Chào các bạn! Vì nhiều lý do từ nay Truyen2U chính thức đổi tên là Truyen247.Pro. Mong các bạn tiếp tục ủng hộ truy cập tên miền mới này nhé! Mãi yêu... ♥

QUATRIÈME HALLUCINATION : Axel

Désolé pour le retard de publication, je n'ai pas pu poster depuis vendredi ! Bonne lecture !


- C'est complètement ridicule, passé de mode et super cliché. Il n'y a pas moyen que je paie pour ça.

De l'autre côté du comptoir, le vendeur nous regardait l'air de dire : « Eh vous savez, vous êtes pas mes seuls clients, j'ai pas que ça à faire de gérer vos problèmes familiaux et puis sérieux merde, vous auriez pas pu vous mettre d'accord avant d'arriver à la caisse ? Dans mon sac y'a des antidépresseurs parce que ma femme vient de me quitter, alors me faites pas chier putain ».

Mais la seule chose qui sortit de ses lèvres fut :

- Bon. On fait comment ?

Je posai le regard sur les sept objets devant moi. Des straps colorés pour téléphone, chacun arborant une étoile d'une teinte différente au bout du fil.

- Je paierai moi, lançai-je en posant un billet de vingt sur le comptoir. Tu paieras ce que t'as pris séparément.

Ma mère secoua la tête, et ses cheveux blonds (une nouvelle couleur) manquèrent de fouetter le visage d'une pauvre grand-mère derrière nous. Elle dégaina sa carte bleue et posa un mug rose et une radio vintage à côté de mes achats.

- Non non non, je ferais une très mauvaise mère si je ne payais pas, pas vrai ?

Cette question semblait s'adresser au vendeur, mais celui-ci se contenta de passer les articles devant le scanner sans y faire attention.

- Et puis, je ne peux rien te refuser, tu es quand même en deuil.

Une veine pulsa sur mon front et j'envoyai un regard noir à ma mère. Elle prit une mine boudeuse mais avant qu'elle ne puisse dire quoi que ce soit, je me dirigeai déjà vers la sortie.

- Je t'attends à la voiture.

Je l'entendis soupirer mais elle ne me retint pas. Elle n'avait pas intérêt. Alors sans me retourner, je quittai la boutique de babiole, puis le centre commercial, et rejoignis la décapotable rose garée au parking donnant sur le bord de mer.

Même si le froid de février était bien présent malgré le ciel dégagé, les premiers vacanciers étaient déjà sur les plages en contrebas, profitant des derniers rayons de l'après-midi. Ils ne risquaient pas de bronzer, mais je devinai qu'une promenade près des vagues devait être agréable. Elle devait redonner le goût de vivre à ceux qui l'avait perdu. Est-ce que ça fonctionnerait pour moi ? Non, pensai-je. Le seul moyen pour moi, c'était d'affronter ma mort.

Et enfin, je pourrai lui dire.

- Axeeeeeel !

Comme si elle ne m'avait pas revu depuis des années, ma mère me hélait depuis l'autre bout du parking, sacs plastiques à la main. Plus en tant que gentleman qu'en tant que fils, je la rejoignis et l'aidai à transporter la marchandise jusqu'au coffre. Avant de le refermer, je récupérai les straps dans un petits sac plastique et les fourrai dans ma poche.

- Pourquoi tu les récupères maintenant ?

- Parce que je ne rentre pas avec toi, t'as oublié ?

- Hein ?!

On aurait dit qu'elle manquait de s'étrangler, ses lèvres rougement artificielles se tordant dans une expression de dégoût.

- C'est un non-non, objecta-t-elle en faisant tournoyer son dois devant son visage. J'ai réservé une table au Negresco avec le manager de l'agence de mannequinat.

C'était cette-fois à moi d'être surpris.

- Quoi ?

- Je te le promets depuis tes cinq ans ; à tes dix-huit ans, tu rentreras à l'agence, comme Maman ! Alors ce soir, on signe les papiers.

Je chancelai un instant, réalisant soudain. On était le 11 février, le jour de mon Anniversaire. Ça m'était complètement sorti de la tête.

