Jeudi 25 septembre

ROMAIN

Nous n'avons pas cours de la journée mais une série de tournois sportifs.

Je suis déçu qu'Avril soit malade ce jour-là, elle l'adore cette journée où elle peut se dépasser par rapport aux sorcières !

Je suis déçu car j'aurais aimé en profiter pour me rapprocher d'elle. Devant tous les autres.

Le bruit et l'excitation des autres élèves me laissent perplexe. Ce matin, je ne suis pas d'humeur à m'amuser !

Toutes les classes de terminales se retrouvent. Je ne compte plus le nombre de bises ou de tapes sur l'épaule que je récolte. On compte sur moi pour rendre la journée hot. Mais je suis absent.

Les professeurs nous réunissent dans le gymnase pour nous présenter les épreuves de la journée, pour former les équipes.

Chaque filière est mélangée pour égaliser les niveaux. Les équipes sont tirées au sort.

Je me retrouve dans une équipe de 4 avec Tara, Elodie (une fille de L), et Lucas (un scientifique qui est dans la classe de Julien). Je sais que Lucas préfère les écrans au sport, Elodie les bavardages à l'effort physique.

On n'est pas prêt de gagner, même si Tara est douée en sport.

Tara...

Rien que le fait de l'avoir si près de moi me rend nerveux ! Elle ne dit rien non plus, elle se contente d'observer les autres équipe. Elle se trémousse en rajustant son débardeur vert fluo qui complète son mini short.

Lorsqu'elle voit Pauline dans la foule d'élèves, elle nous laisse. Adrien et Enzo, qui sont ensembles viennent m'encourager à la supporter toute une journée.

- Un inconnu aurait dû mal à croire que vous avez baisé ensemble pendant deux ans...a commenté Adrien. Mettez vos rancunes de côtés pour une journée !

Enzo a eu une mine désapprobatrice.

- Tu adores cette journée d'habitude ! a continué Adrien. Tu sais, si tu veux, on échange, j'aimerais beaucoup voir la poitrine de Tara rebondir lors du volley !

Il m'a arraché un sourire.

- Nous savons tous ici que tu préfères mater celle d'Avril, mais comme elle n'est pas là, détends-toi autrement...

Au coup de sifflet, Tara est revenue vers nous. Je me suis donc mis en mode du mec cool qui met ses humeurs personnelles de côté et j'ai poussé Elodie et Lucas à s'ouvrir et à passer un moment agréable en ma compagnie.

Tara a commencé à m'adresser la parole lors de la première pause.

Je m'étais assis sur un banc près du terrain d'athlétisme. Lucas était parti chercher des bouteilles d'eau et Elodie était partie au WC.

- Pourquoi tu m'ignores totalement ? m'a demandé Tara, en se refaisant sa queue-de-cheval.

- Tu sais très bien pourquoi, j'ai grogné en me baissant pour refaire mon lacet.

- Oui, mais tu me manques, a avoué Tara d'une douce voix.

Je me suis figé quelques secondes. J'attendais cet instant, la confrontation de l'âme meurtrie qu'elle était depuis que nous avions rompus...

- Je ne reviendrais pas en arrière Tara, tu le sais, j'ai dit en me redressant.

Nos regards se sont croisés. Inquiet, j'ai attendu sa réponse.

- Je voulais juste te le dire, a conclu Tara en remerciant Lucas pour la bouteille d'eau qu'il lui a tendu.

Elle a été la première a proposé de mettre nos rancunes de côté pour la journée. J'ai accepté.

Nous avons repris les courses avec un état d'esprit plus détendu. A plusieurs reprises, Tara m'a cherché physiquement mais j'ai joué une résistance féroce, je n'ai jamais répondu à ses gestes de séduction.

Nous n'avons pas pu en revanche, échapper aux habituelles photos qui complèteraient le site du lycée. J'espère juste qu'Avril ne se fera pas trop de mauvaises idées en les découvrant.

Elles n'avaient rien de compromettant mais se serait dommage, qu'elles viennent tout gâcher, alors que je m'applique depuis quelques semaines à ne coucher à personne d'autres, à ne flirter avec aucune fille. Que j'essaye tant bien que mal de remonter dans son estime...

Accaparé toute la matinée par la musique, la compétition et les rencontres, ce n'est que vers midi que j'ai pu envoyer un sms Avril. Après ma douche, et m'être changer, j'attendais que Lucas soit prêt pour aller manger.

J'ai envoyé à Avril :

« J'espère que ça va mieux »

J'ai hésité à finir par « bisous ». J'ai pensé que ça ferait un peu kitch.

Sa réponse n'a pas tardé.

« Ça va, j'ai repris des couleurs. Tu te défoules bien ? »

« Je fais au mieux »

« Qui t'accompagne dans cette journée ? »

Je me suis mordu l'intérieur de la lèvre. Inutile de lui mentir, elle le saura de toute façon, que j'ai passé ma journée avec Tara...

