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Il quitta les lèvres pulpeuses et pleines de gloss de Marina sans aucun regret.
« C'est bon, t'as eu ce que tu voulais, tonna Juan en la poussant loin de ses genoux. Ce mec ne reviendra pas après ce qu'il vient de voir, maintenant laisse-moi, j'ai encore un verre à finir et un plan cul qui m'attend. »
Marina, brunette avec un fort caractère, ne se braqua pas pour autant. Son talon claqua au sol et ses jambes firent de leur mieux pour l'aider à se maintenir debout, le bras de Lola fut d'une aide non-négligeable le temps qu'elle reprenne ses esprits. Putain, il sait embrasser ce con ! jura-t-elle silencieusement.
Ne vous leurrez pas, elle savait comment était son ami. Il avait une belle gueule qui se voyait profanée par la violence des mots qui sortaient de sa bouche. La brune n'oubliait pas non plus le paradoxe de ce fabuleux muscle, tantôt une vraie calamité, tantôt la pire des tortures luxurieuses.
« Merci Juan, je te revaudrai ça.
— J'sais. »
Il finit son verre d'une traite et se leva. Sa main se secoua de droite à gauche dans la vaine intention de saluer ses amis.
Une fois, dehors, le brun se permit de lever les yeux et d'apprécier la nuit aussi sombre que sa personnalité. Ouais, moi, je vous le dis, c'était le calme, l'obscurité de la nuit qui lui correspondait, pas cette parfaite personne qui faisait la une des journaux. Ce n'était pas lui.
Contrairement à ce que pensait la presse – et ces cons de pigeons qui lui mangeaient dans la main – Juan Mourier était quelqu'un d'exécrable. Si on le voyait comme l'idole de la jeunesse masculine, comme le futur gendre parfait, le brun était en réalité une absurdité désagréable. Et même si notre jeune homme de vingt-six ans n'aimait pas la confrontation, n'avait pas un ego surdimensionné, ce p'tit con pouvait être détestable : il crachait ses mots avec autant de venin qu'un serpent, haïssait la compagnie, fêlait contre l'imperfection, et enfin, il évitait la gentillesse et la bonté comme la peste. J'en crache des paillettes, disait-il alors avant de se renfrogner.
Seuls ses amis, les très rares qui savaient voir au travers des ténèbres de son âme, osaient se tenir près de lui. Et si quelqu'un avait le malheur casser du sucre sur son dos, soit la presse étouffait elle-même l'affaire, ou bien n'en tenait pas compte, soit la véritable identité de cet homme lui faisait si peur qu'elle ne l'approchait plus.
Mais voyez-vous, tout cela, ces messes basses, ces potins, cette presse, la vérité même, Juan s'en foutait royalement. Ouais, ça lui passait bien au-dessus de la tête, et ce même plus que ses premières chaussures – que sa mère avait osées garder dans un carton bien rangé avec toutes les autres affaires de son enfance. Cet homme était un con fini, ouais, une pure absurdité désagréable, comme j'aime le dire.
Toutefois, il ne manquait pas d'intelligence. Il savait ce qui était bien pour lui, pour l'image qu'il devait renvoyer afin de satisfaire le narcissisme de son père. Alors évidemment, il menait à la baguette son avenir, chose assez impensable pour tout être vivant doté de raison. Que je vous explique, Juan aimait avoir le pouvoir et le contrôle sur tout, il avait hérité cela de son arrière-grand-mère, fabuleuse patriarche qui ôtait l'envie d'émettre toute résistance sur ses décisions, et ce même à son mari qui fut Premier ministre. Ainsi, il prévoyait chaque opportunité – non-négligeable, le reste, il s'en fichait un peu – sur sa vie future et pensait que le hasard n'était qu'une piètre idée inventée par les philosophes qui ne savaient pas assumer qu'ils étaient trop peu visionnaires. Oui, pour lui, et je le pense aussi, ces soi-disant illuminés n'avaient seulement pas pensé à de telles possibilités d'aventures.
Pour résumer le tout, Juan Mourier méritait bien son surnom d'absurdité désagréable.
Il se remit à marcher, la tête un peu plus légère en pensant à l'adorable fessier dont il profiterait d'ici quelques minutes. Sa main glissa dans sa poche à la recherche de son portable, mais il n'eut pas le temps de le prendre qu'on l'interpella.
