Chapitre 26
Je reste complètement immobile à fixer mon père et Sylvia qui se jugent, sûrement l'un et l'autre en train de chercher un plan. Ils semblent très concentrés et presque détachés de la réalité. Ce combat, j'ai l'impression qu'ils l'attendent tous les deux depuis des décennies. Comme s' ils allaient enfin pouvoir clore un chapitre douloureux de leur vie. Mais je ne veux pas que ce combat se finisse en bain de sang. L'un comme l'autre, je ne suis pas décidée à les perdre. Pas déjà et pas comme ça. Ma tante a fait des choses affreuses mais je ne crois pas que sa mort arrangerait quoi que ce soit. Cela ne fera pas revenir ma mère. Et mon père, lui, il est hors de question que je ne puisse pas le découvrir. Je me concentre donc sur son esprit et lui dis par la pensée :
"Papa, je t'en prie, fais attention, moi non plus je ne veux pas te perdre."
Il semble d'abord surpris de m'entendre dans sa tête, mais ensuite, avec un léger sourire aux lèvres, il tente de me répondre tout en essayant de rester concentré sur son combat.
"Alors comme ça ma fille est une télépathe. J'y avais pensé avec les informations que j'avais sur toi. Je comprends mieux certaines choses maintenant. Eléanore, tu dois me promettre de ne pas intervenir dans ce combat, et surtout, si je commence à être en mauvaise posture, tu dois fuir, le plus vite et le plus loin possible. Je refuse que tu meurs."
"Oui, mais moi je viens de découvrir que tu étais toujours en vie, alors il n'est pas question que je t'abandonne."
"Eléanore !"
"Papa !"
"Tu es aussi têtu que ta mère. Très bien, mais reste où tu es. Je voulais juste te dire que je m'excuse de ne pas être intervenu plus tôt. Je devais voir de quoi elle était capable, mais je ne pensais pas qu'elle ferait autant de mal à tes amis. Je suis vraiment désolé."
"Ne t'inquiètes pas, je comprends. Mais maintenant que c'est ton tour, je compte sur toi pour nous sortir de là. "
Je regarde mon père et décèle sur son visage un sourire plein de fierté. Non, il n'est pas question que je l'abandonne et que je le perde. Pas maintenant que j'ai découvert qu'il était en vie. Ensuite, je tourne la tête vers Sylvia, et son expression est toujours la même que depuis le début de ce combat. Mais elle est complètement différente de celle que je connaissais. C'est un visage que je n'ai jamais vu. Elle semble en colère, mais il n'y a pas que ça, on dirait qu'elle est hors d'elle, comme si elle ne se controlait plus vraiment, comme si ce n'était pas la même tante que celle qui m'a élevée. Je regarde tous mes amis au sol, aucun d'entre eux ne bouge. J'aimerais aller les voir, mais je décide d'écouter les conseils de mon père et reste stoïque.
Étrangement, malgré tout ce qu'il vient de se passer et toute la tension entre les deux adversaires, la scène qui se déroule devant mes yeux est très calme. J'entends à l'extérieur le vent souffler contre la cabane, j'aperçois par la fenêtre l'extérieur et la lumière du jour, mais je n'arrive pas à savoir l'heure qu'il est, et sans portable ni montre, je ne risque pas de me repérer.
Et tout à coup, avant même que je ne vois arriver quoi que ce soit, je vois une boule d'énergie orange voler à travers la cabane.
Ça y est.
Le combat commence.
Sylvia forme dans ces mains, non pas par des boules d'énergies comme je m'y attendais, mais des poignards. Elle veut se battre au corps à corps. Je ne savais même pas que cela était possible de créer des armes comme celles qu'elle a dans les mains. Notre énergie magique est presque le plus faible de nos atouts. Son utilisation se fait toujours sous forme de sphères car c'est facile à contrôler et que, à ma connaissance, on ne peut faire que ça. C'est pourtant des poignards orange qui sont dans la main de ma tante et cela m'inquiète. Comment sait-elle faire ça ? Et mon père, en est-il capable ? Il pourrait faire apparaître de vrais poignards dans ses paumes mais je pense qu'il serait nettement moins puissant. La magie que nous créons est bien plus résistante et a bien plus de propriétés que les matériaux humains.
