ROMAIN

Jeudi 11 septembre

Entre midi et deux

Julien est en train de rire depuis le début du repas. Je lui ai raconté l'histoire de la clé, après la séance photo. Ma maladresse avec Avril, l'amuse depuis le primaire !

Enzo déjeune avec Camille, quand elle lui a proposé le tête-à-tête, j'ai cru le perdre...-

- Avril n'a peut-être pas vu les photos, a conclu Julien.

J'ai soupiré en croisant le regard de Tara. Je serais heureux si la curiosité d'Avril ne l'avait pas poussé à le faire ! La connaissant dès qu'elle a vu le fichier, elle s'y est jeter dessus, sans en voir trop parce que le porno, ce n'était pas son truc...

- Tara et ses talents au lit ne te manquent pas ? m'a questionné malicieusement Julien. Un mois sans de vraies parties de jambes en l'air, c'est un record pour toi !

- Hey, je t'en parle de vos nuits intimes ? j'ai grogné.

En voyant le visage de Julien se renfermer, je me suis concentré sur mon assiette de pâtes.

Julien n'a pas tardé à se confier sur ce point.

- Tu sais, depuis l'année dernière on a des soucis de ce côté-là avec Léa. Je commence réellement à perdre patience... Elle prend trop à cœur son blog, l'équitation et les cours ! On dirait qu'elle n'en a plus à rien à faire de moi !  De temps en temps, j'ai droit de voir son côté sexy, mais c'est si l'occasion l'en y oblige...

- Ce n'est peut-être qu'un passage à vide, j'ai suggéré. Léa est perfectionniste dans tout ce qu'elle entreprend, c'est normal qu'à un moment donné, elle se focalise sur ses passions. Vous êtes ensemble depuis la classe de cinquième Julien... 5 ans, du jamais vu autour de nous !

- Oui, le couple mythique, a chuchoté Julien exaspéré. Mais bon, je ne lui demande pas non plus une journée de cul ou de tendresses. Juste qu'elle me montre que je lui fais toujours de l'effet...Après elle me fait des crises de jalousie lorsque je passe du temps avec Diane. C'est comme si Avril était jalouse de Camille parce que tu passais plus de temps avec elle...N'importe quoi !

- Si elle te fait des crises c'est qu'elle tient encore à toi, non ?

- Oui, mais c'est saoulant, a commenté Julien. Si elle passait son temps de crise à m'exciter, tout irait très bien...

- Tu lui en donnes de l'attention ? j'ai demandé.

- Au début, je faisais des efforts mais je t'avoue que je ne suis plus trop inspiré. Et...

Julien s'est arrêté un instant car trois garçons que nous connaissions, nous ont salués.

- Il y a Diane.

J'ai senti mes poils s'hérisser dès que l'on abordait ce sujet. Julien m'a avoué qu'il fantasmait sur Diane depuis le bac de français de l'année dernière. J'étais le seul à être dans la confidence et ce fantasme grandissant de mon meilleur ami, ne me plaisait pas du tout ! Avril serait sûrement du même avis que moi, si elle l'apprenait.

- C'est comme si j'annonçais à Léa que je fantasmais grave sur Camille ! j'ai fait remarqué en haussant un sourcil.

- Je sais, je fais tout pour me changer les idées mais...

- Tu n'arrêtes pas de passer de plus en plus de temps avec Diane, j'ai répliqué, sans compter les sms que vous vous envoyez à longueur de journée ; il y a de quoi devenir accro l'un à l'autre Julien, et c'est super dangereux pour ton couple ! Pour l'amitié de ces 4 filles ! Tu imagines les conséquences si tu quittais Léa pour Diane ? Ou pire, si tu couchais sur un coup de tête avec Diane ?

Julien a soupiré.

- Je suis mal placé pour te donner des conseils, je te le confirme, j'ai ajouté plus calmement, mais fais attention, s'il-te-plaît ! Sinon, je vais devoir me taper une Léa en colère et deux filles désemparées.

- On n'a qu'à s'amuser dès aujourd'hui, choisir des filles en dehors du lycée, pour nous changer les idées, a proposé Julien. Je resterais dans la limite du raisonnable, je te le promets !

