Chapitre 23 : Ils deviennent tous fous
Nicolas entra dans la chambre en poussant Maggie qui manqua de tomber. Il se précipita sur Ewen qui bondit sur ses jambes avec beaucoup d'agilité et se recula pour se protéger de son ami.
« —En plus de fouiner, tu ne sais pas tenir ta langue ! hurla Nicolas, les veines du cou apparentes. Je savais que je te trouverais ici. Vous fricotez sous mon toit, vous complotez contre nous, vous êtes deux sombres merdes.
—Attend attend attend. Qu'est-ce qui se passe ? lui demanda Ewen éberlué.
—Tu vas me le payer espèce de connard ! Aurélie va renvoyer Chelsea et me diminuer mes revenus.
—Tes revenus ?
—Oui. Tous les mois, Aurélie me donnait une certaine somme d'argent, car mes revenus sont insuffisants pour vivre correctement.
—Et Agnès ? hasarda Maggie.
—De quoi tu me parles toi ? Je parle d'Aurélie, pas d'Agnès.
—Agnès te donnait aussi de l'argent non ? Tu avais une dette envers elle.
—Encore une fois tu vas mettre ton nez dans une affaire qui ne te regarde pas. Je ne sais pas ce qu'Aurélie te trouve mais tu n'es qu'une petite prétentieuse détestable.
—Mais si c'était toi le tueur par exemple ? persista la jeune femme, ignorant les insultes.
—Attention Maggie, je sais que tu soupçonnes chacun de nous. Mais un jour, il va t'arriver malheur.
—Et tu ne parles pas de Léa ?
—Pourquoi je devrais en parler ?
—Elle a été arrêtée pour le meurtre d'Agnès, et pourtant j'ai cru comprendre que tu penses que le meurtrier est encore en liberté.
—Tu as au moins la qualité d'être intelligente.
—Donc, pour toi, Léa est innocente ?
—Oui. Pour toi non ?
—Si, justement !
—Tu vois !
—Pour toi, qui est le vrai meurtrier ?
—Je n'ai de soupçons sur personne.
—Parce que le meurtrier et toi n'êtes qu'une seule personne.
—Tais-toi Maggie, tu dis des conneries.
—Je ne pense pas.
—Qu'est-ce qui te fait dire ça alors ?
—L'argent. »
Nicolas prit une expression emplie de haine et sortit de la chambre en claquant la porte, sans ajouter un mot de plus. Ewen resta coi un moment, puis il se décida à parler le premier :
« —À part à toi, je n'ai rien dit... souffla-t-il.
—Quelqu'un nous manipule, et il le fait habilement.
—Oui, tu as raison. On se fait monter la tête les uns contre les autres. Je te laisse Maggie, j'ai besoin de calme, de m'isoler. »
Une fois seule, Maggie se positionna en boule dans son lit et se mit à pleurer toutes les larmes de son corps. Ce n'était pas dans son habitude de pleurer, elle avait toujours été relativement neutre dans l'expression de ses émotions, mais à présent elle était épuisée. Et elle avait peur, peur pour sa vie. C'était ce manoir qui pesait sur les nerfs de tout le monde. Non, ce n'était pas le manoir, c'était le meurtre. L'apprentie détective était résolue à trouver le fin mot de cette histoire tragique afin d'être enfin tranquille.
Maggie sécha ses larmes, se leva, et sortit de sa chambre une fois qu'elle eut vérifié que personne n'errait dans les parages. Elle entendit des bruits au bout du couloir, elle alla donc voir ce qu'il se passait. Les bruits montèrent à l'étage. Elle s'y rendit. La jeune femme suivait toujours les bruits. Elle eut à peine le temps d'apercevoir la porte du jardin d'hiver se fermer. Elle allait ouvrir, lorsqu'elle eut un mauvais pressentiment. Et si le tueur l'avait amenée ici pour la tuer ? La jeune femme se rendit compte qu'elle s'était mise en danger et qu'elle n'était plus en sécurité dans le manoir tant que le véritable meurtrier n'avait pas encore été arrêté. Elle n'aurait pas dû être aussi bavarde à propos de l'innocence de Léa.
La jeune détective tourna les talons et redescendit les marches quatre à quatre. Elle regretta tout de même de ne pas avoir ouvert la porte se disant qu'elle avait cédé à la panique et que ce n'était que de la paranoïa. Peut-être aurait-elle pu découvrir l'identité du meurtrier ? Mais elle n'y retourna pas, et descendit au rez-de-chaussée. Sa vie importait plus que la vérité. Elle décida de sortir prendre l'air pour se remettre de ses émotions.
