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Chapitre 17


Alyssa

Je crois qu'Evannah Williams est ma meilleure amie. On s'entend tellement bien, mieux que moi et ma sœur même, que ça me semble être une évidence. On doit se connaître depuis quoi ? Un an ou deux peut-être, mais jamais nous n'avons été aussi proches que maintenant.

Au début, je traînais plus avec certaines de ses amies, passant nos pauses et nos temps d'études en commun avec elles ; et puis, petit à petit, j'ai prêté plus attention à Evannah. Je la trouvais drôle, discrète, vive et pleine d'esprit... Elle avait toujours le mot pour rire, toujours un mot ou une attention gentil pour les autres. Je l'ai trouvée... formidable ; alors, j'ai commencé à plus lui parler, je lui posais des questions sur sa famille, ses loisirs, ses rêves. Et j'ai été agréablement surprise de découvrir que mon intérêt était partagé : à chacune de mes questions, Evannah m'en posait deux supplémentaires.

Nous sommes devenues très proches en peu de temps après cela, faisant un bout de chemin à pied ensemble à la sortie des cours au bout de deux semaines « d'investigation renforcée ». Et me voilà aujourd'hui, chez elle, dans sa chambre, prête à passer un excellent après-midi en sa seule compagnie. Elle et moi désirions nous voir davantage, et en dehors des rares occasions de rencontre à l'école, étant donné que nous ne sommes pas dans la même classe. Nous nous sommes donc mises d'accord pour nous voir ce week-end, chez elle, sans qu'il y ait son frère et ses parents dans les parages.

Je me suis sentie un peu gauche avant d'arriver chez elle, me demandant si notre entente allait se poursuivre ou bien se ternir suite à cette journée. J'étais un peu nerveuse, je suppose, de la décevoir et qu'elle me déçoive. Je n'aurais pas pu plus me tromper : non seulement je m'éclate avec Evannah depuis mon arrivée, mais je me sens encore plus proche d'elle. Nous avons passé notre temps à nous prendre en photo, puis à les poster sur nos pages Facebook, avant de lire les commentaires de notre groupe de copines dessus. Ensuite, on a pris la direction de sa salle de bain pour nous maquiller l'une l'autre en échangeant quelques secrets. C'est comme ça que j'apprends qu'elle n'a jamais eu d'animal de compagnie, et qu'elle déteste le chocolat ; de mon côté je lui confie ne pas connaître mes grands-parents, et ne pas être sûre d'aimer ma sœur.

« C'est rien, me dit Evannah en me tapotant le bras avec un sourire tendre. Je serai ta sœur désormais, et on s'aimera toute la vie, conclut-elle en brossant mes cheveux. J'ai toujours voulu une sœur. »

Je lui souris à travers le miroir, reconnaissante en entendant ses paroles. Elle me le rend puis se reconcentre sur mes cheveux. Cela fait quinze bonnes minutes que je suis assise devant sa coiffeuse et qu'Evannah s'est mis en tête de les lisser. Je lui ai confié ne l'avoir jamais essayé, ce qui l'a poussé à sortir son fer à vitesse grand V avant de me faire asseoir sur son siège molletonné. Je l'observe faire, admirative devant sa dextérité et sa douceur lorsqu'elle manipule mes mèches. Elle est très habile de ses doigts, alternant gestes amples avec gestes précis et vifs pour parfaire mon lissage. Je rigole lorsqu'elle va jusqu'à faire rebiquer les pointes vers l'extérieur.

« Tu te donnes beaucoup de mal, dis donc ! lui fais-je quand elle lève ses yeux interloqués dans le miroir. »

Evannah se met à rire elle aussi, et secoue la tête face à son initiative.

- Tu seras belle jusqu'au bout des pointes comme ça, me lance-t-elle avant d'être reprise d'un accès d'hilarité.

- C'est la blague la plus pitoyable que j'ai entendu, dis-je entre deux hoquets de rire. »

Nous nous esclaffons de bon cœur en nous regardant dans le miroir. Une fois un peu calmée, Evannah reprend son travail tandis que je l'interroge sur ses profs préférés au collège. La fin de la journée approche, laissant les rayons éclatants du soleil derrière elle, signe qu'il est temps pour moi de rentrer. Je soupire en me tournant vers mon amie.