- On peut essayer, j'ai acquiescé. Ça ne me fera pas de mal non plus... J'ai besoin de retrouver ma virilité. La maladresse dont je fais preuve depuis la fin des vacances commence à m'agacer !

- C'est mignon, m'a taquiné Julien. Cela prouve que tu es réellement amoureux d'Avril, elle te contrôle du tout au tout !

- A 1000 %, j'ai assuré en voyant Avril marcher derrière la grande baie vitrée.

Avril a dû se sentir observée car elle s'est retournée et nos regards se sont croisés.

Elle a répondu à mon sourire lorsque je lui en ai lancé un.

En sortant de la cantine, nous avons croisé Salomé et Manon, deux filles de ma classe, avec lesquelles nous nous sommes mis à discuter de tout et de rien.

- Pour qui comptes-tu voter mardi prochain ? Avril ou Claire ?, m'a demandé Manon. Le désistement de Tara me perd un peu dans mon choix... J'aime les deux mais le fait que Tara se désiste si vite, et propose Avril à sa place, ça me laisse dubitative.

- Je vais soutenir Avril, j'ai assuré. Tara doit avoir ses raisons de lui laisser sa place...

- Tu sors réellement avec Claire ? a ajouté Salomé. J'avais l'impression que vous arriviez enfin à vous rapprocher avec Avril !

Sur le coup, je n'ai pas su quoi répondre.

Salomé, loin d'être une idiote, a conclu :

- Ton cœur balance ?

J'ai souris en effectuant un mouvement de tête mi-figue, mi-raisin.

- Hum, a grommelé Salomé. Saches que je suis bien contente qu'Avril se présente pour remplacer Tara, ensemble, vous représenterez très bien notre classe !

Je l'ai remercié en déposant une main amicale sur son épaule. Les deux filles ont continué leur chemin. Julien m'a laissé en croisant certains de ses camarades de classe. Pour patienter jusqu'au prochain cours, j'ai rejoints Maxime, Emmanuel et Benjamin.

Benjamin m'a montré Avril d'un mouvement de tête.

- Tu crois qu'elle viendrait pour la fête de mon anniversaire, demain soir ?

- C'est demain soir ? j'ai questionné.

- Comme d'habitude Rom', deuxième vendredi du mois de septembre, dis-moi,  tu seras là ?

- Et bien je suis privé de sortie jusqu'à dimanche, j'ai rappelé en faisant une grimace. Tu connais ma mère, la faire revenir sur sa décision est mission impossible !

- Même si tu lui dis que c'est pour surveiller Avril ? a essayé Emmanuel.

- Je peux essayer de la convaincre, je te tiendrais au courant ce soir, tu n'as qu'à aller lui demander toi-même à Avril...j'ai grogné. Tu invites aussi Camille ?

- Camille est déjà au courant, elle m'a dit qu'elle viendrait, a avoué Benjamin. C'est plus facile de discuter avec elle, elle plus ouverte. Avril est très intimidante.

- Intimidante ? j'ai répété, amusé.

- Elle est très secrète, s'est reprit Benjamin. C'est fascinant...

Je me suis tendu lorsque Renaud, Jordan et Tarik se sont incrustés entre Diane, Camille et Avril. Jordan s'est directement posté à côté d'Avril et ils se sont mis à discuter. Heureusement, tout s'est bien déroulé. Jordan n'a pas osé cette fois-ci, effleurer le moindre centimètre de peau d'Avril. Lui, avant qu'il arrive à ses fins avec elle, les poules auront des dents !

- Au fait Romain, a dit soudain Maxime. Tu connais la dernière rumeur qui concerne ta chère et tendre ?

- Claire ? a demandé Benjamin, toujours perdu dans sa contemplation de la fille que j'aimais.

- Non idiot, celle que tu es en train de mater ! a ajouté Maxime.

- Quelle rumeur ? j'ai grommelé, déjà agacé.

- Jack l'aurait embrassé mardi. Elle ne l'aurait pas repoussée !

- Pardon ? j'ai commenté, en espérant qu'il me racontait une mauvaise blague.

