ANGELINE

En début de semaine, Evan s'est montré très curieux au sujet de son père. Nous avons longuement parlé et j'ai répondu aux questions qu'il se posait. Je pense que ça lui a fait du bien qu'on en parle. Il m'a dit qu'à travers de simples anecdotes - une couleur préférée, un plat favori -, il a l'impression de connaître un peu son père.

Je suis à la fois heureuse et soulagée que nous ayons eu cette discussion. C'est fait, et j'espère que nous n'en reparlerons plus... Mais j'avoue qu'avoir parlé de Luke m'a donné envie de savoir comment il va, après toutes ces années...

Allongé dans mon lit, je tape sur le clavier de mon ordinateur le prénom de mon ex. Un tas de sujets s'affiche sur le moteur de recherche, mais rien qui ne concerne mon Luke. Il est introuvable. Je soupire, frustrée de ne trouver aucune information. Je n'ai même plus son numéro de portable pour l'appeler, ayant perdu tous mes contacts il y a plusieurs années...

Je ferme mon ordinateur, le pose sur le chevet puis je ferme les yeux pour m'endormir.

La scène se déroule au ralenti. Les rires retentissent, je sens le vent qui soulève mes cheveux et avec mes mains, j'essaie de toucher les coquelicots sur mon passage. Je tourne légèrement la tête vers l'homme qui me suit et lui souris. Je lui fais un signe de la main pour qu'il me rejoigne. Lorsqu'il arrive à ma hauteur, je plonge mes yeux dans les siens et passe mes mains dans ses cheveux que les rayons couchants du soleil teintent de reflets dorés. Nous restons comme ça, immobiles dans le silence. Il pose ses mains sur mon ventre légèrement rond et se met à lui parler :

— Nous viendrons ici, nous promener aussi souvent que nous le pourrons. En famille.

— Faire de longues promenades jusqu'à que la nuit tombe..., renchéris-je.

*

Je suis réveillée par la sonnerie de mon réveil ! J'ouvre difficilement les yeux et fixe le mur blanc devant moi. Un sentiment d'accablement s'est emparé de moi. Mon rêve, ou plutôt mon souvenir, me revient à l'esprit. Nous allions souvent à notre endroit préféré : un champ de coquelicot a seulement une heure au sud de Chicago. Nous nous y sommes rendus seulement quelques jours avant le dernier match. Nous y avions passé un agréable moment, pendant lequel la pression qui pesait sur les épaules de Luke s'était brièvement dissipée.

Je me ressaisis et me lève pour aller boire un café dans le calme. Une fois ma boisson chaude avalée, je pars me préparer. Ensuite, j'ouvre doucement la porte de la chambre d'Evan, m'accroupis au pied de son lit et lui caresse le visage.

— Mon cœur, réveille-toi, c'est l'heure.

Aucune réponse ni réaction. Je souris en voyant sa bouille d'ange et sa bouche entrouverte.

— Evan, il faut se réveiller, maintenant.

Il ouvre doucement ses yeux et les pose sur moi. Je le porte et l'installe sur l'un des tabourets de la cuisine. Pendant que je prépare son petit déjeuner, Evan est accoudé à la table, les yeux à demi-ouverts. Je lui donne son bol de céréales et tandis qu'il le déguste en prenant son temps, je plie le linge en le regardant.

— Je t'ai prévu une surprise pour ce week-end, annoncé-je d'un ton enthousiaste.

Il se retourne vers moi, un grand sourire sur les lèvres, le regard soudain brillant de curiosité, cette fois-ci bien réveillé.

— Quoi ?

— Ça ne serait plus une surprise si je te le disais, mon chéri.

Je lui fais un clin d'œil puis m'éloigne pour aller ranger les vêtements. Je l'entends râler, mais je sais qu'il est en train de réfléchir à ce que j'ai pu préparer pour lui.

Une fois qu'Evan est prêt, nous partons en direction de l'école. Sur le trajet, il m'assaille de questions que je m'efforce d'ignorer. Je ne dois pas craquer, pas même face à ses yeux de chien battu. J'embrasse sa joue puis il court rejoindre ses copains.

D'un pas rapide, je m'en vais pour attraper les transports en commun. Quand j'arrive sur mon lieu de travail, je me mets de suite aux tâches ménagères. Je profite de mes pauses pour répondre aux messages de Charles quand je prends mes pauses. Devrais-je l'inviter à cette fameuse surprise, ou est-ce encore trop tôt ?

Je décide d'envoyer un message à Sofia, c'est ma conseillère en amour !

Je continue ce que j'ai à faire jusqu'à ce que la journée soit finie et qu'il soit l'heure d'aller chercher Evan pour rentrer à la maison. Tandis que mon fils fait ses devoirs sur la table basse, je prépare un gratin dauphinois tout en lisant le SMS que ma meilleure amie vient de m'envoyer.

— SOFIA
Je ne peux pas vraiment t'aider sur ça, Angel. Il faut que tu écoutes ce que ton cœur te dit, et si tu sens que c'est le bon moment, que tu es prête, vas-y. Mais si ce n'est pas le cas et que tu angoisses à l'idée qu'Evan rencontre officiellement Charles, alors oublie.

— ANGÉLINE
Tu es la meilleure ! Qu'est-ce que je ferais sans toi ? 😱

— SOFIA
Pas grand-chose ! 😂

Je lui envoie un emoticone « bisou-cœur » puis je mets le plat au four.

— Je vais me doucher, tu es sage et tu finis tes devoirs. Je te fais réciter après, lancé-je à Evan.