 « Il faut que j'y aille, mes parents m'attendent. »

Evannah acquiesce, clairement déçue elle aussi de voir notre moment s'achever si vite. Le temps est passé à une vitesse impressionnante aujourd'hui ! Je récupère ma veste et mon sac dans l'entrée, et nous nous quittons en nous faisant un grand câlin.

« J'ai adoré notre après-midi, m'avoue-t-elle, un grand sourire aux lèvres, on doit remettre ça.

- Complètement d'accord ! Le week-end prochain ? lui demandé-je en lui retournant son sourire.

- D'accord, répond-elle joyeusement. »

Je la salue puis tourne les talons, sans me départir de mon air jovial. Je rentre d'un bon pas jusqu'à chez moi, anticipant par avance le plaisir que va me procurer le week-end prochain. C'est ce jour-là très précisément que je comprends qu'Evannah Williams est ma meilleure amie.


Je me réveille dans un sursaut à la fin de mon rêve. Je viens de rêver du premier moment de complicité entre Evannah et moi, lorsque l'on avait treize ans. Je n'avais pas rêvé d'elle depuis très longtemps... Quand j'étais plus jeune, mes songes étaient peuplés par mon ancienne meilleure amie ; certains évoquaient de réels souvenirs, comme celui de cette nuit, d'autres n'étaient vraiment que des chimères, des inventions de mon esprit torturé. Parfois, une fois éveillée, je ne me rappelais pas immédiatement de ces rêves, ils finissaient par me revenir une fois sous la douche, ou en train de boire mon café matinal. Mais, dès que je m'en souvenais, la même douleur viscérale me tordait les entrailles et m'enserrait la poitrine. Les larmes me montaient aux yeux, tant cette sensation était insupportable, et roulaient silencieusement sur mes joues pendant plusieurs minutes. Je ne tentais jamais de combattre cette douleur ; au contraire, je la laissais m'envahir, annihiler tous mes sens, me submerger corps et âme.

Seulement aujourd'hui, les choses sont différentes. Première raison : je ne suis pas seule ce matin. Ian est allongé à mon côté, encore profondément endormi. Je passe ma main dans mes cheveux en fixant son dos se soulever à intervalles réguliers. Deuxième raison : cette douleur viscérale est toujours présente, comme à chaque fois que je repense à Evannah, cependant elle est plus... sourde à présent. Elle me laisse davantage dans un état mélancolique que désespéré... J'ai beaucoup de difficultés à mettre des mots sur ce que je ressens à l'heure actuelle, à dire vrai j'essaie de ne pas y mettre de mots. Plus maintenant.

Après tout, j'ai l'espoir de récupérer ma meilleure amie. Certes, on ne s'est pas parlées depuis près d'un mois, mais j'espère quoi qu'il en soit. J'espère réussir à lui faire changer d'avis. J'espère pouvoir lui raconter la vérité, un jour ou l'autre. J'espère retrouver son amitié qui m'est si précieuse. J'espère aussi récupérer une partie de ma vie d'avant, ainsi qu'une partie de moi-même...

Je me lève doucement pour ne pas réveiller Ian, et je me dirige vers la salle de bain attenante à ma chambre. Je ferme la porte, retire mon pyjama et me glisse directement sous la douche, appréciant la chaleur réconfortante du jet d'eau. En sortant de la cabine, je jette un coup d'œil à l'horloge murale : 12h45. Je me mords la lèvre, prise de panique à l'idée d'être en retard à mon rendez-vous. Je suis attendue pour quatorze heures, il est hors de question que je sois en retard. Je passe rapidement mes vêtements du jour – un jean slim bleu ciel et un top noir évasé au niveau du ventre –, me maquille légèrement et coiffe mes cheveux en tresse. Une fois prête, je retourne dans ma chambre et me penche sur le lit. Ian s'est tourné dans son sommeil, cette fois ce sont son torse et son visage qui me font face. Je ne résiste pas à la tentation de passer mes lèvres du bas de sa clavicule jusqu'à sa tempe, deux fois de suite. Ian se réveille en douceur, ses yeux papillonnent avant de se fixer sur mon visage. Un sourire ensommeillé s'esquisse sur sa bouche lorsqu'il s'étire.

- Bonjour, me salue-t-il d'une voix rauque.

- Bonjour, fais-je à mon tour en me penchant sur sa bouche.

Je l'embrasse rapidement puis me redresse avant qu'il ne puisse me placer à califourchon sur son érection matinale. Je fais la moue.