- Pourquoi cette tête étonnée ? C'est vrai que je ne te l'ai pas souhaité ce matin, mais je comptais le faire avec Bruno, ce soir. Bruno, le manager.

Je secouai la tête. En plus de n'avoir absolument aucune envie d'entrer dans son agence pour sacs d'os sur pattes, j'avais quelque chose de mille fois plus important à réaliser ce soir.

Ce soir, j'affronterais ma mort, et je gagnerais.

- Ce repas devra attendre, lâchai-je alors.

- Quoi ? Mais enfin je ne peux pas décommander.

Bien que je fisse une tête de plus qu'elle, ma mère me regardera de haut comme si j'étais le dernier des imbéciles.

- Eh bien tu n'auras qu'à dire que je suis malade. J'ai déjà quelque chose de prévu ce soir, je suis à la fête foraine avec des amis.

Cette fois, elle s'étrangla vraiment.

- Ah ! Dis pas de bêtises comme ça. Tu vas passer la soirée de tes dix-huit ans sur le territoire de ton inutile de père ? Avec ces péquenauds de ton... club ?

- Péquenauds ? Répétai-je en riant.

Le terme avait eu beau déclencher ma rigolade, c'était plutôt la colère qui me submergeait à ce moment-là.

- Non mais je comprends, soufflai-je. Maintenant que Victoria est morte, il ne reste plus que des pauvres parmi mes amis. Forcément, tu voyais l'intérêt de la fortune de sa famille mais maintenant, c'est trop tard, pas vrai ?

- C'est complètement fau-

- Bien sûr, bien sûr. Tu as beau détester Papa, vous avez la même vision des relations humaines ; vous n'y percevez que le profit.

Elle émit une note suraigüe et me toisa d'un air dédaigneux.

- Je n'ai rien à voir avec ton père.

- Oh que si. Et votre plus gros point commun, c'est que vous êtes persuadés d'être meilleur que l'autre.

Avec ça, je fis volte-face et la laissai là.

- Je prends le bus, à plus.

Elle ne dit plus rien pendant de longues secondes, mais j'entendis sa voix résonner quand lorsque j'arrivai près de la route.

- Quoi que tu fasses, je t'aime Axel !

C'était inattendu. Même très inattendu. Etait-ce une tentative désespérée pour que je la suive ? Je n'avais pas vraiment le temps d'y réfléchir.

Moi aussi je t'aime Maman, quoi que tu aies fait. Néanmoins, ce n'était pas assez pour me faire faire demi-tour.

Sarah fit danser ses doigts au-dessus de ma paume quelques secondes et finit par sélectionner un des straps, le violet.

- Je prends celui-là, il me fait penser à la couleur du ciel un peu avant la nuit.

Avec ça, elle accrocha la babiole au bout de son téléphone, la petite étoile pendouillant mollement au-dessus du sol déjà tâché de la fête foraine. Ça ne faisait que depuis dix-huit heures qu'elle avait ouvert, et sur ce qui étaient habituellement des places de parkings se mêlaient déjà deux heures plus tard sucre, sauces, chewing-gums et glaces en tout genre. Et au-dessus de ce sol sale pesait la dernière chanson populaire du moment, diffusée sur la radio populaire du moment. Une bonne ambiance de fête foraine.

- Ton tour, indiquai-je à Leila.

Il ne manquait plus que nous deux. Notre petit groupe était un peu à l'écart de la fête, assez pour ne pas croiser dix personnes au mètre carré mais pas suffisamment pour ne pas profiter des odeurs sucrées flottant dans l'air avec la musique.

D'un geste décidé, Leila attrapa entre ses doigts fins le strap rouge et le scruta un sourire aux lèvres.

- Ma couleur préférée.

Elle semblait heureuse, apaisée. Normal, pensai-je. Pour elle, ce n'était qu'une sortie entre amis, peut-être imaginait-elle qu'elle aurait une valeur thérapeutique pour surmonter la mort de Victoria. En tout cas, bien plus efficacement que les interventions du psy scolaire que le lycée nous avait proposées et que nous avions tous refusées un mois plus tôt. Leila semblait sereine.

