Epilogue
Le vent balaie mes cheveux mais je ne réagis pas. Mes yeux fixent la montagne et la forêt qui se dessinent devant mes yeux. Et en même temps, ils ne fixent rien. Perdu dans le paysage, tandis que mon esprit est dans la lune. Le dos collé à la porte d'entrée depuis une éternité, je réfléchis. Comme souvent dans la semaine qui s'est écoulée, j'avais besoin d'être seule. Face à moi-même et à mes sentiments. A vrai dire, je ne sais pas tellement ce que je ressens. C'est un perpétuel changement. Je n'arrive pas à croire que cela fait déjà une semaine. Et pourtant, chaque jour, l'écran de mon portable m'assure que cela fait une journée de plus que je passe dans ce nouveau monde. Dans le même temps, certaines de mes questions se taisent tandis que d'autres apparaissent. C'est pour ça que depuis des jours, je tente de faire le point sur ma vie, seule, sur le pas de la porte. Malheureusement, j'ai l'impression d'être loin d'avoir tout accepté et tout compris. D'abord la mort de mes proches que je commence seulement à réaliser. Hier, j'ai fais le carton des affaires de ma tante que je souhaite garder. Je n'ai pas su choisir. J'ai dû rétrécir une à une chacune de ses affaires afin de tout emporter. Comment pourrais-je n'en choisir que quelques-unes ? Dans un coin de ma tête, une phrase ne cesse de tourner et tourner. C'est de ta faute si ces cartons doivent être faits. C'est à ce moment là de la journée que j'ai ressenti le besoin de sortir et de m'asseoir devant cette porte.
Aujourd'hui, rien n'a vraiment changé. Ma culpabilité est toujours là. Elle restera, j'en suis persuadée. Même si le soutien de mes amis et de mon père m'aide à la faire un peu disparaître. C'est pour ça que je ne sais pas vraiment ce que je ressens en ce moment et que mon besoin d'être seule n'a fait que croître. J'aimerais me pardonner et, ce chemin, je dois le faire seule.
Je resserre mes bras autour de moi lorsqu'une nouvelle bourrasque tourne autour de la maison. Une feuille d'arbre vient se poser juste devant moi et je l'attrape. Avec de petits mouvements, je commence à la déchirer. Petit à petit, les bouts s'envolent une nouvelle fois. Cette tâche m'occupe et m'empêche de réfléchir au deuxième sujet qui me préoccupe : Justin. Malheureusement, cette pauvre feuille est vite réduite en morceau et cette discussion avec moi-même, qui est autant sans fin que celle sur la disparition de ma tante, vient vite hanter mon esprit. Comme tous les jours, je suis vite renvoyée en arrière, dans cette cabane, et je revois son corps inanimé au sol. Je ressens ma poitrine se serrer puis se libérer lorsque l'on s'embrasse. Je repense à ce baiser et mes joues s'empourprent. Pourtant, je ne sais pas si j'ai bien fait. Après tout, je ne le connais pas si bien. Et puis, il y a ses relations avec des filles. Je sais comment il est et donc je ne sais pas si faire quoi que ce soit avec lui est une bonne idée. A côté de ça, je sais qu'il m'énerve et que j'adore le détester. Et je sais aussi que j'aime le découvrir sous d'autres facettes. Surtout, je sais qu'il est trop tard. J'ai déjà des sentiments pour lui. Ma seule peur est que ça ne soit pas réciproque et qu'il joue avec moi comme avec toutes les autres. Bizarrement, je me raccroche presque à l'idée d'être la pauvre fille qui va devoir le supporter.
Me sortant précipitamment de mes pensées, j'entends des petits coups toqués à la porte. Je me lève et me tourne pour voir qui en est l'auteur et je vois le sourire de ma meilleure amie apparaître derrière la porte entrouverte. Je lui souris pour lui faire comprendre que je vais bien et elle me fait une moue me faisant comprendre qu'elle sait que je mens. Je hausse les épaules et lui demande ce qui l'amène. Enfin, pourquoi est-ce qu'elle m'a sortie de mes pensées existentielles.
- Que penses-tu d'aller faire une petite balade avant que Kate ne parte ?
Derrière elle, j'aperçois enfin la tête de Kate et Lucy qui attendent ma réponse. J'hésite d'abord un peu avant d'acquiescer. Je crois que cette balade pourrait me faire du bien. Je pourrais prendre l'air et éviter d'avoir toutes mes questions dans la tête. Et puis je devrais sûrement un peu moins penser à moi et plutôt m'intéresser à mes amies. J'ai tendance à oublier que je ne suis pas la seule à avoir des problèmes.
Voyant que je suis d'accord, mes amies sautent de joie et sortent immédiatement de la maison, m'emmenant avec elles vers le portillon. Je me laisse faire et me laisse ainsi embarquer sur plusieurs mètres jusqu'à ce que nous ne voyons même plus la maison.
