Chào các bạn! Vì nhiều lý do từ nay Truyen2U chính thức đổi tên là Truyen247.Pro. Mong các bạn tiếp tục ủng hộ truy cập tên miền mới này nhé! Mãi yêu... ♥

II - Chapitre 28

Jeremy
 

Alors que je commençais à cligner lourdement des paupières, j’eus l’impression qu’un voile me couvrait les yeux. Je portai lentement une main à mon visage pour les frotter et je fus cette fois ébloui par quelques rayons de soleil. La lumière plongeait ma chambre dans une atmosphère orangée et une douce odeur ne tarda pas à réveiller mes autres sens. C’était la même odeur qui avait imprégné mes draps il y avait de cela presque un an et demi et à laquelle je m’étais accrochée des nuits entières avant de pouvoir quitter mon lit. C’était simplement mon odeur préférée, celle de Savannah.

Je me redressai lentement et la cherchai du regard, mais je pus constater que j’étais seul encore dans le lit. Je supposai que Savannah était à la salle de bain sans m’inquiéter et pris une seconde pour souffler et chasser l’étrange poids que j’avais sur l’estomac. J’entrepris de m’asseoir au bord du lit et tendit une main vers la table où était déposée ma montre. À plusieurs reprises, je dus fermer les yeux avant de les écarquiller pour être certain de ne pas me tromper. Il était déjà 17h et il s’agissait pas des derniers rayons du soleil qui illuminaient la pièce.

Jamais je n’avais dormi aussi longtemps. Non seulement, une alarme était censée me réveiller en pleine nuit pour reprendre mon service, mais même un sommeil naturel ne durait pas aussitôt. Comme si ce n’était pas déjà suffisant pour m’inquiéter, je me sentais confus et nauséeux. Quelque chose n’allait pas. Je me levai et dus lutter contre une violente sensation de vertige avant de pouvoir aller jusqu’à la salle de bain. Bien sûr, elle était vide.

Je retournai dans la chambre et n’y trouvai pas non plus la moindre trace de Savannah. La vaisselle de notre repas de la veille traînait encore sur le sol et la moquette arborait une large tâche de sang séché. Au moins, je n’avais pas rêvé la nuit dernière. Mais alors que s’était-il passé ? Était-elle simplement partie sans laisser le moindre mot ? Avait-elle fui en réalisant que c’était une erreur ? Avait-elle eu peur que son père ne l’a trouvât ici ? Et pourquoi venais-je seulement de me réveiller ? Se pouvait-il que ce ne fût qu’un malentendant et qu’elle entrât d’un moment à l’autre par la porte, se manquant de moi pour avoir autant traîné au lit ?

De puissants coups frappèrent alors à ma porte et me sortirent de ma stupeur abrutissante. Je me frappai bêtement le visage pour me réveiller, j’enfilai le pantalon que je trouvai par terre et me dirigeai enfin vers la porte avant qu’elle ne fût arrachée de ses gongs. Je découvris Chris sur le pas de la porte, en tenue de service et le visage rouge de colère. Je tentai de me souvenir sur quel service il était aujourd’hui mais j’en fus absolument incapable. Tout ce que je savais, c’était que je ne l’avais jamais vu dans cet état. Le doyen des Soleils de Thompson était toujours un modèle de sérénité et de sang-froid.

– Chris…

Son poing était venu s’écraser sur ma mâchoire avant que je ne pusse articuler le moindre son supplémentaire. Je me retrouvai déséquilibré et si le mur n’avait pas été là pour me stabiliser, je serais minablement tombé au sol.

– Où étais-tu ? me hurla-t-il dessus en claquant la porte derrière lui.

Je reculai vivement, une main massant ma mâchoire, hébété.

– As-tu la moindre de ce qu’il s’est passé ? continua-t-il en me fusillant du regard. Je n’en ai rien à faire si ce n’est pas encore l’heure de ton service, quand tu es appelé en renfort, tu te lèves et tu ramènes ton putain de cul !

J’entrepris de respirer profondément pour parvenir à le regarder dans le yeux et à enfin dire quelque chose mais tout tanguait autour de moi.

– Et tu me regardes quand je te parle, Scandola !!

