Chapitre 28
Je ne sais pas combien de temps il s'est passé quand nos lèvres se séparent. J'ai l'impression que ce moment a duré une éternité, mais à la fois, que c'était bien trop court. A nouveau mon front contre le sien, je ne peux m'empêcher de sourire. Et lui aussi apparemment. Je n'arrive pas à croire ce qu'il vient de se passer. Je viens de l'embrasser. Justin Miller et moi, on s'est embrassé. Mais je ne peux m'empêcher de revoir dans ma tête l'image de son corps sur le sol, lorsqu'il était inconscient, et une larme coule à nouveau sur ma joue tandis que je lui demande dans un murmure :
- Pourquoi as-tu as fait ça ? Pourquoi t'es-tu interposé ? J'ai cru que tu étais mort.
- Je ne pouvais pas te laisser comme ça, je ne pouvais pas la laisser te faire du mal.
- Idiot, il suffisait de me tirer, et pas de la prendre à ma place !
- Enfin Eléanore, ça aurait été beaucoup moins héroïque !
L'air de fierté qu'il arbore me ferait rire si sa vie n'avait pas été en danger. Dans un autre contexte, je me serais sûrement énervé face à cette remarque. Mais pour le moment, je suis bien trop heureuse de le savoir en vie, alors je me contente de lui dire, entre la colère et le soulagement de le tenir contre moi :
- C'est pas drôle, c'est pas le moment de plaisanter. Tu as failli mourir ! Tu t'en rends compte de ça ?
- Peut-être, mais il n'était pas question que je te laisse mourir. Et si c'était à refaire je le ferais. Je ne laisserais personne te faire du mal. Jamais. Je tiens beaucoup trop à toi pour ça.
En entendant ces quelques mots, je ne peux m'empêcher de sourire, mais surtout de rougir. Mais il ne changera jamais, plaisanter après une chose pareille. Puis il reprend un air sérieux, et me demande
- Qu'est-ce qu'il s'est passé, comment ça s'est terminé ?
- Ma tante ne nous fera plus jamais de mal, elle est morte. Pour être plus précise, c'est moi qui l'ai tué.
Je vois dans ses yeux qu'il se pose tout un tas de questions sur ce qu'il s'est exactement passé pendant qu'il était inconscient. Mais, peut-être à cause de mon air fatigué, il ne m'en pose aucune. Peut-être qu'il préfère attendre que ces informations viennent de moi. En tout cas, je lui en suis reconnaissante de ne pas me poser de question pour le moment. Il se contente de déposer ses lèvres sur mon front pour me réconforter. Je resterais bien comme ça pendant des heures. Simplement là, assise, dans ses bras. Mais je sais que nous devons revenir à la réalité. Que celle-ci finit toujours par nous rattraper. Je relève la tête, et regarde mes amis. J'avais presque oublié qu'ils étaient là. Pendant ces quelques minutes j'étais dans un monde à part très loin de cette cabane et de l'enfer qui s'y est déroulé. Même s'ils ne disent rien, je peux voir sur le visage de mes amies, mais aussi celui de Matthew un air plutôt amusé. Quelque chose dans leurs yeux signifie clairement "on vous l'avait bien dit que vous alliez finir ensemble !". Je lèverai les yeux au ciel dans une autre situation mais je n'en ressent pas la nécessité ici. Je me contente de me relever, la main de Justin toujours placée dans la mienne.
Dans cette ambiance morbide, personne ne sait vraiment quoi dire. La plupart de mes amis sont au courant que je viens d'ôter la vie de ma tante, mais je crois que je ne suis pas encore prête à en parler. Je me contente de baisser la tête, incapable de regarder son corps. Chacun leur tour, ils m'assurent que c'était la seule chose à faire. C'est peut-être le cas, mais tuer quelqu'un reste quelque chose d'horrible. Une chose que je n'aurais jamais imaginé faire. Contrairement à mes parents et ma tante qui eux ont vécu la guerre, nous, nous avons toujours vécu dans la paix, aucune bataille, aucun conflit. Avant les événements de l'année dernière, le plus difficile, c'était de savoir ce que j'allais faire après mes études. Certainement pas de décider si une personne devait vivre ou non.
Personne ne parle, comme si aucun d'entre nous ne savait quoi dire, et ce n'est qu'après de très longues secondes de silence que mon père finit par prendre la parole.