Coupant mes réflexions, Sylvia lance les poignards dans sa direction. Heureusement, il les évite très facilement, mais avec sa télékinésie, elle parvient à les récupérer en quelques secondes. Sans lui laisser le moindre répit, elle court dans sa direction et tente directement de l'attaquer. Il esquive les attaques puis fait un bond en arrière pour s'éloigner d'elle. Les bras de mon père se tendent et de fines et courtes lames en sortent. J'ai déjà vu ça quelque part. Ce sont des armes japonaises appelées kunai. Elles sont très fines et bien aiguisées. A la deuxième extrémité se trouve un cercle dont je ne connais pas l'utilité. Ma tante lève un sourcil à la vue des armes choisies par mon père mais elle ne dit rien, préférant se concentrer sur une nouvelle attaque. Elle place ses poignards devant elle et commence à avancer. Elle varie les directions mais reste toujours face à mon père. Celui-ci ne la quitte pas des yeux, sur ses gardes. Voyant que ma tante se contente de l'observer, il décide d'envoyer un premier kunai dans sa direction. Celui-ci siffle dans l'air et effleure ma tante avant de venir se loger dans le bois humide d'un mur. Ma tante, qui s'est décalé rapidement pour évité l'attaque, fait un bond en avant et son bras se tend lançant son poignard dans la direction de mon père. Il n'est pas surpris, s'attendant visiblement à une telle réaction. Il se baisse avant de mettre un coup de pied dans le genoux de Sylvia. Dans le même temps, son bras gauche se tend et les trois kunais qui sont coincés entre ses doigts viennent griffer le visage de son adversaire. Je ne vois pas le visage de ma tante mais je peux très bien imaginer son expression. Elle ne se démonte pas et projette mon père en arrière par télékinésie. Mais elle ne le laisse pas se reposer. A peine est-il au sol qu'un poignard lui arrive sur la figure. Je vois qu'il tente la télékinésie pour le dévier mais il n'en a pas vraiment le temps, l'arme est bien trop proche. Il se baisse alors in extremis et le poignard termine sa course sur le mur à à peine quelques centimètres de mon père. Profitant que son adversaire soit déstabilisé, ma tante se met à courir dans sa direction. Elle tire sur le poignard pour le récupérer et tente de frapper mon père avec. Il est coincé contre le mur et ne peut que bouger son corps pour éviter les coups. Voulant se servir de ses mains, il lance les cinq kunais qu'il lui reste sur sa droite. Ses mains agrippent les bras de ma tante et il tente de la maitriser. Il lui fait une clé de bras et la tourne face aux kunais qui font demi-tour sous l'impulsion de mon père. Voyant les lames arriver, ma tante essaie de se débattre mais cela ne fait que renforcer la douleur dans son bras. De sa main libre, elle lance un sort et un mur se dresse devant elle. Non seulement les kunais le percutent et tombent au sol, mais en plus, les pieds de ma tante se soulèvent du sol pour prendre appui sur le mur qui n'est qu'à quelques centimètres. Grâce à une impulsion, elle saute par-dessus mon père et se retrouve libérée de son emprise. Sans plus attendre, elle récupère ses poignards et attaque mon père par derrière. Avant qu'il ne puisse faire quoi que ce soit, une lame vient se loger dans son épaule. Il lâche un cri de douleur mais mon cri est encore plus puissant. Je voudrais me lever pour l'aider mais il m'en empêche de sa main qui ne retire pas l'arme de son épaule. Une fois enlevée, il crée une sphère autour du poignard avec sa magie. Il envoie cette sphère au plafond et celle-ci y reste bloquée. Ma tante a désormais une arme en moins. Voulant jouer sur le même terrain, celle-ci essaie de récupérer les armes de mon père mais il ne la laisse pas faire. En moins de temps qu'il ne faut pour le dire, les six kunais de mon père sont entre ses mains.
Je ne comprends pas pourquoi cela semble si important pour elle. Après tout, elle n'a qu'à créer un nouveau poignard. A moins que cela ne soit impossible. Créer une sphère de magie peu dense demande déjà de l'énergie, alors créer une arme avec de la magie concentrée comme elle l'a fait doit en demander encore plus. Il n'est sûrement pas possible pour elle d'en faire un autre qui lui donnerait un désavantage, celui de la fatigue. D'autant que ma tante est la seule qui se bas depuis que nous sommes arrivé ici, elle n'a fait aucune pause.
