Chào các bạn! Vì nhiều lý do từ nay Truyen2U chính thức đổi tên là Truyen247.Pro. Mong các bạn tiếp tục ủng hộ truy cập tên miền mới này nhé! Mãi yêu... ♥

TROISIÈME HALLUCINATION : Mathilde

- Rétrograde.

Sans que je détache les yeux de la route, mon pied quitta l'accélérateur et se posa sur l'embrayage. En moins d'une seconde, je changeai de vitesse et mon pied revenait sur sa position initiale. J'esquissai un léger sourire ; la voiture n'avait que très peu ralenti durant l'action, ce qui représentait un énorme progrès depuis le début de mes heures de conduite la semaine dernière.

- Tu te débrouilles bien mieux que la dernière fois, remarqua le moniteur derrière son écharpe.

Le froid de février était mordant et le chauffage de la voiture fonctionnait mal cependant, la remarque me donna chaud au cœur. Pour moi, tous les compliments concernant ma conduite semblaient être de véritables louanges.

- Essaie juste de moins oublier les clignotants.

- Ah ! Oups, désolée... Me confondis-je en réalisant que je ne l'avais pas activé avant de prendre cette intersection.

Ça aurait pu être un film, la situation dans laquelle je me trouvais. Il y a à peu près un mois, jamais l'idée de faire la conduite accompagnée ne m'aurait traversé l'esprit.

Au moment où la voiture m'avait heurtée, peu après le film que nous étions allé voir avec le Club, je pensais réellement que j'allais mourir. Après tout, je périrais dans un accident de voiture, c'était une certitude. Du moins, jusqu'à ce que je me réveille à l'hôpital. Je n'y étais même pas restée deux jours, et ma rééducation n'avait duré que deux heures. Mauvais diagnostic, paraît-il, le médecin qui m'avait auscultée le temps de mon évanouissement était comme qui dirait pessimiste. Au final, ce n'était qu'une jambe méchamment cassée. La responsable du centre de rééducation avait crié au miracle. « Que quelques égratignures », avait-elle lâchée. Pourtant, ces égratignures me faisaient encore mal au niveau du mollet gauche, mais ce n'étaient que de silencieux échos lorsque je n'y faisais pas attention.

Et puis, mieux valait ça que rester sur l'asphalte.

Cependant, j'avais été tellement certaine que j'y succomberais, qu'une semaine durant j'étais persuadée d'être morte. Le monde me semblait bien plus flou, plus faux aussi, et ce n'était pas l'annonce de la mort de Victoria qui avait arrangé les choses. Ça avait été dur, bien trop dur, et ce n'étaient aucune banderole ou hashtag prayforvictoria affichée sur le portail du lycée ou twitter qui y changeraient quelque chose. Victoria était populaire, c'est un fait, mais je ne m'étais pas douté qu'autant de fleurs puissent être réunies dans l'allée du lycée. Deux-mille, avaient compté les membres de la vie lycéenne.

J'avais beau être quelqu'un d'optimiste, elles m'avaient donné l'impression de deux-mille fleurs hypocrites pour une inconnue morte. Peut-être que c'était la vérité.

Toujours est-il que la popularité du club avait explosée grâce, ou plutôt à cause du décès de Victoria. La curiosité, sans doute, mais jamais elle ne serait comblée. Nous, les membres, n'avions pas la tête à ça.

Samuel, qui était déjà pâle d'ordinaire, semblait transparent la première fois que je l'avais revu après avoir reçu le sms de Victoria. Un mois plus tard, à peine avait-il retrouvé des couleurs. Sarah, si son teint n'avait pas changé, elle avait perdu son humour, et ses couleurs qu'elles ne loupaient jamais étaient devenues aussi ternes que les cernes d'Axel. Lui, il ne dormait plus. Ce n'était pas avoir repris la direction du club du point de vue administratif du lycée (de notre point de vue, Victoria serait toujours la directrice) qui allait le remettre sur pied, surtout si même la présence de Leila qui se rapprochait de lui de jour en jour ne suffisait pas à atténuer sa peine. Tim, enfin, ne mangeait presque plus. Il n'avait plus besoin de trier ce qui était mauvais pour son cœur ou pas car il se contentait souvent de quelques bouchées de son plat pour être comblé. Déjà qu'il n'était pas énorme à la base, il avait perdu plusieurs kilos depuis un mois. Nous en avions tous les cinq perdus.

Ce n'était pas une histoire géniale.

Mais c'était justement pour ça que j'avais décidé de me battre.

Au fil des jours, une idée s'était immiscée dans mon cerveau, et elle était devenue presque aussi claire que celle qui me disait depuis toute petite que je mourrais dans un accident de voiture. Tu as déjoué ta mort, me dictait une voix intérieure. Et plus elle me le chuchotait à l'oreille, moins je savais la manière dont je décèderais. Pour faire taire complètement cette certitude qui s'amenuisait petit à petit, j'avais passé le code.