- Je croyais que tu serais au courant, s'est excusé Maxime. Je l'ai su par Pauline qui a vu Avril partir rapidement du CDI, comme elle proche de Jack, elle est allée lui parler après car il n'avait pas l'air très bien et...

- Il aurait craché le morceau à la fille la plus bavarde du lycée...On fait tous des conneries quand on est dans les vapes, j'ai assuré.

J'étais déçu qu'Avril ne m'en ait pas parlé d'elle-même. Quand j'ai vu Jack de loin, je me suis promit d'éclaircir ce point avec elle, le plus rapidement possible !

AVRIL

19h03

A la maison

Je grimace lorsque Jim désinfecte la plaie sur mon genou. La course d'orientation a été mouvementée. J'ai serré les dents lorsqu'elle a effleuré mon bleu sur ma joue gauche. J'ai eu une altercation avec Claire. Le prof a eu la bonne idée d'établir lui-même les binômes de courses pour cette séance d'entraînement.

La première parole de Claire à mon égard, a été « Tu as intérêt à courir vite Avril, sinon je vais te défoncer, sale fumier ! ». A chaque balise, elle me balançait contre un arbre ou me faisait un croche-patte quand je m'y attendais le moins. Je l'ai bien insultée plusieurs fois, sous la colère et la fatigue, mais le gabarit de Claire lui donnait physiquement l'avantage et me faisais taire sous la violence de ses  gestes.

- Calme-toi...Avril, tu es en sécurité ici, ne cesser de me répéter Jim.

- J'ai été ridicule en revenant...tout le monde regardait mon bleu comme si j'étais un animal battu et que c'était normal !

- Tu n'auras qu'à lui demander de changer de partenaire la prochaine fois, a murmuré Jim.

- Je lui ai demandé, mais il m'a dit qu'il en avait marre des gamineries de certaines filles et que nous devions traité ça entre nous !, j'ai balbutié entre colère et sanglots. Et puis, Claire s'est fait un plaisir de courir avec moi, elle s'est bien défoulée.

- Camille est au courant ?

- Oui, mais pas Romain car je suis rentrée avec toi, les autres filles l'ont vu mais n'ont rien dit, comme d'habitude...

J'ai sursauté en entendant la sonnette de l'entrée.

- Non, je ne veux pas le voir, j'ai précisé à Jim.

J'étais sur les nerfs, stressée, et fatiguée.

- Il ne veut que t'aider, m'a assuré Jim lorsque l'on a entendu la voix de Romain. Il n'est peut-être pas au courant...

- Tu parles, Camille le lui aura dit ! J'ai les yeux rouges ? j'ai questionné

- Oui, et du mascara partout, tiens, démaquille-toi. Je pourrais quand même te mettre de l'arnica sur ta joue, et habille-toi, tu es en sous-vêtements, m'a rappelé ma sœur en souriant. S'il te voit par surprise, sans vêtement, c'est sûr qu'il va en crever...

- T'es marrante, j'ai laissé mon bas de pyjama dans la chambre, j'ai grogné

- Bon, je vais te le chercher, a ajouté Jim.

J'ai enfilé le débardeur que j'avais en ma possession.  Ai ramené mes cheveux en sueur, en une queue de cheval grossière. En me regardant dans le miroir, le souvenir de ces deux heures d'enfer me sont de suite revenus en mémoire et m'ont fait baissés les yeux. Soit forte Avril, le lycée n'est qu'une mauvaise passe à s'enfiler, pour être plus fort à l'avenir. Les paroles de mon dernier psy m'ont d'un coup envie de vomir.

Serrer les dents, subir en priant le temps de s'accélérer. Et merde, j'ai murmuré en renversant une partie du flacon de démaquillant pour les yeux par terre. J'ai senti mon pouls s'accélérer dangereusement, ma respiration s'est faite plus difficile. J'ai eu des frissons et froid d'un coup. Mon bras fut secoué de spasmes incontrôlables.

J'ai rapidement fouillé dans le tiroir du lavabo pour en sortir mon sachet de calmant.

Je me suis assise contre le sol frais pour me calmer, reprendre un peu mon sang-froid. La lumière autour de moi s'est vite éteinte car je me suis évanouie.