Alors que je reviens à la réalité, je vois que le corps à corps ne s'est pas arrêté. Mais mon père est clairement désavantagé par son épaule touchée. Il se contente pour l'instant d'éviter les coups. Sentant que cela est de plus en plus compliqué, il envoie ma tante valser comme elle le lui a fait tout à l'heure. Et, adoptant la même stratégie, il envoie l'ensemble de ses armes vers elle. Ce sont donc six kunais qui volent vers ma tante. Alors qu'elle pense qu'il sera facile de les éviter voir de les récupérer, mon père se met à les contrôler par télékinésie. Leur trajectoire est désormais imprévisible. Ils tournent dans la pièce empêchant ma tante de bouger. Si elle fait un pas, elle peut être sur qu'une des lames la frappera. Elle tente cependant de les attraper au vol mais réalise qu'ils sont bien trop rapides. Elle se concentre donc est, avec une précision presque chirurgicale, envoie son poignard dans une direction où il n'y a rien. D'abord surprise, je comprends très vite son plan. Un kunai arrive dans cette direction et le poignard vient le percuter. Mon père en perd alors le contrôle et il est dévié. Dans ma direction. Ma tante a non seulement réussi à prévoir le mouvement de l'arme mais aussi dans quelle direction elle serait déviée. Mon premier réflexe est de me protéger avec le livre, instinctivement, je tends les bras. Le vieux grimoire me cache de ce qu'il se passe et j'entends juste un impact. Mais ce n'est pas le bruit d'une arme qui s'enfonce dans la couverture que j'entends mais celui d'une lame qui tombe au sol. Surprise, je retourne le livre et vois qu'il n'a aucune trace.
Il s'est défendu ?
C'est impossible.
Mon père et ma tante sont aussi surpris que moi par ce qu'il vient de se passer. Mais ils n'ont pas le temps de s'attarder sur le phénomène, ils doivent continuer à se battre.
Maintenant qu'il y a un kunai de moins qui virevolte, la pièce n'est plus entièrement couverte et ma tante trouve des espaces pour se déplacer. Mon père redouble alors de concentration et augmente la vitesse de déplacement de ses armes. Le bruit est de plus en plus important. Presque le bruit d'une tempête. Mais ma tante ne se laisse pas déstabiliser et continue à avancer. Mon père change alors de tactique, d'un seul coup, le bruit s'arrête et les kunais encerclent ma tante, la pointant de leur lame. A peine une demi-seconde plus tard, ils se mettent à bouger presque comme s'ils se jettaient sur ma tante. Elle tente de leur échapper mais deux arrivent à se loger dans son corps, un dans la cuisse et l'autre dans le bras. Pleine d'une rage incontrôlable, elle les arrache l'un après l'autre avant de les dissoudre de ses mains. Rapidement, elle recule et soigne ses blessures. Le sang et la chair arrachée ne sont bientôt qu'un lointain souvenir. Pourtant, même en ayant utilisé autant d'énergie ma tante semble en pleine forme. Comme poussée par une force inépuisable. Son poignard serré dans sa main droite, elle s'abat sur mon père. Leurs mouvements sont rapides et les coups s'enchaînent. Coup de poings, de pied, de magie, j'ai l'impression d'assister à une scène du film "Docteur Strange''.
Aucun des deux ne veut lâcher alors le combat s'éternise. Ma tante gesticule avec son poignard et mon père le pare inlassablement. De temps en temps, c'est lui qui lance une attaque mais Sylvia l'évite avec une facilité déconcertante. Le livre serré contre moi, les yeux humides, je ne peux que contempler mon monde qui s'écroule et la gravité de la situation. Ma tante, celle qui m'a élevé et m'a tout appris dans la bienveillance, est en train de se battre contre mon père que je croyais mort. Et autour de cette scène sordide, mes amis. Tous étendus au sol, parfois dans une tâche de sang. Je ne peux que penser qu'ils sont dans cet état par ma faute. Ils savaient les risques qu'ils prenaient en venant ici mais j'aurais dû leur dire de ne pas le faire, de ne pas se battre pour moi. C'était à moi d'entrer dans ce combat et je n'ai absolument rien fait. J'ai été mise à l'écart. Mes yeux dérivent sur le corps de Justin. Je ferme mes paupières pour ne plus le voir. Pourquoi a-t-il fait ça ? Il n'aurait pas dû se prendre ce coup, il aurait pu me pousser. Où même simplement me laisser prendre l'attaque. Pourquoi ne l'a-t-il pas fait ?