- Je n'ai pas le temps, lui expliqué-je en voyant son air troublé. J'ai un rendez-vous dans une heure à peine.

- Tu me mets dehors ? demande-t-il en haussant un sourcil.

- Oui ! reprends-je d'un air angélique et pas du tout coupable.

Ian grogne en se jetant à nouveau dans les draps. Je lui donne une tape sur l'épaule en le prévenant qu'il faut qu'il décolle dans moins de vingt minutes.

- Quelle délicatesse, bougonne-t-il en se levant.

Je lève les yeux au ciel. Je rassemble mes affaires en attendant qu'il s'habille. Ian se passe une main dans ses cheveux bouclés à l'arrière du crâne, son air boudeur toujours figé sur son faciès. Je secoue la tête et cède devant cette allure de chien battu. Je passe mes bras autour de son cou et l'embrasse avec avidité. Ian grogne de satisfaction en enroulant sa langue sur la mienne. Je romps notre baiser, un peu essoufflée, et souris face à l'air coquin de Ian. Je plaque une nouvelle fois mes lèvres sur les siennes, puis je m'écarte de lui.

- Ce sera tout pour l'instant, le prévins-je en lui faisant un clin d'œil.

Il fait la moue, tel un enfant contrarié de ne pas pouvoir profiter plus longtemps de son jouet préféré. Oui, je sais, je viens de me comparer à un jouet. La grande classe.

Je me détourne de Ian pour reprendre ma veste placée sur le dossier d'une chaise. J'attrape mon parfum et m'en vaporise sur les poignets. Je suis prête. Ian se racle la gorge ce qui attire à nouveau mon attention sur lui. Son regard est pensif alors qu'il me jauge de la tête aux pieds. Je hausse un sourcil interloqué à son adresse.

- Pourquoi cet empressement ? me questionne-t-il.

- J'ai un rendez-vous très important, dis-je avec un sourire rêveur.

- Avec un autre mec ? lâche Ian.

J'ouvre la bouche, choquée. Je n'avais pas imaginé qu'il envisagerait cette éventualité. Je place une main devant ma bouche lorsqu'un rire étouffé monte de ma gorge.

- Non, bien sûr que non, Ian, dis-je une fois un peu calmée. Non, ça n'est pas un mec, je peux te le garantir.

- Ah, fait-il d'un air détaché, mais je vois dans ses yeux qu'il est soulagé.

- Serais-tu jaloux ? lui demandé-je, taquine.

- Pff, jaloux..., maugrée-t-il en haussant les épaules et en détournant les yeux.

- Siiiii, tu es jaloux, insisté-je en souriant.

- Disons qu'on n'a jamais dit qu'on était exclusif, alors je me posais la question, répond Ian en rencontrant à nouveau mon regard.

Je souris devant sa piètre tentative à obtenir des informations en se la jouant cool et détaché. Je décide toutefois d'être honnête avec lui.

- Eh bien... je me sens plutôt d'humeur exclusive pour l'instant, reprends-je en lui caressant le bras. Je n'ai pas envie d'aller voir ailleurs.

Ian me sourit doucement, satisfait de ma réponse. Il m'attire à lui et m'embrasse lentement, faisant durer le plaisir au maximum. Je m'abandonne un instant dans ses bras, reprise de désir pour cet homme. Lorsqu'il me libère, Ian me fixe un instant.

- Moi non plus, je n'ai pas envie d'aller voir ailleurs, murmure-t-il.

- Parfait. J'embrasse sa lèvre inférieure. Mais il faut vraiment que j'y aille, lui rappelé-je en m'éloignant d'un pas de son corps si tentant.

- D'accord.

Ian passe sa veste en cuir avant de m'ouvrir la porte d'entrée. Je le précède dans le couloir et appelle l'ascenseur pour nous deux. Devant l'immeuble, Ian m'embrasse une dernière fois avant que je ne monte dans mon véhicule. Je souris encore jusqu'aux oreilles lorsque je mets le contact. J'apprécie beaucoup qu'un homme me mange dans la main... Surtout quand il s'agit d'un homme aussi canon que Ian.

Allez, ma fille, concentre-toi un peu.

Je stoppe là mes rêvasseries sur Ian et me concentre sur la personne que je dois voir cet après-midi.

