Chapitre 16 : Mirage
Je savais que quelque chose n'allait pas quand je me suis réveillée ce matin. Mon cœur battait d'une manière étrange, comme s'il essayait de me prévenir d'un danger imminent. Chaque respiration me semblait laborieuse, et mes membres étaient engourdis.
Mes parents avaient insisté pour que je reste à la maison et que je me repose jusqu'à mon rendez-vous chez le médecin l'après-midi. Mais ce repos n'avait rien d'apaisant. Plus les heures passaient, plus mes pensées s'assombrissaient.
Quand nous sommes arrivés chez le médecin, je me suis forcée à paraître calme. Pourtant, l'inquiétude se lisait sur mon visage.
Docteur : Amelia, a-t-il commencé. Je me dois d'être honnête avec toi. Ta maladie progresse plus rapidement que ce que nous avions anticipé.
Je sentais mes oreilles bourdonner. Il a continué, expliquant que l'une des solutions serait de trouver un donneur compatible pour envisager un traitement expérimental ou, en dernier recours, une greffe. Mon regard a immédiatement cherché celui de mes parents.
Maman était assise raide, les doigts entrelacés si fermement que ses jointures blanchissaient. Papa, lui, se contentait d'un silence lourd, mais je n'ai pas manqué le regard qu'il a échangé avec elle. C'était furtif, mais chargé de sous-entendus.
Papa : Ma chérie, nous allons tout faire pour que tu reçoives les meilleurs soins, a-t-il a déclaré, brisant le silence.
Moi : Et pourquoi ne pas simplement me faire une greffe, hein ? Vous êtes mes parents, après tout, ai-je lâché d'un ton sarcastique, espérant que ma remarque les pousserait à me donner plus d'explications.
Mais à ma grande surprise, leur malaise était palpable. Maman évitait soigneusement mon regard, tandis que Papa semblait réfléchir à chaque mot qu'il s'apprêtait à dire. Ne supportant pas leur silence, je me suis tournée vers le médecin.
Moi : Alors, comment ça marche, exactement ? Pourquoi est-ce si compliqué de trouver un donneur ? Et un donneur de quoi au juste ?
Il a ajusté ses lunettes, visiblement un peu gêné lui aussi, avant de répondre.
Docteur : Eh bien, souvent, les donneurs compatibles viennent de la famille proche. Mais cela nécessite des tests génétiques approfondis pour confirmer la compatibilité. Dans certains cas, il est possible d'avoir recours à des donneurs externes, mais les chances de compatibilité diminuent significativement.
J'ai jeté un regard appuyé à mes parents, espérant qu'ils éclairciraient enfin la situation. Mais au lieu de cela, Papa a simplement posé une main sur mon épaule.
Papa : Concentre-toi sur ta santé, d'accord ? Nous allons gérer tout ça.
J'avais envie de hurler. De leur crier que je n'étais pas une enfant qu'ils pouvaient protéger par des demi-vérités. De leur rappeler que c'était ma vie, mon corps qui était en jeu. Mais tout ce que j'ai réussi à faire, c'est hocher la tête, le cœur lourd et l'esprit tourmenté.
Une fois à la maison, je n'ai pas pu contenir plus longtemps ma frustration. Dès que la porte s'est refermée derrière nous, les mots ont jailli sans retenue.
Moi : Pourquoi est-ce que vous ne me dites pas toute la vérité ?
Maman : Amelia, chérie, tu passes une période difficile. Tu dois te concentrer sur ta santé.
Moi : Ma santé ? ai-je répliqué, la voix tremblante. Et quoi ? Vous pensez vraiment que minimiser tout ce qui se passe m'aide à aller mieux ? Ça ne fait qu'empirer les choses !
Papa : Amelia, écoute. Ce qui compte maintenant, c'est que tu te reposes et que tu laisses les médecins faire leur travail.
Moi : Non ! Arrêtez de changer de sujet ! Je ne suis pas stupide, vous savez ? Je vous entends chuchoter, je capte vos regards... Il y a des choses que vous cachez, et j'ai le droit de savoir !
Ils échangèrent un bref regard, et cette simple interaction fit monter ma rage d'un cran.
Moi : Vous voyez ? Vous faites encore ça ! Vous parlez entre vous sans rien me dire ! C'est de votre faute si je suis comme ça !
Ma voix se brisa, mes mots devenant plus faibles.
Moi : Et si vous continuez comme ça, je ne vous ferai plus jamais confiance.
Le silence qui suivit était lourd, presque insupportable. Maman s'approcha, tendant la main comme pour me toucher, mais je reculai instinctivement.
Maman : Amelia, on essaye juste te protéger...
Moi : Me protéger ?
J'ai laissé échapper un rire amer.
