière s'empara de moi. Néanmoins, avant d'avoir eu le temps de faire le moindre mouvement, un souffle chaud me fit frissonner et une voix douce et autoritaire à la fois murmura à mon oreille. Je connaissais cette voix. Elle était la seule que j'avais entendue pendant des jours.
- Alec..., murmurai-je d'une petite voix à peine audible.
Je respirai fort par le nez tellement il me serrait étroitement contre lui, comme si j'allais m'envoler et rejoindre ses amis Lunes. Il finit par me tourner vers lui pour que je lui fisse face, mais garda encore sa main sur ma bouche pour quelques instants.
- Il faut absolument que tu sortes d'ici, déclara-t-il rapidement en regardant déjà ailleurs.
N'ayant pas à fuir son regard, je l'examinai sans discrétion. J'en eus le souffle coupé. L'infirmier de tout à l'heure, c'était lui. Il portait même une blouse blanche à laquelle était accroché un badge avec son nom inscrit dessus. Finalement, je l'avais eu ma réponse. Voilà ce qu'il faisait de ses journées quand ils n'étaient pas dans la forêt. Il empoisonnait des gens comme moi.
- Je te ramène à ma grotte sur le champ, fit-il sévèrement avant d'enfin me lâcher.
Un éclair de dégoût et de frayeur dû briller dans mes yeux un instant car il resta concentré sur moi cette fois-ci.
- Tu as raison je dois sortir d'ici, chuchotai-je avec fureur tout en faisant de grands gestes, il n'est pas question que je retourne dans ta grotte !
Il se détourna et alla inspecter le couloir à travers la vitre de la porte.
- C'est-à-dire que tu n'as pas vraiment le choix, Savannah !
Ma colère redoubla.
- Ramène-moi au pensionnat immédiatement Alec ou je te jure que...
- Que quoi ? m'interrompit-il sans ménagement. Qu'est-ce que tu peux bien faire ? Tu es piégée ici, le moins que tu puisses faire c'est de coopérer quand j'essaie de te sauver la vie.
Il ne plaisantait plus du tout, mais moi non plus.
- Si tu veux vraiment me sauver, aide-moi à rentrer chez moi ! insistai-je, le regard suppliant.
Il me fixa un instant, hésitant, mais secoua rapidement la tête.
- Pas comme ça. Tu n'es pas encore prête, tu n'aurais jamais dû quitter la grotte.
Il me regarda droit dans les yeux pour la première fois depuis qu'il m'avait prise en flagrant délit et je discernai enfin de la peur derrière la colère qui habitait son regard d'émeraude.
- Tu n'as pas la moindre idée de ce que tu viens de faire.
Il se retourna de nouveau vers la porte, me laissant bouche bée. Que voulait-il que je fisse enfin ? Je ne supportais plus de rester enfermée dans cette grotte et l'idée que cela pût prendre encore des semaines avant qu'il ne m'estimât « prête » me terrifiait. Il fallait que je sortisse, il fallait que je retrouvasse ma famille !
Il revint vers moi et m'entraîna vers le fond de la pièce, derrière les machines auxquelles était branchée la jeune fille.
- Je vais aller m'assurer que la voie est libre, tu dois rester cachée, est-ce que c'est clair ? Tu dois à tout prix restée ici, ce n'est pas un jeu, tout ça est bien réel et tu ne sais pas ce qui pourrait se passer si tu sortais de cette chambre. Savannah est-ce que tu m'as bien compris ?
Je le laissai me guider et m'accroupis derrière un gros moniteur.
- Oui, oui ça va...
- Tu restes là où tu es, tu ne touches à rien, tu...tu ne la touches surtout pas à elle !
Il fit enfin référence à la Soleil attachée au lit qui recevait une quantité de sang noir terrifiante.
- J'imagine ce que tu peux ressentir en voyant ça, mais sur ce coup-là tu dois me faire confiance, tout ce que tu pourrais vouloir faire ne ferait qu'empirer les choses, pour elle comme pour toi !