Il semblait sur le point de me frapper à nouveau lorsque je me précipitai à la salle de bain pour vomir mes tripes. Chris cessa alors de crier et il attendit d’un pied ferme que j’eusse finis. Faiblement, je parvins à me relever et allai me rincer le visage en m’agrippant toujours d’une main au bord du lavabo. Lorsque je me retournai enfin, l’expression de Chris semblait avoir changé.

– Je suis désolé, soupirai-je, je ne sais pas…

– Qui était là la nuit dernière ? m’interrompit-il sévèrement.

Je jetai un coup d’œil vers la chambre et de toute évidence, personne ne pouvait manquer ni les verres et assiettes pour deux ni la tâche de sang. Toutefois, et même avec l’état dans lequel je me trouvais, j’étais suffisamment conscient pour réaliser que je ne pouvais pas simplement dire la vérité.

– Pourquoi ? fis-je donc avec méfiance.

Chris leva les yeux au ciel et ses narines se gonflèrent à nouveau de colère.

– Tu ne risques pas d’être viré, imbécile, Thompson est déjà mort !

Mon visage se décomposa en comprenant pourquoi mon collègue était si remonté. Mon employeur était mort. Pas juste mort, certainement, il avait dû être assassiné pendant que moi je…

– Scandola ! cria-t-il pour attirer mon attention. Qui était ici la nuit dernière ?

Je secouai la tête, épuisé.

– Euh...une femme que j’ai rencontré il y a quelques soirs.

Chris ferma brièvement les yeux comme déception avant de me tendre un verre que je n’avais même pas remarqué qu’il avait attrapé. Je le pris dans mes mains, ne comprenant pas où il voulait en venir.

– Tes choix en matière de femmes sont absolument affreux, souffla-t-il. Tu as été drogué.

Sans une explication de plus, il quitta la chambre d’un pas lourd, me laissant seul face à l’incompréhension. Avait-il dit « drogué » ? Je portai mon attention sur le verre en question et après un dur effort de concentration, je parvins à discerner des résidus de poudre dans lesquelles gouttes de vin qu’il restait. Le verre m’échappa instantanément des mains et se brisa sur le carrelage. Était-ce trop ridicule de dire « comme mon cœur » ? Parce que c’était certainement l’effet que je ressentais.

Sentant que mes jambes allaient bientôt me faire défaut, je m’assis sur le sol froid, parmi les morceaux de verre brisés, le regard fixé dans le vide. J’ignorais si c’était un autre effet secondaire de la drogue que l’on m’avait administré – qu’elle m’avait administré – mais je fus incapable de retenir les larmes qui montèrent me piquer les yeux. Aucun sang froid, aucune respiration, aucune parole raisonnable n’aurait pu alléger ma douleur. Le pire scénario auquel j’aurais pu penser était celui qui s’avérait réel.

Ce n’était qu’un mensonge. Ses larmes. Ses regards. Ses sourires. Ses baisers. Ce n’était qu’un mensonge. Et pour quoi ? Pour tuer mon employeur ? Comment avait-elle pu ? Comment avait-elle pu me tromper ainsi ? Pas même dans mes pires cauchemars, pas même quand des personnes qui m’étaient aussi chères que ma propre mère et ma propre sœur me répétaient qu’elle n’en valait pas la peine, je n’aurais pu imaginer que Savannah utiliserait mon amour pour elle comme une arme.

Je finis par sécher mes larmes et à reprendre le contrôle de mon esprit et de mon corps. Beaucoup de choses m’échappaient encore mais une autre était certaine : j’allais la forcer à m’expliquer pourquoi et comment elle avait pu me faire cela et ensuite, s’il le fallait, je la dénoncerais.

Une semaine plus tard, la plupart des éminences américaines qui s’étaient déplacées pour les Jeux d’Hiver étaient de retour aux États-Unis, un retour quelque peu bousculé par le décès de mon employeur. Mme Thompson s’était assurée que tous les Soleils de son mari seraient rapatriés sans coût et contrairement à ce que certaines personnes lui avaient recommandé, elle avait décidé de ne pas porter plainte contre nous. Il était évident que cela n’aurait pas ramené son mari mais elle aurait ainsi pu faire en sorte qu’aucun de nous ne retrouvât un jour du travail auprès d’un particulier.