Sans rien dire à mes amis, ils m'en auraient empêché, je m'étais inscrite à l'auto-école et avait bachoté jours et nuits pour l'avoir le plus rapidement possible. Il ne m'avait pas fallu plus de quatre semaines, et j'entamais aujourd'hui ma cinquième heure de conduite avec moniteur.

Axel et les autres savaient ce que j'avais entrepris, depuis que Tim m'avait aperçu dans un rond-point, mais au lieu de me faire engueulée, comme je l'avais pensé initialement, ils m'avaient félicité, voire même encouragée. Peut-être avais-je ramené un peu d'espoir ?

C'était probable cependant, pour le moment, j'étais la seule à affronter ma mort. A la narguer.


- Oh, ils ont installé la fête foraine.

La voix du moniteur me sortit de mes pensées. Nous arrivions au centre de l'agglomération, près du lycée, et le parking où s'arrêtaient habituellement les bus scolaires était en pleine effusion. Aucune voiture, aucun klaxon, mais des dizaines de grandes machines métalliques colorées en train d'être montées par cinq fois plus de forains. La fête foraine du père d'Axel. Tous les ans, elle quittait Nice au mois de février pour s'installer ici quelques semaines, le temps d'attirer les quelques touristes des vacances d'Hiver. La voir si près du lycée ne devait pas réjouir le garçon sachant qu'il mourrait dans une montagne russe, mais je savais qu'il ferait une fois encore comme l'année dernière et celle d'avant : il n'y irait tout simplement pas.

- Vous y allez souvent ? Demandai-je.

Nous avions dépassé le parking où s'activaient tout ce beau monde, et la voiture descendait maintenant l'allée bordant le lycée et rejoignant le centre-ville. Même si nous roulions vite, j'eus le temps d'apercevoir la banderole jonchant le portail du coin de l'œil, ainsi que quelques lycéens discutant devant. Ils ne la voyaient plus. Et Victoria était sûrement tout autant oubliée dans leurs esprits.

- Mes gosses sont fans de ces trucs-là, lâcha le moniteur. Les sensations fortes et tout. C'est pas vraiment le cas de ma femme et moi, mais on les emmène quand même. A reculons.

- Il sont quels âges, vos enfants ?

J'arrivai à un rond-point. D'habitude, c'était à ces moments que je flippais, mais le fait de parler détachait mon esprit de la route.

- Dix ans.

- Oh ! Lâchai-je en voyant un camion arriver.

J'attendis qu'il passe puis m'engageai à mon tour dans le rond-point.

- Mes petits frères aussi ont cet âge-là !

Je pris la deuxième sortie, sans oublier mon clignotant, et descendit me garer un peu plus bas dans la rue.

- Et voilà ! Déclarai-je enfin après un créneau presque parfait (le pare-chocs de la voiture derrière avait failli se manger celle-ci mais je m'étais arrêtée à temps).

- Tu t'améliores d'heure en heure, dit le moniteur, l'air ravi.

Nous sortîmes du véhicule et je récupérai mon sac de cours dans le coffre. Le moniteur s'étira une seconde et me serra la main.

- Je te laisse repartir en cours, je validerai l'heure à l'auto-école, pas besoin de m'accompagner.

- Merci beaucoup !

- Bah c'est rien. Je ne vais pas te laisser arriver en retard, ce serait pas sympa.

Un petit sourire apparut sur mon visage.

- Enfin ça ne me dérangerait pas vraiment.

- Je crois que ça ne m'étonne pas, j'étais pareil à ton âge. Bon, allez, à la semaine prochaine !

Je hochai la tête et fis volte-face, remontant la rue vers le lycée. J'étais particulièrement heureuse ; une nouvelle heure de conduite validée, ça en faisait une de moins jusqu'à la conduite accompagnée et jusqu'au permis. J'avais l'impression que si je le passais, je ne mourrais plus d'un accident de voiture.

La petite voix me le répétant depuis mon enfance se tairait à jamais.

Mais ce n'était pas une raison pour me plonger totalement là-dedans et oublier les cours. Après un rapide regard sur ma montre, je réajustai mes lunettes (des nouvelles, les anciennes n'avaient pas survécu à mon accident) et pressai le pas. A la première intersection, je manquai de rentrer dans une camarade.

- Désolée ! Lâchai-je automatiquement.

La jeune fille recula une seconde et releva la tête, ses longs cheveux noirs retournant à leur place et dévoilant l'appareil photo qu'elle portait autour du cou. Réalisant qu'il s'agissait de Leila, mon ton changea et je l'interpellai plus gaiement.

- Leila ! Tu vas faire des photos ?

- J'aurais dû me douter qu'il ne pouvait y avoir que toi pour agresser les gens comme ça, plaisanta-t-elle. Oui, ma prof d'art plastique m'a laissée sortir une heure plus tôt pour un projet. Et toi, tu n'es pas censée être en cours ?

Je secouai la tête.

- Prof de maths absente, ce qui m'a laissé deux heures pour manger. J'ai réservé la seconde pour une heure de conduite.

- Je vois.

Elle avait beau sourire, je crus apercevoir une légère brume voiler son regard à cet instant.

