Je finis mon dernier trait de liner quand j'entends ma tante nous dire qu'il est temps pour nous de partir. Je jette un dernier coup d'œil dans le miroir pour vérifier que mon costume est bien en place, récupère mon sac et ma veste avant de quitter ma chambre. Arrivée sur le palier, je tombe nez à nez avec Daisy, et je manque d'exploser de rire. Ma meilleure amie refusait de nous dire en quoi elle allait se déguiser pour la soirée d'Halloween, alors j'ai commencé à imaginer des théories, mais je ne m'attendais pas à ça.

     - Tu es vraiment déguisée en sorcière Daisy ?

     Je remarque un grand sourire sur son visage. Elle semble très fière de son idée.

     - Oui, je trouvais ça drôle. Et puis pour une fois, je pourrais dire à voix haute que je suis une sorcière, et sans risquer d'avoir des problèmes.

     Nous rigolons toutes les deux. Elle porte une robe longue dans une couleur violette foncé, et sur ses manches longues, on peut apercevoir des broderies de toiles d'araignées. Elle porte un chapeau en pointe et tient dans sa main un balai. Le véritable cliché des sorcières qui utilisent des balais volants. Je remarque qu'elle a changé ses cheveux, elle est passée de son habituel carré coloré à de très longs cheveux noirs corbeaux avec quelques mèches ici ou là de la même teinte que sa robe.

     - En tout cas, je comprends pourquoi tu voulais garder la surprise. C'était une bonne idée, bravo.

     - Merci beaucoup. Et j'aime beaucoup ton costume d'égyptienne, c'est très réussi.

     - C'est gentil.

     Je fais un petit tour sur moi-même pour lui montrer mon costume. C'est une robe longue blanche avec un voile bleu clair qui est accroché entre mon dos et mes mains. Mais ce que je préfère, ce sont tous les bijoux et la ceinture dorée qui ajoute vraiment ce côté égyptien.

     - Mais tu n'imagines pas à quel point le maquillage était compliqué à faire. Surtout pour moi qui n'ait pas l'habitude de me maquiller. Mais je trouve que je ne me suis pas trop mal débrouillée.

     Je vérifie une dernière fois mon maquillage dans le reflet de mon écran de téléphone.

     - En même temps, pourquoi tu te compliques les choses ? Je suis sûre que ça aurait été très bien avec seulement le trait de liner avec ton maquillage bleu et doré. Pourquoi est-ce que tu as voulu faire ces dessins sous ton œil ?

     - Je l'ai vu plusieurs fois en faisant mes recherches, et puis je trouvais ça joli, alors j'ai voulu essayer, mais je me rends bien compte que j'aurais peut-être dû faire quelques tests avant. C'est vraiment raté ?

     - Mais non enfin, qu'est-ce que tu racontes, c'est très joli ne t'en fais pas.

     - Merci. En tout cas moi, j'adore ta nouvelle coupe de cheveux !

     - Ah, c'est vrai ? J'hésitais à faire ça parce que je ne les ai jamais eu jusqu'au bas du dos, mais je me suis dis que...

     - Bon les filles, vous pouvez vous bouger un peu ? On va encore être en retard à cause de vous.

     Je lève les yeux au ciel en entendant la remarque de Justin qui vient d'en bas. Quel rabat-joie celui-là. Nous nous lançons un dernier regard avec ma meilleure amie avant de descendre les escaliers. Quand nous arrivons en bas, je remarque que nous sommes effectivement les dernières à arriver. Pour une fois, c'est moi qui suis en retard. Tout le monde est en costume. Même Saphir a eu le droit à une petite cape rouge accrochée à son collier. Je ne peux m'empêcher de détailler chaque personne autour de moi. Le plus à ma gauche, se trouve Matt qui est déguisé en clown, il a tout l'attirail, le nez rouge, les longues chaussures, et même la fleur qui projette de l'eau. Enfin, je pense qu'elle peut le faire mais je n'irai pas tester moi-même. À côté de lui, toujours l'air de s'impatienter, Justin est en vampire. Je crois que c'est celui qui a fait le moins d'effort de toute notre petite famille. Mis à part les dents en plastique, son déguisement n'est en fait composé que d'un costume et d'une cape. À sa gauche, Kate est en pirate. On la croirait tout droit sortie de pirate des caraïbes. Mais mon attention dérive vite vers Lucy qui a mis le paquet sur un déguisement fée clochette. Elle s'est même mis des paillettes un peu partout, ce qui la fait briller à la lumière. Enfin, même ma tante est déguisée. Son costume de Catwoman lui va à ravir. Je crois qu'elle a toujours rêvé de faire ça vu son air enthousiaste quand elle pousse enfin la porte.

