Après quelques casiers forcés par la force fantomatique d'Addison, les deux adolescents avaient finalement trouvé un masque pour Félix. Maintenant mieux équipés, ils reprirent à nouveau l'angle angoissant du grand couloir, appréhendant de voir à nouveau Rowena les épier en plein milieu de ce dernier.

Heureusement pour le cœur du métisse et l'esprit de la jeune fille, la rousse avait décidé de les observer de loin. Après tout, si elle s'amusait à les effrayer toutes les cinq minutes, ils ne risquaient pas de retrouver son corps abandonné.

Même si Félix était silencieux, sa tête et son cœur criaient très forts qu'il avait affreusement peur de ce qu'ils allaient bien pouvoir trouver dans cette salle condamnée. "Halloween, la soirée de l'horreur". Ce nom l'avait toujours bien fait rire.

Eh bien, il aurait aimé continué à en rire.

- On va pouvoir résoudre le mystère de Rowena Roy. souffla la blonde avec un léger sourire crispée. J'ai pas du tout hâte.. !

- Moi non plus.

Leurs voix faisaient écho dans les couloirs vides de ce grand bâtiment, s'accordant au son que provoquait les semelles des baskets de Félix rencontrant le carrelage laissant apparaître son reflet. Dans le nouveau silence angoissé des deux camarades, une pensée traversa le coloré.

- Mais quand on retrouvera son corps, faudra trouver un moyen de le signaler nan ? 

- Pour qu'elle soit enterrée dignement ? elle regarda Félix qui hocha la tête. Hum.. Ouais. Pas faux. T'as une idée ?

Il resta muet un instant, avant de sourire légèrement, ce qui lui donnait un air un peu plus confiant.

- Je crois que oui.

- Eh bah on va voir ça, petit !

Addison vola un peu plus vite en repérant la porte de la salle interdite tandis que Félix la suivait d'un pas plus tranquille, levant les yeux au ciel. Une fois qu'ils furent tout deux devant, la blonde traversa la porte et la déverrouilla sans difficultés pendant que le médium plaçait le masque devant son nez et sa bouche.

Lorsqu'il posa seulement un pied dans la pièce délabré, il sentit une énergie se heurter à lui, se mêler à son sang dans une sensation peu agréable, avant que sa tête ne parte en arrière d'elle-même, comme dirigée par la force inconnue se trouvant enfermée un peu plus tôt dans la pièce.

De là, un déferlement d'image passa à une vitesse folle devant ses yeux, pour finalement reconstituer une scène des plus intéressantes, bien que morbide.

Dans la salle de classe condamnée, une odeur chimique émanait d'entre les murs. Les pupitres, le tableau, tout objet se trouvant à l'intérieur semblaient crasseux, pourris, sur le point de s'écrouler.

La silhouette élancée portant un sac aussi grand qu'elle n'eut donc aucun mal à retirer une des grandes dalles du carrelage du sol. La poche à forme humanoïde éventré à côté d'elle, la jeune femme masquée aux cheveux ébènes commença à creuser le sol à l'aide d'une petite pelle sûrement dérobée dans les ustensiles de jardinage du lycée.

Le sol devenu complètement pourri, la jeune femme ne faisait presque aucun effort pour retirer la terre de sous la première dalle. Cependant, ce n'était pas assez grand. Alors, elle en retira une autre, puis une autre, jusqu'à ce qu'une longueur parfaite pour y déposer un corps soit dessiné dans le sol mou.

La précision et la rapidité dont faisait preuve la meurtrière étonnait Félix. Elle semblait sûre d'elle, ne regrettant en aucun cas l'acte pêché qu'elle venait de commettre. Même lorsqu'elle sortit le corps de Rowena, morte étranglée et aussi maigre qu'il l'avait vu la première fois, elle gardait un sang-froid incroyable. On aurait pu dire sans hésitation qu'elle se débarrassait d'un objet encombrant, d'une chose que plus personne ne veut avoir chez soi.

La pauvre rousse assassinée n'était qu'une vulgaire poussière que l'assassin s'était contenté de balayer avec joie.

Le médium vit la jeune femme recouvrir le cadavre de terre, replacer les dalles, et Félix revint finalement à lui avant qu'il n'ait pu voir le haut du visage de la meurtrière.

Il remit sa tête droite en secouant cette dernière, tel un réveil agité, avant qu'il ne cligne plusieurs fois des yeux pour se ré-habituer à la luminosité de son monde. Il regarda autour de lui, repérant rapidement l'endroit où Rowena devrait être enterrée, mais en regardant au travers d'une Addison inquiète.

- Wouah, pourquoi t'es si proche ? demanda-t-il de sa voix toujours aussi cassée en reculant d'un pas.

- Tu t'es raidi d'un seul coup en penchant la tête en arrière avec les yeux blancs, j'ai un peu, hum, comment dire.. eu peur ?

Il fronça les sourcils, confus, puis grimaça discrètement en imaginant ce que la blonde avait pu voir. Il devait avoir un air de possédé, aussi effrayant que le regard de la fantôme rousse. Il finit par secouer la tête négativement, contournant Addison pour se mettre au milieu de la pièce.

- J'ai vu quelqu'un enterré Rowena ici. affirma-t-il en s'agenouillant. Il faut retrouver les dalles.

- On l'a enterrée ici ?! s'exclama la blonde en le suivant. Ew, c'est vraiment dégueulasse de faire ça !

- Ouais.. Apparemment, y avait un meurtrier dans ton lycée, Addison.

Cette information eut l'effet d'un coup de fouet pour la blonde. Son assassin était très certainement le même que celui de Rowena. Mais.. Pourquoi les avoir tuées, toutes les deux ? Qu'avaient-elles bien pu faire pour énerver à ce point ce fou ?

- Et.. T'as vu à quoi il ressemblait.. ? le questionna-t-elle, curieuse sur l'identité de cette personne.

Pendant qu'il cherchait des dalles surélevées par une terre mal remise, il secoua la tête négativement.

- Non, je suis revenu à moi avant qu'elle tourne la tête vers moi. Je sais par contre que c'est une fille, du coup.

Sentant son doigt heurter le côté rugueux d'un carrelage qu'on aurait cassé pour le retirer, il le saisit afin de le sortir de son emplacement à l'aide de ses doigts fins, finissant par relever une première dalle ayant tassé un amas de terre.

- Je crois que j'ai trouvé ! s'exclama-t-il.

Addison sortit de ses pensées, et vint l'aider à retirer une deuxième dalle qu'ils laissèrent tomber en arrière. Elle se cassa, comme la première que Félix n'avait pas posé avec délicatesse, puis ils retirèrent la dernière dalle de la même manière que les deux autres.

D'un accord commun, ils balayèrent la terre de leur mains, pour finalement entrevoir un sac sale et ouvert sur la tête d'un squelette ayant perdu sa chair et ses muscles depuis bien longtemps.