𝐂𝐇𝐀𝐏𝐈𝐓𝐑𝐄 𝟐𝟗
ANGELINE
La tension est au rendez-vous. J'ai peur. Peur que les jurés soient tous des connards sans empathie prêts à condamner quelqu'un qui est sur le point de mourir. Mourir ne suffit-il pas pour payer l'acte commis ? Même si en l'occurrence, il n'y a pas eu de crime, seulement un homme qui voulait protéger son ami, son camarade...
Luke, qui porte encore ses lunettes à oxygène sur le bout du nez, est assis au côté de Charles sur le banc des accusés quand maître Darrow fait entrer le nouveau témoin. L'ancien coéquipier de Connor. Dans un costume simpliste, il traverse l'allée avant d'aller s'asseoir sur la chaise pour prêter serment. Sans attendre, l'avocat lance sa première question :
— Monsieur Granger, pouvez-vous nous dire comment se comportait monsieur Miller avec vous ou les autres membres de votre équipe ?
Je le regarde droit dans les yeux, il a l'air d'être mal à l'aise, stressé par cet interrogatoire, mais qui ne le serait pas ? Ce n'est pas rien comme affaire, nous parlons tout de même d'un meurtre...
Il passe sa main dans ses cheveux roux avant de répondre en bafouillant :
— Connor... Il... Je pense qu'il était apprécié. Si tu trainais avec lui, les gens te remarquaient, tu te sentais différent comme si tu étais important. En tout cas, c'est comme ça que je me sentais avec lui. Mais c'est vrai que Connor ne mâchait pas ses mots. Il savait quoi dire pour être méchant et il prenait plaisir à rabaisser les personnes autour de lui...
— Lui est-il arrivé de vous rabaisser ?
— Oui... répond-il, les yeux rivés au sol.
— Je sais qu'il est difficile se replonger dans de mauvais souvenirs, mais vous souvenez-vous de moqueries qu'il a pu avoir à votre égard ?
— « Hey Ginger ! Tu as oublié ta jupette de chearleader ? »
— Je suppose qu'il a fait exprès de changer votre nom.
— Oui. Il voulait être méchant et il a tapé en plein dans le mille.
— Si monsieur Miller était infect, irrespectueux voire violent même avec l'un des membres de sa bande, alors avec qui était-il gentil ? questionne maître Darrow à l'intention du jury.
Il retourne s'asseoir et c'est au tour de l'avocat de la partie adverse de mener le contre-interrogatoire.
— Quand monsieur Miller a tenu ces propos, ne veniez-vous pas de rentrer dans l'équipe de football ?
— Objection, votre honneur ! Ce n'est pas une raison valable pour insulter quelqu'un.
— Je retire, réplique maître Cohen. N'est-il pas vrai que ce soir-là, lors de la fête organisée pour célébrer votre première victoire de la saison, vous l'avez vous-même insulté, monsieur Granger ?
— C'est vrai, car...
— Ce sera tout.
— Je n'ai pas fini...
Alors que maître Cohen va s'asseoir, l'avocat de Charles intervient et supplie presque le juge de laisser le témoin terminer de s'exprimer, ce qu'il lui accorde.
— Merci monsieur le juge.
Granger prend un moment avec d'observer les jurés et de continuer à s'expliquer.
— À la fête de début d'année, je venais d'arriver dans l'équipe, mais comme l'a dit maître Darrow, ce n'est pas une raison pour insulter ou rabaisser qui que ce soit. Nous sommes tous des humains avec nos propres émotions face aux événements et parfois, nous n'arrivons pas à gérer notre douleur alors... oui, ce soir-là, je l'ai insulté en retour de "sale connard". Il n'a pas hésité pour me mettre un coup de poing. J'avais été soft, c'est lui qui a commencé. Je n'ai fait que me défendre. Défendre la personne que je suis, tout comme l'a fait Luke.
Maître Cohen se lève tout à coup et retourne près du témoin.
— Mais n'avez-vous pas fini par être amis tous les deux ?