Malgré cela, tous mes collègues se retrouvaient au chômage et plainte ou non, quiconque examinerait leur dossier et verrait qu’ils travaillaient pour Thompson au moment de l’attaque mettrait immédiatement cette candidature en bas de la pile, si ce n’était à la poubelle. Bien que je n’y étais réellement pour rien, je ne pouvais m’empêcher de me sentir coupable. J’aurais dû voir à travers son jeu. J’aurais dû me douter que ses sentiments à mon égard n’avaient pas pu changer aussi brusquement. J’aurais dû anticiper que le moindre de ses gestes étaient guidés à la baguette par son père.

Néanmoins, je ne pouvais pas revenir en arrière sauver la vie de M. Thompson ni l’emploi de mes collègues, mais je pouvais au moins m’assurer que cela ne se reproduisît pas. Je pouvais au moins m’assurer que Savannah ne tuerait plus jamais d’innocents, qu’il s’agît de sa propre volonté ou non. Ainsi, lorsque l’occasion se présentât, je fus prêt.

La marque de cosmétique dont Savannah était une des égéries organisait une somptueuse soirée en l’honneur du lancement de leur nouvelle collection et elle y était bien sûr invitée. Il s’agissait d’une collection végane, soucieuse du respect de l’environnement et du bien-être animal, qui prônait un retour au naturel dans tous les sens du terme. La décoration était ainsi à la fois simple, épurée et florale. La nourriture servie était elle aussi végane et il n’y avait pas la moindre trace de plastique dans la vaisselle. Je trouvais cela ironique de voir Savannah dans un milieu si attentif à la vie de la faune et de la flore, tandis qu’une semaine plus tôt elle avait pris la vie d’un homme.

J’étais parvenu à entrer dans cette soirée en toute discrétion et le moment venu, je fis preuve de tout autant de finesse pour attraper le bras de Savannah alors qu’elle s’éloignait d’un groupe de personne et l’attirait à l’abri des regards derrière un mur de fleurs. Elle m’avait bien sûr reconnu avant même que mon visage ne fût à la lumière et la seule raison qui l’avait empêchée de se débattre était de ne pas vouloir attirer l’attention. Cependant, à l’instant où nous fûmes seuls, elle n’hésita pas à m’envoyer tout son mécontentement via un regard sanglant.

– Qu’est-ce que tu fais ici, putain !? grogna-t-elle.

Je doutais que quiconque pût nous entendre à cause de la musique qui était jouée de l’autre côté du mur, mais comme elle, je ne haussai pas la voix. Pour la première fois depuis que je l’avais revue après mon retour de l’armée, je réunis toutes mes forces pour m’empêcher de l’observer attentivement et de penser à quel point elle était belle, comme je le faisais toujours. Cette fois-ci, elle ne m’aurait pas.

– On a des comptes à régler toi et moi, répondis-je gravement.

J’espérais que l’expression de mon visage était aussi sérieuse que je l’étais, toutefois Savannah haussa un sourcil presque amusé.

– Il n’y a pas de toi et moi, pas plus que de comptes à régler.

Je relevai le menton et croisai les bras.

– Mon employeur a été assassiné en Russie la semaine dernière, je suis certain que ça te parle, Savannah.

Elle m’imita et redressa la tête avant de croiser les bras.

– Je ne vois pas pourquoi.

Son ton était sec, mais pas aussi méprisant qu’il avait pu être par le passer.

– Tu sais que certains m’en tienne responsable ? continuai-je. Tu sais que sa mort remet en cause les capacités de nombreux Soleils qui pourraient tout perdre d’un jour à l’autre maintenant.

Elle leva les yeux au ciel et laissa ses bras retombés le long de sa jupe vert sapin, dévoilant ses jambes musclées, d’autant plus avec des talons aiguille. Il lui avait certainement fallu des semaines d’entraînement pour être aussi à l’aise, elle avait toujours détesté les talons aussi hauts.

Putain, Jeremy, arrête ça !

– Je ne vois toujours pas ce qui te fait croire que j’ai quoi que ce soit à voir là-dedans, rétorqua-t-elle, mais ce que je peux te dire, c’est que ce n’était pas ta faute, il aurait dû écouter ses propres alliés s’il voulait rester en vie.

