Chapitre 4 ❄ Si tu savais...
❄❄❄❄ Erra ❄❄❄❄
Je me réveillai, et regardai l'heure. Trois heures que j'étais affalée sur ce matelas, plus confortable que celui de mon ancien logis. Je me relevai avec peine et descendis du lit. J'avais deux semaines pour réaliser cette mission, mais j'avais surtout deux semaines à passer dans ce monde étrange. J'enfilai des chaussures (encore un nouveau mot que j'avais trouvé dans le dictionnaire) et m'étirai. Quand j'étais arrivée ici (il y avait moins de quatre heures), j'étais vêtue d'étranges tissus, qu'apparemment tous les humains portaient à longueur de journée.
Une fois prête, je jetai un dernier coup d'œil dans le miroir. Je n'arrivais toujours pas à m'habituer à cette nouvelle "moi". Puis je m'avançai vers la porte, saisis la poignée, ouvris...
Je sursautai, surprise, et mon nouveau cœur manqua un battement. Je faillis refermer la porte, mais je me ressaisis. Devant moi se dressait une personne comme moi, qui me ressemblait. J'essayai de ne pas laisser paraître mon étonnement, mais je n'arrivais toujours pas à dire un mot. Heureusement je fus tirée de l'embarras car l'inconnu engagea la conversation.
- Bonjour... J'allais sonner. Je suis le voisin, je voulais te souhaiter la bienvenue.
Je sentais dans sa voix qu'il était aussi désorienté que moi. De plus, en temps que gardienne de l'eau, je sentais quand les gens étaient perdus, troublés, désorientés comme lui, et je savais plus ou moins pourquoi. C'était MA faculté émotionnelle. On pourrait penser que c'était cool, mais non, ça ne l'était pas. En plus de ressentir en permanence le stress et l'angoisse des autres, cette faculté m'en enlevait bien d'autres : Je ne pouvais pas me défendre, car la colère était réservée au gardiens du feu. Je ne pouvais pas compatir, avoir de l'empathie, cela était propre à ceux de la terre, qui pouvaient aider dans une certaine mesure les gens pour lesquels ils avaient de l'empathie, à l'aide de leurs pouvoirs. Et enfin, je ne pouvais même pas rêver, car seul les gardiens de l'air en avaient la possibilité. Ces derniers pouvaient même réaliser certains de leurs rêves. Maintenant que vous savez tout cela, vous devez trouver ma faculté émotionnelle beaucoup moins cool...
Voyant que je ne répondais pas, l'inconnu continua.
- J'ai appris par ton hôte que tu étais au lycée, toi aussi. Peut-être que nous nous verrons.
À vrai dire, le seul mot je retins dans cette phrase fut le mot "hôte". Le reste passa inaperçu. Mais je me rendis compte que je devais peut-être lui répondre.
- C'est super ! Je connaîtrai au moins une personne là-bas ! fis-je en lui souriant chaleureusement. Je m'appelle Erra.
L'inconnu me parut tout à coup d'une amabilité sans faille, et à ce moment là je fus contente de le connaître. Peut-être pourrait il me guider dans ce monde, et pourquoi pas, m'indiquer où se trouvait ma cible: le dénommé Leyn Smirt.
Il me sourit à son tour.
- Moi, c'est Leyn ! Contente de te connaître Erra.
À l'annonce de son prénom, mon sourire défaillit, et je pâlis.
- Tout va bien ? s'enquit-il.
Il était si gentil, et moi, je devais lui retirer ce qu'il avait de plus cher, sa vie.
Si tu savais...
❄❄❄❄ Leyn ❄❄❄❄
- Oui, oui ! Tout va bien, me répondit-elle.
Ses yeux bleus me fixaient avec tant d'intensité que je dus détourner le regard. Je me sentis alors ridicule, et tournai à nouveau la tête vers elle, replongeant mes yeux dans les siens. J'eus alors l'étrange impression de me noyer dans un immense océan. Je n'arrivais maintenant plus à dire un mot, ou même à cligner des yeux. Elle me sourit. Mais je ne le remarquai pas. Je ne remarquais plus rien autour de moi, tout mon esprit luttait pour ne pas me noyer dans son regard.
- Ne laisse pas ton esprit t'envahir, me dit-elle soudain. Tu dois réussir à penser à autre chose qu'à cet immense océan dans lequel tu crois te noyer.
Étrangement, je ne fus pas étonné qu'elle me dise cela. Je ne fus pas étonné qu'elle sache ce que je pensais en ce moment même. Je suivis ces conseils, et essayai de penser au lycée... Immédiatement, l'océan s'effaça de mon esprit et je détachai mon regard du sien, réalisant enfin l'étrangeté de ses paroles.
- Comment as-tu su ? lui demandai-je. Comment...
- Ne te poses pas trop de questions, me coupa-t-elle. Certaines choses vous dépassent.
Vous ? Pourquoi "vous" ???
Comme si j'avais dit cela à voix haute, elle se reprit :
- Nous dépassent, je veux dire. Ne fais pas attention à ça.
- Dis-moi, continua-t-elle, comment ça se passe... Le lycée, je veux dire.
Sa question m'étonna un peu sur le coup, mais elle me l'avait posée avec tant d'hésitation, que je lui répondis sur le champ, saisissant ma chance pour qu'elle m'accorde sa confiance.
- Demain, nos cours commencent à 9h. Si tu veux nous pourrons aller au lycée ensemble... Cela se passe comment dans ton pays ?
- Moi je n'ai pas vraiment eu... d'éducation. Je suis un peu perdue, ici...
- Tu sais lire, au moins ? lui demandai-je.
À peine l'eus-je posée que ma question me parut stupide. Mais au moins elle eu le mérite de la faire rire.
- Oui, me dit-elle, je sais lire. Mais je n'ai sûrement pas le niveau de ta classe... J'ai beaucoup de faiblesses.
La voyant gênée, je décidai de changer de sujet.
- Madame Taylor m'a dit que tu ne restais que deux semaines...
- Madame Taylor ?
- Eh bien oui, celle qui te prête... Ou te loue... cet appartement.
Elle ne parut pas comprendre, et quand elle me répondit, je compris dans sa voix que sa réponse était artificielle et qu'elle ne pensait absolument pas ce qu'elle disait.
- Ah, oui, Madame Taylor !
Je trouvais cette Erra étrange... Mystérieuse...
- En effet, je dois rester seulement deux semaines, jusqu'au jour de mes seize ans, continua-t-elle. Enfin, si tout se passe comme prévu...
Cette dernière phrase m'intrigua. Madame Taylor avait dit exactement la même chose quand je l'avais vue tout à l'heure.
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