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Chapitre 7 - La première invention

Durant douze jours, j'assiste malgré moi aux négociations de comités de consultation mixtes dans différentes tours. 

Pour tous les pans régaliens et législatifs, la procédure est celle du vote à la majorité. La Capitale tente d'opérer une synthèse de toutes les cultures en prenant en considération les intérêts animaliers, environnementaux et l'innovation nécessaire à la construction d'une civilisation florissante. Il s'agit d'une tâche titanesque que les Elfes ont commencée il y a déjà plusieurs siècles.

Outre la langue, le système décimal et la standardisation des mesures, les races essaient de s'accorder sur l'utilisation des cristaux, les propriétés des herbes, les incantations et rituels prohibés, la spiritualité des animaux, les panthéons autorisés et même les recettes de cuisine. 

La mise en commun des connaissances pose de nombreux problèmes d'interprétation parmi les races. Souvent, on me demande mon avis en estimant que je suis la plus impartiale autour de la table.

En revanche, les tribunaux appliquent une loi avec des peines différenciées selon la race. En effet, toutes les espèces ne tiennent pas à l'argent, à l'honneur ou à leur intégrité physique de la même façon. Infliger une peine pécuniaire à un Humain ou à un Gnöme n'aura pas le même impact, de même que l'Urhoq vit plus mal une humiliation publique qui touche à son honneur qu'un châtiment corporel. C'est une justice flexible, mais qui demeure inégalitaire, les puissants échappant le plus souvent à leurs condamnations par des arrangements politiques. Plus généralement, la corruption mène bon train à tous les niveaux.

Les Représentants sont intraitables : ils exigent que je me consacre uniquement à ma tâche. Ils affectent même une Humaine à l'entretien de la maison. Elle se nomme Firouze. Son air poupin et gai cache son âge car elle est mon aînée. Je le vois aux petites rides aux coins de ses yeux et au balancement sensuel de ses hanches expérimentées. Elle a les bras forts d'une femme de son temps et le haut du dos un peu voûté. J'ai du mal à accepter cette aide, mais passant le plus clair de mon temps à travailler, je n'en dispose guère pour les tâches du quotidien.

Si Firouze s'avère être un soulagement, j'ai tôt fait de réaliser sa mission sous-jacente. Lorsque je suis à l'ouvrage, je la vois se pencher sur mes croquis. Je comprends qu'elle m'espionne. Les Représentants m'imaginent bien naïve pour m'avoir imposé cette moucharde. Ils ne me font pas confiance.

Le dernier des douze jours, Ysma consent à ce que j'assiste à l'entraînement de l'armée. La Capitale tout entière est sous son commandement, non parce qu'elle est Humaine, mais parce que son charisme et son autorité ont raison de toutes les contestations.

En raison de la composition hétérogène de l'armée, les tailles de jambes et les rythmes de marche sont incompatibles. Les Hardus écrasent les bottes des Gnömes en surpoids, qui viennent se cogner contre des Adayoshs cornus se dressant tels des monolithes sur la pelouse. Les Kovewalts s'entraînant à escalader les échelles tombent sur les Humains et les Urhoqs se querellent même entre eux à la première bousculade. C'est l'anarchie totale ! La polyvalence martiale n'est pas pour demain.

Exaspérée, Ysma sonne le rassemblement et houspille les troupes. De dépit, elle entérine au Conseil des Représentants une vieille décision d'affecter les races par corps d'armée. À son goût, celle-ci est encore trop faible et mal organisée.

Dans mon ignorance, je questionne la Commandante sur la nécessité d'élever une armée alors que les races sont unifiées. Devant elle, Ryön me cite ses exploits et les guerres pacificatrices qu'elle a menées de la Porte de Wislafel jusqu'à Simoad en passant par Tequacà et le Mont Qaleop.

« Je m'y suis rendue que je suis soldate et que mon devoir est aussi mon métier, clame fièrement Ysma.

Je croise le regard de Ryön et à ce moment, je comprends que je ne fais plus partie de la conversation. Elle et lui savent de quoi ils parlent.

Leur attitude me déplaît.