Mes muscles commencèrent à se raidir.

– Comment ça ?

– Quant tu te retrouves au milieu d'une guerre de pouvoir, bien choisir sa protection est primordiale. L'option la plus sage c'est bien sûr d'engager un Soleil recruter par les chefs de ton camp, l'option la plus risquée serait d'accepter d'engager un infiltré pour lui donner de fausses informations à transmettre au camp adversaire et la troisième option est d'engager un inconnu qui ignore ce qu'il se passe réellement autour de lui. Ça, c'est l'option la plus stupide, conclut-elle avec un sourire chargé de condescendance.

Je m’efforçai de ne pas resté fixé sur le sourire en question et sur ses lèvres roses, mais de me concentrer sur ce qui m’énervait réellement.

– Et tu veux toujours me faire croire que tu ne vois pas de quoi je parle ? Tu ne trompes plus personne, Savannah. J'ai fait mon enquête et je sais que tu es impliquée dans pas moins de 20 assassinats.

– 25, me corrigea-t-elle avec une moue navrée, mais t’étais pas loin, je t’accorde au moins ça.

Je ne pus que la dévisager, ahuri.

– Comment as-tu pu ? Pourquoi !?

Elle balaya mes questions d’un geste de la main.

– Tout ce que tu as besoin de savoir c’est que c’était la bonne chose à faire.

– Ah oui ? m’étonnai-je en haussant les sourcils.

Je réunis ensuite mes forces pour sonner énervé et pas vexé.

– Et partir assassiner mon patron après avoir passé la nuit avec moi c’était aussi la bonne chose à faire ?

Savannah écarquilla les yeux et un rire sarcastique se déploya de sa gorge.

– Oh je t’en prie ! N’aie pas l’air si surpris, je ne t’ai rien fait que tu ne m’as pas déjà fait !

Je restai un instant sans voix, comme attendant qu’elle ajouta quelque chose mais elle n’en fit rien. Elle avait l’air parfaitement sérieuse.

– Je te demande pardon ?

Son regard se durcit et elle fit un pas vers moi.

– Tu m’as très bien comprise. J’ai menti, je t’ai laissé croire que j’étais tienne, je t’ai laissé m’aimer puis je suis partie. Je suis certaine que ça te parle, Jeremy.

Je continuai de la dévisager, les sourcils froncés, et je réfléchis à ce que j’aurais pu faire pour mériter cela, mais je ne trouvai rien.

– Là je ne te suis vraiment pas…

– Ne t’embête pas à le nier ! s’exclama-t-elle en reculant. J’ai vu les vidéos de surveillance ce jour-là, je t’ai vu accepter la bonne grosse enveloppe de frique de mon père et quitter la maison !

Je commençai à comprendre à quoi elle faisait référence, toutefois ça n’avait toujours aucun sens.

– Le frique de ton père ? Mais enfin je l’ai balancé en l’air à la seconde où je suis sorti de la maison !

L’expression de Savannah se figea l’espace d’une seconde, puis elle secoua vivement la tête, l’air presque triste.

– Eh bien ça ne change rien au fait que tu sois parti. J’avais besoin de toi et tu avais promis de ne jamais m’abandonner, mais tu l’as fait. Comment as-tu pu croire que je te le pardonnerais un jour ?

Son était si perçant qu’il aurait pu me faire culpabiliser pour quelque chose que j’ignorais avoir fait. Néanmoins, cette situation devenait absurde.

– Mais que voulais-tu que je fasse ? m’écriai-je mon tour. Passer quelques jours avec ton père pour faire sa connaissance alors qu’il venait de te tuer sous mes yeux !?

Savannah ouvrit la bouche, déjà prête à rétorquer quelque chose, puis elle sembla réaliser ce que je venais vraiment de dire. Elle perdit sa voix et à son tour, elle parût confuse et hébétée.

– ...Quoi ?

– Tu étais morte, Savannah ! insistai-je en me remémorant la détresse qui avait été la mienne.

Elle me tourna alors brusquement le dos, non pas pour partir mais comme pour ne plus sentir le poids de mon regard et réfléchir calmement. Je pouvais parfaitement imaginer les rouages de son cerveau s’activer mais je ne comprenais pas bien pourquoi. Elle était morte, c’était un fait, et il était impossible que son père eût pu le lui cacher.