Dehors, une foule de journalistes se jetèrent sur elle en l'assénant de questions.
« —C'est vrai que mademoiselle Thunas s'est jetée sur vous pour vous étrangler ?
—Étiez-vous présente au moment de la découverte du corps de la victime ?
—Pourquoi ne rentrez-vous pas chez vous maintenant que tout est terminé ?
—Connaissiez-vous bien la victime ? Ou son meurtrier ?
—Il paraît que vous avez joué un certain rôle dans l'enquête puisque c'est vous qui avez découvert l'arme du crime, pouvez-vous m'en dire un peu plus à ce propos ?
—Pensez-vous que Léa ait eu un complice ? »
Et d'autres questions du même type. Alors, Maggie rentra dans le manoir. Elle y serait finalement plus au calme. Au même moment, elle vit Aurélie qui l'appela pour prendre un chocolat chaud. Elle avait les yeux gonflés d'avoir beaucoup pleuré.
Le chocolat fut servi dans la salle à manger. C'était Chelsea qui l'avait préparé mais elle ne fit pas son apparition car elle ne voulait pas croiser sa patronne. Il y avait également Patron, le lieutenant Messant, Ewen, Raphaël et deux officiers de police dont l'un prenait des notes sur un calepin.
Maggie allait avaler sa première gorgée, lorsqu'elle reposa soudainement sa tasse sur la table.
« —Un problème Maggie ? Il n'est pas bon ton chocolat ? demanda son amie.
—Non non, ce n'est pas ça. »
Aurélie dévisagea la détective, puis se remit à boire son thé. Patron, qui s'était assis à côté de Maggie, s'approcha d'elle pour lui dire quelque chose dans l'oreille :
« —J'ai surveillé ton chocolat, tu ne risques rien, lui souffla ce dernier. »
Maggie lui sourit et commença à déguster son chocolat chaud.
Quand tout le monde eut fini leurs tasses, les femmes débarrassèrent la table et rangèrent la cuisine, pendant qu'Ewen faisait sagement la vaisselle.
Une fois que toutes les tâches furent finies, chacun repartit de son côté. Maggie se rendit à la bibliothèque. Elle fut aussitôt rejointe par Aurélie qui s'était remise à pleurer.
« —Merci Maggie, lança Aurélie.
—Euh, de rien ?
—Merci d'être là, d'être restée.
—C'est normal, je ne suis pas attendue ailleurs, je peux prendre du temps pour mon amie. »
Même si la véritable raison au fait qu'elle ne soit pas partie était le meurtre, Maggie se dit que ce petit mensonge ne pourrait que faire du bien à son amie.
« —Je pense quitter Nicolas. De toute façon je n'avais que des problèmes avec lui.
—Quel genre de problèmes ?
—Il n'est jamais là pour moi. Il est là uniquement quand il a besoin d'argent. Maintenant je sais qu'il était avec moi uniquement par intérêt.
—Ne dis pas ça...
—Il m'a avoué avoir embauché Chelsea volontairement. Ils se fréquentaient déjà avant. Ils ont tout manigancé.
—Tu ne te doutais de rien ?
—Je me posais des questions. Mais je n'ai jamais pensé que Chelsea pourrait être sa maîtresse...
—Tu fais très bien de le quitter, il ne te mérite pas.
—Tu crois que c'est moi qu'il voulait tuer ? Et qu'il s'est trompé de cible dans la nuit ? Après tout, j'ai à peu près la même corpulence qu'Agnès et nous étions côte à côte. C'est le sergent moustachu qui m'a soumis l'idée. »
Maggie se retint de lui avouer qu'elle le savait, elle préféra dire :
« —Plus rien ne m'étonnerait dans ce meurtre.
—On dirait que tout le monde devient fou.
—C'est aussi l'impression que j'ai... »
Aurélie allait sortir de la bibliothèque pour vaquer à ses nombreuses occupations que lui occasionnaient le manoir, lorsque Maggie la rappela.
« —Au fait, peux-tu me prévenir quand Chelsea va commencer à faire la cuisine ? Je voudrais l'aider.
—Elle a déjà commencé. Ce soir, pour votre dernier dîner au manoir, il sera grandiose. En plus il y aura ce Patron et le journaliste qui fouine partout, Raphaël je crois qu'il s'appelle.
—Alors je vais aller l'aider.
—André y est déjà.
—André ?