- Quelque chose ne va pas ?

Elle haussa les épaules.

- Rien de particulier. Axel voudrait te voir avec les autres membres à la récréation de l'après-midi.

- Ok.

Leila ne faisait toujours pas parti du Club, et elle n'en ferait probablement jamais parti. La mention NON sur son questionnaire avait quelque chose d'irrévocable, au grand dam d'Axel. Néanmoins, elle était toujours au courant quand nous nous réunissions, et venait souvent dans la salle, même si elle ne savait toujours pas pourquoi le Club existait.

Mais quelque chose me disait qu'elle serait au courant à la seconde où ses lèvres rencontreraient celles d'Axel pour la première fois. Si Victoria n'était pas décédée, ça se serait sûrement passé depuis déjà quelques semaines. J'imaginai sans mal Axel penser à autre chose qu'à l'amour depuis ce moment.

- Tu devrais y aller, lança alors Leila en souriant. Tu vas être en retard.

Décidément, tout le monde me dit ça, aujourd'hui.

- Tu as probablement raison ! A bientôt !

Leila acquiesça et nous reprîmes notre chemin.


Une heure plus tard, je déclinai l'offre d'une camarade de sortir acheter à boire et passai les premières minutes de ma récréation à rejoindre la salle du club. En arrivant, je constatai que tout le monde m'attendait déjà.

Sarah était assise sur le canapé, ses cheveux déteints se confondant presque dans le tissu vert. Samuel et Tim étaient assis l'un en face de l'autre autour de la table, le regard tourné vers moi.

- Salut, lançai-je à mes camarades.

Avant qu'ils ne puissent me répondre, Axel, dans le fond de la salle, s'approcha et posa les poings sur la table.

- Enfin tous là, dit-il.

Je m'approchai à mon tour, et décidai de rester debout également. Le projecteur donnait l'impression d'être dans une salle d'interrogatoire, même si j'avais plutôt l'impression de m'apprêter à assister à un discours.

- Pourquoi nous as-tu fait venir ? Demanda Tim.

Le garçon avait l'air mal-à-l'aise. Je me rappelai à ce moment-là qu'officiellement, il ne faisait toujours pas parti du Club. Peut-être ne se sentait-il pas réellement à sa place. Peut-être était-il mal d'être attristé par la mort de quelqu'un qu'il connaissait bien moins que nous ?

Je me donnai une baffe mentale, tout en me disant que mes réflexions ne menaient à rien.

- Vous le saurez très vite. Sarah, tu veux approcher ?

A moitié dans l'ombre, mon amie croisa les bras contre son pull bleu électrique et secoua la tête.

- J'entends très bien de là où je suis.

- Comme tu voudras.

Axel souffla un instant et prit une grande inspiration. Ses yeux verts nous balayèrent d'un regard et il finit par déclarer :

- J'en ai marre de ne rien faire.

- Co... Comment ça ? Fit Samuel, un peu perdu.

Axel serra les poings.

- Je vais me battre. Je vais combattre ma mort.

Tim le scruta un instant.

- Comment tu comptes t'y prendre ?

- En l'affrontant directement.

Il releva ses yeux vers moi.

- Exactement comme Mathilde l'a fait.

- Hein ?

Je reculai d'un pas.

- Tu as affronté ta mort, et tu en es sortie victorieuse.

- Attends un peu, lâcha alors Sarah.

Elle s'était levée, et s'approcha du garçon en silence.

- Je vois où tu veux en venir, mais d'un autre point de vue, Victoria aussi a affronté sa mort mais elle, elle a perdu.

- Je sais, dit-il en soutenant son regard. Mais il y a une grande différence entre sa mort et les nôtres.

Il s'arrêta un instant, comme pour s'assurer que nous étions tous attentifs.

- Contrairement à nous cinq, sa mort venait d'elle-même. C'est elle qui a choisi de mourir. Nous, nous ne choisissons pas.

- Qu'est-ce que tu veux faire ? Demanda Samuel, l'air paniqué.

- Je l'ai déjà dit, je vais affronter ma mort. C'est la seule manière pour l'éviter. Mathilde, depuis ton accident, est-ce que tu penses réellement que tu mourras dans un accident de voiture ?

- Non.

Je n'eus pas besoin de plus réfléchir.

- C'est comme si la certitude s'évaporait petit à petit.

- J'aimerais tellement que ce soit le cas pour moi... soupira Tim.

- C'est pour ça que je vais affronter ma mort, répéta encore Axel.

A côté de lui, Sarah souffla, l'air indécise. Elle ne dit rien pour autant.

- Qu'est-ce que tu veux faire, exactement ? Demandai-je enfin.

Axel sourit. Un sourire qui me parut plein de rage, de rage de vivre.

- Samedi, nous irons à la fête foraine. Et j'irai sur une montagne russe.

Je fermai les yeux et écoutai ses derniers mots en silence.

- Je vais briser l'Eternel Retour. Mon Eternel Retour. 

Bạn đang đọc truyện trên: Truyen247.Pro