Chapitre 2 : Interrogatoires de Maggie
L'adolescente qui avait suivi Maggie était petite, fine, la peau légèrement satinée, les cheveux d'un noir profond et des yeux verts brillants. Elle était simplement habillée d'un jean slim, d'un chemisier blanc et de baskets à la mode. Elle était fortement maquillée.
« —Bonjour, commença Maggie à l'adresse de l'adolescente qui se trouvait assise en face d'elle. Je suis Maggie Annisterre, détective privée.
—Bonjour, lui répondit-elle timidement.
—On va commencer avec les questions de routine. Je peux te tutoyer ?
—Oui bien sûr.
—Il me faudrait ton nom, ton prénom et ton âge s'il te plaît.
—Delarosa Eva, 18 ans.
—Merci. Peux-tu me dire quelles étaient tes relations avec la victime ?
—Je ne le connaissais pas vraiment beaucoup. On le côtoyait parce qu'il sortait avec Célia mais on n'avait pas plus d'affinités que ça avec lui.
—« On » ?
—Oui, notre groupe d'amis.
—Qui pourrait connaître Driss dans votre groupe d'amis ? À part Célia bien sûr.
—Les jumelles, Julien et Jawad. »
Maggie prenait consciencieusement ses notes tout en menant l'interrogatoire.
« —Quand as-tu vu la victime pour la dernière fois ?
—Je... Enfin... J'ai... J'ai beaucoup bu hier soir et je ne me rappelle pas vraiment de tout ce qu'il s'est passé au cours de la soirée...
—Alors raconte-moi seulement ce dont tu te souviens. »
Eva parût fournir un effort surhumain pour tenter de se souvenir de ce qu'il s'était passé la veille au soir.
« —Il était beaucoup avec les autres mecs dehors pour fumer ou pour parler, enfin pas avec Valentin qui préfère rester avec nous. Sinon il passait son temps collé à Célia.
—As-tu remarqué quelque chose d'anormal ou de particulier ?
—Mmmh... Non il ne me semble pas. Tout le monde avait l'air joyeux.
—Tout le monde ici a eu son bac ?
—Oui.
—Félicitations. »
Maggie sourit à Eva qui rougit et bégaya un « Merci » discret.
« —Bon, reprit la détective avec sérieux. Comment as-tu appris le décès de Driss ?
—Le cri de Célia nous a tous réveillés alors on s'est précipités vers elle. Je n'ai pas vu le corps parce que Valentin, qui était déjà arrivé, m'a prévenue de ce qu'il s'était passé alors j'ai fait marche arrière et je suis retournée dans ma chambre où j'ai pleuré. »
Une larme coula le long de la joue de l'adolescente.
« —Je ne le connaissais pas beaucoup, continua-t-elle, mais ça me rend triste quand même, surtout pour mon amie. Ça doit être très dur pour elle.
—Driss avait-il des ennemis présents à la soirée ?
—Je ne sais pas. Je ne pense pas, il avait l'air de s'entendre avec tout le monde. C'est quelqu'un de très sociable.
—Autre chose à ajouter ?
—Non, rien. Je suis désolée de ne pas pouvoir vous aider plus.
—Tu m'as déjà aidée plus que tu ne le penses. Maintenant tu peux partir. Je serai là un moment, au cas-où tu te rappellerais de quelque chose dont tu voudrais me faire part. Mais tu peux aussi aller en parler à mes collègues.
—J'y penserai. »
Eva se leva et allait sortir quand Maggie la rappela.
« —Peux-tu m'envoyer une autre fille s'il te plaît ?
—D'accord. »
La porte se referma. Maggie profita de son moment de solitude pour prendre quelques notes en plus sur sa feuille. Elle inscrivit ses impressions jusqu'à que quelqu'un frappe à la porte.
Une grande jeune femme entra dans la pièce après que Maggie lui en eut intimé l'ordre. Elle était squelettique comme ses amies Célia et Eva. Ses longs cheveux teints en blond lui tombaient jusqu'aux hanches. Ses yeux étaient bleus foncés. Elle était elle aussi très maquillée. Sa tenue la mettait en valeur. Elle portait une jupe noire très courte et très moulante, un petit haut tout aussi près du corps et laissant apparaître un morceau de son ventre plat et musclé et elle chaussait une paire d'escarpins qui la grandissait encore plus.
« —Asseyez-vous, lui ordonna gentiment Maggie. »
L'adolescente s'assit avec grâce.
« —Bonjour, je suis Maggie Annisterre, détective privée.
—Bonjour, moi c'est Carla Judrel. »
Elle s'exprimait très clairement et avec beaucoup de classe. Elle avait l'air d'être une fille bien dans ses baskets, enfin, dans ses escarpins.