« Je suis tombé au sort avec Elodie, Lucas et Tara »

« D'accord, j'espère que tu en profites quand même... »

« J'aurais préféré être avec toi »

« Moi aussi »

J'ai laissé mon portable sur le banc pour tendre à Lucas sa serviette.

Il n'en fallut pas plus à Tarik pour s'emparer de mon portable et lire à voix haute d'une voix moqueuse mes derniers messages.

Gaspard et Renaud, qui faisaient aussi partie de notre classe ont rigolé et m'ont traité de tapette.

« Ne réponds-pas », m'a murmuré Corentin en croisant mon regard

Quelques garçons ont rigolé à la provocation que me lançait Tarik. Jordan lui, continuait de se changer en ignorant les remarques de son meilleur ami.

- Rends-moi mon portable, j'ai prié d'une voix calme

Il a continué à lire certains de mes messages, ce qui a commencé à bien m'agacer.

J'ai étiré mes doigts qui trembler nerveusement.

- Oh, mais c'est que vous êtes proches en fait, c'est étrange que tu n'es pas encore pu te faire Avril. Cela t'excite sa résistance ?

- Tarik, la ferme, a répliqué Jordan en même temps que moi.

Comme Tarik continua à me chercher, Jordan s'est emparé de mon portable et me l'a tendu.

Je l'ai repris en hochant un sourcil.

J'ai balbutié un merci, surpris par l'aide que m'accorder Jordan. Nous n'avions jamais été en bons termes, surtout depuis qu'il s'en était pris à Avril. Ne pas paraître faible aux yeux des autres s'est quelque chose de difficile à contrôler. Jordan est arrivé au bon moment...

J'ai cru entendre Jordan grommeler : « On ne touche pas aux sentiments des autres ».

Il a lancé une tape derrière la tête à Tarik qui a imité un mec efféminé dans ma direction.

Gaspard nous a traité de Rox et Rouky lorsque Lucas est sorti de la douche. A cause de ses cheveux roux, Lucas avait déjà été surnommé par de nombreux noms « sale roux », « tu es roux, tu pues la merde »...

Gaspard a imité un chien qui aboie.

Une fois que Lucas fut prêt, nous nous sommes éloignés de ce trio un peu con.

Résister à la provocation est quelques fois une bonne façon pour ne pas l'envenimer.

- Tu parles beaucoup des harcèlements avec Avril ? m'a demandé timidement Lucas.

- Quand elle le veut, il nous arrive d'en parler...j'ai avoué. Et toi, tu en parles à quelqu'un ?

- Oh, ça s'est calmé alors je n'en ai plus besoin. Mais j'en discutais vaguement avec mon grand frère...

Je me suis demandé si Lucas me disait la vérité car en parler était bien compliqué. Sa réponse était évasive.

- En parler fais du bien en tout cas, j'ai ajouté

Lucas s'est contenté de m'approuver d'un hochement de tête. Il s'est refermé sur lui-même donc j'ai changé de sujet et j'ai parlé un peu du programme scientifique, histoire que Lucas soit plus à l'aise dans la conversation.

Il m'a avoué avoir d'autres passions que les études, malgré les rumeurs qui le traitaient aussi d'intello.

Il aimait le tennis et aussi dessiner.

Quand je lui ai dit qu'Enzo aussi dessinait, il a ajouté :

- Oui, je sais, nous étions dans les mêmes cours de dessin quand nous étions petits...il est doué.

- Je suis sûr que tu l'es aussi, j'ai assuré en souriant.

- Je te les montrerais bien, mais pas au lycée, j'aime bien gardé un peu ce jardin secret.

- Je comprends.

Nous avons échangés nos numéros, au cas où.

Puis dans la queue qui s'allongeait à la cantine, nous avons retrouvé Camille et Enzo, qui se chamailler, comme d'habitude.

Les retrouver m'a redonné un peu le sourire.

Après la pause déjeunée nous sommes retournés à notre sport.

Il y a eu les épreuves d'escalade à surmonter. Epreuves pendant lesquelles, je faisais équipe avec Tara parce qu'elle ne supportait pas de perdre et qu'être avec moi, l'empêchait de s'en prendre aux deux autres de l'équipe, un peu moins sportifs que nous deux.

Je l'a remettais à sa place quand elle grognait trop.

Tara faisait exprès de remuer ses fesses lorsque je la sécurisais et elle me lançait des « oh quelle belle vue ! », « magnifique fesse ! » lorsque c'était mon tour. Ces copines vipères l'accompagnait dans ses remarques –on ne va pas dire le contraire- flatteuses pour un homme.

Mais arrivé au bout du mur, je lui lançais des ordres machistes pour qu'elle m'aide à descendre en me donnant un peu de cordes.

- Je te donne tout ce que j'ai chéri, me répondait Tara en bondant le torse.

Je lui ai donné une tape sur la tête une fois que j'ai atterrit en bas.

- Avoues que cela te manque de me donner des fessées...m'a chuchoté Tara.

Elle était excitée comme une gamine, et j'en ai donc déduis dis qu'elle n'avait peut-être pas bu que de l'eau au repas du midi...