La manière dont il m'agrippait les épaules en disant tout cela m'incita à croire que ce qu'il disait était d'une importance que je ne réalisais pas. Abasourdie, je le regardai quitter la pièce sur ses gardes et s'enfoncer dans le couloir.
Trop...trop d'informations d'un coup. Je n'en pouvais plus. Ma tête tournait et je m'appuyai désespérément contre le mur en priant pour que la douleur cessât. J'avais ignoré ma fatigue et ma faiblesse jusque-là, mais mon corps n'arrivait plus à les chasser. Je le malmenai depuis des jours en refusant de manger une fois sur deux et en ne bougeant pas heure après heure. Sauf qu'il avait choisi le pire moment pour se manifester. Je pouvais lutter contre les migraines, mais j'allais avoir besoin que tous mes sens fussent en alerte, peu importe ce qui allait suivre. Et il faudrait également que je contrôlasse mes émotions. Je m'étais vraiment mise dans une sacrée merde... Mais je ne pouvais pas lâcher maintenant.
Je me demandai ce qui aurait bien pu se passer si cette nuit-là, dans la forêt, je n'avais pas essayé d'impressionner et de sauver Jeremy à la fois, si j'étais simplement restée sur la touche. Personne ne m'en aurait voulu. Mon mentor aurait été davantage malmené avant que ses collègues ne le rejoignissent pour l'aider à se débarrasser du Lune monstrueux qui s'en était pris à nous, mais il aurait été en vie. Nous aurions tous été en vie et nous serions tous rentrés à Minneapolis. Rien de tout cela ne serait arrivé. Si seulement...
Je m'empêchai rapidement de me polluer le cerveau avec tant de « si » et fixai la porte dans l'attente du retour d'Alec. Il avait peut-être raison...ou peut-être pas. J'avais peut-être tort...ou peut-être pas. Comment en être sûre ? Je savais. Je savais à quoi je m'exposais en sortant de la grotte. Je savais ce que je faisais. Je savais pourquoi je le faisais. Je savais que c'était ça le plus important. Je savais que j'étais prête à prendre ce risque. Je savais que j'avais bien plus de chance de mourir que de survivre. Je savais que je me jetais droit vers la mort. Je le savais. Pourtant je n'avais pas réalisé ce que cela voulait réellement dire. Oui, c'était facile de penser : « Je vais peut-être mourir dans peu de temps, mais je ne dois pas laisser la peur m'empêcher d'au moins essayer. » Sauf qu'être morte ne m'aiderait pas à retrouver les personnes que j'aimais. Je ne voulais pas mourir. Je le comprenais maintenant, je ne voulais pas mourir.
- Savannah ! fit la voix d'Alec avec insistance, comme s'il m'appelait pas la deuxième fois.
Je levai la tête vers lui. Il se tenait dans l'embrasure de la porte, m'observant en fronçant les sourcils.
- Est-ce que ça va ? (Je commençai à me relever à l'aide du mur.) Dépêche-toi, on n'a pas beaucoup de temps.
Je le rejoignis en repoussant mes pensées noires et en expédiant ma fatigue, ma douleur et tout ce qui m'empêchait de me relever loin, très loin dans un coin perdu de mon esprit. Je saisis la main qu'il me tendait et m'y accrochai jusqu'à ce que l'adrénaline coulât à nouveau dans mes veines. Avant de quitter la chambre, il me força à me débarrasser de ma ceinture d'armes, mais je devinais qu'elle aurait gêné son plan. Peu de temps après, je recommençai à penser comme avant.
Alec m'entraînait dans les couloirs, s'arrêtant à chaque virage pour s'assurer qu'il n'y avait personne. Absolument chaque couloir me paraissait identique ou presque. Gauche. Gauche. Droite. Gauche. Attendez. Pourquoi sa blouse blanche était-elle tâchée de sang ? Et pourquoi ces couloirs étaient-ils vides ? Même si nous étions les plus chanceux du monde, ça n'existait pas autant de chance !
- Alec...où sont-ils tous passés ? demandai-je finalement.
Il attendit que nous eussions atteint le prochain angle pour se tourner vers moi un instant. Il semblait désolé.