J'essuie une larme qui roule sur ma joue avant de reporter mon regard sur la scène devant moi. Seuls les cris de rage et les tintements des armes viennent briser l'atmosphère tranquille de la forêt. Ma tante lance une énième fois son poignard et celui-ci vient se loger dans la cuisse de mon père. Mon ventre se serre, pourtant, je ne bouge pas. Je regarde son visage se déformer alors que Sylvia lui assène un coup de poing dans le visage. Il recule de quelques pas sous la violence de ce geste. D'un coup sec, ma tante retire le poignard faisant de nouveau grimacer mon père. Sans laisser le temps à sa chair de se réparer, Sylvia enchaîne les coups. Mais maintenant mon père a du mal à les contrer. Peu à peu, il perd du terrain et se rapproche d'un mur. Si elle arrive à le coincer, tout est fini. Je jette un œil sur Exponentia avant de détourner le regard. Je ne veux pas être le dernier rempart pour le protéger. Mon père envoie ses kunais vers ma tante mais son coup n'est pas assez puissant et elle les arrête d'une main. A peine quelques secondes plus tard ils disparaissent laissant mon père sans défense et incapable d'en créer d'autres. Son regard est presque perdu mais je vois qu'il lutte intérieurement pour reprendre des forces et garder espoir. Ce combat, il a dû l'imaginer des centaines de fois. Mais cette issue, il ne l'avait pas espérée. Voulant à tout prix gagner, il met ses bras en garde et s'approche de ma tante. Il lui envoie un puis deux coups, qui, miraculeusement, atteignent leur cible. Ma tante, déstabilisée par une telle détermination semble presque admirative avant de se rappeler qui est l'homme devant elle. Elle reprend alors le combat en enchaînant de nouveaux coups. Il est quasiment impossible pour son adversaire de tous les arrêter.
En voyant mon père ainsi, perdre petit à petit des forces, je sens l'anxiété monter en moi. Je ne peux pas faire ça, je ne peux pas voir mon père mourir alors que j'ai appris il y a seulement quelques heures qu'il était vivant. Prise de panique, je ferme les yeux pour essayer de reprendre mon souffle. Il faut que je fasse quelque chose, je dois absolument trouver une idée pour le sortir de là. Je ressert le grimoire contre ma poitrine, et une idée me vient à l'esprit. Ce livre, Exponentia, renferme des sorts puissants, il doit bien y avoir quelque chose pour l'arrêter. Je l'ouvre et lis le premier sortilège sur lequel je tombe. Le sort pour envoyer dans les limbes. Non. Je veux l'arrêter, mais pas question de faire ça. Je tourne les pages pour trouver autre chose, mais je tombe sur un sort pour tuer. Non pas question. Heureusement, la troisième page que je regarde pourrait m'aider. Cela me permettra de créer un grand cercle de feu. Ces flammes empêchent la personne de sortir, mais elle ne blesse pas ceux qui sont à l'extérieur. Je pense que ça pourra faire l'affaire. Le principal, c'est réussir à l'arrêter pour que mon père puisse reprendre le dessus sur ce combat. Je prends une grande inspiration, puis commence à lire le sort.
" Que des flammes brûlantes t'entourent,
Ce feu qui t'empêche de sortir j'en trace les contours
Et ton corps encerclé est enfermé dans cet enfer,
Une prison dont tu ne pourra te défaire "
De petites flammes sortent de mes mains et le feu se dirige droit vers ma tante. Sentant que quelque chose arrive sur elle, elle tourne la tête et aperçoit le sort.
- Oh non Eléanore, il n'en est pas question
Comme si elle connaissait le sort, elle dit quelque mot et celui-ci disparaît. Un sourire diabolique apparaît sur ses lèvres et elle touche une nouvelle fois mon père avec son poignard. Prise d'une nouvelle crise de panique et de larmes, je tente de discerner sur les pages un autre sort. Mais ceux qui m'apparaissent sont plus horribles les uns que les autres. Je comprends mieux pourquoi ces sorts sont interdits. Fermée à l'idée de faire du mal à qui que ce soit, je ferme rageusement le grimoire. Il faut que je trouve d'autre sort pour l'arrêter.