Parce qu'aujourd'hui est un des rares après-midis où j'ai la possibilité de garder Kathleen seule. Après avoir été jouer dans le parc en face de l'appartement de Caroline et Steven, nous sommes rentrées à l'intérieur, main dans la main, afin de prendre un goûter devant un dessin-animé. Dès qu'elle franchit le seuil de la porte, ma fille se précipite sur le canapé, puis se débarrasse de ses chaussures et de sa veste, les faisant valdinguer dans tous les sens. Je lève les yeux au ciel et vais les ramasser pour les ranger convenablement dans la penderie de l'entrée.

Je me dirige ensuite vers la vaste cuisine de la maison, parfaitement bien équipée et agencée. Je prépare rapidement le biberon de Kathleen, puis je retourne auprès d'elle et m'assieds dans le large canapé. Ma fille s'empare de son biberon pendant que je lance le DVD, et l'enfourne dans sa bouche, une main enfoncée dans ses beaux cheveux bruns. Elle fixe intensément l'écran devant elle, mais moi, c'est elle que je fixe. Elle est tellement belle... A à peine trois ans, Kathleen est une petite fille vive, souriante, curieuse et joyeuse, riant aux éclats à la vue de pitreries des enfants dans le parc ou bien celles de ses propres parents. Elle est pleine de vie et d'énergie, c'est la meilleure bouffée d'oxygène qui soit.

Ses yeux dévient de la télévision et se posent sur moi. Puis, ma fille retire la tétine de son biberon de sa bouche gourmande et un sourire taquin se dessine sur ses lèvres. Mon cœur a un raté. C'est mon sourire taquin. Soudain, elle se jette sur mes genoux en riant. Je ris à mon tour, surprise par son action, puis je commence à la faire sauter sur mes genoux. Kathleen rigole de plus belle, appréciant visiblement ce nouveau jeu.

- Encore ! fait-elle de sa petite voix, les yeux pétillants.

Je fonds littéralement devant son adorable minois, alors je m'exécute à nouveau, déclenchant encore et encore son hilarité contagieuse. Après quelques minutes de jeu, Kathleen descend de mes genoux et court comme une folle jusqu'à sa chambre à l'autre bout du couloir, en s'esclaffant toujours. Je me renfonce dans le canapé, un doux sourire aux lèvres.

Je l'aime.

J'entends son rire se répercuter sur les murs de l'appartement, tandis que je replonge dans le souvenir du jour où j'ai appris que j'attendais cette sublime petite fille, alors enceinte de six mois.


En m'installant au piano, je tourne mon visage vers la fenêtre. La pluie tombe en rafale, frappe les carreaux à intervalles réguliers. Je caresse distraitement mon ventre, bien arrondi désormais, puis me concentre sur le clavier sous mes doigts libres. Depuis que j'ai appris que j'attendais une fille – il y a de cela à peine trois heures –, une chanson n'a pas cessé de me trotter dans la tête. Alors je laisse la mélodie s'exprimer enfin, et me mets à en chanter les paroles si bouleversantes et sincères.

When the rain is blowing in your face

And the whole world is on your case

I could offer you a warm embrace

To make you feel my love

Je mets tout mon cœur dans cette interprétation, exprimant tout l'amour que j'ai pour ce bébé qui grandit en moi. Les larmes coulent sur mes joues dès le deuxième couplet, mais je tiens bon, c'est trop important pour que je me laisse submerger par ma peine.

Quand j'ai vu l'échographie m'annonçant le sexe de mon enfant, j'étais comme en état de choc. Tout se bousculait dans mon esprit, je ne savais plus quoi ressentir pour ma fille. D'un côté, j'étais transportée de joie face à cette annonce tardive, mais d'un autre côté j'étais emplie de regrets amers puisque j'ai fait le choix de ne pas la garder.

Caroline et Steven sont fous de joie à l'idée d'avoir cet enfant – surtout maintenant que l'on sait que c'est une fille, Caroline en voulait absolument une – et moi... malgré mon amour évident pour ce bébé, je ne peux pas lui offrir une vie convenable. Il y a trois semaines, quand j'ai appris ma grossesse, j'ai laissé tomber la fac. Je ne voulais pas que mes ami( e)s apprennent ma grossesse, ni qui que ce soit d'autre à part ma famille. J'ai donc laissé en plan, momentanément, ma première année de Master, prétextant un accident de la route suivie d'une convalescence longue pour mon rétablissement, puis je suis retournée chez mes parents, à soixante kilomètres de ma vie étudiante.