- Tu ne veux pas le savoir, me répondit-il alors.
Je le laissai me tirer par la main, réfléchissant à ce que je devais en déduire. Enfin, nous arrivâmes devant...une rampe. Ils avaient des rampes !? J'avais l'impression de me trouver dans une caserne de pompier, face à cette grande barre métallique qui ne demandait qu'à être agrippée. Alec se pencha dans la sorte du tunnel vertical qui abritait cette rampe pour regarder vers le haut puis vers le bas et se retourna vers moi.
- D'accord alors écoute-moi bien. Cette rampe permet d'accéder à tous les étages inférieurs mais nous on ne doit en descendre qu'un ! Tu reconnaîtras facilement quand un niveau arrivera mais surtout tu dois arrêter de glisser, tu peux ralentir ta descente avec tes mains, tes pieds, tout ce que tu veux mais il faut vraiment le faire sinon tu auras plus de mal à attraper l'anneau.
- L'anneau ? demandai-je incrédule.
- Oui, un peu comme un anneau de gym, tu le reconnaîtras en le voyant. Quand tu arriveras à son niveau tu dois absolument le saisir et lâcher la rampe le plus rapidement possible pour laisser l'élan t'entraîner. L'anneau est fixé à une barre sur laquelle il coulissera dès que tu balanceras ton poids pour atteindre le sol. Ce n'est pas bien compliqué, je passe le premier de toute façon, tu pourras voir comment on fait. Une fois en bas, je te dirai quand tu pourras descendre, mais toi-même tu devras bien vérifier qu'il n'y a personne qui s'apprête à descendre depuis un des niveaux supérieurs.
- Et si quelqu'un commence à descendre avant que tu ne sois en bas et que je t'aie rejoint ?
- Cache-toi le plus vite possible. Vraiment.
Je hochai la tête, très sérieusement.
- Très bien. Tu as tout compris ? s'enquit Alec en me regardant droit dans les yeux.
- Oui. Ça ira, répondis-je avec une assurance chargée de le convaincre ou de nous convaincre, je n'étais pas très fixée là-dessus.
Il souffla alors un bon coup.
- Avant de descendre, j'ai juste un dernier truc à te demander.
Je lui fis signe de parler sans plus attendre.
- Frappe-moi au visage.
Je ne perdis pas plus de temps et lui lançai mon poing dans la figure. Il sembla avoir à peine senti mon coup, puis secoua la tête.
Pourquoi tant d'injustice ?
- Ce n'est pas de ta faute, euh...
Il fouilla ses poches et trouva un stylo.
- OK, griffe-moi avec ça.
J'avais un petit doute sur son idée mais m'exécutai tout de même. Une belle trace mêlée d'encre et de sang se dessina sur son visage. Il y porta sa main en fronçant le nez. Mon ego en aurait vraiment pris un coup supplémentaire s'il n'avait rien senti.
- Parfait. Fais-moi la même chose dans le cou et sur le bras.
Je suivis ses ordres.
- On est bon, fit-il quand j'eus fini. Tiens-toi prête.
Je le vis alors s'emparer de la rampe et se laisser glisser. Discrètement, je fourrai le stylo dans ma poche. Je n'avais peut-être plus de poignard ni de pistolet, mais nous venions de prouver qu'un stylo pouvait s'avérer utile. Enfin, je me rapprochai de la rampe. Juste au-dessus de ma tête se trouvait une seconde barre métallique au bout de laquelle pendait un anneau, semblable à la description d'Alec. Ça aurait pris tellement moins de temps s'il me l'avait juste montré... Bref, tout ceci devenait vraiment sérieux. Je baissai la tête et regardai mon ami s'apprêter à étendre le bras pour s'emparer de l'anneau du niveau inférieur et lâcher la barre. Avec de l'élan, il balança ses jambes vers l'avant et toucha de nouveau le sol. Cela n'avait pas l'air si compliqué.