- On devrait y aller. Il ne faut pas qu'on vous trouve ici quand le corps sera découvert.
Je me retourne vers lui. Qu'est-ce qu'il veut dire par là ? Je sais ce qu'elle a fait, à ma mère, à un tas de gens, mais elle reste celle qui m'a élevé. Il n'est pas question que je laisse son corps comme ça dans cette cabane abandonnée.
- Non, attends, on doit l'enterrer.
- Eléanore, enfin on ne peut pas, et si on est découvert ?
- S'il te plait, j'ai besoin de le faire. Et à mon avis, il vaut mieux l'enterrer quelque part dans cette forêt plutôt que la laisser là où des enfants viennent jouer.
- Elle n'a pas tort monsieur Foster, si on la laisse là et que le corps est découvert, il y aura une enquête, et tout le monde dans le village la connaît.
Je remercie du regard Justin, puis me retourne à nouveau vers mon père. Je vois dans ses yeux qu'il hésite. Comment pourrait-il enterrer la personne qui est la cause de toutes ces années de malheurs ? Mais il finit par acquiescer. Je suppose que mon opinion lui importe, peut être même plus que la sienne.
Il me demande cependant de m'occuper de tout. Je reste celle qui a le moins utilisé mes pouvoirs et la plus apte à faire tout ça, mais de toute façon avec ou sans énergie, c'est à moi de m'en occuper. C'est à moi de transporter le corps et de préparer l'enterrement. Ce mot résonne en moi. Je n'aurais jamais pensé avoir à le réutiliser si tôt. Après Cinder et Mathis, je pensais que cela resterait derrière nous encore pour un moment, mais les choses ne se passent pas toujours comme prévu.
Après une grande inspiration, je me concentre sur le corps de ma tante et la fait flotter grâce à mes pouvoirs. Dans un convoi funéraire, nous sortons tous un à un de la cabane. Mon père réveille Daisy et elle se joint à nous sans vraiment comprendre ce qui est en train de se passer.
Dehors, l'air est glacé. La nuit est maintenant bien tombée, laissant apparaître de magnifiques étoiles dans le ciel. Matthew me regarde avant de se rapprocher de moi. Sa main se pose délicatement sur mon épaule quand il me dit.
- Tu vois cette constellation ?
Je suis du regard son doigt et mes yeux se posent sur une sorte de corps dans le ciel. Le souvenir de la soirée que nous avions passé, quelques mois plus tôt, à observer les étoiles me revient en tête. Je hoche la tête, et me tourne vers lui pour écouter, impatiente de savoir, ce qu'il va me dire à propos de ces étoiles qu'il connaît si bien.
- C'est la constellation d'Orion. Orion était un chasseur dans la mythologie grec, selon la légende, à cause de son frère Apollon, Artémis l'a tué par erreur. Prise de chagrin à cause de ce qu'elle avait fait, elle le fit monter au ciel sous la forme d'une constellation.
Je scrute la lumière qui émane de la constellation. Fascinée. Mais en même temps, je ne sais pas vraiment où il veut en venir.
- La situation n'est pas exactement la même, je le sais bien, mais vous avez quelque chose en commun toi et Artémis. Vous aimiez cette personne, alors je suis certaine que comme dans la légende, ta tante aussi montera au ciel pour devenir une étoile ou une constellation.
Mon regard abandonne le ciel étoilé pour fixer son visage. Ses yeux ne me quittent pas, ils sont plein de bonté, de compréhension. Je lâche la main de son frère et je me blottit dans ses bras, lui chuchotant un "merci". Je ne sais pas quoi lui dire d'autre, mais j'ai l'impression que cela lui suffit. Malgré tout ce qu'il vient de se passer, ce qu'on a apprit, la seule chose qu'il me dit, c'est que grâce à moi, ma tante deviendra une étoile.
Quelques secondes plus tard, me ramenant à la réalité, il se sépare de moi m'indiquant d'aller enterrer ma tante comme il se doit. Mon regard se tourne vers le corps flottant auprès de moi et une larme roule de nouveau sur ma joue. Avant de reprendre possession de ma main, Justin la fait disparaître de son pouce. Sans dire un mot de plus, il me guide vers l'arrière de la cabane, là où se trouvent déjà les autres.