– Ce que tu racontes n’a aucun sens, souffla-t-elle finalement en me refaisant face.

Je haussai bêtement les épaules, ne sachant que répondre.

– Pourtant je m’en souviens comme si c’était hier. Nous étions chacun dans une de ces horribles salles blanches séparées par une vitre de verre blindé. Tu étais en train de te battre contre un des hommes de ton père que il a simplement dit à travers les haut-parleurs : « Ça suffit. » Un instant plus tard, un autre homme est arrivé, un Soleil cette fois, il t'a…

Ma gorge se serra et la scène se joua à nouveau dans mon esprit.

– Il a formé deux piques de glace et il t'a transpercé le ventre et la poitrine avec. Je n'ai rien pu faire pour te sauver. Ils sont juste partis et ils t'ont laissée te vider de ton sang. J'ai tout essayé, j'ai tout fait pour briser le verre qui nous séparait et te sauver, tu dois me croire, insistai-je en l’implorant du regard. J'ai tout essayé mais il n'y avait rien à faire. Je t'ai regardée mourir lentement et je n'ai même pas pu te prendre dans mes bras ou t'embrasser une dernière fois. Ils m'ont laissé pleurer, hurler et frapper ce putain de mur en verre pendant des heures avant de venir me chercher pour me jeter dehors. Et j'ai passé l’année suivante à te croire morte. Et tu l'étais ! Je… Encore aujourd'hui, je ne comprends rien, je...je ne m'explique pas comment tu as pu survivre.

J’observai ensuite la poitrine de Savannah se soulever lentement, à un rythme particulièrement régulier, comme si elle faisait un effort pour calmer les battements de son cœur, tandis que ses yeux turquoises fuyaient les miens mais ne parvenaient à se poser nulle part. Elle passa finalement une main nerveuse dans ses cheveux avant de déglutir et d’articuler :

– Je… Non.

J’eus un léger mouvement de recul, l’air de dire : « C’est tout ? ». Elle s’empressa de reprendre :

– Je veux dire, je me souviens de la voix de mon père et d’avoir vu ce Soleil entrer juste après, mais..il ne m'a pas tuée, il m'a juste assommée, révéla-t-elle dans un souffle.

Mon cœur fit un bon dans ma poitrine et je retins inconsciemment mon propre souffle.

– Je me souviens m'être réveillée des heures plus tard dans une autre pièce, toute seule. Ensuite on m'a conduite dans une sorte de salle de surveillance où se trouvait mon père. Là, il m'a dit qu'il t'avait laissé le choix entre te battre pour moi ou accepter assez d'argent pour que ta famille n'ait plus jamais de problème et ne reçoive plus de menace de sa part, à condition que tu ne revienne plus jamais.

Savannah planta alors son regard dans le mien.

– Tu as pris l'argent et tu es parti, conclut-elle durement.

– Je…

À mon tour, j’eus dû mal à trouver les mots.

– Ce n’est pas du tout ce qu’il s’est passé, Savannah, je te le jure ! m’exclamai-je en avançant vers elle.

Elle s’empressa de reculer et de lever un bras pour me maintenir à distance.

– Tu m’as abandonnée et tout ce que tu as trouvé à dire c’est que tu étais désolé ! grogna-t-elle à la fois avec douleur et colère.

Ses yeux étaient de plus en plus brillants et j’aperçus pour la première fois ce qu’elle cachait derrière la haine qu’elle prenait soin d’avoir à mon égard en permanence : un cœur brisé. Je n’insistai donc pas pour me rapprocher davantage d’elle et cherchai plutôt à m’assurer qu’elle vît la sincérité de mes paroles.