Me sortant de mes pensées, mon père crie une nouvelle fois sous les coups de son adversaire. Il semble comme paralysé par la douleur. Paralysé. Mais oui ! Reprenant espoir, je tente de me souvenir d'un sort que Daisy avait lancé sur Mathis lorsque nous étions plus jeune. Elle l'avait trouvé dans un livre et avait à tout prix voulu l'essayer. Paralyser son frère était bien trop tentant pour elle. Ses compétences en magie étant parfois limitées à cette époque, le sort avait lamentablement foiré. Mais peut être qu'aujourd'hui je pourrais y arriver si je me souvenais de la formule. Cela parlait d'un brouillard mais j'ai du mal à en dessiner les contours. Il y avait évidemment le mot paralysé.Aller Eléanore réfléchit !
Devant mes yeux mon père prend un nouveau coup, et comme un déclic, le sort me revient. J'essuie mes quelques larmes pour me concentrer et je dis le plus distinctement possible la formule.
" De ce brouillard épais, tu ne sortiras pas en paix
Ton corps tout engourdi, ne bougera plus d'un pli
Et pour un temps donné, tu seras paralysé. "
Alors que je m'attends à une réaction, rien ne se passe. Absolument rien. Je ne comprends pas. Mes oreilles commencent à bourdonner et ma vue se trouble. Ça n'a pas marché. J'ai du me tromper dans la formule. Pendant de longues secondes je tente de trouver où j'ai pu faire erreur. Je tente encore plusieurs fois en changeant certains mots, mais rien n'y fait, je suis incapable de lancer ce sort. Encore une fois, j'ai échoué. Mes larmes redoublent devant mon incapacité à aider mon père. Même qui que ce soit. Je n'ai pas été capable de protéger mes amis non plus. Derrière mon flot de larmes, je vois mon père continuer à se faire malmener par ma tante. Il ne tiendra plus longtemps. Je le sais, lui aussi le sait et tout comme ma tante.
Il faut que je me reprenne. Je peux encore faire quelque chose. Trouve des sorts Eleanore aller !
J'essuie les larmes qui coulent sur mon visage et prend une grande inspiration. Je dois trouver quelque chose le plus vite possible. Je réfléchis encore et encore pour trouver une idée. Puis je repense à quelque chose, un sort qu'on avait essayé avec les filles un jour. Encore une fois, je ne suis pas certaine que la formule soit la bonne, mais je dois essayer.
" Que le sol sous tes pieds, d'un coup se mette à changer
Et que ta lutte, n'atteigne pas son but
Car à la place de la terre, ce sont des sables mouvants qui t'enterrent "
De même que le précédent, ce sort n'a aucun effet. Mes larmes redoublent mais je ne veux pas perdre espoir. Je lance encore deux sorts mais le premier est contré et le second ne fonctionne pas. Mes poings se serrent de plus en plus fort. Il faut que je trouve.
Devant moi c'est presque de la torture qui est perpétré. Mon père n'a plus les moyens pour se défendre. Il a dû mal à tenir sur ses pieds. Mes yeux fixent cette scène, impuissants. J'ai du mal à respirer et mes larmes ne s'arrêtent plus. Qu'est ce qui nous a mené à ça ? Comment en est-on arrivé à une telle horreur ?
- Éléanore !
La voix de Kate atteint mes oreilles. Je tourne la tête dans sa direction et je vois que ses yeux sont ouverts bien que son corps soit encore étendu au sol. Ses yeux me fixent quand elle me dit.
- Fais quelque chose, elle va le tuer ! Je suis sûre que ce n'est pas ce que tu veux.
Un peu perdue, je reporte mon regard sur le combat. Mon père est au sol et ma tante le regarde de haut. Ses lèvres s'ouvrent et, presque trop bas et trop sereinement par rapport à la situation, elle dit :
- Je ne te laisserai pas détruire la famille que j'ai construite.