Il hoche la tête et je pars m'enfermer dans la salle de bain. Je fais couler l'eau dans le vide et, sur mon portable, appuie sur le contact : Charles. La sonnerie sonne trois fois avant qu'il décroche.

— Salut, je ne te dérange pas, j'espère ?

— Non pas du tout, je viens tout juste de sortir de la douche.

— On est connectés, j'étais sur le point d'y entrer.

J'entends son petit rire à l'autre bout du fil et un sourire se dessine sur mes lèvres.

— Quand est-ce que tu es libre pour qu'on se voie ?

— Je ne sais pas... Avec Evan, c'est un peu compliqué.

— Oui, je comprends.

— Je pourrais... peut-être m'arranger avec ta mère pour finir plus tôt vendredi. Je lui dirai que j'ai rendez-vous chez le médecin, proposé-je d'une voix sexy.

— Je pense que le médecin sera très heureux de te voir.

— Je suis impatiente qu'il m'ausculte.

— Je vous dis à vendredi alors !

Je raccroche, le sourire scotché au visage. J'entre finalement dans la cabine de douche et quelques instants plus tard, une fois mes cheveux séchés, je rejoins Evan qui entreprend de réaliser un dessin pour illustrer une poésie.

— C'est très joli, mon cœur !

Je jette un œil au plat dans le four : il me reste encore quelques minutes et j'en profite pour faire réciter son poème à Evan. Je m'assieds sur le canapé tandis qu'il se lève et commence à énoncer.

Il cite le texte d'une traite et sans erreurs, et je le félicite. Il me demande s'il peut allumer la télé : je lui réponds qu'il devra attendre qu'on ait fini de manger. Nous dégustons le gratin en tête à tête en nous racontant notre journée.

Une fois les assiettes débarrassées, comme promis, je laisse Evan devant la télévision pendant une demi-heure avant qu'il aille se coucher.

*

En ce vendredi matin, je n'ai qu'une hâte, c'est que l'après-midi arrive. Hier, j'ai m'entretenir avec Sharon pour lui demander de me laisser partir plus tôt, ce qu'elle a accepté. Elle ne sait pas que je vais voir son fils, ce qui me va très bien. Il vaut mieux que les parents de Charles ignorent notre relation naissante, du moins pour le moment.

Après avoir concocté une soupe bien consistante pour le couple Ross, je finis de nettoyer la cuisine avant de quitter la demeure, en début d'après-midi. Dès que je franchis le portail, j'aperçois Charles appuyé contre la malle de sa voiture. En nous retrouvant l'un face à l'autre, nous avons un moment d'hésitation, et puis nous nous embrassons tendrement. Je monte dans sa voiture puis Charles nous conduit jusqu'à chez lui. Nous arrivons devant un grand immeuble dans le centre, et la voiture s'engage dans un parking souterrain.

— J'ai remarqué que tu habites à mi-chemin entre chez tes parents et chez moi.

— Le hasard fait bien les choses, ricane-t-il.

Nous sortons de la voiture et je le suis en silence, curieuse de découvrir son appartement. L'ascenseur s'arrête au dernier étage et nous tournons à droite dans le couloir. Charles ouvre la porte, qui s'ouvre sur une vaste pièce à vivre. La salle est ouverte et laisse entrer la lumière par toutes ses grandes vitres.

— C'est immense...

— Oui, enfin, je n'ai pas voulu trop grand non plus, comme chez mes parents. Tu peux t'approcher, tu sais ?

Il me sourit et je m'avance vers les fenêtres, la cuisine derrière moi. Je contemple la vue sur les nombreux gratte-ciels. La décoration de l'appartement est moderne, dans les tons noirs et gris. J'enlève ma veste et pose mon sac dans l'entrée. Charles me propose une boisson, mais je refuse. Ensuite, il me fait découvrir les lieux : c'est un duplex, et je découvre que le rez-de-chaussée comporte aussi une salle de bains. L'escalier donne sur une mezzanine qui fait office de bureau. Il y a une chambre et une suite parentale. Sa chambre. Une chambre splendide.

— Tu as du goût, Ross.

— Tu en doutais ?

Il me prend par la taille et me regarde tendrement. Ok, j'ai carrément envie de lui sauter dessus.

— Je ne m'attendais pas à ce que ça soit aussi charmant.

— Mon logement ressemble à son propriétaire.

Je ris à sa phrase.

— C'est pas faux !

Il se penche vers moi et m'embrasse passionnément. Je lui rends son baiser et en un éclair, nos vêtements se retrouvent par terre et nous, dans le lit de Charles. Toujours dans la tendresse, il ne manque pas de me faire plaisir. Je n'ai pas besoin de parler, il sait ce qu'il a à faire.

Blottie dans ses bras, du bout de mon index, je dessine des cercles sur son torse. Soudain, je lâche d'un ton détaché :

— Ça te dirait de rencontrer officiellement Evan ?

Nous nous redressons en prenant appui sur la tête de lit. Un sourire s'étend sur les lèvres de Charles :

— J'aimerais beaucoup.

— Demain, je lui ai prévu une surprise. Je l'emmène à l'exposition « Jurassic Quest » sur la jetée Navy, tu veux nous accompagner ?

— Avec plaisir !

Je souris, heureuse qu'il ait accepté l'invitation. Après avoir savouré cet après-midi à deux en discutant et en regardant un film, Charles me raccompagne jusqu'à l'école d'Evan. Il s'éclipse avant la sortie des classes et je lui dis à demain pour une merveilleuse journée en perspective.

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Cette semaine vous avez un chapitre à l'heure haha !
Je prépare un autre projet mais je ne peux pas encore vous en parler, c'est trop tôt :)