Matt se réveilla pour cracher de l'eau nauséabonde, il s'était assoupi dans une flaque remplie de boue. Le jour était levé. Un ciel bleu dénué de tout nuage surplombait la colline. De courtes rafales rafraîchissaient son torse aux vêtements humides.

Il se leva pour se débarbouiller le visage, puis fit demi-tour pour regarder l'étendue verte de ronces, branches épaisses, buissons épais, marécage gluant qui l'avaient forcé à faire demi-tour. Même en plein jour il ne parvenait pas à débusquer le moindre passage.

La nature redevenue sauvage l'empêchait de fuir. Il tenterait par la ville de Préchac.

Il scruta le paysage sans trouver la moindre visibilité au-delà de la forêt. Comment pouvait-on vivre cette situation au XXIe siècle ? On n'était pas dans un film d'horreur, c'était réel... et pourtant ?

Le château de Cazeneuve lui faisait penser au film Doomsday de 2008, ou afin d'endiguer un terrible virus tuant quatre-vingt-dix pour cent des habitants de l'Écosse, le gouvernement britannique avait construit un mur infranchissable autour du territoire. Au cours du film, les personnages se retrouvaient dans une bâtisse moyenâgeuse dont le château de Blackness avait servi de modèle !

Le château girondin privé se débrouillait sans aucune aide de l'état. Matt l'avait contourné sans découvrir aucune autre entrée que l'immense porte en métal. Personne n'en était jamais sorti, preuve qu'il n'était pas habité en ce moment. Il avait décelé un vieux blason moyenâgeux avec trois lettres à certains endroits de la palissage. Il n'était pas parvenu à les comprendre, les lire.

Il avait fini par s'en désintéresser, le haut mur infranchissable interdisait tout accès. Il prit la direction de la ville.

Matt traversa anxieux la route principale, il était à découvert ! Les voitures stationnaient dans les parkings, aucune n'avait été abandonnée sur la double voie. La plupart des maisons avaient leur porte fermée, seules celles des magasins n'étaient pas verrouillées. Pourquoi ? Préchac était une petite ville de campagne. Il avait déjà visité la pharmacie, la supérette. Il avait volontairement évité le vendeur de chaussures, le bar-tabac, l'électroménager, car rien d'électrique ne fonctionnait !

Une impulsion électromagnétique ?

Un IEM était une émission d'ondes électromagnétiques de très forte amplitude pouvant détruire tous les appareils électroniques reliés au courant et non protégés, tout en brouillant toutes communications. Matt frémit d'inquiétude, car l'impulsion pouvait être générée artificiellement par une explosion nucléaire. Cela pourrait expliquer les combinaisons de protection des autres.

Il avait visionné un documentaire traitant de la radioactivité trois ans plus tôt.

Les vêtements de protection chimique étaient conçus pour un usage unique, il minimisait une contamination croisée par des particules radioactives. Une plus grande couverture de protection du corps était préférable, comme une combinaison à cagoule en supplément ! Elle n'offrait cependant aucune protection contre les particules et les liquides radioactifs.

L'inquiétude de son prisonnier lui revint en mémoire, S'il vous plaît, je dois immédiatement regagner mon CUB pour procéder au nettoyage et à une désinfection totale ! Il devait trouver un semi-remorque ou un hangar transportable comprenant tout l'appareillage de désinfection !

Il longea la route principale pour stopper au large rond-point qu'il n'avait jamais osé franchir. Il enjamba le trottoir inquiet en observant les quatre coins. Il se pressa de traverser la double voie pour regagner l'autre côté. Il longea ensuite le coiffeur, le vendeur de journaux pour découvrir une large place occupée par l'objet de sa recherche. Une remorque de trois mètres de haut sur quatre de large et dix mètres de long occupait le centre. Le système d'aération semblait fonctionner, tout comme le voyant d'étanchéité.

Cela semblait si irréel de voir fonctionner des dispositifs électriques.

Une affiche publicitaire était collée sous une des vitres, CUB, Laboratoire Shaffer-Shaft – France, nous améliorons l'avenir ! Il fit le tour de la remorque émettant un ronronnement, des bruits de souffleries. Il monta les quelques marches pour se retrouver devant une porte coulissante sans serrure, l'ouverture réclamait un code à quatre chiffres sur un boîtier.

Il tapa vainement sur la paroi pour rapidement s'en lasser.

Matt quitta la place pour regagner la route.

Il suivit la route tournant à quarante-cinq degrés sur sa gauche pour se heurter à un immense grillage de quatre mètres de haut avec barbelés. Une porte en grilles de six mètres de large était le seul accès pour entrer ou sortir.

Matt récupéra une barre de métal au sol pour frapper le grillage, la douloureuse vibration lui arracha son arme des doigts. Il n'aurait aucune chance de l'endommager à main nue.

Il suivit le grillage pendant deux kilomètres avant d'abandonner.

Qui mettrait autant de moyens, de sécurité pour rendre inaccessible une zone aussi étendue ?