– Jamais, Savannah, jamais je ne t’aurais abandonnée dans les mains de ton père. Je ne l’aurais pas fait pour tout l’argent du monde et encore moins le sien. Je me suis tellement battu pour toi, si tu savais. Et je ne parle pas juste de ce jour-là mais de tous les jours depuis que je t’ai rencontrée. Je me suis battu contre tes professeurs au pensionnat pour qu’ils te donnent une seconde chance, je me suis battue contre John pour ce qu’il t’avait fait, je me suis battu contre des Lunes, souvent je me suis battu contre moi-même lorsque je sentais que je tombais amoureux, puis je me suis battu contre ta famille, même contre ma propre famille lorsqu’ils me répétaient que tu n’en valais pas la peine et je me suis battu contre ce putain de mur de verre à m’en briser les os pour essayer de te sauver.

Je fis un pas vers elle, tandis qu’une larme glissait le long de sa joue.

– Je n’ai jamais cessé de me battre pour toi, Savannah et je ne cesserai jamais.

Elle détourna les yeux et se mordit nerveusement la lèvre inférieure alors que la distance entre nous se réduisait. Délicatement, je portai une main à sa joue.

– Anna… Regarde-moi.

Elle releva le menton vers moi.

– Peux-tu me regarder droit dans les yeux et me dire que tu crois encore que je t’ai abandonnée ?

Elle entrouvrit légèrement les lèvres mais il lui fallut encore plusieurs secondes avant de pouvoir répondre.

– Je ne sais pas, je ne sais plus…

Je la pris dans mes bras pour qu’elle pût sentir tout l’amour que j’avais pour elle et elle finit par me rendre mon étreinte. De nouveau, la délicieuse odeur de ses cheveux emplit mes narines et je n’eus plus la moindre envie de la lâcher.

– Je ne comprends pas comment il a pu nous tromper ainsi, soufflai-je avec peine.

Savannah rompit finalement notre étreinte pour reculer un peu et reprendre le contrôle de ses émotions.

– Trevor, déclara-t-elle alors.

– Pardon ?

Je ne voyais pas très bien ce que son copain venait faire dans cette histoire… À ce propos, devais-je le mentionner ? Savannah l’avait définitivement trompé avec moi – peu importait ses raisons – et quand bien même je l’avais en horreur, je le respectais suffisamment pour ne pas lui faire ça.

– Trevor travaille pour nous, expliqua-t-elle, c’est...c’est un Soleil télépathe, il est capable de manipuler l’esprit des gens, il est même très doué pour montrer à n’importe qui ce que mon père veut leur faire voir. Ses hallucinations s’avèrent souvent utiles en mission.

Du moins, c’était le cas jusqu’à présent. Cet homme était entré dans mon esprit à mon insu et il m’avait fait voir ce que j’avais de plus précieux se vider de son sang. Après Arthur Hamilton, il serait le prochain à payer.

– Je vois. C’était une hallucination.

Savannah prit une inspiration avant de soupirer :

– Ça n’a plus d’importance, c’est trop tard pour revenir en arrière de toute façon.

Son expression recommença à se faire plus sévère et je me doutai que nous nous apprêtions à refaire un pas en arrière.

– Qu’est-ce que tu veux dire ?

– Il faut que j’y retourne, mes parents doivent être arrivés maintenant, répondit-elle en commençant déjà à se retourner.

– Quoi !? m’écriai-je soudain. Non ! Pourquoi...pourquoi voudrais-tu les retrouver ? On vient de découvrir qu’ils t’ont menti et manipulée pour que tu fasses leur sale boulot pendant des mois !

Je savais que l’influence qu’ils exerçaient sur elle devait être forte et je ne doutai pas qu’une partie au moins de tout ce qu’elle m’avait confié en Russie était vraie, mais elle avait encore le pouvoir de se libérer. Toutefois, elle secoua la tête.

– Ce n’est pas ce que tu crois.

J’avais peut-être tort mais je ne supportais pas de la voir partir ainsi alors que nous avions enfin compris ce qu’il s’était passé un an plus tôt et que ce n’était la faute d’aucun d’entre nous, alors je m’interposai entre elle et la sortie qui la mènerait dans la salle principale.

– Pourquoi est-ce que tu continues de les défendre ? Tu n’as pas à faire bonne figure avec moi, je sais exactement qui ils sont et je n’ose pas imaginer les souffrances qu’ils t’ont fait subir, mais tu peux y mettre un terme, Savannah !

Si jusqu’ici elle avait été patiente, je compris rapidement à sa gestuelle que ça n’allait plus durer.