Moi : Tout ce que vous faites, c'est me pousser à me méfier encore plus de vous.
Je ne leur ai pas laissé l'occasion de répondre. D'un pas brusque, je suis montée dans ma chambre, claquant la porte derrière moi. Là, enfin seule, je me suis laissée tomber sur mon lit, le cœur lourd et l'esprit en ébullition. Les larmes que je retenais depuis des heures ont fini par couler, un mélange de colère, de tristesse et de peur que je n'arrivais pas à apaiser.
L'annonce du médecin résonnait encore dans ma tête, tout comme la dispute avec mes parents. J'avais l'impression d'être un puzzle dont les pièces manquaient à l'appel, un tableau dont les contours étaient dessinés, mais dont le centre restait une énigme.
J'attrapai mon téléphone, cherchant un moment de distraction, mais une notification attira immédiatement mon attention. Mon cœur manqua un battement. C'était un message du compte anonyme. Le premier depuis des jours.
Rendez-vous à Quincy Market à 15h...
Je te dirai ce qu'ils cachent.
Je relus le message plusieurs fois, le cœur battant. Pourquoi maintenant ? Comment cette personne pouvait-elle toujours apparaître pile au moment où tout semblait basculer ? Le choix des mots résonnait étrangement, comme s'il s'agissait d'un écho de mes propres pensées.
Une part de moi voulait ignorer ce message, le rejeter comme une coïncidence ou une mauvaise blague. Mais une autre, plus forte, plus insatiable, voulait savoir. Il y avait trop de mystères autour de moi, et je ne pouvais pas continuer à avancer dans cette obscurité. Pourtant, l'idée d'y aller seule me terrifiait.
Je decidais alors d'envoyer un message à la première personne à qui j'ai pensé.
Miles, tu es occupé ?
J'ai besoin de te parler.
La réponse ne tarda pas.
Toujours là pour toi.
Qu'est-ce qu'il y a ?
Je lui envoyai une capture d'écran du message anonyme.
Je ne sais pas quoi faire.
Quelques secondes plus tard, il m'appela.
— Amelia, c'est quoi ce message ? Tu penses vraiment aller à ce rendez-vous ?
Moi : Je ne sais pas, murmurai-je, la gorge serrée. Mais si cette personne sait quelque chose... si elle peut me dire ce que mes parents me cachent... Je dois y aller, Miles. Je ne peux pas rester dans l'ignorance.
— Alors je viens avec toi, déclara-t-il fermement. Mais promets-moi qu'on fera attention. Si quoi que ce soit semble louche, on part immédiatement.
Un sourire involontaire étira mes lèvres.
Moi : Merci, Miles. Je ne sais pas ce que je ferais sans toi.
— Ne t'inquiète pas. On gère ça ensemble, répondit-il, son ton sérieux mais réconfortant. Je passe te prendre ?
Moi : Non, répondis-je. On se rejoint là-bas, c'est plus simple.
Je raccrochai en soupirant profondément. L'idée de découvrir la vérité m'effrayait, mais je savais qu'avec Miles à mes côtés, je serais un peu plus forte.
Plus tard, à l'insu de mes parents j'ai pris ma voiture et je suis sortie. Quand Miles et moi sommes arrivés au lieu indiqué, je ne pouvais pas m'empêcher de ressentir un mélange d'appréhension et d'espoir. Cet endroit n'avait rien de particulièrement intimidant, mais l'absence de mouvements humains suffisait à renforcer ma nervosité. Miles, toujours attentif, jeta un regard autour de nous avant de poser une main rassurante sur mon épaule.
Miles : Ça va ? demanda-t-il doucement.
Je hochai la tête, bien que mon cœur battait à tout rompre.
Moi : Je crois. Enfin, je ne sais pas vraiment.
Miles s'arrêta, me tournant légèrement vers lui. Ses yeux fixèrent les miens, son expression grave.
Miles : Amelia, je m'inquiète pour toi. Tout ça, ces messages, tes absences à l'école, les secrets de ta famille... ça te bouffe. Et je comprends que tu veuilles des réponses, mais tu dois te protéger. Je veux que tu sois en sécurité.
Son ton, empreint de sincérité, me désarma. Je n'avais pas l'habitude que quelqu'un s'inquiète pour moi de cette façon, pas de manière aussi évidente. Je baissai les yeux, évitant son regard perçant.
Moi : Je sais. Mais je me sens tellement... perdue. J'ai l'impression que tout s'effondre autour de moi et que mes parents m'en cachent encore plus.
Miles pencha légèrement la tête, m'invitant à continuer. Après une brève hésitation, je pris une grande inspiration et lui parlais de mes doutes et des non-dits constants de mes parents. Il écouta attentivement, sans m'interrompre une seule fois. Quand j'eus fini, il prit ma main dans la sienne.