Mes ami ( e)s proches ont voulu, plus d'une fois, me rendre visite à l'hôpital, mais face à ma volonté – et mes prétextes – de ne pas être vue dans un état, je cite, « abominable, façon momie égyptienne », ils ont cédé sans toutefois interrompre leurs nombreux appels téléphoniques. Je ne peux pas leur dire la vérité, ils ne comprendraient pas ma démarche, mon choix. Après tout, ça n'est pas si commun que ça de faire adopter son enfant par sa propre sœur.

Cela fait donc trois semaines que je réside à nouveau chez mes parents, assistant aux changements fulgurants de mon corps. J'avais passé plusieurs mois sans connaître ma situation, et du jour au lendemain, après une banale prise de sang faite au centre médical du campus, mon ventre s'est arrondi, mon poids a un peu augmenté, et mes hormones ont commencé à me jouer des tours. J'avais connaissance de ce qu'était un déni de grossesse auparavant, mais jamais je n'avais imaginé que cela aurait pu m'arriver. J'avais encore moins imaginé que je tomberai enceinte sans le vouloir et en prenant la pilule, mais, vous savez ce que l'on dit, il n'existe aucun risque zéro en terme de protection.

Mais peut-être qu'avec une capote, tu aurais été plus proche de ce risque nul.

Je grimace à cette pensée. Oui, c'était une erreur. Une grossière erreur... Je chasse ces souvenirs de mon esprit, et me recentre sur l'instant présent. Mes doigts poursuivent leur course sur les touches en ivoire, je reprends mon souffle pour le dernier couplet.

I could make you happy

Make your dreams come true

Nothing that I wouldn't do

Go to the ends of the Earth for you

To make you feel my love

To make you feel my love

La dernière note retentit dans le silence absolu de la pièce. Je baisse la tête sur mon ventre, caresse tendrement mon renflement. Soudain, le bébé me donne un petit coup de pied là où est posée ma main. Mes larmes redoublent d'intensité, j'étouffe un sanglot.

 « Je t'aime, murmuré-je. Pardonne-moi. »

Je pousse un profond soupir, remettant encore une fois en cause ma décision. La plupart du temps, je suis sûre de mon choix, souhaitant le meilleur pour ma fille, même si cela implique qu'elle ne l'obtienne pas avec moi ; mais il y a des jours... il y a des jours sans, comme aujourd'hui, où, quand je la sens grandir en moi, je ne rêve que d'une chose : la garder et partir loin, très loin avec elle... Je ne peux m'empêcher de soupirer à nouveau.

 « Alyssa ? »

Ma mère m'appelle depuis la cuisine. Je sèche vivement mes larmes puis me lève du siège bas. Je rejoins ensuite ma mère, laissant derrière moi le piano et ma douleur...


Le bruit de petits pas sur le plancher me ramène à l'instant présent. Ma fille revient en courant dans le salon, encore surexcitée, le visage rougi par l'effort. Mon absence n'a donc duré que quelques minutes, suffisamment pour me laisser happer entièrement dans mes souvenirs et les revivre avec la même intensité qu'à l'époque, mais pas assez pour que ma fille puisse le remarquer.

Sois plus vigilante avec elle dans les parages, tu pourrais finir par l'inquiéter.

Ma fille saute sur le canapé, débordante de joie et de rires, et commence à sautiller dessus. Je la laisse faire quelques secondes, le regard attendri, puis je l'attrape et la fais tournoyer dans les airs. Son rire me transporte de joie et me pousse à poursuivre nos pirouettes jusqu'à ce que mes bras demandent grâce.

Je repose Kathleen par terre et lui embrasse tendrement les cheveux. Je plonge mon regard dans le sien, m'attardant un millième de seconde sur notre ressemblance physique. Parmi nos traits en commun, le plus flagrant restera à tout jamais nos yeux. La forme, la couleur, l'encadrement de longs cils... Tout correspond en tout point. Nous nous ressemblons comme deux gouttes d'eau à bien des égards, mais nos yeux... peut-être qu'un jour ils trahiront notre véritable lien de parenté, je ne sais pas. J'y réfléchirai sans doute le jour venu, à moins que je n'en discute auparavant avec ma sœur... Je grimace rien qu'à l'idée d'avoir une conversation aussi délicate avec Caroline. Elle qui m'en veut déjà tellement, il y a de fortes chances que ce jour-là ma sœur adorée me tue, sans autre forme de procès.