— Je pensais qu'il n'y avait plus de guerre. Pourquoi avez-vous besoin d'entraîner une armée ?

Ysma se moque :

— La présence de la paix ne signifie pas l'absence de brigands ! Et vous croyez que les guerres s'arrêtent aux frontières ? Elles sont loin, mais existent et nous devons nous y préparer ! »

Elle part dans un grand éclat de rire qui fait vibrer les murs. Ryön secoue la tête. Il a trouvé ma réflexion stupide, lui aussi.

Je les trouve bien cassants avec moi ! Après tout, leur nation compte s'offrir mes services pour concevoir non seulement des inventions utiles au peuple, mais également, je m'en doute, des armes. J'aimerais argumenter, mais j'en suis incapable. Tenter de faire valoir ma position est peine perdue.

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Je me tourne vers les travaux de Charles. D'après son témoignage dont on m'a remis une copie, il est apparu à la fin du XIXème siècle de mon monde. Cette période concorde avec les informations que j'ai rassemblées à son sujet. 

Ainsi, plus de cent trente ans nous séparent, lui et moi, mais je crois pouvoir me servir de son influence pour asseoir ma sécurité. En sa qualité de dernier Traverseur, Charles a proposé l'abolition des corporations et la création des syndicats, mais cette initiative a été refusée en bloc. Ses idées étaient trop avancées par rapport à l'époque dans laquelle il vivait et il ne prenait pas suffisamment en compte les spécificités de ce monde. Le Conseil des Représentants a concédé le développement des ateliers, mais a prohibé la multiplication des usines sous l'insistance des Elfes et des Adayoshs. Les Kovewalts et les Hardus se sont alliés dans les négociations, mais les autres races ont préféré écouter les sages. En revanche, les gens ont obtenu le droit de réunion. La liberté de la presse elle, est demeurée inexistante malgré les efforts de Charles en ce sens.

Parmi ses dernières inventions « de faible portée » comme il les décrit dans ses notes, figurent l'école, mais uniquement réservée aux familles aisées, la boîte à lettres, en service dans la Capitale comme en témoignent les plateformes aériennes, ainsi que les réverbères. Faute d'avoir adopté l'électricité et par-là même l'ampoule électrique, ceux que j'ai aperçus fonctionnent avec des lucioles. Des Adayoshs employés par la Capitale les capturent et les y enferment à la nuit tombée. Ils les libèrent au matin. De même, ils assurent le ravitaillement en eau des bureaux publics, la sourcant dans les nombreuses fontaines et la transportant d'un bout à l'autre de la ville. À mon désespoir, Charles ne mentionne pas le soutien-gorge, mais il a introduit les corsets qu'il a nommés « ficelles de porc. » Je préfère encore utiliser des bandages.

Le Traverseur ne s'est pas non plus étendu sur le nettoyage à sec et c'est là une idée que je pourrais employer. Je ne tiens pas à avoir recours à des croquis d'armes. Autant montrer aux Représentants qu'ils ne peuvent espérer de moi que des inventions améliorant le quotidien comme leurs moissonneuses-batteuses.

Plus désolant, Charles parle incessamment d'alcool dans ses notes. Il indique que les bouteilles de vin sont d'un degré plus fort que celui de son Auvergne. Il aurait côtoyé les tavernes de la Capitale jusqu'à sa mort.

Cela me donne une idée. 

Aux Beaux-Arts, on nous a enseigné que le mélange d'alcool et de térébenthine nettoyait plutôt qu'il tâchait. Il suffit de récolter la térébenthine à partir d'arbres résineux. En principe, elle est de couleur jaune ou brunâtre selon l'origine de l'arbre.

Je tiens ma première invention, ma première chance de me faire respecter ! Ryön devrait pouvoir m'aider. Plus vite j'impressionnerai les Représentants et plus vite on me laissera accéder aux bibliothèques.

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Je commence les tests de térébenthine avec l'aide de l'archer. D'ailleurs, je ne devrais plus l'appeler ainsi car il laisse désormais son grand arc à la maison. Lorsque j'y réfléchis, un arc en ville est bien moins pratique que des dagues. Le statut de Ryön s'est précisé : il est le Capitaine de cette ville. Mais pour le moment, de garde du corps impavide, il s'est transformé en assistant poli.

