Chapitre 6: Votre Obscurité
La lune était pleine, éclatante, éclairant une vaste clairière au milieu d'une forêt dense et silencieuse. Lupa se tenait là, pieds nus sur l'herbe humide, son souffle créant de fines volutes dans l'air frais. Elle n'avait aucune idée de comment elle était arrivée ici, mais cela semblait étrangement familier, comme un souvenir lointain et flou.
Une silhouette apparut au loin, émergeant doucement des ténèbres. Perséphone. Sa robe était blanche, scintillante comme un tissu tissé à partir de rayons de lune. Ses cheveux d'or semblaient danser autour d'elle, et ses yeux brillaient d'une lumière douce mais pénétrante.
- Perce... murmura Lupa, son cœur s'emballant.
La vampire ne répondit pas. Elle avança lentement, ses pieds ne semblant pas toucher le sol. Chaque pas faisait trembler le sol légèrement, comme si la terre elle-même la redoutait.
- Pourquoi es-tu là ? Je pensais... je pensais que tu ne m'aimais...
Lupa ne pouvait pas terminer sa phrase. Ses mots semblaient se perdre dans l'air, comme si le rêve lui-même refusait de les entendre. Perséphone sourit, un sourire triste et énigmatique. Elle tendit la main vers la brune, ses doigts pâles et délicats, mais ses lèvres bougèrent sans qu'aucun son ne sorte.
- Parle-moi ! s'écria Lupa, avançant d'un pas hésitant. Bordel !
Mais à mesure qu'elle s'approchait, Perséphone semblait s'éloigner, comme une image réfléchie dans l'eau. La forêt derrière elle s'assombrissait, les arbres devenant des ombres menaçantes.
- Lupa...
La voix de Perséphone était douce, presque un murmure, mais elle résonnait dans la tête de Lupa comme un cri, comme une menace sourde qui vrillait ses oreilles sensibles. Elle sentit une douleur poignante dans sa poitrine, et agrippa sa chemise de nuit, sur son coeur.
- Non... je... je n'avais pas voulu que ça se passe comme ça ! répondit-elle, sa voix brisée par une culpabilité qu'elle ne voulait pas nommer.
La lumière de la lune s'estompa soudainement, et la silhouette de Perséphone se transforma. Ses yeux devinrent rouges, éclatants comme deux braises, et un sourire cruel déforma son visage. Ses dents de vampire grandirent, s'allongèrent, devenant les crocs aiguisés d'un loup aux yeux jaunâtres. Énorme, couvert d'une fourrure brune, il se tenait devant Lupa, qui vit son reflet dans ses propres yeux... C'était elle, lors du soir où elle avait attaqué Perséphone.
Lupa recula, mais ses pieds semblaient enracinés au sol. La silhouette avançait, sa robe blanche disparaissant sur son corps velu, se teintant de rouge, goutte après goutte, comme si elle saignait.
- Je ne voulais pas te blesser, je voulais te protéger... murmura Lupa, mais ses mots semblaient inutiles. Me protéger...
Perséphone tendit la main, cette fois avec une rapidité surnaturelle, agrippant Lupa par la gorge. Lupa se débattit, mais la prise était implacable. La forêt disparut, remplacée par un abîme noir. Lupa sentit son souffle lui manquer, et l'image de Perséphone se dissipa en cendres, emportée par un vent violent.
- PERSÉPHONE !
Elle hurla, un cri silencieux et désespéré, avant de se réveiller en sursaut. Sa poitrine se soulevait rapidement, son souffle court, et des gouttes de sueur coulaient le long de ses tempes. La lumière pâle du matin filtrait à travers les rideaux de sa chambre. Elle porta une main tremblante à son visage, tentant de calmer son cœur affolé.
Je préférais les rêves érotiques, se dit-elle en déglutissant difficilement, se levant presque avec horreur de son lit. Elle était seule dans sa chambre. Titubante, elle se traina jusqu'à sa fenêtre, posant ses avant-bras musclés sur le rebord, et regarda la ville en dessous d'elle. Juste en face, la devanture du bar, avec son insigne en forme de museau de loup.
Elle ne vit même pas la silhouette blonde encapuchonnée qui franchit la porte, faisant résonner une petite cloche.
S'étirant, Lupa enleva le marcel qu'elle avait enfilé pour la nuit, enfila un pantalon parachute et une chemise, ainsi qu'une cravate. Puis, elle se brossa les dents, les cheveux, et fila au dehors pour acheter des croissants à Elektra, afin de se faire pardonner.
=^.o.^=
- Bonjour, dit la barman, qui installait les chaises, regardant Perséphone arriver en branle d'un air un peu intrigué.
- Bonjour, s'exprima la vampire clairement, son regard bleu glacier posé sur elle. Je reviens sur ma décision. Hors de question que je travaille pour un bar en tant que serveuse. Cela ne convient pas à mon rang, et je rembourserais mes dettes.
Elektra la regarda, croisa les bras, avant de passer son regard désormais lourd d'électricité sur tout le corps de Perséphone, passant de ses yeux à ses pieds dans ses grands escarpins.