Néanmoins, rien de tout ceci n'était rassurant. Ici, la roche avait gardé son aspect premier et dégageait quelque chose de sinistre et de sombre. L'espace vide autour de la rampe était relativement étroit et je ne pouvais m'empêcher de craindre la douleur que procurerait le frottement de la pierre contre ma peau. Je n'étais pas épaisse alors il était en réalité peu probable que je la touchasse, mais ce genre de pensée ne se contrôlait pas.
Quelques secondes plus tard, la voix d'Alec m'appela. Comme prévu, je lançai un regard vers les niveaux supérieurs pour m'assurer qu'il n'y avait personne d'autre, puis agrippai à mon tour la rampe. J'enroulai mes jambes autour du métal froid puis commençai à glisser. Je pris de la vitesse et sentis l'air fouetter mes cheveux en peu de temps mais je ne pensais qu'à une chose : attraper ce fichu anneau. Plus je me rapprochais de l'étage en question, plus le couloir était éclairé. C'était quelque chose de faible mais cela résonna en écho dans mon cœur tel une lueur d'espoir. Le cauchemar allait peut-être bientôt prendre fin.
Je plissai les yeux pour me concentrer sur mon objectif, mais ma vision était légèrement floue. J'avais déjà commencé à ralentir et mes paumes me brûlaient davantage à mesure que je resserrai mon emprise. C'était loin d'être la première douleur que je supportais depuis que j'étais ici (ma cheville avait beau aller mieux, il n'en fallait pas beaucoup pour la fatiguer), mais cette douleur-ci était différente. Elle était chaude, brûlante, et réveillait quelque chose au creux de mon ventre. En un instant, mes mains se retrouvèrent enflammées et la douleur disparue. Par chance, ma vision redevint immédiatement claire. Cela n'avait pas grand-chose à voir avec de la chance, mais je refusais toujours de céder.
Quelques secondes plus tard, je m'emparai de l'anneau avec assurance et lâchai la barre. Le poids de mon corps se balança dans le vide si légèrement que j'eus l'impression de voler jusqu'à la terre ferme. Là, Alec m'attendait, tous ses sens en alerte. Je serrai les poings et mes flammes s'éteignirent.
- On fait quoi maintenant ? demandai-je tout en examinant mon nouvel entourage.
Encore une fois, les murs étaient fait de roche brute ici et les couloirs sentaient un mélange d'humidité et de pourriture. Cela ressemblait bien plus à l'idée que l'on se faisait d'un repère de Lunes. Alec me jeta un petit regard désolé.
- Tu fais la morte.
Surprise, j'eus à peine le temps d'écarquiller les yeux qu'il me porta sur son épaule sans me laisser le temps de poser la moindre question. Ne pouvant pas non plus protester, je me contentai de lui donner un coup de coude dans le dos avant de laisser pendre mes bras dans le vide, telle une morte. Cette position n'avait peut-être rien de confortable, mais elle me permettait de poursuivre mon inspection des lieux (même la tête à l'envers), sachant que mes cheveux empêchaient quiconque d'entrevoir mon visage, et donc, mes yeux grands ouverts.
Alec commença à s'engager dans le couloir, comme si je ne pesais pas plus lourd qu'une veste qu'on balançait nonchalamment sur son épaule. Cool... En chemin, je dus tout de même retenir quelques tressautements dès que je voyais apparaître des paires de jambes de Lunes dans mon champ de vision, mais apparemment, c'était tout à fait normal de trimbaler un cadavre sur son épaule dans le coin. Très rassurant...
Tout compte fait, les balancements ne m'avaient pas aidé à découvrir où nous nous trouvions, mais j'y étais quand même parvenue. À plusieurs reprises, j'avais réussi à deviner des lourdes portes, des cadenas et des chaînes. Nous devions être dans une sorte de dortoir comme à Minneapolis, mais en version étrangement sécurisée et morbide. En gros, Alec me ramenait à sa grotte.
Cela n'était pas vraiment surprenant, c'était ce qu'il avait dit qu'il ferait, mais une part de moi n'avait pu s'empêcher d'espérer qu'il me conduisait vers une sortie. Un endroit qui me permettrait de partir loin, très loin de cette montagne. Je ne voulais pas retourner dans cet endroit glauque où j'avais déjà passé beaucoup trop de temps... Mais je ne voulais pas non plus mourir. J'étais désormais entourée de Lunes et même Alec ne pourrait pas m'en protéger. Si seulement voir Jeremy se faire tabasser ne m'avait pas brisé pas le cœur...