Après purification et distillation, la térébenthine se sépare en deux parties : l'une solide et inodore, c'est la colophane ; l'autre liquide et odorante, c'est l'essence de térébenthine. Les termes techniques entrent immédiatement dans la langue commune, au grand désarroi des traducteurs des différentes races qui militent depuis parfois des années pour faire entendre leurs propres propositions.

Il ne reste qu'à vérifier que le nettoyage à sec fonctionne dans ce monde. Pour cela, Ryön me mène aux lessiveuses Humaines sans révéler mon identité. Il m'a habillée comme elles, en hardes. 

Le Capitaine m'introduit aux lavoirs comme une fille de la ferme qu'il a recueillie sur la route et qui cherche à se faire une place à la ville. Aucune lessiveuse ne se méfie de lui, mais à son approche, elles reculent en s'exclamant, le visage accusant un profond respect.

Être au contact des lessiveuses remet en perspective ma situation : les plus jeunes ont à peine seize ans et déjà plusieurs bouches à nourrir. Certaines, un peu plus âgées que moi, sont grands-mères. Si les fendôriennes tiennent un rôle dans la société plus important que celui qu'a connu mon monde, certaines valeurs traditionnelles ont la vie dure et la contraception est inexistante. Il faut être bien née ou avoir gagné un large respect pour se faire accepter d'égale à un homme. 

Prise d'un sentiment de révolte et d'impuissance, je brosse les draps avec une frénésie qui passe pour une admirable motivation auprès des femmes.

Quelques lessiveuses sont au service d'artisans Urhoqs : leur linge est le plus sale et pestilentiel qu'il m'ait été donné de nettoyer. Cependant, la térébenthine vient sans mal à bout des tâches et c'est ainsi que je connais mon premier succès. Le nettoyage à sec est né à Fendôr. Toutes les places publiques en parlent : une Traverseuse est arrivée et va rendre leur vie meilleure. Qui est-elle ? Où vit-elle ? À quoi ressemble-t-elle ?

Je demeure quelques jours enfermée dans la maison, le temps que la Capitale trouve un autre sujet d'intérêt et que les lessiveuses oublient mon visage. La période correspond à avril et s'il fait encore frais, le soleil radieux chauffe les toitures. Je parcoure l'immensité de la Capitale à pied, à la recherche d'idées. Encore une et on m'ouvrira la bibliothèque de la Confédération.

Je goûte les fruits étranges sur les étals, passe la main sur les runes gravées des maisons et sur des étoffes plus douces que la soie, laisse toutes sortes d'odeurs pénétrer mes narines jusqu'à m'enivrer ou me dégoûter. Ma seule contrainte résulte de quelques pièces laissées chaque matin sur la table que je dépense la journée même, incapable de mettre un seul écu de côté. Je dois m'habituer à marchander : les prix ne sont pas affichés et la vente à la tête du client.

Pendant ce temps, Ryön me suit à la trace. 

Ne peut-il donc s'amuser et oublier son devoir quelques instants ? Certes, il n'est pas nécessairement à portée de main, mais je surprends régulièrement sa silhouette effilée dans l'ombre d'une ruelle, l'éclat argenté de sa chevelure à l'angle d'une arche ou ses yeux clairs perçant les vitraux des apothicaires. À la maison, je ne le vois pas, mais devine sa présence. À l'extérieur, je le sens proche de moi sans appréhension de me faire agresser par des tire-bourses.

Un jour, j'entends une clameur grondante et des sifflets. La masse de badauds grossit dans les rues exiguës qui forment des caisses de résonnance. Un Gnöme qui m'arrive à la ceinture se faufile devant moi, le poing levé en hurlant : « À mort le terroriste ! »

La foule est agglutinée devant un échafaud dressé sur une place commerçante. 

Se dresse celle qui rend la mort moins douloureuse. Imposante, aiguisée, silencieuse, la guillotine tranche la tête d'un Adayosh ligoté.