« —Je peux te tutoyer ?
—Oui je vous en prie madame Annisterre.
—Appelle-moi Maggie.
—Pas de soucis Maggie. »
Maggie prit une nouvelle feuille blanche et nota le nom et le prénom de la jeune femme qui la regardait faire avec une grande curiosité.
« —Il n'y a qu'un E et qu'un L à la fin de mon nom de famille, corrigea Carla qui avait vu Maggie écrire son nom « Judrelle ».
—Excuse-moi, se rattrapa la détective qui corrigea aussitôt sa faute en faisant une grosse rature sur sa feuille, ce qui eut l'effet de lui faire froncer les sourcils de désapprobation.
—Quel âge as-tu ?
—19 ans.
—Quelles étaient tes relations avec la victime ?
—C'était le copain de Célia, et un bon ami à moi.
—Qui le connaissait ce soir, à part Célia ?
—Jawad, Julien et les jumelles.
—Quand as-tu vu la victime pour la dernière fois ?
—Hier soir. Il est allé se coucher le premier parce qu'il était fatigué et que l'alcool ne le réussissait pas. Il a dit bonsoir à tout le monde et je ne l'ai plus jamais revu.
—Il était quelle heure environ ?
—Je ne sais pas vraiment. Je peux seulement vous dire qu'il était plus d'une heure du matin parce j'avais reçu un SMS un peu avant et j'ai vu qu'il était 1h06 quand je l'ai lu.
—Tu ne bois pas d'alcool ?
—Non. J'ai horreur de ça. En plus, les rares fois où j'ai bu, j'ai fait n'importe quoi. C'est un matin où je me suis réveillée à côté d'un mec qui ne me plaisait pas du tout que je me suis dit qu'il fallait que j'arrête de boire en soirée. »
Maggie notait chaque mot qui sortait de la bouche de l'adolescente sans en oublier un seul.
« —Quel était le comportement de la victime durant la soirée ?
—Il passait beaucoup de temps dehors à fumer. Et quand il n'était pas dehors il était avec Célia, ils se bécotaient dans le canapé. Ça nous faisait bien rire.
—Tu n'as rien remarqué d'anormal au cours de cette soirée ?
—Absolument pas. C'était une soirée comme une autre. Banale. »
Maggie marqua une pause dans sa prise de notes. Elle se mit à réfléchir un instant puis se remit à noter rapidement quelques mots en bas de la feuille qui semblaient n'avoir aucune signification pour Carla qui observait toujours ce que faisait la jeune détective en face d'elle.
« —Comment as-tu appris le décès ?
—Comme tout le monde, en entendant Célia hurler.
—Personne d'autre que Célia n'était levé à ce moment ?
—Je ne sais pas. Quand je suis arrivée devant la chambre, Valentin était déjà là. C'est lui qui m'a dit de ne pas m'approcher car Driss était décédé. Il a dit la même chose à Eva qui est arrivée un peu après que je sois repartie, je l'ai entendu.
—Ça ne t'a fait ni chaud ni froid ?
—J'étais choquée mais je n'ai pas pleuré. Je vous l'ai dit, je ne connaissais pas Driss plus que ça.
—Donc je suppose que tu ne lui connaissais pas d'ennemis non plus ?
—Non.
—Autre chose à ajouter ? »
Carla fit semblant de réfléchir quelques instants puis elle hocha négativement la tête.
« —Bien, reprit Maggie, merci de ta participation qui m'a beaucoup aidée. Si tu te souviens de quelque chose, je serai ici encore un moment. Ou tu peux aussi aller voir mes collègues.
—Entendu.
—En repartant, peux-tu m'envoyer une autre fille s'il te plaît ? »
Carla acquiesça et sortit. Maggie nota sur sa feuille les impressions que lui avait faites la jeune femme, puis attendit que la prochaine personne se présente.
On frappa à la porte et Maggie intima une nouvelle fois l'ordre d'entrer à la personne. Une adolescente d'une grande beauté fit son apparition. C'était le portrait de Shela en plus jeune. Une grande blonde, des yeux d'un bleu très pâle, des traits fins et des dents parfaitement droites. Elle portait un jean, un bustier et une paire de chaussons blanche toute simple. Maggie lui fit signe de s'asseoir.
« —Bonjour, je suis Maggie Annisterre, détective privée. Je peux te tutoyer ?
—Bonjour, oui bien sûr.
—Il me faudrait ton nom, ton prénom et ton âge s'il te plaît.
—Je m'appelle Morel Marina et j'ai 18 ans. »
Maggie prit une nouvelle feuille pour tout noter.