- Je ne croyais pas vous avoir laissé le choix.
- Alors je vous le dit. C'est non.
- Très bien, alors. Barrez vous, dans votre joli manteau et vos jolis souliers. Mais ne remettez pas un seul pied ici, sinon vous aurez affaire à ma Patronne. Et je peux vous assurer qu'elle n'est pas très commode.
La barman gronda, montrant la chaise d'un index à l'ongle court, laissée dans un coin, seul souvenir de la veille. Les débris de bois, lancés par Lupa avec force contre un mur, avaient attaqué le plâtre, et complètement détruit la chaise.
Perséphone ne fléchit pas, le coeur battant. À vrai-dire, elle s'était attendu à beaucoup plus de réactions de la part de la serveuse... Ce ne fut pas le cas. Rassurée, ou presque déçue de ne pas avoir eu à se battre.
- Visiblement, une femme qui accepte un refus me surprend.
Perséphone fronça les sourcils, se demandant si quelque chose n'allait pas dans sa propre façon de voir les gens qui l'entouraient, alors qu'elle sortait de l'échoppe. "Au bar de la Lune". Elle frissonna en regardant l'enseigne, et passa instinctivement un doigt sur ses lèvres serrées.
Perséphone marchait d'un pas vif, le cliquetis de ses escarpins sur le pavé résonnant dans l'air froid du matin. Elle s'arrêta brusquement en apercevant une silhouette familière près d'un banc devant le bar. Lupa, adossée à un lampadaire, tenait un téléphone contre son oreille, son visage marqué par une expression d'agacement.
- Non, écoutez, je ne peux pas attendre une semaine de plus. Vous deviez venir hier. Oui, HIER. La cour ressemble à un champ de bataille !
Lupa passa une main nerveuse dans ses cheveux courts, son regard sombre fixé sur un point invisible. Ses yeux d'or faisaient ressortir ses boucles d'oreilles nombreuses, ses cheveux bruns ondulés, sa belle mâchoire coupante.
- Non, je ne vais pas payer un supplément pour votre retard. Si vous ne pouvez pas venir, je trouverai quelqu'un de plus compétent. Je voulais un jardin, pas une friche, merde.
Perséphone se figea, le cœur serré par une vague d'émotions contradictoires. Elle serra son manteau autour d'elle, tentant de retrouver son souffle. Lupa n'avait pas remarqué sa présence, trop absorbée par la conversation houleuse avec le jardinier.
- Écoutez, vous avez intérêt à me rembourser au plus vite, lança Lupa avant de raccrocher sèchement.
Perséphone détourna rapidement le regard, comme si elle craignait que Lupa ne sente sa présence. Elle baissa les yeux, ses doigts jouant nerveusement avec le bord de ses manches. Puis, après un instant d'hésitation, elle releva le menton, se dirigeant de nouveau vers la porte du bar.
Elle poussa la porte d'un geste décidé, les clochettes au-dessus de l'entrée tintant doucement pour annoncer son retour. Elektra, qui ajustait quelques verres derrière le comptoir, tourna la tête, un sourcil levé en la voyant revenir.
- Vous avez oublié quelque chose ? lança-t-elle, son ton légèrement moqueur.
Perséphone fit un pas en avant, posant une main élégante sur le dos d'une chaise. Elle inspira profondément, rassemblant tout son aplomb.
- J'ai changé d'avis, déclara-t-elle d'une voix forte mais contrôlée.
Elektra posa un verre avec un bruit sec, s'appuyant contre le comptoir pour la fixer avec intensité. Ses cheveux blonds coupés en carré court, son visage en coeur, rien en elle ne semblait pareil à la vampire. Pourtant dans ce charisme tranquille, elle surpassait largement son interlocutrice.
- Oh ? fit-elle simplement, un sourire amusé étirant ses lèvres.
- Je travaillerai ici, ajouta Perséphone. Pour rembourser ma dette.
Elektra ne répondit pas immédiatement. Elle s'avança lentement, croisant les bras tout en observant la vampire d'un regard perçant, ses hanches ondulant au rythme de ses pas.
- Intéressant, murmura-t-elle. Et qu'est-ce qui vous a fait changer d'avis, Votre Obscurité ?
Perséphone releva le menton, défiant le regard de la barman.
- Mon rang ne signifie rien si je ne suis pas capable d'assumer mes responsabilités, répondit-elle d'une voix posée mais tranchante.
Elektra esquissa un sourire, hochant légèrement la tête.
- Très bien. Et bien... Vous savez jardiner ?
- Plutôt, oui, dit modestement la vampire, fronçant légèrement les sourcils.
- Parfait. On voudrait nettoyer la cour pour en faire un petit jardin agréable à ouvrir, le midi, pour installer notre restaurant. Si vous avez l'audace -ce dont je doute vu votre... "rang"- de déblayer la cour...
- Je le ferais, dit Perséphone, vexée, ignorant les battements rapides de son cœur.
Elle jeta un dernier coup d'œil vers la porte, comme pour vérifier que Lupa n'avait pas vu son entrée, avant de suivre Elektra derrière le comptoir.
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