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32. Spectre

"Un rêve sans étoiles est un rêve oublié." - Paul Eluard


***

Sol 412, sol 426, sol 434, sol 458... L'Utopia se placera en orbite à sol 88, an martien 12. Je compte les jours qu'il me reste à vivre sur Mars. Un long compte à rebours qui m'enivre autant qu'il me remplit d'horreur.

Quitter ce monde que j'ai connu. Quitter mes parents, Hayden, et tous les autres.

Caméra en main, j'immortalise chaque instant. Jason qui me demande ce qu'est une nébuleuse. Hayden qui sourit. Les paysages ocres à travers la vitre du rover. La salle commune qui résonne de rires et de discussions.

Je sais que pendant tous ces mois, je me suis fourvoyée. Le bonheur était juste là, sous mes yeux. Et rien dans l'univers ne saurait l'égaler.

Tout à coup, je ne suis plus certaine de vouloir partir.

Et puis, je suis née sur Mars. Malgré sa dangerosité, elle ne m'est plus si hostile - c'est chez moi. Alors, qui dit que j'arriverai à survivre à la Terre ?

Mais je ne peux plus me défiler : les terriens m'attendent. Et après avoir investis tant d'argent dans le voyage du retour, Mars Utopia ne me laissera pas renoncer. Enfin, il y a Jason, Sélina, Xiaoyun. Je suis la seule responsable de leur départ. Je ne peux pas abandonner, pas maintenant.

À chaque fois que je fais quelque chose, je ne peux m'empêcher de me dire qu'il s'agit d'une des dernières fois. Combien de fois encore nettoierai-je les panneaux solaires aux côtés d'Hayden ? Combien de fois monterai-je dans un rover avant de quitter Mars ? Combien de fois encore Hayden caressera-t-il ma joue ? Combien de fois encore, ses lèvres sur les miennes ? La seule chose dont je suis certaine, c'est le nombre de jours qu'il me reste à vivre sur la planète rouge.

***

Sol 462, an martien 11, 16h34, heure martienne.

Je me trouve dans la salle de communication avec ma mère. L'équipe technique de Mars Utopia vient de nous annoncer que la capsule, qui nous permettra d'entrer dans l'atmosphère terrestre une fois en orbite de la planète bleue, a été amarrée au vaisseau. Ce module d'atterrissage, servant initialement au retour des taikonautes en mission dans la station spatiale chinoise, nous a été gracieusement fourni par la Chine.

Le projet de notre retour sur Terre se précise, et c'est peut-être pour cela que ma mère se tourne vers moi, un triste sourire aux lèvres.

— Tu vas me manquer, ma chérie. Tu vas tellement me manquer.

— Maman... Je pourrais toujours te parler. Et la colonisation va se poursuivre. Si je n'aime pas la Terre, je referai le voyage jusqu'ici, ou tu viendras sur Terre, toi.

Mais je sais pertinemment qu'elle n'abandonnerait Mars pour rien au monde.

Sa main se pose sur ma joue.

— Non, Harmony, tu sais très bien que si tu pars, tu ne reviendras jamais... Nous ne nous reverrons jamais.

Ma mère me regarde, des larmes emplissant ses yeux. Une culpabilité atroce me saisit, et je m'en veux tant de la faire souffrir. J'aurais dû penser à elle, à mon père. Je suis si égoïste.

Je tombe dans ses bras, la serrant fort, comme autrefois, la nuit, lorsque j'avais peur du monstre de Mars.

— Je sais. Je suis désolée...

Un sanglot secoue ma poitrine, irrépressible.

— Sois heureuse. Promets-le moi.

Être heureuse ? Sans elle, sans mon père, sans Hayden ? Des larmes coulent sur mes joues, tandis que j'agrippe encore un peu plus fort ses vêtements.

— Promets-le moi, répète-elle.

J'acquiesce, la tête enfouie dans son épaule.

Je ne veux plus voir, plus entendre, plus parler.

Parce que, à cet instant, je prends conscience de cette terrible réalité, dans son entièreté. Ma mère a raison. Il n'y aura pas de retour. J'ai signé pour un aller simple vers la Terre. Mars Utopia ne me laissera pas m'enfuir.

***

Le mélange de sable et de cailloux sous les épaisses semelles de nos combinaisons intra-véhiculaires crisse en une cacophonie infernale.

— Tu sais quel jour on est, aujourd'hui ?

Sol 526, an martien 11, 14h21, heure martienne.

— Sol 526. L'Utopia part demain de la Terre.

— C'est vrai. Mais ce n'est pas pour ça que je te le demandais.

— Pour quoi, alors ?