Devant moi, j'aperçois Lucy s'accroupir et mettre ses mains sur le sol, une seconde plus tard, la terre s'écarte pour former un trou. Mais je n'ose pas y déposer le corps. Cela rendrait la situation bien trop réelle. Sylvia flotte ainsi pendant près d'une minute dans cette nuit de novembre. Voyant que je suis incapable de faire ce qui s'impose, mon père s'approche de moi et pause sa main sur mon épaule. Il me lance un sourire plein d'amour et de compréhension. Alors, il utilise les quelques forces qu'il lui reste pour déposer le corps au fond du trou. Le visage calme, Sylvia est peu à peu recouverte d'une terre humide. Ses cheveux, si lisses d'habitude, se retrouvent vite parsemés de terre. Je ferme les yeux et la main de Justin se resserre sur la mienne. De nouvelles larmes coulent sur mes joues sans que je puisse les arrêter. Quand ce sentiment de culpabilité va-t-il disparaître de ma poitrine ? Va-t-il seulement disparaître un jour ?
Lâchant la main de Justin, je tente d'essuyer le torrent qui est en train de se former. Tous mes amis autour de moi semblent ne pas savoir quoi faire pour m'apaiser. Eux même sont très touchés. Les joues de Daisy et Kate sont elles aussi très humides. Lucy, trop discrète et trop fière, retient les gouttes qui voudraient s'échapper de ses yeux qui ont déjà trop pleuré par le passé. Après quelques minutes, Lucy s'approche lentement de moi. Je relève la tête, et en essuyant une des larmes qui coule sur ma joue, elle me demande.
- Je peux refermer ?
Fixant toujours le trou dont le vent à déformé les contours, je hoche la tête. Il est temps d'avancer. Enfin, je crois. Délicatement, la terre se met à bouger et à refermer la tombe. Le corps de ma tante disparaît bientôt sous une couche de terre humide. Finalisant le camouflage, Lucy déplace quelques mottes de terre coiffées d'herbe jusqu'à la tombe. Ainsi, il semble que rien ne soit jamais arrivé. Comme si la terre n'avait jamais été retournée. Voulant tout de même marquer l'endroit, pour qu'il ne soit pas oublié, mais aussi dans un certain sens pour ne pas faire comme si rien ne s'était passé, je fais apparaître une rose rouge dans mes mains. Accroupi devant cette tombe improvisée, j'hésite quelques secondes avant de déposer la fleur.
- Je suis désolée. Mais j'espère que maintenant, où que tu sois, tu as pû trouver la paix.
Dans mon dos, les membres de ma famille se mettent en mouvement. Ce sont bientôt huit magnifiques fleurs qui enjolivent la tombe. Je me relève et prend la parole, la voix encore cassée par les larmes.
- Je crois qu'on devrait rentrer.
Acquiesçant à mes paroles, mon père se met en route. Faisant apparaître une lampe torche, il nous éclaire à tous le chemin. Un à un, mes amis le suivent, reprenant la route que nous avons empruntée il y a maintenant des heures. Me dépêchant de m'éloigner de l'endroit qui restera mon pire cauchemar, je me retrouve rapidement à la tête du convoi. Seul mon père est devant moi. J'ai l'impression de le voir pour la première fois. Comme si je réalisais seulement l'ampleur de cette nouvelle: mon père est en vie. Soudain, des milliers de questions tournent dans mon esprit sans que je puisse vraiment en exprimer une clairement. Je voudrais aller lui parler mais une soudaine timidité m'envahit. Je suis comme paralysée, du moins, ma bouche ne sort plus un son. Que pourrais-je lui demander ? Par où commencer ?
Je pose mes pieds dans ses empreintes et le suis à un mètre de distance. Cet écart, pourtant petit, me semble insurmontable. Plusieurs fois, j'ouvre la bouche, comme pour commencer une conversation, mais à chaque fois, je suis incapable de prononcer le moindre mot. Voyant sûrement mon désarroi, Daisy, qui était derrière moi, prend la parole.
- Monsieur Foster, je crois que votre fille a une tonne de questions à vous poser.
Me retournant instantanément, mes yeux s'écarquillent devant son intervention. Devant mon air interdit, ma meilleure amie se contente d'hausser les épaules. Puis elle me lance un clin d'œil, comme pour me donner la force qu'il me manque pour aller parler à mon père. Quand je me retourne une nouvelle fois pour regarder où je mets les pieds, c'est mon père qui me fixe, un sourire accueillant étirant ses lèvres.