Miles : Je suis là, Amelia. Pour tout ça. Mais il faut qu'on y aille doucement. Promets-moi de ne pas te laisser emporter par ce genre de chose. Ces messages... ce compte... Si ça te stresse autant, est-ce vraiment une bonne idée de continuer à les lire ?
Ses paroles résonnèrent en moi. J'ouvris la bouche pour protester, mais il continua.
Miles : Tu es déjà en train de te battre contre beaucoup de choses. Si tu te fais du mal en ajoutant encore ce genre de stress, ce n'est pas juste. Ni pour toi, ni pour nous.
Mon cœur se serra à ses mots. Nous. Il avait raison. Mes obsessions et mes questions sans fin me faisaient du mal. Et il en souffrait aussi, par ricochet. Je serrai doucement sa main, cherchant à lui transmettre une promesse silencieuse.
Nous avons attendu encore un long moment, assis sur un banc, jetant des coups d'œil autour de nous. Mais personne n'est jamais venu. Ni un signe, ni une présence suspecte. Rien. Je sentais la déception monter en moi, mais aussi une lassitude accablante. J'avais tellement espéré que cette fois, ce serait différent. Que cette personne m'apporterait des réponses.
Miles : Je crois que cette personne ne viendra pas, Amelia. On devrait rentrer.
J'hochai la tête, silencieuse, le regard fixé sur le sol. Je pris mon téléphone et bloquai le compte anonyme. C'était une décision impulsive, mais nécessaire. J'en ai assez de tout ça. Miles jeta un coup d'œil rapide dans ma direction, hochant doucement la tête.
Miles : Tu fais bien. Tu n'as pas besoin de ça, pas maintenant.
Nous sommes allés au parking, il m'a conduit à ma voiture, puis il m'a embrassé avant de rejoindre la sienne. Alors que je conduisais, encore bouleversée par l'échec de cette rencontre mystérieuse, mon estomac gronda, me rappelant que je n'avais presque rien mangé de la journée.
Je passai devant une petite épicerie de quartier et décidai d'y entrer pour acheter quelque chose de rapide. L'endroit était modeste, presque vide à cette heure de la journée. Je m'attardai dans une allée, cherchant une barre de chocolat ou un paquet de chips, quand une voix derrière moi brisa le silence.
... : Amelia, n'est-ce pas ?
Je me retournai brusquement. La femme de la dernière fois, cette Cynthia Benett, me fixait avec un mélange de curiosité et d'intensité. Elle portait une veste sombre qui semblait avoir vu des jours meilleurs, et son visage portait les marques d'une vie difficile.
Moi : Vous, encore ? soufflai-je, mi-surprise, mi-agacée.
Elle esquissa un sourire, mais son expression restait empreinte de sérieux.
Cynthia : Je ne savais pas que je tomberais sur toi ici. Mais peut-être que c'est le destin.
Je roulai des yeux, exaspérée.
Moi : Le destin ?
Elle eut un petit rire, presque amusée par ma méfiance.
Cynthia : J'en suis persuadée, oui.
Moi : Mais qui êtes-vous exactement ?
Cynthia : Personne d'important, du moins pour toi... pour l'instant, dit-elle, un sourire énigmatique aux lèvres.
Moi : Vous êtes bizarre. Toujours là où je suis, toujours à insinuer des choses que je ne comprends pas.
Cynthia fit un pas en avant, réduisant la distance entre nous, et baissa légèrement la voix.
Cynthia : Et si je te disais que ce que je sais pourrait changer ta vie ? Que ta famille n'est pas ce qu'elle prétend être ?
Je fronçai les sourcils, mon cœur s'accélérant malgré moi.
Moi : Arrêtez. Si vous avez quelque chose à dire, dites-le. Sinon, laissez-moi tranquille.
Elle sembla hésiter un instant, puis murmura.
Cynthia : Tout ce que je dirai, c'est que ta famille n'est pas celle que tu crois. Et toi... tu n'es pas celle que tu penses être.
Ces mots me frappèrent comme une gifle.
Moi : Qu'est-ce que ça veut dire ? demandai-je, ma voix tremblant d'incrédulité.
Cynthia posa une main légère sur mon épaule, son regard se faisant presque tendre.
Cynthia : Tu finiras par le découvrir. Ne fais pas confiance à tout ce qu'ils te disent. C'est une longue histoire. Mais disons simplement que les Harrington... ils ne sont pas toujours honnêtes, même avec leurs propres enfants.
Moi : Qu'est-ce que vous insinuez ? répliquai-je, ma voix plus forte cette fois.
Elle sourit doucement, presque comme si elle compatissait.