Contrairement à ce que je pensais, la balade n'élude pas toutes mes craintes. Cela me rappelle que Kate s'en va. Je ne peux m'empêcher de ressentir de la tristesse. Après tout, nous nous connaissons depuis des années, et même si je sais que nous allons nous revoir, je ne peux m'empêcher de ressentir comme un vide. Passer de voir une amie presque tous les jours depuis notre enfance à l'école de magie, à vivre à plus de mille kilomètres, ce n'est pas toujours facile. Mais je sais que Kate à besoin de ça pour aller bien, alors il n'est pas question de lui demander de rester. Ce serait bien trop égoïste, surtout si partir lui permet de renouer avec sa sœur. Mia est arrivée ce matin vers 8h après son vol de nuit. J'ai immédiatement été impressionnée par la ressemblance entre les deux sœurs. Elles se ressemblent comme deux gouttes d'eau, et même si Mia a sept ans de plus, on pourrait presque les prendre pour des jumelles. La seule différence, est la couleur de leurs yeux, car si Kate à les yeux verts de leur père, Mia a les yeux marron de leur mère.
- Les filles, vous savez, même si je pars, ça ne veut pas dire que je ne veux plus vous voir.
Mon regard se dirige vers Kate, et je ne peux m'empêcher de sourire. C'est vrai que dans un premiers temps, j'ai pensé qu'elle ne voulait plus me voir. D'une certaine façon, tout ce qui est arrivé ces derniers mois est relié à moi, donc c'est quelque chose que j'aurais été en capacité de comprendre. Mais Kate a passé toute la semaine à nous dire et redire que cela n'avait aucun rapport avec nous. Son but n'est absolument pas de couper les ponts avec nous mais juste de se recentrer sur elle-même. Chose que je peux encore plus comprendre vu mon isolement de ces derniers jours. En fait, chacun réagit différemment à la situation et si elle pense que partir avec sa sœur est une bonne solution, je ne peux que l'encourager. Me faisant revenir sur terre, la voix de Daisy résonne dans la forêt.
- On a compris Kate. Tu sais que ça doit faire au moins trente fois que tu nous le dis en cinq jours.
Nous explosons toutes de rire. Qu'est-ce que je disais, elle passe son temps à nous le dire. Et la franchise de ma meilleure amie le lui fait bien comprendre.
- Alors, quand vous aurez le temps, il faudra que vous passiez nous voir à Miami. Je suis sûre qu'on pourrait bien s'amuser ! Je dois bien avouer que la plage et le beau temps commencent à me manquer.
C'est vrai que la météo dans l'Oregon n'est pas la même qu'en Californie. Je regarde mon téléphone pour savoir l'heure. 14h36. Je crois qu'on va devoir y aller, Kate et Mia doivent partir à 15h30. Je le dis aux filles, et nous reprenons la route pour nous diriger vers la maison.
Une fois arrivé, tout se passe très vite. Kate met sa valise dans la voiture que sa sœur a louée, elle vérifie dans la maison qu'elle n'a rien oublié, puis c'est l'heure de se dire au revoir. Je vois qu'elle retient ses larmes quand elle nous serre les unes après les autres dans ses bras. Il faut dire que les nôtres coulent déjà. C'est encore une page qui se tourne. Presque à reculons, comme tétanisée, elle se dirige ensuite vers Alex.
- Je t'aime Alex.
Ce sont les seuls mots qui sortent de sa bouche quand ses yeux croisent ceux de son désormais presque ex petit ami. Celui-ci, lui répond, la voix cassée par l'émotion.
- Alors laisse moi venir avec toi.
- Non, s'il te plait, tu dois respecter mon choix. J'ai besoin de partir, de voir autre chose. Si tu m'aimes, tu dois me laisser partir.
Les larmes se mettent à couler sur le visage de mon amie. Je sais qu'elle vient de prononcer la phrase la plus difficile de sa vie. Je vois que ce moment est horrible pour elle, mais je sais qu'elle prend la bonne décision. Ne voulant pas revenir sur sa décision, notre amie embrasse Alex, lui murmure un adieu, puis se dirige vers la voiture où sa sœur l'attend. Alors qu'elle ouvre la portière, elle se retourne vers nous. Tout à coup, elle se met à courir dans notre direction et nous prend toutes les trois dans ses bras. Après ce dernier câlin, elle retourne finalement vers la voiture. Cette fois-ci, je sais qu'elle ne fera pas demi-tour. Je ne peux empêcher une larme de couler sur ma joue. Tout sera différent maintenant. Le groupe de cinq enfants à bien changé, et aujourd'hui, nous ne sommes plus que trois. Les choses changent, mais les souvenirs de notre enfance et de notre adolescence resteront pour toujours.
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Je suis sur le canapé avec Saphir sur les genoux depuis près d'une heure. Je ne sais pas quoi faire. J'ai l'impression de tourner en rond depuis le départ de Kate. Je sais que je devrais faire ma valise étant donné que nous partons pour Washington, là où vit ma grand-mère, dans une semaine, mais je n'arrive pas à me motiver à faire quoi que ce soit aujourd'hui. J'entends le bruit de pas dans l'escalier, puis, Justin apparaît à côté de moi.