—Oui. C'est son métier, et il est un cuisinier hors-pair, je peux te l'affirmer. Tant mieux pour lui car il n'a pas de femme pour lui préparer de petits plats.
—Ah oui c'est vrai, mais on ne dirait pas comme ça... fit pensivement Maggie qui préféra ignorer la dernière remarque venue d'un autre siècle et prononcée par son amie.
—C'est vrai que c'est un vieil ours solitaire, mais il a grand cœur, surtout pour sa fille chérie. Et c'est quelqu'un de sensible aussi. Mais il n'hésiterait pas une seconde à tuer, il a beaucoup de sang-froid.
—Tu crois qu'il a tué Agnès ?
—Non, c'est Léa. »
Maggie regarda Aurélie avec étonnement.
« —Léa est capable de tuer, se justifia la jeune hôte, son père le ferait aussi. Ils ont le même comportement.
—Léa n'a tué personne. Elle n'avait pas de raisons de tuer cette pauvre femme. Elles avaient l'air de s'apprécier.
—Si, elle en avait une.
—Laquelle ?
—Elle ne pouvait pas la voir en peinture !
—Qu'est-ce qui te fait dire ça ?
—Léa m'a déjà parlé d'Agnès, mais elle ne m'a pas dit du bien d'elle, au contraire ! Agnès l'exploitait dans son salon, je pense qu'on peut aussi parler de harcèlent moral. Elle parlait beaucoup sur le dos des autres, Agnès. Et pas toujours en bien. Léa en souffrait beaucoup.
—Et André ?
—Quoi André ?
—Aurait-il pu tuer Agnès lui aussi ?
—Oui, je pense. Pour l'argent je suppose. C'est un mobile tellement évident.
—Trop évident.
—Ou pour venger sa fille. Il n'a pas supporté de la voir souffrir. On ne sait pas ce qu'Agnès a pu raconter à propos de Léa. Elle lui a peut-être fait une sale réputation. André a vu rouge et est passé à l'action.
—Mais au fait, en parlant d'eux, pourquoi il est encore là lui ? Il ne devait pas partir ?
—Nicolas l'a convaincu de rester au manoir avec nous, de ne pas rentrer tout seul au moins pour cette nuit. Il a eu du mal à le décider, mais il a fini par accepter. Bon, je vais te laisser, j'ai du linge à laver.
—Ce n'est pas Chelsea qui...
—Ne me parle plus d'elle ! la coupa Aurélie.
—Désolée.
—Sinon pour répondre à ta question, non ce n'est pas Chelsea qui lavera le linge. Elle est trop occupée à faire la cuisine. Et elle s'en va demain en même temps que vous. Donc, il faut que je m'y mette. »
Sur ce, les deux filles se quittèrent. Maggie se rendit à la cuisine. Elle y trouva, sans surprise, Chelsea qui épluchait des pommes de terres. Il y avait aussi André qui beurrait plusieurs moules à tartes, Ewen qui peinait à faire entrer une énorme dinde dans le four sans renverser la sauce, et deux officiers de police qui suivaient attentivement chaque gestes effectués dans cette cuisine.
« —Tu veux quoi ? lui lança Chelsea sans aucune forme de politesse.
—Je viens aider, lui répondit Maggie avec douceur.
—On n'est pas déjà assez nombreux ? »
Maggie s'apprêtait à ressortir, lorsque Chelsea la rappela.
« —En fait, si. J'ai quelque chose à te faire faire.
—Ah ?
—Epluche et coupe les pommes posées sur la table, en petits carrés.
—Ok. »
Maggie prit un économe qui traînait à côté et commença à éplucher les 5 pommes posées sur la table. Une fois les pommes épluchées, elle prit un petit couteau posé devant elle et se mit à couper des petits cubes avec beaucoup d'application.
« —Plus gros les carrés ! ordonna Chelsea qui observait la jeune détective.
—Pardon ! »
Alors, elle se mit à couper de plus gros cubes de pomme.
« —J'ai fini, fit la jeune femme lorsqu'elle eut entièrement coupé les fruits.
—Tu sais préparer de la pâte à gâteau ? lui demanda Chelsea froidement.
—Euh, oui je crois.
—Alors tu vas aider Ewen à en préparer deux saladiers. »
Maggie se rendit près de son acolyte qui avait déjà attaqué le premier saladier. Tous deux firent de la pâte à gâteau, ce qui prit un certain temps.
Pendant ce temps, André, qui ne disait aucun mot, faisait cuire des haricots verts et Chelsea faisait une espèce de sauce avec de la crème et plusieurs épices dont Maggie ne connaissait pas le nom, sauf pour le curry qu'elle crut reconnaître à la couleur.