Cynthia : Peut-être que tu n'es pas celle que tu penses être. Peut-être qu'il y a des choses sur toi... sur ta naissance... qui ne correspondent pas à ce qu'ils t'ont raconté.
Mon esprit s'emballa. Ces mots faisaient écho à mes propres doutes, mais les entendre de la bouche d'une étrangère les rendaient bien plus réels et terrifiants.
Moi : Qui êtes-vous vraiment ? Comment savez-vous tout ça ? insistai-je.
Elle glissa sa main dans sa poche et sortit une petite carte de visite, qu'elle me tendit. Je pris la carte d'une main tremblante. Le nom "Cynthia Bennett" y était inscrit, accompagné d'un numéro. Avant que je ne puisse poser une autre question, elle fit un pas en arrière et murmura.
Cynthia : Reste forte, petite. Tu en auras besoin.
Elle disparut rapidement, me laissant seule dans l'allée, le cœur lourd et l'esprit tourmenté. En sortant de l'épicerie, je regardai longuement la carte dans ma main. Une partie de moi voulait la jeter, mais une autre, plus forte, savait que cette rencontre n'était pas un hasard.
Était-ce elle qui m'envoyait ces messages anonymes ? Tout semblait concorder, mais quelque chose ne collait pas. Elle ne ressemblait pas au genre de personne qui maîtriserait les subtilités des réseaux sociaux.
Je rentrai chez moi avec un poids nouveau sur mes épaules. Qui étais-je vraiment ? Et pourquoi cette femme semblait-elle savoir plus sur moi que je ne savais moi-même ?
Je n'avais jamais aimé entrer dans le bureau de mon père. C'était un espace qui semblait interdit, presque sacré. J'étais venue chercher des réponses. Quelque chose, n'importe quoi, pour éclairer les zones d'ombre qui me hantaient depuis trop longtemps. Chaque bruit, chaque craquement du parquet semblait amplifier ma nervosité.
Dans un tiroir verrouillé que j'avais réussi à ouvrir avec une vieille épingle à cheveux (merci, Clara, pour les tutoriels en ligne), je suis tombée sur une chemise cartonnée épaisse. À l'intérieur : des documents officiels et des photos. Un nom m'a tout de suite sauté aux yeux : Shawn Bennett.
Mon cœur a fait un bond. Pourquoi mon père garderait-il des documents sur cet homme ? Je feuilletai rapidement les pages. Il y avait des dates, des références légales, et une photo. Il semblait plus jeune sur cette image, mais son regard m'a figée. Même dans une photo en noir et blanc légèrement jaunie, il dégageait quelque chose d'inquiétant. Je ne savais pas pourquoi, mais son visage me semblait... familier, d'une manière que je ne pouvais expliquer.
Puis, sous ce dossier, j'ai trouvé des photos d'autres hommes. Quatre visages, jeunes, souriants, posant dans ce qui semblait être une soirée décontractée. Aucun nom, aucune information. Juste des visages figés dans le temps. Qui sont-ils ? Quelque chose dans ces images me mettait mal à l'aise, mais je ne savais pas quoi.
Je pris rapidement une photo des documents avec mon téléphone, mes mains tremblant toujours. Je remis tout en place exactement comme je l'avais trouvé, priant pour que mon père ne remarque rien.
Alors que je refermais doucement le tiroir, un bruit de pas résonna dans le couloir. Mon cœur rata un battement. Je me redressai précipitamment, tâchant de paraître naturelle. Juste au moment où je m'éloignais du bureau, mon père apparut dans le couloir. Son regard scrutateur me mettait instantanément sur la défensive.
Papa : Tout va bien ? demanda-t-il, sa voix calme mais teintée de suspicion.
Moi : J'ai besoin d'une copie de mon extrait de naissance, improvisai-je, la gorge sèche. L'école me le demande pour un formulaire.
Il haussa un sourcil, visiblement surpris.
Papa : Ton extrait de naissance ?
Il hésita un instant, puis fit demi-tour vers le bureau.
Papa : Attends.
Après de courtes minutes, il sortit avec un document.
Papa : Tiens.
Je le pris, le remerciant rapidement avant de quitter la pièce. Dans ma chambre, je scrutais soigneusement la feuille. Tout semblait normal : mon nom, celui de mes parents, la date et le lieu de ma naissance. Et pourtant... quelque chose me paraissait faux.
Si tout était si simple, pourquoi avait-il ces dossiers ? Pourquoi avaient-ils besoin d'un donneur extérieur si tout était aussi évident ? Je serrai le papier dans mes mains, ma confusion se mêlant à une peur grandissante.
Je n'étais pas sûre de ce que je cherchais. Mais une chose était claire : je n'allais pas du tout aimer ce que j'allais trouver...
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