Sa famille. Moi et mes amis sommes sa famille. Mais je n'ai pas le temps de réfléchir à ses mots que Kate s'écrie:
- Eléanore tu dois intervenir ! Tu dois faire quelque chose. Tu dois l'arrêter.
Ses mots arrivent à mes oreilles alors que je vois mon père près de la perte de connaissance. Ses yeux fixent ma tante qui a toujours cet air mauvais sur le visage. Je respire un grand coup. "Tu dois l'arrêter". Le problème, c'est que tous les sorts que j'ai essayé pour le moment n'ont eu aucuns effets contre elle. Je crois savoir ce que je dois faire mais cela me semble impensable. Mais je crois ne pas avoir d'autres choix. Est-ce que je réalise vraiment ce que je dois faire ? Ma tête se tourne vers Exponentia. Presque sans en avoir conscience, je l'ouvre et recherche une page précise, une page que j'ai déjà aperçu, mais que dont j'ai refusé de prêter attention. Lorsque je l'atteins, la seule chose que j'arrive à voir est : MORT. Ces quatre lettres me paralysent. Je ne peux pas faire ça. Je ne peux pas. Je referme le livre, mais instinctivement, un de mes doigts retient la page. Je regarde Kate, les yeux perdus. Elle a compris ce que je m'apprête à faire. Elle semble avoir aussi peur que moi, mais elle hoche la tête pour me dire que c'est la seule chose à faire. Je tremble. Je ne peux pas. Je regarde mon père, ma tante, encore mon père. Je ne peux pas faire ça. Je ne peux pas choisir de faire ça. Je suis leur famille. Nous sommes la famille de ma tante. Quel genre de personne tue quelqu'un de sa famille ? Comment pourrai-je tuer la personne qui m'a élevée, qui a pris soin de moi depuis des années, qui a soigné mes blessures après mes entraînements avec les filles. Je ferme les yeux, les larmes inondent toujours mon visage. Que dois-je faire?
Lorsque j'ouvre les yeux, devant moi, à travers les larmes, je vois ma tante armer son poignard. Elle va le tuer. Elle va le faire. J'aimerais me rappeler du sort qu'elle a utilisé contre Daisy quelques instants plus tôt mais je n'y arrive pas. Elle va le tuer. Elle va tuer mon père. Son bras est en l'air, la lame tranchante en direction du cœur de celui que je croyais avoir perdu. Je crois que je crie. Je vois flou tellement mes larmes sont impossibles à retenir. Mes mains essuient mes yeux mais les larmes reprennent le dessus. A travers cet épais brouillard j'essaie de déchiffrer le sort. Je ne peux pas faire ça. Pourtant, les mots sortent de ma bouche entre plusieurs sanglots.
" De ce monde aujourd'hui, je ne veux plus que tu fasses partie.
Ton sort est acté, la mort va te rencontrer
Ton corps se vide de son âme et de son énergie, ta vie s'arrête ici. "
Je pleure. De plus en plus. Comme si cela était possible. Je crie. Cette fois, j'en suis sûre. La main de ma tante lâche le couteau et ses yeux plein de surprise me fixent. Elle tombe à genoux, puis s'effondre complètement sur le sol. Je la vois petit à petit perdre toute son énergie, je vois la vie la quitter. J'ai l'impression de me retrouver il y a plus d'un an quand on a vu Cinder mourir. Là aussi, c'est comme si autours, le temps s'était arrêté. Puis, je l'entends essayer de parler, elle tourne son visage vers moi et me dit
- Eléanore je... je suis désolée. Quand j'ai compris qu'il voulait te reprendre, j'ai perdu le contrôle.
Elle prend une grande inspiration, puis reprend, avec une voix encore plus faible.
- Surtout, ne t'en veux pas, tu as fais la seule chose qu'il fallait pour m'arrêter, c'était la seule solution. Je suis désolée de ne pas avoir été assez forte pour contrer cette colère.
Sur ces mots, elle ferme les yeux, et sa main tombe sur le sol.
Elle est morte.
Au même instant, je lâche Exponentia, et il s'écrase dans un bruit sourd contre le sol. Mais qu'est-ce que j'ai fait ? Comment ai-je pu faire ça ? Je m'écroule, les mains sur les yeux pour pleurer et ne plus voir la dure réalité.
J'ai tué ma tante.
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