Chapitre 23 : Sauve qui peut
Maggie se jeta dans la voiture de fonction côté passager et attendit Ewen en trépignant sur place. Il arriva quelques secondes plus tard, légèrement essoufflé.
« —Dépêche-toi, démarre ! lui ordonna-t-elle alors qu'il n'avait qu'ouvert sa portière et ne s'était même pas encore assis derrière le volant.
—Oui, oui, laisse-moi le temps de m'installer avant. »
Il s'assit sur son siège, mit les clés dans le contact, démarra la voiture et quitta en trombe le parking des bureaux. Le trajet dura 45 minutes qui semblèrent beaucoup trop longues à Maggie.
« —Il faut vraiment se dépêcher, répéta-t-elle tout au long de la route.
—Tu veux bien me dire ce qui se passe enfin ?
—On s'est trompés depuis le début, on n'a rien vu venir. Tout était sous nos yeux depuis l'interrogatoire que tu as mené. Tes notes étaient parfaites Ewen, tu as très bien ressenti ce qui se passait. On n'a juste pas réussi à interpréter, on était aveuglés par ce trio amoureux. On n'a pas voulu regarder plus loin, et maintenant Carla est en danger à cause de nous. Si on avait réfléchi comme il le fallait, on aurait peut-être même pu sauver la vie de Célia. On s'est tellement fourvoyés...
—Je ne comprends pas le rapport avec mes notes sur Valentin.
—Mais si, mais si tu verras. »
Elle n'avait rien voulu dire de plus à Ewen par peur de se tromper une nouvelle fois, bien qu'elle sentait au fond d'elle-même qu'elle avait enfin trouvé le dénouement de toute cette histoire. Il n'avait pas cherché à poser davantage de questions. Il devait se concentrer avant tout sur la route, ayant conscience de sa conduite dangereuse. C'est d'ailleurs cela qui lui donna l'idée de demander des gyrophares à Patron lors de la prochaine réunion mensuelle.
Arrivés devant l'immense maison des Judrel, Ewen s'arrêta en dérapant devant la barrière qui était ouverte. Il n'avait pas éteint le moteur que Maggie était déjà sortie comme un boulet de canon de la voiture et se dirigeait en courant vers la porte d'entrée, aussi vite que ses jambes le lui permettaient.
Elle sonna et frappa comme une possédée jusqu'à ce que Carla lui ouvre la porte.
« —Mais qu'est-ce qui se passe bordel ?! s'énerva l'adolescente en voyant la jeune détective dans cet état de quasi démence.
—Carla, commença Maggie tout en essayant laborieusement de retrouver son souffle – il faudra qu'elle songe à se remettre au jogging prochainement – tout en appuyant sur son point de côté. Carla, tu es en danger. Es-tu seule chez toi ?
—Oui je suis seule chez moi.
—En es-tu certaine ?
—Il y a Rosalita notre employée mais c'est tout.
—Vous n'avez ouvert à personne aujourd'hui ?
—Moi non. Et je ne pense pas que Rosie l'ait fait non plus.
—Peut-on la voir s'il te plaît ?
—Je vais la chercher. Mais pouvez-vous me dire ce qui se passe, vous allez commencer à me faire peur.
—Tu es peut-être en danger Carla, il faut vite que nous parlions à Rosalita, va nous la chercher s'il te plaît.
—J'y vais, j'y vais. »
Carla disparut quelque part dans sa grande maison, laissant les deux détectives – Ewen ayant rejoint son amie entre temps – sur le pas de la porte. Elle revint accompagnée de la petite employée de maison, sûrement une femme originaire de la péninsule ibérique.
« -Bonjour, les salua Rosalita avec un fort accent chantant qui confirmait les hypothèses sur ses origines. Vous avez besoin de moi ?
—Bonjour madame, lui répondit Maggie. Nous devons vous poser quelques questions.
—Je suis à votre disposition.
—Merci. Avez-vous laissé entrer quelqu'un dans cette maison aujourd'hui ? »
Rosalita réfléchit un moment avant de donner sa réponse :
« -Je peux vous assurer que non. Non, je n'ai vraiment laissé personne entrer aujourd'hui.
—Hier peut-être ? »
Nouveau moment de réflexion, puis :
« —Ah hier le plombier est venu réparer le lavabo de la salle de bain du bas. Et le facteur est venu apporter le colis qui ne rentrait pas dans la boite aux lettres.
—Un colis ? D'où venait ce colis ? À qui était-il destiné ? L'avez-vous ouvert ?
—Le colis venait de Paris pour madame Judrel. C'était son maquillage, il est encore ouvert dans la salle de bain.
—Très bien, merci de vos réponses. Rien d'autre à signaler ?
—Non, tout est très normal ici. Pas de problème.
—D'accord, merci. Vous pouvez retourner à vos occupations, nous sommes désolés de vous avoir dérangée.
—Pas de problème ! »
Sur ce, elle les abandonna pour retourner à son repassage qui lui prenait un temps incroyable tellement elle s'appliquait à ne laisser aucun froissement.
« —Rassurés ? leur demanda Carla qui s'était apaisée maintenant qu'elle était convaincue qu'elle ne courait aucun danger.
—Non, lui répondit abruptement Maggie.
—Vous ne m'avez même pas dit qui je devais craindre.
—On se trompe peut-être, je ne vais pas te rendre méfiante sans raison. »
Carla soupira avec cet air théâtral qui l'a caractérisait si bien.
« —Pouvez-vous me laisser maintenant ? Je suis fatiguée par tout ce qui se passe.
—Nous te laisserons seule dans ta maison mais surveillerons les alentours.
—Comme vous voudrez. »
Sur ces mots, elle rentra dans sa maison en refermant la porte sur les deux détectives.
« —On fait quoi maintenant ? demanda Ewen a sa collègue. »
Maggie ne lui répondit pas, elle réfléchissait. Au bout d'un moment, elle quitta ses pensées :
« —Ewen ?
—J'en avais presque oublié que tu étais là, ironisa ce dernier.
—Ce n'est pas le moment de rigoler.
—Rabat-joie.
—Tu as le dossier de l'enquête avec toi ?
—Dans la voiture pourquoi ?
—J'ai besoin d'un numéro de téléphone.
—Je vais te le chercher, histoire de participer un peu. »
Et il se rendit à la voiture où il se saisit du dossier avant de revenir aux côtés de Maggie qui n'avait pas bougé d'un pouce. « Merci », lui dit-elle tout en lui arrachant le dossier des mains. Elle s'éloigna pour passer son appel. Ewen ne saisissait rien de là où il était, mis à part la fin de la conversation : « D'accord, merci. ».
« —Il est en chemin s'il n'est pas déjà arrivé.
—Mais qui à la fin ?! »
Toujours aucune réponse. Maggie faisait les cent pas devant le perron. Les minutes qui passaient ressemblaient davantage à des heures pour les deux détectives, notamment pour Ewen qui ne comprenait strictement rien à la situation. Maggie s'étant enfermée dans une sorte de mutisme réflexif, elle faisait la sourde oreille à toutes les sollicitations de son collègue.
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