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19. La famille de coeur

"Fais nous ton rapport Tsao."

Le dénommé Tsao s'installa en face d'un homme en costume, et d'un autre en uniforme militaire. Il croisa les jambes puis se mit à parler.

"Par lequel voulez-vous que je commence ?"

"Peu importe." répondit l'homme au costume.

"Kim Taehyung." exigea le militaire.

Le premier regarda le deuxième qui enchaina ainsi :

"C'est le plus dangereux."

L'homme en costume détourna le regard pour le fixer de nouveau sur Tsao. 

"Kim Taehyung. Il a démarré sa deuxième année à la WCS. Comme l'année dernière, il ne se distingue pas que par son intelligence. Il reste colérique, parfois violent, souvent en dehors du cadre. Il semble concentrer sa fureur contre son ennemi désigné, Deun Jung, ainsi que contre son père. Je ne vous refais pas un topo là dessus, vous connaissez déjà leur relation."

"Dirais-tu qu'il est plus incontrôlable qu'auparavant ?" demanda le militaire avec sérieux.

"Je dirai qu'il est plus désespéré."

"Le désespoir est dangereux." commenta le militaire.

"Le désespoir peut être atténué." répliqua l'homme en costume.

"Et par quoi ?"

"Park Jimin."

"Tsss ! Je n'y crois plus !"

"Tu as tord. Parle nous de Park Jimin."

Tsao hocha la tête avant de poursuivre son discours.

"Park Jimin. Il travaille à temps partiel pour une des seules associations de protection des surchargés qu'il reste. Il est un atout indéniable dont tout le monde ignore tout. Parfois, il va chanter en ville et il semble qu'il fasse ça pour apaiser les passants."

"Ça fonctionne ?" interrogea l'homme en costume.

"On dirait. Mais ça ne dure pas."

"Hm... mais ça fonctionne. Il arrive à agir sur une foule. Il est plus fort qu'avant."

Tsao acquiesça aux conclusions de l'homme en costume. Le militaire ne semblait pas satisfait de cette réponse et intervint de nouveau.

"Et ils se revoient alors ? Tu peux dire que Park agit encore sur Kim ?"

"Non je ne peux pas dire ça. Je n'ai pas encore d'informations concrètes là dessus."

"Parce-qu'il n'y en a pas !" s'agaça le militaire.

Il se releva d'un coup et toisa l'homme près de lui avec défi. Celui-ci le regarda en retour, silencieux et observateur.

"Il n'y en a pas parce-que Kim est incapable d'accepter une solution ! Il est déjà complètement dirigé par ses émotions et bientôt, il sera hors de contrôle !"

L'homme en costume détourna le regard et posa une nouvelle question à Tsao.

"Qu'en est-il de Jeon Jungkook ?"

"De ce que j'ai pu voir, il est imperméable à toutes formes d'émotions. Mais je peine à l'observer. Il passe son temps entre l'école où il m'est difficile d'entrer, et l'appartement de Kim Namjoon."

"Kim Namjoon ? Pourquoi il est encore dans les parages celui-là ? Je croyais qu'on avait réglé le problème !" s'énerva le militaire.

"Kim Namjoon n'est pas un problème. Nous avons besoin de lui." répondit l'homme au costume.

"Il te fuit comme la peste ! Il n'est plus dans notre camps, il doit être mis hors d'état de nuire !"

"Non."

"Tu n-..."

"J'ai dit non !"

Tsao regarda le militaire fulminer silencieusement avant de s'éloigner un peu plus de l'espace où eux étaient encore assis. Il leur tourna le dos pour se mettre face à une fenêtre. L'homme en costume recentra son attention sur Tsao.

"Autre chose sur Jeon Jungkook ?"

"Oui. Avant qu'il ne reparte chez Namjoon, je l'ai vu aller quelques fois chez Taehyung."

"Intéressant... très interessant. La nature de leur relation à ce jour ?"

"Je ne sais pas. Il me faut plus de temps."

"D'accord."

"On devrait le ramener ici et le laisser enfermé dans une cage. Ce garçon est une aberration..." commenta le militaire sans se retourner.

"Une opportunité." voulu corriger l'homme au costume.

Le militaire grommela et se dirigea vers la porte. Là, il se planta à côté et attendit.

"Poursuis ta mission. On te reverra comme d'habitude, ou avant si tu observes quelques chose de particulier."

Tsao hocha la tête, l'homme au costume se leva puis sortit en premier de la petite pièce, suivit par le militaire. Il attendit quelques secondes puis sortit également par une autre porte. Il rejoignit ensuite une voiture qui l'escorta jusqu'en dehors du bâtiment protégé. De là, il marcha un peu avant de monter dans un taxi où il se mit à écrire sur son portable.

Tsao : Comment vas-tu ? Namjoon est-il passé te voir ?

Jin : Pourquoi tu me demandes ça Tsao ?

Tsao : Je sais que tu es toujours en contact avec lui. Malgré mes recommandations. 

Jin : Qu'est-ce-que tu veux réellement ?

Tsao : Que tu sois prudent. Et être en contact avec Kim Namjoon n'assure pas cela. 

Jin : Je suis protégé. Comme toi. Et je sais m'occuper de moi. Arrête d'être comme ça.

Tsao : Je serai toujours comme ça avec toi. 

Jin : Je voulais dire arrête de te faire passer en second. Je vais bien. Pense à toi.

Tsao : Tu es mon petit frère. Je m'occupe de toi depuis toujours et ça ne cessera jamais. Si je vois que tu fais les mauvais choix pour toi, je resterai toujours aux aguets. Prêt à te protéger. Et être avec Kim Namjoon en ce moment, c'est risqué et tu le sais aussi bien que moi.