- Si tu as des questions, je peux y répondre.
Intimidée comme une gamine de cinq ans qui a fait une bêtise, je baisse la tête. Son doigts vient me relever le menton et sa voix douce me murmure.
- Je t'écoute.
Je veux resserrer Exponentia contre moi, comme une protection, ou un moyen de gagner un peu de force, mais je réalise que je ne l'ai pas. La panique monte en moi en quelques secondes, et je vois que mon père s'en rend compte. Il me demande ce qui ne va pas et je crie presque en lui répondant.
- Je n'ai plus Exponentia !
Je me retourne et commence le chemin inverse quand une main m'agrippe le bras. Je me tourne vers son propriétaire et voit Alex me fixer. Je baisse ensuite les yeux vers son autre main qu'il me tend. C'est en fait le grimoire qu'il me montre.
- Je l'ai ramassé avant de sortir. Je me suis dis que tu avais autre chose à penser à ce moment-là.
Je souffle de soulagement. Je me calme et tente de faire reprendre à mon cœur un rythme normal. Je me retourne et vois mon père près de moi. Les autres ont pris la tête du convoi, peut-être pour nous laisser un peu d'espace et pouvoir discuter tranquillement. Alors nous reprenons la route. Je remarque que mon père à les yeux sur l'horizon, je me demande à quoi il peut penser. Après de longues secondes à mettre mes idées en ordre, ou, du moins, à essayer, je prends mon courage à deux mains et la première question qui me vient à l'esprit franchie enfin mes lèvres.
- Pourquoi tu n'es pas venu me voir plus tôt ?
Il semble d'abord étonné que ce soit ma première demande. Mais je dois bien avouer que c'est une des première chose que je me suis demandée quand j'ai appris qu'il était toujours en vie. Après tout, j'ai l'impression d'avoir perdu tellement de temps dans ma vie, tellement de moment qu'on aurait pu passer ensemble. Il n'était pas mort, alors pourquoi ne pas venir plus tôt ? Pourquoi m'avoir laissé avec Sylvia quand il savait ce qu'elle avait fait. Il aurait pu venir me voir, me parler. Simplement me dire que j'ai un père.
Il réfléchit quelques instants, mettant sûrement en ordre ses idées avant de prendre la parole. Les souvenirs que ma question engendrent semblent douloureux puisque les mots ont d'abord du mal à s'écouler correctement.
- Pendant près de dix ans, j'ai fait une grosse dépression. Sylvia venait de mettre fin à la guerre alors je pensais qu'elle avait éliminé tous les ennemis sur sa route, toi y compris. En sachant ce qu'elle avait fait à ta mère, j'ai eu du mal à l'imaginer prendre soin de toi. J'ai immédiatement pensé qu'elle t'avais fait subir le même sort, qu'elle s'était débarrassée de toi.
Il fait une pause suite à ses derniers mots. Après avoir dégluti difficilement, il reprend son récit.
- Cette période a été très difficile. J'étais au fond du trou, alors j'avais décidé de partir loin, je ne voulais pas rester près de l'endroit où tout cela s'était passé. Et un jour où j'étais en Californie, je suis tombée par hasard sur une ancienne amie de la famille, Jeanne Lee. Me voyant dans un état déplorable elle m'a demandé ce qui n'allait pas. Elle ne semblait même pas surprise de me voir, ce qui l'interpellait le plus était mon état. Quand je lui ai dit que je n'arrivais pas à passer par-dessus ta mort et la disparition de ta mère, son visage à changé. Je me rappelle très bien ce moment, elle s'est approché de moi et elle m'a dit distinctement : " Ta fille va très bien, elle vit avec sa tante dans le même village que moi." Après ses mots, mon monde s'est écroulé, mais à la fois, j'ai eu l'impression que mon cœur se mettait à battre à nouveau. Tu étais en vie. Mes espoirs renaissaient. Je lui ai alors demandé d'être mon informatrice. Evidemment, elle a commencé par me raconter un tas de choses sur toi. Mais même si j'en avais très envie, je ne pouvais pas débarquer chez Sylvia comme ça, elle m'aurait immédiatement tué. Ses horaires d'infirmière n'étaient pas fixes et tes horaires de cours non plus. Il me fallait donc une taupe. Elle a tout de suite accepté de m'aider. Mais alors qu'on avait rendez-vous pour qu'elle me dise quand et comment vous approcher, elle n'est pas venue. Je ne l'ai pas revu depuis. Je pense que t'as tante à du découvrir que nous étions en contact.