- Foster, tu sais que c'est pas une bonne idée de rester toute la journée sur le canapé ?
- Laisse moi un peu déprimer tranquillement s'il te plait.
- Elle n'est pas morte, elle a juste déménagé.
- Je sais bien, mais on est amie depuis des années
- Et vous êtes toujours amies, elle a juste décidé de vivre avec sa sœur. Allez, viens avec moi dehors.
- Pourquoi ?
- Si je me souviens bien, c'est toi qui voulait qu'on discute non ?
- Pas faux.
Je me retourne vers lui et ne peux m'empêcher de sourire. Je ne pensais pas qu'il se souviendrait de ce que je lui avais demandé ce matin. Je pose Saphir sur le canapé, enfile mes chaussures et mon manteau avant de suivre Justin à l'extérieur. Pendant plusieurs minutes, nous marchons en silence. C'est moi qui lui ai demandé de discuter ce matin, mais je ne sais absolument pas quoi lui dire. Tout à coup, il s'arrête. Je me retourne vers lui, mais avant d'avoir le temps de lui demander ce qu'il lui arrive, il s'approche de moi et m'embrasse. Je ne m'attendais absolument pas à ça, mais je ne peux arrêter le sourire qui se crée sur mon visage. Puis il s'écarte, nous nous regardons dans les yeux quelques secondes.
- Et c'était pour quoi ça ?
- Parce que j'avais envie, et puis je me demandais quelque chose.
- Quoi ? La dernière fois, c'est un peu moi qui t'ai embrassé, alors je n'allais pas te repousser tu sais.
- Non, ce n'était pas ça.
- Alors quoi ?
- C'était mieux qu'avec Zack, pas vrai ?
Je le regarde complètement perdue pendant de très longues secondes. Mais qu'est-ce que c'est que cette histoire ?
- Comment t'es au courant qu'on s'est embrassés avec Zack ? Il n'y avait personne, on était juste tous les deux.
- Oh, je passais pas là au moment où vous vous êtes embrassés.
Au moment où il me dit ça, les souvenirs de cet instant me reviennent en tête, et surtout une scène en particulier.
- Attends, y a eu un bruit à ce moment-là qui a fait qu'on a arrêté de s'embrasser. C'était toi en fait !
- Possible.
Il a un petit sourire en coin alors que je lève légèrement les yeux au ciel. Je crois que, dans un sens, je lui en veux. Je crois qu'il n'avait pas à faire ça. Certes, ce baiser ne comptait pas tant que ça. Avec Zack, on s'est rendu compte que c'était une erreur, mais Justin n'avait pas à intervenir, même de cette façon. Et puis pour quelles raisons ? Son visage arbore toujours un sourire fier mais, d'un coup, quelque chose change. Il est soudainement redevenu sérieux. Je fronce les sourcils. Je ne comprends pas ce changement. Je le fixe tenant de comprendre et il prend la parole sur un ton que je ne l'ai jamais entendu employer.
- En fait, il y a quelque chose que je voulais te demander. Quand tu m'as embrassé, est-ce que c'est seulement parce que tu as pensé que j'étais mort, mais que...
- De quoi est-ce que tu parles ?
Il me regarde sérieusement, et fini par me dire après de longues secondes
- Est-ce que tu regrettes de m'avoir embrassé ?
Je le regarde, complètement perdue. Je dois bien avouer que je ne m'attendais pas à ce qu'il me demande ça. Non, je ne regrette pas qu'on se soit embrassé, mais en même temps, je le connais un peu, je sais comment il fonctionne avec les filles, je ne sais même pas s'il voit les choses comme moi. Alors qu'est-ce que je suis censé lui répondre maintenant ? Je vois qu'il attend ma réponse mais je suis complètement perdue. Je place ma main sur le pendentif de ma mère et je repense à elle. J'aimerais savoir ce qu'elle m'aurait dit si elle avait été encore en vie. Une mère conseille sa fille pour ce genre de choses. Mais soudain, ma vision se trouble. Avant que je n'aie le temps de comprendre ce qu'il se passe, je me sens comme aspirée. Le paysage tourne autour de moi et je me sens tomber. Je me prépare à toucher le sol mais la sensation de le heurter ne vient pas. A la place, tout est devenu noir. Je tente de bouger et bizarrement mes membres réagissent. Devant mes yeux, le paysage change. Tout devient de plus en plus clair et je commence à discerner des formes. Je cligne des yeux plusieurs fois, pas tout à fait sûre de ce qu'il se passe. Qu'est-ce qu'il m'arrive ? Alors que je les rouvre pour la dixième fois, une silhouette apparaît. Je mets du temps à pouvoir discerner les traits de son visage. Mais quand je la reconnais, je manque de tomber une nouvelle fois. Ce n'est pas possible. Je me concentre, mais l'image reste la même. Les mots me manquent. Je tente de parler mais pour dire quoi ? Qu'est-ce qu'on pourrait dire dans une situation comme celle-là ? Il n'y en a qu'un mot qui franchit ma bouche :
- Maman ?
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