Jamais je n'oublierai cette vision, celle de la boule encapuchonnée dont les cornes ont percé le tissu. Sous les huées, la tête se détache du corps et tombe dans un panier. Aussitôt un rapace fond sur le réceptacle et s'envole avec la prise coincée dans ses serres. Le sang éclabousse la foule en contrebas. La masse se jette sur le reste du corps et en arrache les membres. Mes oreilles bourdonnent et ma vue se brouille. 

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Le Capitaine apparaît dans l'entrebâillement de la porte de ma chambre, Firouze sur ses talons :

« Elle a déboulé comme un fantôme et n'a pas quitté sa chambre ! À croire que cette femme hait le monde !

Firouze éprouve pour moi un dédain mal dissimulé. Elle est une fée du logis, mais pour le reste, m'estime autant que son balai. Agréable de compagnie au possible envers Ryön, il émane d'elle des piques de fourberie à mon égard.

Le Capitaine laisse souvent à Firouze quelques pièces sur la table car celle-ci fait du zèle en nettoyant les écuries. Elle a même cajolé les chevaux, le temps de se faire pleinement apprécier de Ryön. Pour le reste, ses yeux et ses oreilles traînent partout avec indiscrétion, jusqu'à la boutique de mon fournisseur de papier et d'encres. 

Assise sur ma couverture hagarde, je gratte de l'ongle ma tête de lit découpée en forme de feuille. Le Capitaine ouvre la porte en grand, la tête encore tournée vers Firouze.

— Cela ira. Je vous remercie. Rentrez chez vous, lui ordonne-t-il avec douceur. Nous parlerons demain de votre avancement. »

Satisfaite, elle se rapproche au point de le frôler et lui glisse quelques mots à l'oreille. Le Capitaine secoue la tête et referme la porte. Le grincement des gonds étouffe la complainte de Firouze. Tant mieux. Cette femme ne cesse d'atrophier mon espace personnel et mérite qu'on lui claque de temps en temps la porte au nez. Certes, elle a bassiné et battu mes draps qui sentent bon la lavande. Je lui en aurai été reconnaissante si, à mon retour, son accueil n'avait pas pris la forme d'un interrogatoire.

Ryön m'a apporté un bouquet de fleurs magnifiques comme celle qu'il a autrefois accrochée à la broche d'Edhelís. Il les dépose dans un vase sur la commode avec un air coupable. 

C'est le comble ! Il ne cesse de courir dans tous les sens et malgré cela, on dirait qu'il a le sentiment de constamment manquer à son devoir.

Peu à peu, je relâche la crispation qui me noue le ventre :

« Tuer est légal.

— Assurément, répond-il comme une évidence. Une autre observation te pèse-t-elle sur le cœur ?

Il me sonde, comme il observe tout ce qui se trouve autour de lui, les gens surtout.

— Je suis entravée.

— Tu es libre de tes mouvements et de la gestion de tes activités, autant que faire se peut.

Le simple fait qu'il ait eu besoin de mentionner ce détail prouve que je suis prisonnière. Un spasme me contracte l'estomac.

— C'est ce que toi et les Représentants voudraient me faire croire.

— Nous veillons à ta sécurité. C'est un privilège pour lequel tu devrais te montrer reconnaissante.

Je lève vers lui mes yeux emplis de larmes collantes.

— Mon sort n'est pas enviable. Je suis déracinée.

J'espère que ce terme lui parle, mais il n'est pas dupe. Pour un être tel que Ryön, les Humains sont comme les plantes : ils naissent et meurent en un claquement de doigts. Leurs complaintes sont vaines et futiles.

Il baisse la tête et pose une main amicale sur mon épaule :

— Parle-moi des tiens et de ton univers. »

Ryön se révèle avide de connaissances sur ma civilisation à mon époque : les villes et les campagnes, les infrastructures, les organisations sociales, la nourriture, les vêtements, la politique, tout ce que je sais. Je l'abreuve d'informations, de détails et d'anecdotes. 

Ces discussions qui durent toutes les nuits suivantes me sont libératrices. Mieux, elles fissurent peu à peu le mur que Ryön a construit entre nous.

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Merci de votre lecture !

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N'hésitez pas à laisser un commentaire pour me dire ce que vous pensez de l'histoire ;)

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