C'est alors que quelqu'un dans le couloir interpella Alec.
- Alexander !
En entendant cette voix grave, Alec s'arrêta immédiatement, tendu. Il me semblait avoir déjà entendu cette voix quelque part. Je n'arrivais pas à la replacer, mais j'étais certaine de la connaître.
- Miles..., balbutia Alec, ça va ?
Celui-ci semblait plutôt mal à l'aise. Pas très étonnant...
- Moi ? fit ce certain Miles. Bien sûr.
Deux jambes musclées venaient d'apparaître dans mon champ de vision et j'écarquillai les yeux de terreur en identifiant cette voix rauque. Le Lune de la forêt. C'était lui que j'avais bousculé, c'était lui qui m'avait étranglée contre cet arbre, c'était lui ! Miles... Je me souvenais même qu'Alec avait mentionné son nom ce soir-là pendant qu'il s'efforçait de me convaincre de le suivre. Oh putain...
- Et toi ? demanda-t-il à Alec en lui donnant une tape dans l'épaule (la libre).
Je n'osais même pas imaginer la tête qu'il devait afficher en ce moment.
- Eh bien ça va.
- Est-ce que c'est ce que je pense ? enchaîna Miles.
Je distinguai son bras retombé le long de sa jambe, alors je devinai que c'était sûrement moi qu'il venait de désigner. Ou mes fesses... Vu ma position on
pouvait se poser la question.
- Ce que...
- Tu as enfin décidé de mettre un terme à ton abstinence ? reformula-t-il.
Je n'avais pas la moindre idée de l'excuse qu'avait préparée mon ami ou même s'il en avait préparée une.
- C'est... (Quelle merde.) Une longue histoire. Elle faisait partie des Soleils sur lesquels on expérimente au-dessus. Elle a été ramassée dans la forêt il y a quelques jours et c'était sa première injection aujourd'hui. Disons qu'elle a été un peu plus difficile que prévu à contrôler, les autres s'en souviendront certainement.
- Je vois, elle ne t'a pas laissé le choix, conclut Miles.
- On va dire que je me suis un peu laissé emporter, mais...
Miles fit un pas de plus vers Alec et parla plus doucement, de manière à ne pas être entendu par d'autres Lunes.
- Mais tu as aimé ça, pas vrai ?
Mais t'es un vrai connard surtout !
- Je ne m'y attendais pas, répondit mon ami sur le ton de la confession.
Un rire diabolique s'échappa des lèvres de Miles l'enfoiré.
- Je savais que tu ne tarderais plus à changer d'avis. Allez viens, allons fêter ça en bas.
Ce dernier tenta d'entraîner Alec dans la direction opposée de celle dans laquelle nous étions engagés. Il se montra tout de suite réticent.
- Euh je ne sais pas trop... Enfin tu vois, c'est ma première. Je n'ai pas trop envie de la partager.
Attendez...ils ne sont pas en train de parler de me vider de mon sang et d'arracher ma chaire, là ?
- Je comprends parfaitement Alexander, tu as ma parole, personne ne la touchera. Je m'engage à punir toute personne qui contredirait mes ordres, ne t'inquiète pas pour ça.
Bizarrement, le mot punir sonnait très sanguinaire dans sa bouche. Et puis, « ses ordres » ? C'était qui au juste ici ?
- Hé attends un peu, fit-il encore, je la connais cette fille.
Alec se raidit de nouveau.
- Ah oui ?
- C'est la fille de la forêt de l'autre soir, celle qui a réussi à s'enfuir. Ses amis ont réussi à tuer certains d'entre nous, je ne pourrais pas oublier de tels cheveux.
C'est quoi le rapport entre la mort de Lunes et mes cheveux !?
- Mais ils ne t'ont pas eu toi ! fit légèrement mon ami.