Jin : Je l'aime. Est-ce-que j'ai besoin d'en dire plus ?

Tsao soupira en secouant la tête. Rien n'était plus important pour lui que de protéger son frère. Son demi-frère. Sa seule famille depuis que tous leurs parents étaient décédés. Le père de Tsao avait rencontré la mère de Jin alors qu'ils étaient tout deux veufs. La vie semblait vouloir s'acharner sur leurs enfants en ne leur laissant aucun ascendant en vie. La famille recomposée éclata lorsqu'ils décédèrent tout les deux dans un accident. Les deux orphelins n'avaient alors que douze et quinze ans. Depuis ce jour, Tsao s'était promis de protéger son frère Jin de toutes autres formes de tristesse. Il avait encaissé beaucoup et s'était sacrifié sans réfléchir pour lui offrir la vie la plus apaisée possible après ce drame. Il avait réussi, quitte à en oublier parfois sa propre existence. Jin ne lui avait jamais demandé de faire ça, mais il n'avait pas non plus pu l'en empêcher. Lorsqu'il avait eu vingt ans, il avait voulu voler de ses propres ailes en espérant rendre à son frère, la liberté qu'il s'était enlevé tout seul. Mais tout avait été plus compliqué que ça.

Tsao : Non. Tu n'en as jamais eu besoin. Je te comprends toujours parfaitement. Même si je ne suis pas d'accord.

Jin : Tu n'as pas à l'être... je t'aime Tsao, mais tu dois vivre pour toi maintenant. Je veux que tu sois heureux.

A cela, Tsao ne répondit pas. Il consulta sa galerie photo pour regarder la photo de lui et Jin enfant qu'il avait conservé. C'était l'année où leurs parents s'étaient mis ensemble. Ils avaient été une famille recomposée et heureuse. Les deux garçons s'entendaient bien et sur la photo, Tsao avait mit son bras autour des épaules de Jin avec fierté. On voyait déjà le sens des responsabilités qu'il avait endossé sans que personne ne lui demande. Il souriait à peine alors que Jin avait un bras levé en l'air et semblait parfaitement heureux.

"Je te protégerai. Toujours. Jusqu'à ma mort."

**

"Tsao..."

Le soupir de Jin était rempli d'inquiétude, et d'amour. Il rangea son téléphone car il venait d'arriver devant le bâtiment protégé où il se rendait pour son travail. Il montra son badge deux fois, signa un registre, plaça ses yeux face à l'identificateur rétinien, et enfin, accéda à l'unité où il passait de nombreuses journées.

Il salua de la tête plusieurs personnes portant comme lui un badge de sécurité. Il entra dans la petit pièce qui lui était réservée et referma la porte. Il griffonna quelque chose sur un papier au mur puis alluma un petit bâtonnet d'encens. Un encens bien spécial, fait uniquement pour lui, et à base de drogue diluée pour ne pas être trop nocif. Jin retira ses lunettes qu'il posa sur la commode près de l'entrée, verrouilla électroniquement la porte, puis alla s'installer sur le large sofa qui occupait presque toute la pièce.

Une fois installé comme il se sentait bien, il ferma les yeux, et huma l'air. Rapidement, ses sens furent provoqués d'une façon unique et qu'il connaissait bien. Sa tête bougea un peu d'un côté puis de l'autre puis il sembla tomber dans un état de semi-conscience où il resta jusqu'à ce que le bâtonnet ait fini de bruler.

Jin rouvrit les yeux en revenant progressivement à son état normal. Il soupira alors longuement avec un air de déception. Il se releva pour s'apprêter à allumer un deuxième bâtonnet, lorsque son portable vibra. Il avait oublié de le mettre en mode avion avant de commencer et il allait donc le faire lorsqu'il vit l'appelant. Il choisit alors de décrocher sans hésiter.

"Namjoon tu vas bien ?"

"Oui. Et toi ? Je te dérange pas ?"

"Je suis au travail..."

"Ah..."

"..."

"..."

"Nam'..."

"T'y es depuis combien de temps ?"

"Pas assez. J'ai rien, il faut que je continue."

"Arrête Jin. Si tu l'as déjà fait alors ça suffit, rentre chez toi."

"Non je vais continuer. N'essaie pas de me dire quoi faire, tu sais que je n'écouterai pas."

"Ça je le sais... têtu comme une mule." souffla Namjoon à l'autre bout du fil.

"Regardez qui parle." rigola légèrement Jin.

"Hm... j'aime pas quand tu fais ça. C'est dangereux."

"C'est nécessaire. Si je rate quelque chose d'important, ça peut tous nous condamner."

"Tu en as déjà fait assez Jin..."

"Comme toi... et pourtant, tu ne t'arrêtes pas. Alors tu sais bien que je ferai pareil. Hm ?"

Le deuxième bâton d'encens que Jin avait allumé s'imprégnait déjà en lui. Il se recula et alla s'allonger sur les cousins à même le sol. 

"Et si on s'en allait... juste toi et moi... loin d'ici. Loin de tout ce bordel..." murmura Namjoon.

Jin sourit en fermant les yeux.

"On irait où ?"

"A l'autre bout du monde. Une cabane sur une plage déserte. Une caverne dans une montagne. Un igloo sur la banquise. Peu importe... tant qu'on est ensemble... mon amour."

"Namjoon... ça semble... bien..."

"T'as allumé un autre bâton... c'est ça ?"

"Hm..."

"..."

"Je t'aime. Je te rappelle."

Jin laissa tomber son téléphone et repartit dans les tréfonds de son âme et de son coeur. Il savait que ni Namjoon ni lui n'avait vraiment la volonté de s'en aller. Pas maintenant. Pas avec tout ce qu'ils savaient. 

**

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