Hayden passe un bras autour de mes épaules. Nous nous tenons à bonne distance de la base, notre rover arrêté à quelques mètres de là. Sithonius Lacus n'est qu'une étoile difforme de dômes étincelants en contrebas, vu d'ici.

— Joyeux anniversaire, lâche-t-il au bout d'un moment.

Un stupide sourire étire mes lèvres. Les différences de calendrier font qu'aujourd'hui, c'est mon deuxième anniversaire de l'année martienne. J'ai dix-neuf ans terrestres au compteur.

— Merci, dis-je dans un souffle.

Nos casques s'entrechoquent en une parodie de baiser. Ses mains gantées enserrent chaque côté de la vitre protectrice, et je fais de même sur la sienne.

— J'ai oublié ton anniversaire, dis-je tout à coup. C'était quand ?

— Il y a un mois environ. Mais ça ne fait rien. Je t'aime.

Sol 526, an martien 11, 16h34, heure martienne.

Lorsque nous rentrons à la base, pour l'occasion, Hayden m'apporte une part de gâteau au chocolat lyophilisée. Je proteste. Depuis le début des catastrophes, plus personne ne se soucie de célébrer quoi que ce soit, et puis nous devons nous rationner jusqu'au largage des vivres.

— C'est ton dernier anniversaire sur Mars. Profite.

Sa remarque me refroidit quelque peu, mais je continue de sourire. Pour lui, parce qu'il nous fait vivre, parce que je l'aime.

Parce que je dois graver tous ces instants dans ma mémoire. Parce que j'ai beau affirmer le contraire, je ne reviendrai jamais ici.

***

Sol 668, an martien 11, 23h59, heure martienne.

Nous fêtons la nouvelle année martienne avec un pincement au coeur. Auparavant, le passage d'une année à une autre se faisait à grands renforts de plats de haute gastronomie déshydratés, envoyés par les plus grands chefs terriens en provenance de tous les continents. Chaque an martien qui s'écoulait était le symbole de la réussite de notre colonisation.

Si, à minuit, quelques uns d'entre nous se souhaitent une bonne année, le coeur n'y est pas, et l'atmosphère retombe bien vite. Nous avons tous bien trop conscience de la faim qui commence à tenailler nos corps, de nos réserves qui s'épuisent.

***

Sol 16, an martien 12, 00h05, heure martienne.

— Soixante-douze sols, chuchote Hayden, allongé à mes côtés dans les ténèbres.

— Chut.

Je n'ai vraiment pas envie qu'il me le rappelle maintenant, mais il poursuit :

— J'ai de la chance de t'avoir dans ma vie.

Ses doigts se promènent sur mon bras, traçant des arabesques mystiques. Ses lèvres viennent chercher un baiser, mon coeur s'emballe.

Soixante-douze sols. C'est si peu.

— Est-ce que je peux te demander une faveur ? murmure Hayden contre mon oreille.

— Tout ce que tu veux.

Ses doigts enserrent mes joues, tandis qu'il embrasse mon front.

— Ne m'oublie pas. Je sais bien que tu referas ta vie sur Terre. Mais si tu pouvais juste garder un souvenir de moi...

Ma gorge se serre tant que je n'arrive plus à articuler le moindre son. Des larmes brûlantes s'écoulant sur mes joues, je suffoque. Quelque chose pulse dans la moindre de mes cellules. Un désir ardent de vivre. Un besoin inextinguible d'être à ses côtés pour toujours.

Lentement, mes mains courent sur son buste, jusqu'à trouver l'attache de sa sous-combinaison.

Je veux vivre, vivre, vivre. Le sang bat à mes tempes, impétueux. Je frémis lorsque ses doigts se glissent jusqu'à la fermeture éclair de ma combinaison, puis lorsqu'ils s'aventurent sur mes épaules, sur mon dos, remontent vers mon visage pour chasser mes larmes.

Je pose mes lèvres sur les siennes, les paumes de mes mains caressent son torse nu. Hayden caresse ma joue du bout des doigts.

J'aimerai lui dire que je l'aime, mais les mots sont comme bloqués dans ma gorge. J'entends son coeur battre à toute rompre, miroir parfait du chaos qui règne au creux de mon être.

Nos doigts s'entremêlent, ma poitrine se soulève sous le flot d'émotions inconnus qui me submergent. Nos corps se rencontrent en une lente chorégraphie, au gré de la symphonie erratique de nos souffles.

Une douce mélopée, une cruelle dernière danse.

Je renverse la tête en arrière, levant les yeux vers le ciel qui transparait au-dessus du dôme. Le firmament est piqueté d'un millier d'astres, et je leur souris en silence.

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*Spectre : image du rayonnement lumineux détaillant les couleurs de l'arc-en-ciel.

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