Hé, ta fille te regarde avec des yeux interrogateurs depuis trois secondes au moins.

Je me recentre sur Kathleen et je remarque que son air a effectivement changé. J'attrape ses toutes petites mains dans les deux miennes en lui souriant.

- Je t'aime mon ange, plus que tout et à jamais, lui dis-je très sérieusement.

- Moi aussi, me répond-elle tout aussi sérieusement.

Je la serre dans mes bras un long moment, le temps pour moi de refouler les larmes qui pointent et de reprendre contenance avant de m'écarter. Je l'aime tellement que j'en ai mal physiquement. Devenir mère est la chose la plus intense et la plus difficile qui m'ait été donné de vivre... même si je n'en suis pas une aux yeux de qui que ce soit. Ni ma sœur, ni Steven, ni même mes parents. Ces derniers ont eu du mal au début à respecter mon choix, trouvant quelque peu malsaine ma démarche, puis ils ont fini par agir en conséquence lorsque Kathleen est passée de mes bras à ceux de Caroline. Ce fut un moment difficile pour tout le monde, chacun devant s'adapter à son nouveau rôle et à un nouveau rythme de vie. De mon côté, ce fut officiellement le jour où mon cœur se brisa, laissant une plaie béante dans ma cage thoracique.

Quand j'ai perdu Kathleen, j'ai eu l'impression très nette de souffrir mille morts ; quand j'étais avec Shane, j'avais la sensation d'être une coquille vide, sans âme ni cœur ; mais laisser ma fille... c'est la pire douleur que j'ai jamais eu à affronter, et je sais, au plus profond de moi-même, qu'elle m'accompagnera jusqu'à mon dernier souffle. Cette souffrance... elle est pire que la mort.

Une larme solitaire roule sur ma joue. Je la sèche prestement puis m'écarte de Kathleen. Ses grands yeux bruns me regardent, l'air sérieux et réfléchi. Elle sent que quelque chose ne va pas, mais elle ne dit rien pour l'instant. Je me redresse et lui tends une main qu'elle s'empresse de serrer, puis nous nous dirigeons à nouveau vers le canapé. Ma fille s'empare de son doudou resté par terre, avant de venir se blottir sur mes genoux pendant que je relance son dessin-animé. Je hume ses cheveux, inspirant son odeur de rose et de bébé, puis je profite de cet instant parfait avec l'être que j'aime le plus au monde.

Une heure plus tard, Caroline rentre de son travail, l'air harassé. Je suis seule dans le salon, installée devant une émission de télé, le baby phone à proximité au cas où Kathleen se réveillerait. Je me lève pour accueillir ma sœur et fermer la porte communiquant avec le couloir des chambres.

- Salut, dis-je à Caroline après qu'elle eut jeté sa sacoche sur la table à manger. Dure journée ? ajouté-je devant son mutisme.

- Mmh...

Caroline se détourne de moi, retire sa veste qu'elle dépose sur un dossier de chaise, puis se serre un verre de scotch. Pur.

- Il n'est pas un peu tôt pour ça ? lui fais-je en désignant son verre. Il n'est que dix-sept heures de l'après-midi.

- Et tu es qui, ma mère ? m'attaque-t-elle en sifflant rapidement son alcool. Je n'ai pas de compte à te rendre que je sache.

- Ça va, répliqué-je en levant les mains, je m'inquiète juste pour toi.

Caroline baragouine quelque chose qui m'est inintelligible avant de se resservir. Je décide de ne pas me préoccuper plus avant de son comportement plus que tendancieux et exécrable, et passe donc à autre chose.

- Kathleen a passé une bonne journée aujourd'hui, informé-je Caroline en prenant une chaise à la table du salon. On est allé au parc, elle est allée sur le toboggan, a joué avec deux petites filles dans le train en bois, puis nous sommes rentrées pour prendre un petit goûter devant un dessin-animé. Cendrillon, ton dessin-animé préféré lorsqu'on était petites, lui fais-je part en souriant largement à l'évocation de ce souvenir. Tu connaissais toutes les chansons par cœur ! ajouté-je en riant. Et Kathleen est comme toi, elle adore ce film au point de vouloir se faire appeler Cendrillon elle aussi.