Mais ce n'était pas le cas des autres.

Samuel, dont le strap vert était accroché à sa ceinture car son téléphone était en réparation, était encore plus silencieux que d'habitude. Mathilde, tenant son portable duquel pendait le strap orange avait l'air inquiète, et elle détournait les yeux dès que nos regards se croisaient. Tim, lui, qui avait sélectionné le strap bleu clair, grattait son avant-bras gauche depuis que nous nous étions tous retrouvés dix minutes plus tôt. Seule Sarah semblait comme à son habitude ; ailleurs, même si elle n'avait pas lancé de piques depuis le début de la soirée. A côté d'eux, Leila était parfaitement rayonnante.

Mais c'était parce qu'elle ne connaissait pas la vraie de raison de cette sortie. Après tout, elle ne savait même pas que nous sachions. Mais elle saurait, dès que je serais sorti de la montagne russe.

C'est en regardant le « Typhoon » que je glissai le strap jaune dans ma poche et que j'accrochai le dernier – le bleu foncé, à mon téléphone. Le « Typhoon » était un modèle réduit d'une célèbre montagne russe américaine que mon père avait fait exporté depuis la Californie. Ce côté US justifiait d'après lui le prix exorbitant du billet, 7 euros. Je ne pensais pas vraiment qu'il les valait, car il s'agissait tout juste d'un tour d'1min 10 sur un chariot circulaire bleu ciel, où la seule valeur ajoutée était un magnifique panorama de la ville qu'on pouvait admirer avant la dernière pente.

Mais montagne russe de pacotille ou pas, c'était dessus que j'allais affronter ma mort.

- Pour qui est le jaune ? demanda Tim sans arrêter de se gratter le bras.

Il faisait évidemment référence au dernier strap, celui que j'avais glissé dans ma poche quelques secondes plus tôt.

- C'est pour Victoria. Je ne veux pas la laisser de côté, morte ou pas.

- Je pense qu'elle est contente de le savoir, lâcha Sarah mélancoliquement.

Ce n'était pas quelque chose qui ressemblait à mon amie aux cheveux bleus. Mais ça n'allait pas me faire douter.

- Bien, et si on commençait la soirée, lâchai-je d'un ton enjoué que je n'utilisais pas souvent.

- Oui ! Répondit immédiatement Leila.

Les autres maugréèrent leur approbation puis la membre du club photo ajouta :

- Par quoi on commence ?

Sans hésiter, je pointai du doigt les rails du « Typhoon » dépassant du toit de la bicoque où un des forains vendait ses churros ultra-gras.

- Tu ne veux pas garder le meilleur pour la fin ? Demanda Sarah d'une manière loin d'être innocente.

- Ce soir, j'ai plutôt envie de commencer par le gros de la fête, rétorquai-je.

Un blanc de plusieurs secondes accueillit ma phrase, puis Leila décida de briser le silence encore une fois.

- Bon, alors allons-y, non ?

De dépit peut-être, Sarah hocha la tête et les autres approuvèrent. Alors je menai la marche.

Durant le cours trajet jusqu'au « Typhoon », nous passâmes devant mon père, accoudé au bar tenu par une jeune femme fraichement employée et peu habillée malgré le frais qui s'annonçait ce soir. Un instant, j'eus envie de le saluer mais me retins. Quel intérêt de lui dire que j'allais monter sur une montagne russe ? La seule chose qu'il me dirait serait : « Ah bah c'est pas trop tôt, tu vas enfin surmonter ta stupide peur des attractions ». Et que pourrais-je lui répondre ? D'une certaine manière, il aurait parfaitement raison.

Alors je passai sans l'appeler, le laissant à sa contemplation d'une jeune femme bien trop jeune pour lui et sa bedaine. Sans même me dire que cela pouvait être la dernière fois que je le voyais.