— On ne l'était pas vraiment, comme je l'ai dit plus tôt, c'est la sensation d'avoir sa place dans un groupe que l'on recherchait vraiment et non son amitié, car à vrai dire... Avait-il seulement un ami sincère qui l'aimait pour sa personne et non pour sa popularité ? Je ne le crois pas.
La salle est silencieuse. Alors que les deux avocats achèvent leur ultime plaidoirie, le jury part délibérer dans une autre pièce. J'espère ne pas attendre des heures pour être finalement déçue par un vote non-unanime.
Nous patientons dans le hall, dispersés en petits groupes, et je ne peux m'empêcher de jeter des regards noirs emplis de colère en direction de Charles tout en tapotant du pied, angoissée par l'attente du verdict. Quant à Luke, dans son fauteuil roulant, il me lance un regard amoureux que je lui rends. Soudain, un personnel nous informe que nous pouvons à nouveau rentrer dans la salle. Ça s'est fait beaucoup trop vite, j'ai peur !
Des coups de maillet résonnent à travers le tribunal, tout le monde se lève puis le juge demande au président du jury de lire le verdict. Un homme d'un certain âge se dresse et passe une main sur son front dégarni avant de se lancer :
— Pour l'accusation de meurtre sans préméditation, nous déclarons l'accusé, Wright Luke... non coupable.
Un soupir général s'élève. Tout le monde est soulagé par cette annonce qui libère Luke. Je le regarde et souris, le coeur plus léger. Vient le tour de Charles. Je voudrais qu'ils l'inculpent, mais ils ne le feront pas vu qu'ils ne l'ont pas fait pour Luke... Je le sens.
— Pour l'accusation de complicité de meurtre sans préméditation, nous déclarons l'accusé, Ross Charles, non coupable.
Je reste de marbre face à cette décision tandis qu'un grand sourire s'affiche sur les lèvres de Charles qui se baisse pour prendre Luke dans ses bras, puis ses parents.
— Mesdames et messieurs les jurés, je vous remercie pour votre service et pour avoir fait partie intégrante de cette procédure judiciaire. Vous pouvez prendre congé.
Des coups de maillet retentissent, annonçant la fin de l'audience. Je me lève et avance vers Luke qui se trouve avec Charles et ses parents. Ceux-ci m'observent en silence et alors qu'ils vont pour parler, je les interromps :
— Monsieur et madame Ross, vous comprendrez que je ne peux plus travailler pour vous...
— Nous comprenons, Angéline..., répond Sharon. Nous ferons tous les papiers pour l'agence.
— Bien.
Je ne jette même pas un regard à l'assassin et m'adresse directement à Luke, lui demandant s'il veut que nous partions, ce qu'il accepte. Alors que nous sommes dans un taxi en route pour l'hôpital, je laisse enfin le soulagement m'envahir... Evan n'aura pas à voir son père malade et en prison pour couronner le tout. Je vais essayer de tout faire pour qu'ils passent le plus de temps possible ensemble, si Luke est assez en forme.
Arrivés à l'hôpital, dans la chambre qu'occupe Luke depuis deux semaines maintenant, nous demandons s'il peut rentrer à la maison et retrouver son fils. Le médecin donne son accord et après avoir récupéré ses affaires, nous retrouvons mon appartement. À midi, étant seulement tous les deux pour le repas, je lui prépare son repas préféré : un simple burger et des frites maison. Nous en mangions souvent à l'époque quand nous avions la flemme de cuisiner ou alors après un match de football.
Nous savourons les hamburgers devant une série quand je décide d'aborder un sujet qui me tracasse : notre fils.
— Comment va-t-on lui dire ?
— Je m'en occupe, si tu veux ? dit-il après avoir bu une gorgée de sa boisson.
— Je pense que c'est mieux qu'on lui explique tous les deux...
— Tu as raison. Nous irons le chercher à l'école ensemble ce soir...
Nous échangeons un sourire puis je m'approche de lui et l'embrasse tendrement avant de me replonger dans mon assiette, la boule au ventre en pensant à la réaction d'Evan.
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Et voilà, le verdict est tombé mais vous vous en doutiez surement...
J'espère qu'il vous a plu,
A la semaine prochaine ! ♥
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