– Il y a tellement de choses que tu ignores, Jeremy ! Cette histoire n’a rien à voir avec nous !

– Alors de quoi s’agit-il ? répliquai-je sur le même ton. Parle-moi !

Elle parût hésiter un instant, les membres raides, avant de répondre :

– J’ai passé un accord avec mon père, d’accord ? Je ne peux pas partir et je ne veux pas le faire.

Je fronçai les sourcils avec méfiance.

– Quel genre d’accord ?

Elle serra alors les poings.

– J’en ai déjà trop dit.

Il était vrai qu’elle ne m’avait jamais autant révéler d’informations le même jour, aussi vagues fussent-elles, mais je n’aurais jamais considérer que c’était « trop ».

– Savannah, la suppliai-je tant qu’elle était encore à ma portée.

– Le genre où tout le monde est gagnant, tu n’as pas à t’inquiéter.

Comment pouvais-je ne pas m’inquiéter ? Sa famille était en train de la transformer en une meurtrière !

– Et les 25 personnes que vous avez tuées, elles étaient gagnantes elles aussi ? lui demandai-je, outré.

Elle détourna le regard et je crus un instant que c’était par culpabilité, mais j’avais tort, elle ne voulait simplement pas en parler. Ce n’était qu’un sujet déplaisant pour elle.

– C’est différent.

– En quoi ?

– C’est différent, un point c’est tout ! commença-t-elle à s’énerver.

Elle se rapprocha pour me faire comprendre qu’elle avait l’intention de partir mais je ne bougeai pas d’un centimètre.

– Savannah, tu n’es pas obligée de continuer comme ça, tu n’es plus seule, laisse-moi t’aider !

Cette dernière continua de secoua la tête.

– Tu ne comprends vraiment pas, Jeremy. Dans très peu de temps, mon père ne sera plus mon patron mais mon partenaire et j'aurais autant besoin de lui qu'il a besoin de moi en ce moment.

Je refusais de croire qu’il était trop tard.

– J’étais persuadé que tu ne voulais rien avoir à faire avec lui après tout ce qu’il t’avait fait.

Savannah sembla retrouver un certain calme et son regard s’adoucit. Elle devait sentir à quel point j’étais désemparé.

– C’était vrai au début. Mais depuis j’ai compris que mon père n’était pas celui dont nous devions avoir peur.

– Comment peux-tu en être certaine ?

– Parce que j’ai déjà croisé ceux contre qui nous nous battons. La première fois, j'ai vu Marley se faire assassiner. La deuxième fois, les Darcy sont morts. La troisième fois, Lizzy a été transformée en Lune. Et ce n'était que le début d'une guerre à l'étendue bien plus large que tu ne le penses.

Je parvins à assembler les pièces du puzzle sans difficulté, cependant le résultat me laissait perplexe.

– Es-tu en train de dire… Qu’est-ce que les Sherwood viennent faire là-dedans ?

Elle m’adressa une moue de résignation

– Tu le découvriras par toi-même bien assez tôt.

Un soupir de frustration m’échappa.

– Pourquoi refuses-tu à ce point de m’éclairer sur la situation ?

– Parce que tu n’as pas la moindre idée dans quoi tu mets les pieds. Tu as déjà eu beaucoup de chance de t’en sortir vivant alors que tu protégeais Thompson.

Je fis un pas vers elle, pris ses mains dans les miennes et plongeai un regard chargé de détermination dans ses yeux perçants.

– Je n’ai pas peur, Anna. Je veux seulement que tu sois en sécurité et m’assurer que dans un an tu pourras encore te regarder dans le miroir. C’est ce que tu as fait pour moi.

– Jeremy, murmura-t-elle en collant son front contre le mien, si tu veux vraiment m’aider, fais-moi confiance quand je te dis que je sais ce que je fais.

Elle déposa ensuite un baiser sur ma joue, puis lâcha mes mains et partit rejoindre ses parents. Je restai là encore quelques minutes à m’apitoyer sur mon sort. J’étais celui qui faisait tous les efforts et prenait toujours le risque d’ouvrir les portes pour elle, quoiqu’il arrivât, et j’étais encore celui qui se cognait contre des murs de brique.

Bạn đang đọc truyện trên: Truyen247.Pro