     Je monte, après quelques vaines protestations, en voiture avec Matthew et Justin, tandis que ma tante prend les autres filles. Pour mon plus grand plaisir, c'est Matt qui conduit, ce qui me permet, pour une fois, d'être assise et attachée lorsqu'une voiture démarre. Le trajet se fait dans une impatience peu dissimulée, enfin, en ce qui concerne Matt et moi. J'ai vraiment hâte de voir le résultat final des décorations dans le village. Nous avons fini de mettre en place notre petite scène il y a déjà quelques heures, mais tout le monde n'avait pas encore terminé. Et puis je suis certaine que ce sera encore mieux maintenant qu'il fait nuit, avec toutes les guirlandes qui seront allumées.

     Une fois en bas, nous nous garons devant la boutique de ma tante puis nous nous dirigeons à pied vers le grand champ où se déroulent les festivités.

     À ce que j'ai compris, tous les ans pour Halloween, le village fait une grande fête où tout le monde prépare quelque chose comme des spectacles ou des jeux pour la soirée.

     Quand nous arrivons enfin sur la place, je reste sans voix. J'ai l'impression d'être dans un endroit totalement différent du village où nous vivons. Malgré la nuit noire due à l'heure tardive, c'est comme si nous étions en pleine journée avec toutes les guirlandes et les lanternes accrochées un peu partout. Effectivement, les gens ne font pas les choses à moitié dans cette ville. Il y a des décorations un peu partout, des citrouilles sur lesquelles des visages ont été gravés, des fantômes accrochés en l'air pour donner l'impression qu'ils volent, et même une espèce d'énorme piñata en plein milieu du champ. Les stands sont eux aussi très réussis. Tous sont très décorés selon le thème et l'activité qui y est proposée. Il y a une énorme diversité de stands. Ce qui est certain, c'est que ni les enfants ni les plus grands ne vont s'ennuyer ce soir. Il y en a pour tout le monde. Le premier qui me tape à l'œil est celui de la boulangerie. Il est entièrement orange. Le pain est orange, les pâtisseries sont oranges, les décorations sont oranges... Mais le meilleur, c'est l'activité qu'ils proposent. Ils font des décorations de cupcake sur le thème des citrouilles. Il faut absolument que j'y aille. J'ai acheté une fois un cupcake dans leur boutique du centre ville et ils sont vraiment délicieux. Plus loin, un stand permet aux enfants de se maquiller. Sorcières, spidermans, princesses, fantômes, squelettes et autres y font la queue pour parfaire leurs costumes. Leurs paniers me semblent déjà plein ce qui me fait penser qu'ils ont déjà fait le tour des stands déjà opérationnels. Ici, c'est une activité égale une poignée de bonbons. Cela motive les plus récalcitrants.

     Une fois arrivé à notre stand, le stress monte d'un cran. Il ne faut pas que nous loupions nos scénettes que nous travaillons depuis plus d'une semaine. Je pose mes affaires et vais me changer rapidement pour entamer notre première représentation. Le costume d'égyptienne me servira plus tard dans la soirée. Je regrette cependant de m'être maquillée car le liner et le fard bleu vont mettre un petit coup à mon costume de conteuse de la Grèce antique. J'enfile tout de même ma toge avant de récupérer le livre sur les récits antiques qui est habituellement dans les étagères de la boutique d'antiquités. Je passe ma tête entre les rideaux qui servent de fond de scène et remarque que petits et grands sont déjà attroupés dans l'herbe. À ma droite, ma tante me fait signe de commencer et allume les deux projecteurs. Je respire un grand coup et monte sur scène. Lorsque je me retourne, je m'aperçois que mes amis sont déjà fin prêts, cachés derrière les décors de colonnes grecques.

     - Excusez-moi ! Merci de votre attention. Je vous souhaite la bienvenue dans l'atelier lecture de mythes organisé par la boutique d'antiquités. Je vous rappelle que vous pourrez acheter certains de nos objets sur le stand qui se trouve juste à votre droite.

     Comme poussées par une énergie supérieure, toutes les têtes se tournent vers ma gauche. Ma tante, qui s'est installé au stand, leur fait un petit signe avant que toute leur attention ne se remette sur moi.