Etonnamment, il n'y avait pas grand monde dans la queue du « Typhoon ». On entendit un crissement et le wagon déboula la dernière pente et s'arrêta quelques mètres plus loin, devant la sortie. En sortirent trois adolescents ébouriffés complètement excités. Ils longèrent les barrières jusqu'à revenir au cœur de la fête tandis que les deux seules jeunes femmes attendant au guichet montèrent à leur tour dans le wagon, aidées par l'assistant.

- Bon eh bien, j'y vais.

Je m'apprêtai à rentrer dans le couloir de barrières menant jusqu'au guichet quand on me retint par la manche. Je fis volte-face, surpris de constater que c'était Samuel qui me tenait par la main.

- Euh... commença-t-il, son regard camouflé par ses mèches corbeaux tombant devant ses yeux. Quand... quand tu reviens, on pourra faire le palais des glaces ?

Un peu amusé, je hochai la tête.

- Evidemment, pas besoin de me demander.

Je savais bien sûr qu'il souhaitait seulement gagner du temps avec cette question avant que je monte, mais je n'avais aucune envie d'en perdre, moi.

- Attends ? S'écria alors Leila. Tu ne veux pas faire le manège, Samuel ?

Pris au dépourvu, le garçon me lâcha en chancelant puis secoua la tête.

- Ce n'est pas trop mon truc non plus, mentit Sarah.

Mathilde et Tim dirent de même, ce qui laissa Leila pantoise.

- On fera une autre attraction tous ensemble, s'empressa de dire le garçon.

- Mmmh, ok... Hésita Leila. Bon allons-y.

Avant même que je ne puisse réagir, elle attrapa ma main et m'entraîna vers le guichet.

- Qu'est-ce que tu fais ?

- Eh bah je vais faire le manège avec toi, j'adore ça moi.

Un sentiment d'impuissance m'envahit soudain. Et si... et si elle mourait avec moi ? Je ne pouvais pas lui faire subir mon propre destin, jamais je ne me pardonnerais si elle mourait par ma faut- Roh mais tais-toi.

Ma voix intérieure venait-elle d'imiter celle de Victoria ? Je ne me posai cette question que quelques secondes car nous arrivions au guichet cependant, mes idées semblaient plus claires à présent. Je jetai un coup d'œil à Leila, elle souriait. Je ne lui ferai pas subir mon destin ce soir car j'allais l'affronter, et je gagnerais.

- Deux places s'il vous plaît.

Mon frère décrocha le regard de son portable et me toisa d'un air dédaigneux.

- Oh tiens mais c'est Axel. Tu veux impressionner ta copine en montant sur ce gros engin ?

Quelle était la probabilité pour que Benjamin soit au guichet au lieu de se balader dans la fête pour tenter de draguer ? Sûrement trop faible pour que j'y pense, mais il était de toute façon trop tard pour reculer.

- Epargne-moi tes remarques et fais-nous monter, s'il te plaît.

Je posai rapidement un billet de vingt sur le comptoir mais mon frère le repoussa aussitôt.

- C'est papa qui invite ce soir. Joyeux anniversaire...

Je rangeai mon argent et lâchai un « merci » avant de prendre à mon tour mon amie par la main et de l'emmener jusqu'aux rails. Etonnamment, je me sentais serein, pas un brin de stress ne me traversait. Peut-être était-ce le contact de la main de Leila qui me calmait ?

L'assistant, un jeune qui devait être employé pour une semaine ou deux, nous installa dans le wagon bleu ciel dont la peinture commençait à s'écailler. Celui-ci était conçu pour six personnes, mais nous l'avions pour nous tout seul. Aucun bruit suspect ne parvint à mes oreilles lorsque je m'asseyais. Premier point rassurant. Le deuxième arriva lorsque l'assistant mit en place la barre devant Leila et moi. Celle-ci était tellement serrée que jamais nous ne pourrions tomber, point positif également.

- Axel, ça va ?

Je réalisai soudain que je respirais bien plus bruyamment que d'ordinaire, et j'imaginai alors sans mal que mon visage était rougi par le stress. Finalement, il avait bien fini par se montrer.

- Excuse-moi, tu disais ?

- Ton anniversaire, c'est aujourd'hui ?

Je hochai la tête en silence, les yeux rivés vers les rails qui commençaient déjà à monter cinq mètres devant moi.