Pas de réponse. Caroline me tourne toujours le dos, un nouveau verre en main. Je déglutis puis reprends la rétrospective de mon après-midi.

- Euh, j'ai préféré donner du pain complet à Kathleen pour son goûter, son alimentation manque un peu de fibres en ce moment, donc je lui ai acheté ce pain-ci, dis-je en désignant l'objet en question resté sur la table. Elle a l'air de bien apprécier en plus...

- Tu crois que tu as des leçons à me donner en terme d'éducation ? réplique froidement Caroline en faisant volte-face.

- Pardon ?

- Ne fais ton innocente ! Rien ne semble trouver grâce à tes yeux quand il s'agit de Kathleen et de mon mode de fonctionnement. Aujourd'hui c'est le pain complet, l'an dernier c'étaient les couches, et après ce sera quoi ?

Ma sœur est cassante, limite glaciale dans ses reproches. Je ne comprends pas pourquoi elle s'emporte comme ça.

- Caroline, il ne s'agit que de pain, reprends-je le plus doucement possible. Si tu n'es pas d'accord, et bien ce n'est pas grave...

- Evidemment que ça n'est pas grave, manquerait plus que ça le soit !

J'écarquille les yeux devant sa verve. Ma sœur est très souvent remontée contre moi, mais là...

- Caro, je suis vraiment désolée si j'ai dit quelque chose qui t'a énervée, ça n'était vraiment pas mon intention, dis-je, contrite.

- Tu crois tout savoir, tout bien faire, mais en réalité tu te trompes complètement, poursuit-elle sans prendre en compte mes excuses. J'en ai marre de te voir t'immiscer dans mon mode d'éducation. Kathleen est ma fille, souviens-t-en !

Je ne réplique pas, trop choquée par la tournure qu'a prise cette discussion incongrue. Ça tombe bien, car Caroline ne semble pas en avoir terminé avec ses reproches.

- J'en ai marre de te voir traîner ici, à passer autant de temps avec elle. C'est malsain, Alyssa, et ça me tape sur le système. C'est ridicule... tu n'as vraiment rien d'autre à faire que de venir m'importuner et me voler ma fille ?

- Mais qu'est-ce que tu racontes ? m'écrié-je en adoptant le même ton hargneux que ma sœur.

- Tu vas la monter contre moi, je le sens ! Tu vas tout faire pour qu'elle se détourne de moi à l'avenir. Et qui c'est qu'elle ira voir au moindre problème, après ça ? Toi. C'est toi, et toi seule à qui elle se confiera, s'emporte Caroline, rouge de colère.

- Tu es complètement malade, ou ivre ! lui répliqué-je en fixant du regard son quatrième verre de scotch. Pose ce verre, Caroline, ton attitude est parfaitement insensée.

- Insensée ? Oh non, mon attitude n'est pas insensée, je n'ai jamais été aussi lucide de ma vie, au contraire.

- Ça suffit ! explosé-je. Kathleen fait partie de ma vie et de ma famille, que ça te plaise ou non, Caroline, articulé-je après un court silence. Je ne vais pas ne plus la voir sous prétexte que tu es prise de doutes et que tu te sens menacée – à tort – par ma présence dans sa vie. Enfin merde quoi, je suis censée être sa tante, c'est normal que je passe autant de temps avec elle !

- Mais toi comme moi savons que, justement, tu n'es pas sa tante, Alyssa, et c'est ça le problème !

- Tais-toi ! Tu vas la réveiller, la préviens-je en zyeutant la porte du couloir.

- Je n'en ai rien à foutre, putain !

Caroline me regarde, ses yeux pleins d'éclairs et de rancœur à mon encontre. Elle m'a toujours détestée, depuis que nous sommes toutes petites, et aujourd'hui sa jalousie et sa haine ont atteint leur paroxysme. Je me lève de mon siège, rendue tremblante par l'adrénaline qui pulse dans mes veines.

- Je ne peux rien faire contre ta peur, Caroline, lui dis-je bien en face. Si tu crois que je cherche à te ravir Kathleen, tu te trompes, je ne veux que l'aimer et trouver une place dans son univers. Et si je dois être sa tante pour y arriver, je le serai. Tant qu'elle voudra de moi dans sa vie, je ne partirai pas. Tu m'entends, Caroline ? Je l'ai aimée avant toi, et je ferai tout ce qui est en mon pouvoir pour la rendre heureuse. Tu ne passes qu'au second plan.