     - Je vais vous compter ce soir, trois histoires extraordinaires. D'abord, commençons par le mythe d'Orphée. Orphée est un excellent musicien, berçant de sa lyre les plus belles de nymphes et charmant humain et animaux.

     Sur ces mots, Matt, vêtu de son plus beau costume, rentre sur scène, une lyre à la main. Le public l'applaudit, mais se reconcentre vite sur la partie droite de la scène où Lucy et Daisy l'écoutent avec bonheur.

     - Un jour, Orphée rencontra Eurydice et ils tombèrent immédiatement follement amoureux.

     Kate fait son apparition dans la plus belle de ses robes et fait mine de tomber sous le charme de notre Orphée. Ils partent tous deux dans une promenade en amoureux. Matt finit par se mettre à genoux.

     - Ils s'aimaient tellement qu'ils décidèrent presque immédiatement de se marier. Malheureusement, le jour du mariage, un serpent mordit Eurydice. Celle-ci succomba à cette morsure et fut enlevée à Orphée.

     Des " oh ! " venant du groupe d'enfants s'élèvent dans l'assemblée lorsque Kate, mordue par un faux serpent, meurt en plein milieu de la scène.

     - Orphée se trouva complètement dépourvu et ne savait plus comment vivre. Il décida d'aller la chercher dans les enfers. Mais pour cela, il fallait passer Cerbère, le terrible chien à trois têtes.

     Je cherche des yeux notre Cerbère, mais je ne le vois pas arriver. Je me retourne et vois que Justin n'a pas du tout envie de monter sur scène. Je lui fais les gros yeux et il finit par avancer, en traînant des pieds. D'accord, son costume n'est pas le plus simple à porter mais je ne vois pas pourquoi son ego devrait intervenir. Une tête de chien sur sa propre tête et une autre sur chacune de ses mains, il interprète à merveille le gardien des enfers. Certains enfants le pointent du doigt, masquant à peine un petit rire, ce qui me ferait presque rire à mon tour. Ou bien est-ce Justin transpirant la joie dans son costume ?

     - Jouant de sa lyre, Orphée endormit la bête. Il s'engouffra dans les enfers à la recherche de sa bien-aimée. Impressionné par ses prouesses, Hermès lui permit de repartir avec sa femme. Mais il y posa une condition. Orphée ne devra pas se retourner pour voir sa femme avant d'être sorti des enfers. Celui-ci accepta et partit vers la sortie.

     Matthew entame la traversée de la scène suivie par Kate. Ils sont parfaitement dans leurs rôles.

     - Alors qu'il se croyait sorti, et n'entendant plus sa bien-aimée derrière lui, Orphée se retourna. Mais il n'avait pas vu qu'un de ses pieds était encore dans le sinistre lieu des enfers. Il perdit Eurydice à tout jamais.

     Alors que Kate disparaît une nouvelle fois, la lumière se tamise. Les applaudissements commencent à retentir et tous les comédiens viennent saluer. Justin se relève comme sorti de son sommeil et prend finalement du plaisir à être applaudi. Tout est une question d'ego. Les deux autres mythes s'enchaînent, toujours avec le même succès. Nous finissons en beauté en lançant des bonbons à la foule, ravie de ces sucreries.

     Quand je descends enfin de scène, j'ai l'impression d'avoir couru un marathon tellement je suis fatiguée. Mais je me reprend vite, car la soirée ne fait que commencer. J'enfile une nouvelle fois mon costume d'égyptienne et vais déambuler entre les stands.

     Malgré l'heure tardive, beaucoup d'habitants sont encore sur la grande place. Les enfants en profitent pour jouer entre eux, tandis que les parents discutent ensemble. Nous avons arrêté il y a plus d'une heure nos petits spectacles, mais parfois, certains enfants reviennent nous voir pour nous en demander un quatrième. Personnellement cela ne me dérangerait pas, mais je pense que si je devais demander à Justin d'enfiler à nouveau un de ses costumes, je risquerais de me faire tuer.

     Je continue de me promener sur la place, à observer les décorations du village quand quelqu'un se place devant moi. Je m'apprête à me décaler pour l'éviter lorsque je reconnais le visage de l'homme qui est en face de moi. Je pense que je n'oublierai pas son visage avant plusieurs semaines. Je sens un mélange de peur et de colère monter en moi. Pourquoi est-ce que je suis partie faire une balade toute seule ? L'homme prend alors la parole :

     - Bonsoir, désolé, je ne voulais pas te faire peur, je ne sais pas si tu te souviens de moi, mais je suis...