« —Quand vous aurez fini, vous verserez la pâte dans les moules à tarte et vous y ajouterez les morceaux de pomme, fit Chelsea aux détectives. »
Maggie et Ewen s'exécutèrent.
« —Maintenant, vous mettez les gâteaux dans le four près de la porte et après je n'aurais plus besoin de vous. »
Ils firent ce que Chelsea leur avait demandé, puis ils sortirent de la cuisine.
« —J'ai l'impression d'avoir suivi un tuto de cuisine tout le temps où j'étais avec elle ! se moqua Ewen. C'est son territoire et c'est elle qui donne les ordres, y'a pas photo. Rien à voir avec la Chelsea qu'on avait aperçue jusqu'à présent. Sinon André est quelqu'un de très distant, mais il fait des merveilles en cuisine !
—C'est vrai que j'ai été très étonnée de le voir cuisiner mais il avait l'air de ne pas trop mal se débrouiller.
—J'ai hâte de goûter ce qu'il a fait.
—Moi aussi. Espérons qu'il ne nous empoisonnera pas...
—Même s'il a voulu essayé, il n'aurait pas pu, tous nos gestes étaient surveillés par ces policiers.
—Ils font ça pour nous éviter un second meurtre.
—Mais qui penses-tu qu'on veuille tuer ?
—Je ne sais pas. »
Maggie tourna les talons et se rendit dans sa chambre. Elle s'allongea sur son lit et ferma les yeux pour réfléchir, encore et toujours. Elle pensa à Léa lorsqu'elle se jeta sur elle pour l'étrangler. Ça ne lui ressemblait pourtant pas. Mais elle n'eut pas le temps d'approfondir ses pensées qu'on frappa à sa porte.
« —C'est encore Ewen, j'ai du nouveau.
—Entre. »
Le jeune homme entra dans la chambre. Il referma la porte après être entré et vint s'asseoir aux pieds de Maggie qui était restée allongée.
« —Alors ? questionna la jeune femme sans même poser les yeux sur son ami et préférant fixer le plafond d'un blanc absolument ennuyant.
—J'ai parlé à Patron de ta théorie, même si je sais que tu as dû le faire. Je ne voulais pas t'en parler devant tout le monde.
—Oui et ?
—Lui aussi pense que Léa n'a pas tué Agnès et que le dénouement est proche.
—Demain j'imagine ?
—Oui, demain tout le monde est convoqué au manoir pour le verdict.
—Patron s'est enfin décidé à le donner ?
—Non. C'est toi qui le donneras.
—Pardon ?! s'étrangla Maggie en se relevant d'un bond.
—Tu sais qui est le meurtrier. C'est Patron qui m'a dit de te le dire.
—Non, je n'en ai absolument aucune idée.
—La nuit porte conseil à ce qu'on dit.
—C'est aussi Patron qui t'a dit ça ?
—Euh non, là c'est moi. Bref, demain tout le monde sera réuni et il y aura aussi les parents d'Agnès, et Léa. Ainsi que d'autres personnes qui ont travaillé sur l'enquête. C'est-à-dire Patron, Lud... euh, le lieutenant Messant, le sergent Batiez, et Raphaël.
—Et je vais devoir parler devant tout ce monde là ?
—On a peur Maggie ? demanda gentiment Ewen.
—Ce n'est pas que j'ai peur, c'est que je n'ai absolument rien à leur raconter.
—Tu trouveras bien (Ewen fit un clin d'œil à la jeune femme qui détourna la tête).
—On verra demain.
—En tout cas, si tu as besoin d'aide, je suis là.
—Merci, tu me l'as déjà dit. Justement, j'ai besoin d'aide.
—Oui ? Super Ewen est là !
—Super Ewen aurait-il une idée sur l'identité du meurtrier ?
—En fait, j'ai beau chercher, et j'ai l'impression que tout le monde est coupable.
—Efficace Super Ewen. »
Le jeune homme ne répondit rien mais ne se vexa pas.
« —Je suis dans le même cas que toi, chacun a eu la possibilité de tuer Agnès et le mobile est principalement l'argent, fit Maggie.
—Eh ben tu vas passer une bonne nuit toi ! lança ironiquement Ewen. Il va falloir chercher le meurtrier.
—Mais toi aussi tu vas le chercher ce meurtrier !
—Oui bien sûr. Mais toi en plus tu vas devoir trouver un discours.
—J'improviserai. »
Ils se sourirent et on les appela pour aller manger.
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