- Comme d'habitude, crache-t-elle.

- Tu as une fille, Caroline, éructé-je, pleine de foudre moi aussi. Elle passe avant tout le reste, putain ! Tu es sa mère, alors comporte-toi telle qu'elle et laisse de côté cette rancœur qui te ronge.

- Je suis une bonne mère, s'offusque-t-elle. Kathleen a tout ce dont elle a besoin.

- Très bien, alors continue comme ça et arrête de me prendre la tête parce que tu as passé une mauvaise journée ou bien parce que tu ne me supportes pas. Il n'est ni question de toi ou de moi là-dedans, mais de Kathleen, la rappelé-je à l'ordre.

- Je te déteste, souffle-t-elle, les yeux brillants.

L'air de mes poumons s'échappe, comme si je m'étais pris un coup dans le ventre. Aïe... Nous voilà donc au point de non-retour. J'inspire par le nez en fermant les yeux.

- Je sais, reprends-je en vrillant mon regard résolu au sien téméraire. Tu me détestes depuis toujours, et moi... je ne sais pas ce que je ressens pour toi, je ne sais plus à force... Tout ce que je sais, tout ce dont je suis sûre en revanche, c'est que ta haine à mon encontre ne m'intimide pas. Je me fiche de ta colère, je me fous de ton amertume, je n'en ai rien à carrer du fait que tu ne puisses pas avoir d'enfant et que me voir en avoir un t'a plongé dans une colère noire, lui asséné-je en haussant le ton. La seule qui m'importe c'est Kathleen ; tant qu'elle voudra de moi, je serai là, tu vas devoir t'y faire.

Caroline me fixe, un peu surprise par mes propos ; l'ambiance est électrique entre nous, je peux presque sentir toute cette énergie négative irradier de nos deux corps. Je serre les poings pour éviter de trembler, et mon cœur bat la chamade dans ma poitrine.

- Sors d'ici, me lance ma sœur sur un ton cassant. Sors d'ici !

Je bombe le torse, tourne les talons afin de me saisir de mes affaires, puis je pivote vers la sortie, à la droite de ma sœur. Je ralentis le pas lorsque je passe devant le couloir, pensant à ma fille qui, je l'espère, est encore profondément endormie. Avant de franchir la porte d'entrée, je me tourne une nouvelle fois vers Caroline. Ses joues sont encore rouges, mais ses yeux ont un peu perdu de leur éclat meurtrier.

- Le fait que je sois sa mère n'est pas le problème en soi, n'est-ce pas Caroline ? Ce qui l'est pour toi, c'est le fait que ça ne soit pas toi sa mère, déclaré-je posément.

- Va-t'en, chuchote-t-elle les larmes aux yeux.

Je me mords la lèvre inférieure ; une part de moi aimerait rester pour la consoler, la prendre dans mes bras et lui dire que les liens du sang ne font pas tout dans la vie. J'aimerais la rassurer en lui disant que Kathleen l'aime vraiment, et que pour elle, c'est bien elle sa maman, pas moi. Une part de moi aimerait sincèrement réconforter ma sœur et faire la paix avec elle.

Mais je sais que Caroline ne l'acceptera jamais ; son ressentiment à mon égard est trop profondément enraciné en elle pour qu'elle puisse me voir autrement que comme une menace à son bonheur. Ma sœur me déteste, et il en sera toujours ainsi, à moins qu'elle décide de se soulager et de se faire aider par un tiers. Mais elle ne le fera pas, sa fierté l'en empêche. Pourtant, je sens qu'elle en souffre : toutes ces années passées à me haïr lui demandent beaucoup d'énergie et de temps. Energie et temps qu'elle pourrait très bien consacrer à autre chose, sauf que Caroline s'y refuse. Je me demande si ce n'est pas aussi ce que ressent Evannah à mon égard. Auquel cas, nous n'avons vraiment aucune chance de nous retrouver...

Je regarde une dernière fois ma sœur avant de me détourner et de claquer la porte de son appartement derrière moi.


**************

Bonsoir ! Pardon pour la longueur du chapitre mais je n'arrivais vraiment pas à le couper :$

J'espère que ce chapitre vous a plu avec un spécial clash entre Alyssa et sa sœur ! Qu'en avez-vous pensé ?

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Bisous

A. H.

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