     - Je sais qui tu es, je me souviens de toi. Désolée, mais je suis plutôt pressée, alors si tu pouvais ...

     Je ne suis vraiment pas très sereine. Des images de lui au bar me reviennent en mémoire et un petit frisson me parcourt.

     - Oui, je ne voudrais pas te retenir, je voulais seulement m'excuser de ce qu'il s'est passé à la soirée au bar. Je ne me souviens pas vraiment de tout ce qu'il s'est passé ce soir-là, mais je sais que j'ai fait quelque chose qui n'aurait jamais dû se produire avec toi. Je sais très bien que rien ne pourra excuser ce que j'ai fait évidemment, mais je voulais te retrouver pour t'expliquer.

     - Non ne t'in...

     - Si, je sais qu'on ne se connaît absolument pas, et je comprendrais que tu n'acceptes pas mes excuses, c'est tout à fait normal. Mais ce soir-là, ma petite amie venait de me larguer d'une façon assez... difficile, alors je suis allé au bar, et j'ai bu. Beaucoup. Beaucoup trop. Et quand je t'ai vu, j'ai cru devenir fou parce que... Disons que tu lui ressembles beaucoup. Je ne sais pas ce qu'il m'a pris, je n'aurais jamais dû faire ça.

     Je le fixe, ne sachant pas trop comment me positionner vis-à-vis de lui. Vu à cette fête, sobre et à une distance raisonnable, il m'a l'air d'être sincère.

     - Je... je dois bien avouer que je ne m'attendais pas à ça. Je t'imaginais plus comme quelqu'un d'horrible, mais j'accepte tes excuses. Ne t'en fais pas.

     - Merci, merci beaucoup.

     Il a l'air extrêmement rassuré. Comme quoi, il ne faut pas juger les gens à la première rencontre. En ce qui le concerne, il n'aurait pas pu faire pire. Il reste quelques secondes, mal à l'aise devant moi sans rien dire, puis il reprend la parole :

     - Je peux te demander comment tu t'appelles ?

     - Oui, bien sûr, je m'appelle Eléanore. Et toi, tu es ?

     - Bien sûr désolé, Luke. J'avais peur de ne jamais te retrouver parce que je ne t'avais jamais vu avant.

     - Oui, c'est normal, j'habite ici depuis peu de temps, seulement quelques mois, et j'ai passé beaucoup de temps dans la nouvelle boutique de ma tante donc je ne sortais pas beaucoup.

     - La nouvelle boutique ? Celle d'antiquité ?

     Il semble connaître et être plus qu'enthousiaste ce qui finit de me détendre. Je lui explique donc:

     - Oui, c'est ça, c'est ma tante qui l'a récupéré, et on a dû tout remettre en place.

     - Je suis passé plusieurs fois devant et j'ai remarqué qu'elle avait beaucoup changé. Je suis heureux qu'elle ait trouvé un nouveau propriétaire. C'est un endroit que j'adorais étant petit.

     - Tu vis ici depuis longtemps ?

     - Oui, depuis toujours en fait, je suis né ici, et je n'ai jamais quitté la ville.

     Et sans que je ne fasse attention, la discussion que je voulais à tout prix éviter dure depuis plus de quinze minutes. Je ne sais pas combien de fois pendant cette conversation il s'est excusé. En même temps, je le comprends, je serais sûrement pareil à sa place.

     Dans ce laps de temps, j'ai appris beaucoup de choses sur lui. Il vient de me dire qu'il a un grand frère qui est parti il y a plusieurs années pour travailler à Portland. Je m'apprête à lui demander ce qu'il fait comme étude lorsqu'une voix que je reconnaîtrais entre mille nous interrompt.

     - Est-ce que je peux savoir ce que c'est que ce délire ?

     - Qu'est-ce qu'il y a Justin ?

     - Qu'est-ce qu'il fait là lui ? Je croyais t'avoir fait comprendre la dernière fois de ne pas t'approcher d'elle non ? Tu veux que je te foute mon poing dans la gueule pour que tu comprennes enfin ?

     Face à l'air menaçant de Justin, Luke se met sur la défensive et tente de désamorcer le conflit.

     - Désolé, j'étais juste venu m'excuser, je te jure que je ne voulais pas venir draguer ta copine.

     - Je ne sors pas avec lui.

     Je tiens à mettre les choses au clair. On ne va pas jouer à ce cinéma une deuxième fois.

