troisième souvenir.
il y avait quelque chose de plaisant dans cette ville.
la fraîcheur du matin, les arbres en ligne dans l'allée, la vue sur le lac, et le lever du soleil du parking de la mairie.
et le calme. la tranquillité.
-bonjour, jeno! le saluait-on, alors que son vélo roulait sur le trottoir, au bord du lac.
sa frange effleurait son front, bougeant sur le côté par le vent, il continua de pédaler, son sac en cuir marron posé sur le panier, accroché au guidon. il commençait à y avoir du monde, le soleil commençait déjà à taper lorsque jeno se retrouva vers le parking, face à la mairie. il aperçut une voiture, rouge. il tourna la tête pour admirer le ponton au-dessus du lac, ou des cygnes se baignaient autour.
il faisait bon et jeno continue de pédaler, il tourna vers l'allée d'arbre près du chapelier, avant de croiser des enfants jouant si tôt le matin sur les balançoires, glissant du toboggan. il sourit, saluant les parents assis sur un banc, deux poussettes à côté d'eux. il regarda sa montre accroché au poignet et accéléra doucement, son premier patient devait déjà l'attendre.
Il posa son vélo à côté d'une maison décorée de verdure, le temps avait apporté les lierres et elles allaient jusqu'au-dessus de la porte en bois, il lança un coup d'œil à l'homme, dos au mur, portant un béret, sur son téléphone.
-bonjour monsieur, le salua jeno, comment ça va ce matin ?
l'homme rangea rapidement son téléphone, le sourire aux lèvres avant de poser une main sur sa hanche et soupirer.
-votre hanche vous fait toujours aussi mal ?
-oh...! l'homme s'exclama, si ce n'était que ça...
jeno rit à la remarque, prit ses clefs et ouvrit la porte, jetant un rapide coup à la plaque, clouée au mur de la maison: "Lee Jeno- médecin généraliste".
la matinée continua ainsi, à dix heures, sa secrétaire arriva, et les clients défilèrent; leur âge n'allait pas en dessous de quarante cinq ans. vêtu de sa blouse blanche, jeno rangea un moment son cabinet, regarda ses quelques photos accrochées sur le mur, sur son bureau, la montagne de paperasse qu'il devait envoyer à son professeur pour une thèse et enfin, le paysage à sa fenêtre. tout était si calme, il était apaisé.
sa ville natale lui avait manqué, et revenir pour y travailler, jeno en était plus qu'heureux, il regarda l'arbre en face de sa fenêtre, les quelques vieilles voitures garées devant et le soleil d'été, toujours là. à onze heures quarante-cinq, les commérages commencent, comme d'habitude.
-vous vous sentez bien ici docteur ? dit la vieille femme, moi je suis arrivée il y a quatre ans, et j'y suis très heureuse. mais pour un jeune comme vous... il n'y a rien..
jeno sourit doucement, alors qu'il tapait l'ordonnance de la vieille femme sur son ordinateur.
-je suis très bien ici, je suis né ici, lui répondit-il, et puis... qui d'autre pourrait vous soigner aussi bien que moi ?
la dame se mit à rire, surprise et flattée par le charme de son médecin.
-vous savez... ma fille...
et à onze heures quarante-huit, la tournée de prétendante commença.
-ma nièce... dit une autre dame, quarante-huit ans, venue pour un rhume, elle est chef de cuisine...
Jeno sourit.
-elle a trente-deux ans et elle est responsable... je suis sûre que vous vous entendrez parfaitement!
Je plaisanta.
-je vous ai parlé de ma petite-fille, elle est en marketing...
jeno ricana.
et deux heures plus tard, la tournée de présentation s'arrêta, pour la cinquième fois cette semaine. il connaissait les filles, et petite-filles de ses patients par coeur, mais ça ne les empêchait pas de les présenter à nouveau à jeno. il enleva sa blouse, sortit de son cabinet, saluant sa secrétaire mangeant à son bureau en regardant sa série, et il sortit, laissa ses cheveux ébènes se faire décoiffer par une soudaine bouffée de vent.
il ne prit pas son vélo, ce n'était pas nécéssaire, simplement sa lunchbox et se promena, son tee shirt blanc idéal pour l'air frais de la fin de matinée, avec un petit bonhomme imprimé sur sa poitrine et marcha jusqu'au chemin, près du lac.
il regarda sa montre, tout était comme d'habitude, et son quotidien le rassurait. il retrouva son banc, sa vue et son soleil, prenant son sandwich, silencieusement avant de le déguster face à cette si belle vue qui lui avait manqué pendant ces dernières années; sous stress et travail sans forcément le temps de repos qu'il voulait, jeno avait enfin réussi à trouver une nouvelle routine sans ressentir la pression des examens comme l'épée de damoclès au-dessus de lui. dans cette ville où il a grandi, il sentait en lui un sentiment agréable grandir, il sentirait presque des papillons, si son estomac ne se nouait à la pensée de certains souvenirs.
il finit son sandwich, bu quelques gorgées d'eau et admira un instant la vue.
parfois, ça lui arrivait de penser à son ami d'enfance, à ses amis qu'il avait perdu de ses contacts. il se sentait si seul, ces dernières années. il prit une grande inspiration, avant de soupirer. jeno était dans une ville, dans un endroit considéré à la limite du désert médical, il voulait venir et y rester, aider les gens avec qui il a pu grandir et savourer toute cette nostalgie qu'il ressentait chaque moment de la journée à admirer sa ville.
mais face à cette nostalgie, jeno ne ressentait que solitude et se sentait perdu, il se sentait presque comme une coquille vide; il faisait ce qu'il voulait, il avait sa routine qui le rassurait, il rentrait chez lui le soir, lisait, écrivait puis il pensait à jaemin.
jaemin.
il cligna plusieurs fois des yeux, surpris par sa propre pensée, avant de baisser le regard, gêné par lui-même. il n'avait pas pensé à lui depuis longtemps, où plutôt il n'avait pas laissé son prénom hanter ses pensées depuis longtemps.
jeno sortit alors son téléphone, prit une grande inspiration et chercha parmi ses contacts quelque chose, il ne savait pas vraiment quoi, pour se rapprocher de jaemin.
mais encore une fois, il n'avait rien. jaemin et lui n'avait plus partagé de nouvelles, il n'avait pas plus son numéro, ni ses réseaux sociaux.
alors jeno se sentit stupide soudainement, ses mains se mirent à trembler et sa respiration devenaient irrégulières. il regarda rapidement autour de lui avant de sourire timidement, embarrassé et surpris par ses propres émotions.
il sentit un mal de tête lui prendre toute ses pensées qui arrivaient en lui d'un coup, devenant beaucoup trop insupportables pour jeno. soudainement, il senti sa vision se détériorer, devenir flou et peut-être que tous ces doutes, ces reproches que sa tête lui envoyait avait créé ce moment de panique, et jaemin, ce petit pincement qui prenait d'abord son estomac, puis son cœur. il tenta de rythmer sa respiration à partir des coups d'aiguille de sa montre. il se sentait si vide, et pourtant, ses pensées, son corps entiers étaient remplies d'émotions, d'une vulnérabilité qu'il n'arrivait plus à contrôler.
il s'était levé, après avoir toussé un peu, et ravalé ses larmes.
il sourit face à la vue du lac et de la chaleur de la journée puis reprit sa balade, en direction de son cabinet.
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