Quand Tara a essayé de me caresser le torse, je l'ai repoussé et j'ai dû lui tenir les poignets quelques secondes pour arrête de me provoquer.

Camille, qui participait aussi aux épreuves en même temps que nous, lui a lancé un verre d'eau au visage. Son geste l'a calmé de suite.

J'ai remercié Camille d'un hochement de tête tandis que Tara râlait et allait s'essuyait le visage au WC.

- Je témoignerais en faveur de ta résistance si Avril me demande des explications...a commenté Camille

- Merci...c'est cool, j'ai grogné.

Camille m'a montré d'un mouvement de tête, Pauline qui avait filmé les séances d'escalades.

J'ai passé une main derrière ma nuque tendue pour la détendre. Aujourd'hui, certains avaient eu envie de tester ma patience et ses limites...

La journée s'est terminée après un match de basket entre mecs (où le but de certains était de démontrer leurs forces et leur souplesse) et un goûter.

Vendredi 26 septembre

AVRIL

Lorsque les migraines me prennent, celles-ci me clouent au lit des heures durant et je suis dans une incapacité totale de faire le moindre effort.

Les migraines peuvent durer deux à quatre jours. Je résiste tant bien que mal à la douleur. Je rêve de tout, n'importe lesquelles de mes pensées se mélangent. Je suis ailleurs, dans une sorte de monde parallèle farfelu. Un zombie serait actuellement plus humain que moi !

Résister à la folie. Dormir. Ne pas réfléchir. Se reposer...

Ma journée se passe vite, heureusement. Il ne s'y passe vraiment rien d'intéressant. Quelques fois, Jim vient pour m'hydrater, et me donner de quoi manger.

Elle ne va pas mieux, je le vois, même si je suis mal en point ! Mais des fois, il faut juste penser à soi. Pour ne pas sombrer davantage dans la maladie.

Romain et Camille m'envoient des sms, me demande comment je vais. Léa et Diane aussi. Mais je suis tellement mal que même répondre me demande trop d'effort. Je fais pitié, je me dégoûte d'être une fille aussi fragile ! Je culpabilise de ne pas me battre pour profiter de cette vie qui me tend les bras, je me sens inutile auprès de mes amis, un fardeau. Un boulet.

Je demande à ma sœur de quoi dormir parce que j'en ai marre de réfléchir...

ROMAIN

Dans la soirée.

Avec Julien, Enzo et quelques garçons que l'on apprécie de nos classes respectives on a décidé de se retrouver en ville, pour se balader.

Il y a quelques bouteilles dans nos sacs, un peu de tout. Les bouteilles de jus de fruits que l'on se passe assis sur un banc près de la rue Alsace-Lorraine, ne contient peut-être pas que du jus de fruit...

Mais on a tous envie de s'amuser alors on ne s'en prive pas, même si on sait que boire dans la rue ce n'est pas autorisé, surtout quand nous sommes mineurs !

Sauf que des fois, notre immaturité de jeunes ados prend le dessus et on aime les défis.

Certains d'entre nous supportent plus ou moins l'alcool alors ils se réservent pour le moment où l'on ira dans l'appartement de la grande sœur d'Enzo qui le lui a laissé pour la fête. Sa grande sœur s'appelle Hailey. Camille m'a souvent parlé d'elle parce qu'elles ne peuvent pas se blairer, tellement elles sont différentes niveau caractère...

Lorsque la soirée est bien avancée et que nous sommes chez Enzo, je suis surpris lorsque Tara, Pauline, Amandine et trois autres de leurs copines du lycée s'incrustent.

Nous sommes nombreux à ne plus avoir toute notre tête...

Cependant, je tiens bien l'alcool alors quand Tara essaie de m'embrasser, je la repousse. Il en va de même lorsqu'elle essaye d'aller plus loin et de dégrafer mon jean.

Je la prends par les cheveux et je la mets au sol.

La musique, la fumée et les silhouettes nombreuses ne m'empêchent pas de sortir rapidement et d'appeler de l'aide pour venir me chercher à la place de Jean-Jaurès.

Prendre le métro me semble trop risqué, j'ai quand même trébuché plusieurs fois des Carmes à la place.

Je n'ai qu'un seul mot en tête quand Baptiste me récupère :

- J'ai...j'ai résisté.

La gifle qu'il me donne me secoue chaque membre osseux. Je retiens avec mal mon dernier verre dans mon ventre...

Une fois dans la voiture, j'ai laissé éclater quelques larmes. Même si l'alcool me faisait oublié un temps soit peu, l'ambiance dure qu'il y avait au lycée en ce moment, la pression qui me tenait pour le bac, ma relation quelques fois compliquée avec ma mère et mes sentiments à sens unique avec Avril...

Si l'alcool me déculpabilisait pendant quelques minutes des remords ou de ces situations, il y avait des moments, où je me sentais impuissant, et où la résistance s'envolait en petit morceau. Sans que je ne puisse rien y faire !