Ponctuant sa phrase, un hibou lâche un cri en s'enfuyant. Je le cherche des yeux mais je ne vois rien. Jeanne Lee. En entendant ce nom, c'est comme si toutes les pièces d'un puzzle s'emboîtaient. Alors en réalité, elle n'a jamais disparu, mais ma tante à découvert la vérité, et prête à tout pour garder son secret, elle s'est débarrassée d'elle. Une pointe de remords monte en moi en voyant au loin Justin et Matthew. Il y a quelques mois, je les avais accusés d'être à l'origine de la disparition de Jeanne, mais, en réalité, la fautive était ma tante.
Revenant à la réalité, je vois que mon père s'est arrêté. Devant nous, la route s'étend. Il ne nous reste plus qu'à descendre une motte de terre. Il me tend sa main et je m'y agrippe lorsqu'il m'aide à descendre. Une fois les pieds sur le bas-côté de la route, j'ai l'impression de revenir dans la vraie vie. Comme si je quittais le monde des sorciers pour retrouver le monde des humains. Derrière moi, j'entends le bruit de mes amis qui descendent un à un. Lorsque tout le monde a rejoint la route, nous reprenons notre marche vers la maison. Dans un silence des plus complet nous faisons ces quelques kilomètres. Seuls nos pas sur le bitume glissant raisonnent dans la nuit. Ça, et mes questions incessantes à mon père.
- Qu'as-tu fais ensuite ?
Se souvenant qu'il s'était interrompu, il reprend son récit.
- C'est là que j'ai contacté les jumeaux. Ils étaient nouveau en ville et donc ta tante ne les connaissait pas. Ils étaient parfaits pour reprendre le flambeau de Jeanne. Je ne pouvais pas approcher car j'avais trop peur de ce dont ta tante était capable. Elle aurait pu te tuer pour m'empêcher de te rencontrer et ça, je ne l'aurais pas supporté. La suite, je crois que tu la connais.
Je me tourne et fixe les jumeaux. Oui, je connais la suite de l'histoire, presque trop. J'aurais voulu oublier ce que ça m'a fait de découvrir qu'ils étaient derrières toutes les choses qui m'arrivaient. Malheureusement, ça ne s'oublie pas si facilement. Même si j'ai décidé de leur pardonner.
Sa conclusion ayant laissé un froid, nous marchons maintenant dans un silence total. Autour de nous, la forêt disparaît peu à peu et la maison apparaît. Elle a l'air normale, comme si une tornade d'émotions ne s'était pas déroulée à l'intérieur.
Mais avant de rentrer, mon père place sa main sur mon épaule et murmure :
- En parlant de ça, Eléanore, il y a quelque chose que je voulais te dire. Je suis vraiment désolée pour tes amis. Ce qu'il s'est passé... Je n'ai jamais voulu qu'il vous arrive quoi que ce soit, à toi ou à eux. J'espère que tu arriveras à me pardonner.
- Ne t'en fais pas, il m'a fallu un peu de temps, mais je sais bien que tout ce qu'il s'est passé n'était qu'un accident.
Il me lance un sourire timide, puis, nous reprenons notre chemin. Il ne nous faut qu'une minute pour rallier notre jardin. Je pousse le portillons qui grince encore et m'engouffre chez nous. Arrivée devant la porte, j'ai le réflexe de chercher mes clés mais mon père la pousse et entre. D'abord surprise car je suis sûre d'avoir fermé, je réalise que les jumeaux ont dû rentrer pour découvrir ce qu'il se passait.
Une fois tous à l'intérieur, Alex dépose Exponentia dans l'entrée. Je m'approche du livre mais n'ose plus le toucher. Il vaut mieux que plus personne ne l'ouvre. Jamais. Admirant sa couverture, je réalise que c'est ce livre que mon père voulait. Il ne voulait pas seulement me voir, ce qu'il voulait c'était le livre. Pourquoi ? Je lui pose la question et son regard se voile. Il se reprend vite et sa réponse me laisse figée sur place.
- Pour ramener ta mère.
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