     - Pardon ? Ah, j'avais cru comprendre la dernière fois que...

     - Non, en fait, il voulait juste te faire partir. Mais c'est bon Miller, calme toi, tout va bien.

     J'aperçois Justin observer Luke de haut en bas, comme pour juger si oui ou non il pouvait le laisser tranquille ou plutôt lui casser la figure. C'est bizarre, j'ai comme le souvenir qu'il m'avait dit que plus JAMAIS il ne viendrait à mon secours. Quand ses yeux croisent les miens, il doit comprendre ce que mes yeux veulent lui dire puisqu'il arrête immédiatement son cinéma. Alors qu'il commence à s'éloigner, j'aperçois la montagne derrière lui. Une question me traverse alors l'esprit.

     - Luke, j'ai une question à te poser. Tu vas peut-être trouver ça stupide, mais est-ce que tu crois à cette légende sur la cabane dans la forêt ? Qu'il y aurait un fantôme là-haut, que ça serait un sorcier et tout ça.

     - Non, évidemment que non. C'est une histoire que les anciens aiment bien raconter pour faire un peu peur et éviter que les enfants aillent se promener seuls dans la forêt, mais ce n'est qu'une histoire.

     - D'accord, bon nous on doit y aller maintenant.

     Sur ce, Justin qui s'était donc arrêté, me tire par le bras, et nous éloigne de Luke.

     - Je peux savoir ce qu'il t'arrive ? On était en train de discuter.

     - Ce mec a failli t'agresser il y a quelques jours, et toi, tu discutes tranquillement avec lui. Tu es vraiment encore plus bête que ce que je croyais.

     - Et toi, tu me fatigues, tu vois très bien qu'il n'allait rien faire. Il s'est excusé, et il m'a expliqué ce qu'il s'était passé. Et puis de toute façon, en quoi ça te regarde que je lui parle ou pas ?

     - Je n'ai pas vraiment envie de revenir te sauver à chaque fois qu'un mec essaye de t'agresser, alors évite de retourner les voir espèce d'idiote.

     Je lève les yeux au ciel, visiblement, il n'a pas compris le message subliminal de tout à l'heure. Je n'ai pas vraiment envie de lui répondre. De toute façon, avec lui, c'est presque impossible de discuter, alors autant abandonner dès maintenant. Alors que nous sommes en train de marcher en direction de je-ne-sais-où, je remarque de la lumière dans la forêt, j'essaye d'apercevoir d'où est-ce que cela provient exactement quand je comprends que c'est la cabane du "fantôme de la légende du village". Mais comment est-ce possible ? Nous y sommes allés il y a quelques jours et il n'y avait personne, pas de trace de vie, alors comment peut-il y avoir quelqu'un maintenant ? Je me rends compte que j'ai arrêté de marcher quand je vois le visage de Justin devant moi. Avec un sourcil levé, il me demande.

     - Mais qu'est-ce qu'il t'arrive encore Foster ?

     - La cabane.

     - Quoi la cabane ? Tu ne pourrais pas faire des phrases entières s'il te plaît, ça nous ferait gagner du temps, je n'ai pas envie de jouer aux devinettes.

     - Regarde. Il y a de la lumière dans la cabane dans les bois. On a pourtant vérifié !

     - C'est rien ça.

     - Tu fais tout un drame quand je parle avec Luke et là qu'une cabane, supposément abandonnée, fasse de la lumière, ça tu t'en fous ?

     - Je te dis que ce n'est rien, c'est juste des gosses. J'en ai entendu certains tout à l'heure, il voulait aller y faire un tour. Histoire de se faire peur, ou je ne sais pas trop. Franchement, ces gosses sont stupides.

     - Tu es sûr ? Et si c'était ...

     - Tu sais quoi, si tu ne me crois pas, tu n'as qu'à aller voir, moi en tout cas, je me casse d'ici, j'en ai marre. Et ne compte pas sur moi pour t'accompagner cette fois.

     Il brandit sa cape comme dans un film avant de me laisser plantée en plein milieu du champ. Seule. Pendant quelques secondes, je reste plantée là, à me demander quoi faire. Je ne fais que le suivre du regard. Il s'enfonce entre les stands et semble se diriger vers un groupe entièrement fémin. Finalement, je ferais mieux de bouger. Je me décide à rentrer à la maison. Il a sûrement raison, ce n'est qu'un groupe d'enfants qui s'amuse. Et puis je n'ai franchement pas très envie de retourner là-bas toute seule.