« J'suis déjà là, laisse ton forfait tranquille Juan. »
L'interpellé esquissa une grimace de sourire et se retourna. La silhouette emmitouflée d'Yvan se distinguait sous les lumières de la ville, il avait les mains dans les poches, le nez et les joues un peu rougies, signe qu'il avait passé quelques minutes à attendre son rendez-vous dans le frais de la nuit. Il combla la distance entre lui et le bouclé.
« Ça va, t'es pas trop torché ? » demanda le blond railleur.
Juan gloussa dans un rire sombre. Il savait parfaitement ce que le jeune homme d'une tête de moins que lui sous-entendait par le « trop » : il voulait clairement savoir s'il pouvait encore bander ou non. Il passa une main sur son entre-jambe. Ce n'était pas une petite dizaine de verres qui allaient le clouer au sol. Le brun le prit par la taille et le tira vers les rues qui menaient à son appartement (une chance qu'il habitait en centre-ville, à deux pas de toutes les activités citadines).
« Absolument pas. Un verre d'eau et je te prends dans la douche pour me débarrasser de ce goût de femelle, répondit-il.
— Encore une que tu viens d'envoyer sur les roses ? »
Le blond explosa de rire, mais il ne s'arrêta pas de marcher aux côtés de l'homme qui gardait son éternelle expression impassible. Évidemment, Yvan n'était pas surpris que son ami intime ait attiré presque toute la gente féminine qui se dandinait dans cette boîte. Pour ne rien vous cacher, il avait tout pour plaire, en considérant que tout, était sa belle gueule et son physique. Ouais, un beau jeune homme de sa carrure - il y avait aussi le critère de son statut qui rentrait en jeu, mais pour un coup d'un soir ce n'était pas ce que la majorité des personnes recherchaient, surtout à deux heures du matin avec trois grammes dans le sang – ça ne courait pas les rues.
« Nope, ce soir, c'était une faveur, réfuta-t-il en secouant ses boucles. Marina avait un obsédé collé aux basques, dans le genre du gros con qui a bu comme un trou et qui se sent encore baisable après s'être vomi dessus. Du coup, je lui ai fait comprendre qu'elle n'était pas accessible, chose absolument fausse puisqu'on sait parfaitement que les poulettes et moi ça fait deux.
— Dis donc, un peu plus et tu vas avoir l'auréole, fait gaffe.
— Ce jour n'arrivera jamais, tu le sais bien. Je serai une plaie jusqu'à la mort et emmerderai une dernière fois le monde avec une émission de dioxyde de carbone lorsque je me ferai incinérer. »
Juan ne mentait pas, et je peux vous confier qu'il était certain que jamais, au grand jamais, il ne deviendrait l'un de ces princes charmants ou ange des contes de fées, dont rêvait toutes les petites filles. C'était quelqu'un de grossier, flegmatique en société, en soit le contraire absolu du garçon fleur bleue et romantique qui pensait à son prochain avant lui. Oui, comme je vous le mentionne depuis maintenant quelques lignes, Juan Mourier était l'absurdité désagréable par excellence.
Ils arrivèrent à l'appartement. Le brun fourra sa main dans la poche de sa veste et grommela quelques injures en tâtant celles-ci, à priori, vides.
« Tu t'en sors ou tu as besoin d'aide ?
— D'après toi mon cher Watson ? siffla Juan, piqué.
— Bouge. »
Ni deux, ni trois, Yvan se planta face au jeune homme et enfonça ses mains fraîches sous la veste de cuir de son ami. Il en profita pour le chauffer un peu, le taquiner d'un touché baladeur, avant de brandir le petit trousseau caché dans la couche intérieure du tissu. Les clés claquèrent entre elles en même temps que la langue du brun. Sans prévenir, Juan s'empara de l'objet métallique, crocheta la serrure en deux tours puis poussa le blond dans le couloir sombre. Le plus petit peina à se tenir au corps du brun, cependant, il ne s'en plaignit pas, au contraire, le sourire qui étirait ses lèvres ne mentait pas. Croyez-le ou non, à chaque fois qu'ils se retrouvaient, c'était le feu. Pas d'amour, pas d'attache, mais une splendide entente sur le lit.
« Bon, fini les prélis. Ce soir, j'te prends sous la douche. »
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