« —Quelle relation entretenais-tu avec la victime ?
—Il était gentil et rigolait beaucoup. Il était tout le temps de bonne humeur... »
Marina fondit en larmes. Maggie se leva, fit le tour du bureau et alla s'agenouiller à côté de l'adolescente. La jeune détective posa une main amicale sur le genou de l'adolescente et attendit patiemment que cette dernière se calme tout en lui répétant des mots d'encouragement. Elle avait vu Béthanie faire cela avec succès de nombreuses fois.
Une fois que les larmes de Marina furent sèches Maggie retourna s'assoir à sa place et reprit son stylo et l'interrogatoire :
« —Quand l'as-tu vu pour la dernière fois ?
—J'ai un peu trop bu hier soir alors je ne me rappelle plus exactement de la fin de soirée... Mais il me semble qu'il est allé se coucher tôt alors j'imagine que c'est à ce moment que je l'ai vu pour la dernière fois. Oui... J'en suis même sûre, je le revois nous dire bonne nuit.
—Célia est-elle partie se coucher avec lui ?
—Non ils n'ont pas dormi ensemble et elle a voulu rester encore un peu pour profiter de la soirée.
—Qui dormait avec qui ?
—Sébrine et moi dormions dans la même chambre, celle de mes parents. Eva a dormi dans ma chambre, Célia dans celle de ma sœur avec Carla. Driss a dormi dans la chambre de notre frère aîné. Valentin et Nicolas ont dormi dans la salle de jeux, sur le canapé. Julien et Jawad ont dormi dans la chambre d'amis. »
Maggie nota consciencieusement tout ce que la jeune femme venait de lui dire. Elle nota également qu'il fallait qu'elle reparle à Carla à propos de Célia puisqu'elles avaient passé la nuit ensembles.
«—Quel était le comportement de Driss durant la soirée ?
—Il était normal. En tout cas je n'ai rien remarqué de spécial.
—Aucun évènement n'a attiré ton attention hier soir ?
—Non aucun.
—Comment as-tu appris le décès de ton ami ?
—En entendant Célia hurler. Je me suis précipitée vers les cris avec ma sœur et nous avons vu Julien, Jawad et Valentin qui étaient devant la porte, ils étaient blêmes. Ils nous ont expliqué rapidement ce qu'il s'était passé et nous avons aussitôt appelé nos parents. Enfin après nous être calmées un peu parce que... »
Marina se remit à pleurer. Maggie attendit, à sa place cette fois, que l'adolescente se calme à nouveau. Elle n'était pas à l'aise avec ces démonstrations de sympathie. Marina mit moins de temps à stopper ses larmes que lors de la précédente crise.
« —Excusez-moi, dit-elle avec la voix encore légèrement tremblotante.
—Ce n'est rien. Autre chose à ajouter ?
—Non, j'ai dit tout ce que j'avais à dire. »
J'en doute, se dit Maggie, mais elle se retînt d'en faire la remarque.
« —Tu peux y aller. Si quelque chose te revenait en mémoire, n'hésite pas à revenir me voir ou à en faire part à mes collègues. Et si tu pouvais m'envoyer ta sœur, ce serait gentil.
—D'accord, je vous l'envoie. »
Marina sortit du bureau. Maggie prit encore des notes sur sa feuille avant d'en saisir une vierge et d'attendre l'arrivée de Sébrine. L'adolescente frappa à la porte du bureau quelques minutes plus tard, entra après avoir reçu l'autorisation de Maggie et s'assit en face de la jeune détective, toujours après en avoir reçu l'autorisation, telle une personne bien élevée.
Elle était le portrait craché de sa sœur, et de sa mère. Elle avait juste les cheveux plus courts que ceux de sa sœur et elle était habillée différemment, permettant ainsi à Maggie de pouvoir les différencier. Sébrine portait un pantacourt troué, un t-shirt lacé dans le dos ainsi qu'une paire de chaussons, les mêmes que portait sa jumelle.
« —Bonjour, je suis Maggie Annisterre, détective privée. Tu dois être Sébrine Morel c'est ça ?
—Bonjour, oui c'est ça.
—Excuse-moi, je ne t'ai pas demandé, je peux te tutoyer ?
—Oui oui.
—Merci. Je ne te demande pas ton âge, je suppose que tu as le même que ta sœur.
—Évidemment. »
Maggie nota toutes ces infos sur sa feuille et reprit :
« —Quelle était ta relation avec la victime ?
—On s'entendait bien. Mais ce n'était pas non plus un super grand pote.