Quel humour mon cher Alec...
- Pff... il faudrait plus que des petites vermines de Soleils pour m'arrêter, ils ne m'ont même pas vu partir pour la poursuivre, à leurs yeux j'ai dû m'être volatilisé comme par magie. De vrais débutants je t'assure.
Euh...va te faire voir ?
- Ah je te crois sans problème, mais sinon euh je préférerais vraiment garder ça personnel.
Je ne préférais pas penser à ce qui pourrait m'arriver si je me retrouvais entourée de Lunes pensant que j'étais déjà morte.
- Mais qu'est-ce que tu racontes ? C'est quelque chose qu'on doit fêter entre frères et sœurs ! Bon d'habitude ont fait ça pour nos enfants de 12 ans mais mieux vaut tard que jamais.
- Miles, insista Alec, je...
- Assez Alexander, le coupa-t-il, presque autoritaire, ce genre de chose ne se refuse pas, surtout pas à moi.
Nous n'avions plus vraiment le choix apparemment.
- D'accord mais personne ne la touche, hein ? s'enquit avec innocence mon porteur.
- Personne, Alexander.
S'il l'appelait encore une fois Alexander j'allais péter un câble. Nous reprîmes alors notre déambulation dans les couloirs jusqu'à ce que nous prissions un escalier. Il n'avait rien à voir avec l'escalier secret que j'avais découvert dans la salle des objets personnels. Celui-ci était large, les marches, régulières, et il était naturellement éclairé. Personne n'aurait eu la moindre difficulté à l'emprunter. J'étais encore loin d'être au bout de mes surprises.
Enfin, nous débouchâmes sur une grande salle bruyante. Je ne pouvais pas encore observer beaucoup de jambes mais je distinguai sans problème les nombreuses voix qui se faisaient entendre ici. Une lumière un peu orangée se reflétait sur le sol et je devinai que c'était un feu qui projetait toutes ces ombres contre les parois rocheuses. C'était la salle commune de tout à l'heure. Celle sur laquelle donnait la pièce où se trouvaient des tonnes d'objets qui ne seraient même pas suffisants pour me sauver, vu la quantité de Lunes qui vivaient ici. Celle qui possédait son propre tas de cadavres.
Je ne veux pas mourir, Alec !!
- Tu n'as qu'à la poser là-bas, fit Miles.
Je pus distinguer l'ombre de son bras désigner un endroit de l'autre côté de la salle. Je n'osai pas imaginer ce qu'il y avait « là-bas ».
- Avec les autres ? s'exclama Alec. Non pas question, tu as dit...
- Je sais que ce que j'ai dit Alexander, l'interrompit le monstre de mes cauchemars.
Je commençai à sentir l'effet du sang qui remontait à ma tête, mais je ne pouvais rien y faire. Je luttai pour garder une vision claire et mettre mes idées en ordre quand la voix de Miles fit taire toutes les autres.
- Mes chers frères et sœurs, votre attention s'il vous plaît. Alexander, notre confrère ici présent, porte sur son épaule quelque chose de très important.
Une chose !?
- Elle n'était pas seulement une Soleil, elle n'était pas seulement une jolie fille, elle n'était pas seulement l'une de nos ennemies. Elle était sa première victime depuis plus de cinq ans !
Des acclamations suivies d'applaudissement rompirent immédiatement le silence. Des « Félicitation ! » et « Mieux vaut tard que jamais ! » rajoutèrent tout juste la dose de perfidie qui manquait à cette situation. J'étais tout simplement stupéfaite devant ces personnes qui étaient réunies pour fêter le premier meurtre de quelqu'un qu'ils pensaient être l'un d'entre eux. Mais qu'y avait-il à fêter là-dedans !? Quel genre de peuple acclamait le sang versé et applaudissait les os brisés ? Qu'avaient-ils dans le crâne ? Leurs cœurs étaient-ils si durent ? Avaient-ils au moins un cœur ?
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Nous voilà à nouveau dans une mauvaise posture... À votre avis, comment vont-ils s'en sortir ? 🤔
À samedi pour la réponse ! 😉😘
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