❄❄❄❄ Leyn ❄❄❄❄

J'ouvris doucement les yeux, un peu perplexe. Cette nuit j'avais encore rêvé que je me noyais... Dans un océan glacial parsemé d'icebergs. Je jetai un coup d'œil à mon réveil, persuadé que pour une fois je l'avais devancé. 8h ! J'avais l'habitude de me lever tôt, vers 6h30 quand j'avais cours en première heure. Je mettais beaucoup de temps pour me préparer le matin et je préférais me laisser de la marge pour ne pas avoir à me stresser.

Malgré mon retard je ne me pressai pas, et baillai une ou deux fois avant de m'étirer. Une quarantaine de minutes était largement suffisante. Il suffisait que je fasse l'impasse sur le gel dans les cheveux et...

Je me redressai d'un coup, pris de panique. J'avais oublié... Oublié que ce matin, je devais accompagner ma nouvelle voisine Erra pour son premier jour de classe dans mon lycée. Pourtant j'étais loin de l'avoir oubliée. Elle hantait littéralement mon esprit, et chaque fois que je fermais les yeux je la voyais en haut de cet iceberg, me regardant me noyer sans aucune pitié. Pourtant quand j'avais aperçu cette fille elle m'avait parut fragile, perdue, pleine de compassion... Ce n'était pas l'impression que j'avais d'elle dans mes rêves... Elle y était dure, froide, et on aurait dit qu'elle maîtrisait tout ce qui était autour d'elle.

Je secouai le tête. Ce n'était en aucun cas le moment de divaguer. Il était déjà 8h06. Et hors de question de faire l'impasse sur le gel comme je le voulais.

Je saisis mon téléphone et regardai mes messages en tremblant. Lie et Tommy devaient m'en vouloir. Ils m'avaient annoncé qu'ils allaient se mettre ensemble, mais au bout de deux minutes leurs paroles n'étaient plus parvenues à mes oreilles, et je m'étais rendormi. J'avais eu peur de recevoir des centaines de messages de la part de mes amis, qu'ils me disent leur déception. Mais je n'avais reçu aucun message de leurs part, et cela devint vite encore pire à mes yeux. Ils m'en voulaient vraiment. Et si Lie me pensait jaloux ? Non, nous nous connaissions depuis petits, elle était ma meilleure amie. Elle savait que je ne m'intéressais pas à elle. Mais pour Tommy... Je ne le connaissais pas si bien que cela. Je l'avais rencontré en début d'année, cela ne faisait pas si longtemps que ça. En plus, j'étais super content pour eux, mais je ne leur avais pas dit. Je décidai de leur écrire pour m'excuser, et j'oubliai un instant mon retard phénoménal.

Mon rappel de réveil que j'avais oublié d'éteindre sonna 8h20. Pris de panique, je jetai mon portable sur le lit et m'habillai en vitesse, oubliant malencontreusement d'envoyer le message. Mais plus rien ne m'importait maintenant, j'étais en retard, je ne devais pas la faire attendre.

❄❄❄❄ Erra ❄❄❄❄

J'étais toute excitée. Aujourd'hui était ma première journée au lycée,ma première journée dans ce monde. Hier j'avais voulu sortir un peu pour voir l'extérieur, mais Leyn était arrivé, m'avait parlé de madame Taylor... Cela m'avait intriguée, et j'en avais oublié la petite escapade que j'avais compté faire. D'ailleurs une de ses phrases m'avait marquée. Elle m'avait dit qu'un jour une gardienne avait échoué dans sa mission, et que cela avait impacté tout le système construit par les immortels pour les gardiens. Mais elle n'en savait pas plus. Elle ne savait pas ce qui lui était arrivé, d'après elle cela était tenu secret par le conseil des immortels, ceux qui étaient en charge de l'organisation des missions des gardiens.

Je secouai le tête, tout cela était trop complexe, je n'arrivais pas à ingurgiter autant d'informations. Je devais réunir mes affaires pour les cours. Elles étaient posées sur le bureau de ma chambre, à côté d'un petit sac. Je fourrai en plus de cela mon dictionnaire et le papier censé me guider. Puis, j'ouvris l'armoire de ma chambre, en quête d'habits de saisons. C'était l'hiver ici. MA saison. En effet je suis née le dernier jour de l'hiver, le 20 mars. Cette date n'était pas un hasard, chaque gardien avait sa saison. Durant cet hiver, avant ma naissance, la gardienne précédente terminait son règne sur l'élément de l'eau. C'est en partie pour cela, pour ne pas qu'elle regrette de m'avoir cédé sa place, que je voulais à tout prix réussir cette mission.

Comme je ne savais pas quoi mettre, je décidai d'évaluer la température extérieure. J'ouvris donc la fenêtre, respirant pour la première fois l'air extérieur. Relativement chaud. Un short et un T-shirt seraient parfaits. J'enfilai alors les habits sélectionnés, et des baskets. 8h39, il fallait que je me dépêche. J'empoignai vivement mon sac en direction de la sortie, mais celui ci me retint le bras. Trop lourd. Ce devait être le dictionnaire. Hier soir j'avais passé la nuit à le feuilleter, et j'avais finit par m'assoupir, la tête entre les pages. Je n'en avait pas besoin aujourd'hui, je pouvais m'en sortir toute seule. Quant à l'appareil avec mon visage dessus, je ne savais pas encore comment m'en servir, mais d'après mon petit papier, je devais tout de même le prendre pour ne pas paraître étrange. Comme si un simple objet suffisait pour que les gens se doutent que je n'étais pas humaine! J'avais encore beaucoup de choses à apprendre de ce monde matérialiste. Mais en attendant je devais me dépêcher, j'étais en retard de trois minutes. Je sortis vite sur le pas de ma porte, la refermai, et utilisai les clés pour la verrouiller. J'eus à peine le temps de les ranger dans la poche avant de mon sac et de remettre ce dernier sur mon dos que la porte de Leyn s'ouvrit. Heureusement qu'il était lui aussi en retard !

Gêné de me voir déjà là, il s'excusa.

- Désolé d'être en retard ! Tu es là depuis longtemps?

Non, depuis à peine trente secondes.

- Oui, je suis là depuis 8h34, je ne voulais pas être en retard...

Menteuse. Oui, je sais. Mais j'aimais le voir paniqué, désolé, gêné, confus, c'était mon côté de glace. Enfin ça, c'était ce que j'avais bien voulu me faire croire, car en vérité le voir comme ça me peinait. Étrange, je ne pouvait pas ressentir d'empathie normalement. Peut-être ce fléau s'était il estompé lors de ma venue sur terre.

Pour le tirer de l'embarras, je rajoutai un autre mensonge par dessus.

- Mais ne t'inquiète pas, je ne retrouvais plus mes clés, je viens de fermer ma porte à l'instant !

Il me sourit à nouveau, et je remarquai ses yeux très noirs qui brillaient.