—Quand l'as-tu vu pour la dernière fois ? »
Une larme roula sur la joue de Sébrine. Elle ne l'essuya pas et la laissa s'écraser sur le sol.
« —Hier soir, quand il est allé se coucher. Il nous a dit bonne nuit et je ne l'ai plus jamais revu.
—Tu ne bois pas d'alcool ?
—J'ai seulement pris un verre. Et il n'y avait presque rien dedans.
—As-tu remarqué quelque chose d'anormal durant la soirée ou dans le comportement de Driss ?
—Absolument pas.
—Comment as-tu appris son décès ? »
Une nouvelle larme alla s'échouer sur le sol.
« —Ce matin. Je me suis précipitée avec ma sœur vers les cris que poussait Célia quand elle a trouvé le corps. C'est Jawad, Julien et Valentin qui nous ont prévenues.
—Autre chose à ajouter ?
—Non, rien.
—Merci pour ta participation. Tu peux y aller. Il me semble qu'il ne me reste que Célia à interroger, peux-tu me l'amener s'il te plaît ?
—Oui. »
Sébrine quitta le bureau laissant Maggie seule pour écrire ses impressions sur sa feuille de papier en attendant que Célia arrive. L'adolescente frappa timidement à la porte mais n'attendit pas que Maggie lui permette d'entrer pour le faire. Elle referma la porte derrière elle et vînt s'asseoir sur la chaise qui était placée en face de Maggie. Ses gestes étaient automatiques et ses yeux se perdaient dans le vide. On aurait dit un robot.
« —Bonjour Célia, je suis Maggie Annisterre, une détective privée. »
Célia ne lui répondit pas. Elle se contenta de poser son regard sur la jeune détective. Elle paraissait tellement fragile. De ses amies, c'était elle la plus mince. Maggie se demanda même si elle était anorexique, ce qu'elle n'oublia pas de noter sur sa feuille quand l'adolescente fut repartie.
« —Je peux te tutoyer ? demanda Maggie. »
Célia hocha positivement la tête.
« —Merci. Il me faudrait ton nom de famille et ton âge s'il te plaît. »
Les yeux de l'adolescente se perdirent à nouveau dans le vide et elle répondit d'une voix faible :
« —Raburat, 18 ans.
—Peux-tu m'épeler ton nom s'il te plaît ?
—R, A, B, U, R, A, T.
—Merci. Quelle relation entretenais-tu avec Driss ?
—J'étais sa petite amie... »
Sa voix se brisa, elle se prit la tête entre les mains et pleura.
« —En août ça aurait fait un an que nous étions ensemble. »
Ses pleurs redoublèrent et elle ne put plus articuler pendant un long moment. Comme pour Eva, Maggie se fit violence et alla s'agenouiller à côté de la jeune femme et lui posa une main, pas sur le genou, mais sur l'épaule cette fois-ci. Quand Célia arriva enfin à se calmer, Maggie retourna à sa place.
« —Tout allait bien dans votre couple ?
—Oui, parfaitement bien, il était le petit ami parfait... »
Nouvelle crise de larmes. Maggie décida qu'il fallait qu'elle parle le moins possible de leur relation pour le moment, qu'elle reviendrait à l'attaque quand Célia ne sera plus en état de choc.
« —Quand l'as-tu vu vivant pour la dernière fois ? demanda prudemment Maggie
—Hier soir, il est allé se coucher, je l'ai accompagné pour lui dire bonne nuit... »
Une nouvelle fois Célia fondit en larmes. Maggie s'arma de patience et attendit encore une fois que l'adolescente se calme.
« —Bois-tu de l'alcool ?
—Oui. Et hier soir j'avais assez bu mais j'ai quand même de bons souvenirs de la soirée.
—Et que peux-tu me dire de ce matin ? »
Nouvelle crise de larmes. Maggie poussa un soupir discret. Il fallait vraiment qu'elle pose cette question maintenant, avant que Célia puisse oublier, ou changer, le moindre détail. Elle regretta de ne pas avoir posé cette question plus tôt, même si ce devait être la seule question qu'elle devait poser.
« —Je... Je voulais aller dans sa chambre pour... Pour le voir... Et puis je lui parlais et... Et il ne répondait pas... Alors je lui ai un peu secoué l'épaule mais... Il... Était... Tout... Raide... »
Elle eut beaucoup de mal à terminer sa phrase et la jeune détective comprit qu'elle ne pourrait plus rien tirer de la jeune femme. Maggie la raccompagna jusqu'à la porte puis alla se réinstaller derrière le bureau. Elle nota les quelques impressions que Célia lui avait faites, puis elle se mit à penser. Le regard fixe, elle pensa longuement.
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