- Oui, j'avais complètement oublié à vrai dire.

- Les autres aussi, je suppose. Ils ne te l'ont pas encore souhaité.

- Peut-être qu'ils le feront quand on sera descendus.

L'hypothèse était probable.

- En tout cas, joyeux anniversaire.

Pas même le temps de dire merci, le mécanisme s'activa et un claquement métallique retentit juste avant que le wagon ne démarre. Mon dos fut collé contre le siège un court instant et je jetai un coup d'œil rapide à mes amis, loin derrière les barrières limitant la zone de l'attraction. Mais le circuit ne me laissa pas le loisir de les observer bien longtemps, car Leila et moi furent propulsés en avant violemment en même temps que le wagon.

Le premier élan de la machine nous envoya tout de suite au milieu d'une courte montée jusqu'à ce que le mécanisme de tapis roulant entre les rails ne prenne le relais pour tirer le « véhicule » jusqu'en haut. Nous ne devions être que trois mètres au-dessus du sol mais j'avais déjà l'impression que mon cœur allait quitter mon corps.

- Prêt ? Me lança Leila, le visage empli d'excitation.

Devant nous, une série de trois bosses se rapprochait dangereusement, comme un apéritif censé aiguiser notre appétit pour la suite du repas.

- Euh...

Je tentai tant bien que mal de parler mais aucun mot ne franchit mes lèvres. Finalement, nous arrivâmes devant la première descente avant que je ne puisse finir ma phrase. Le wagon arriva au tout début de la courbe et pencha subitement vers l'avant, une milliseconde avant qu'il ne fonce à toute vitesse dans la descente. Il n'eut aucun mal à remonter la courbe grâce à l'élan, et une fois à son sommet, nous repartîmes une nouvelle fois en bas, puis en haut, en bas, et une dernière fois en haut. Cette série de bosse n'avait même pas duré cinq secondes.

- Alors, ça te plaît ?

Haletant, j'arrivai enfin à formuler une réponse.

- Pas mal.

Leila partit dans un fou rire mais j'étais bien trop occupé par mes pensées pour la suivre. Cette première partie du « Typhoon » ne m'avait pas semblée si terrible. Pour éviter la crise cardiaque, je n'avais qu'à me dire que le reste de l'attraction serait composée des mêmes courbes... En un peu plus grande. Et si ça devenait vraiment insoutenable, je n'aurais qu'à fermer les yeux.

A ce moment-là, l'idée qu'un défaut technique puisse survenir ne me serais jamais venue à l'esprit. Même si mon père était loin d'être bon dans de nombreux domaines de la vie, le soin qu'il portait à ses attractions et son exigence concernant leur état de fonctionnement étaient exemplaires. Je lui accordais ce point-là.

- Et c'est parti pour la suite ! Cria joyeusement Leila.

Après la série de bosse, le wagon avait bifurqué deux fois à droite et entamé une montée. De ce que je jaugeais, le point culminant de celle-ci devait être à sept mètres, pas super haut mais juste assez pour refaire carburer mon palpitant à plein régime. Les bruits métalliques désagréables du mécanisme qui tirait le wagon vers le haut n'aidaient pas à me calmer non plus. Mais heureusement, nous fûmes rapidement arrivés en haut de la pente. Le wagon bifurqua deux fois à gauche et nous fîmes face à deux nouvelles courbes ; la première semblable aux précédentes (si ce n'est qu'elle descendait bien plus bas), tandis que la suivante faisait effectuer au wagon un virage à droite, ce qui le ferait pencher comme une moto. C'était celui-là que je redoutais.

Instinctivement, je passai ma tête en dehors de l'habitacle pour voir si le wagon était bien accroché aux rails.

- T'inquiète, on va pas tombeeeeeeeeer !

La fin de la phrase de Leila se mua en une exclamation débordant de joie alors que le wagon dévalait la nouvelle pente. Je me dépêchai de reprendre une position conventionnelle, les mains serrés à la barre restreignant mes mouvements ; tout le contraire de mon amie qui elle arborait un magnifique sourire pendant que ses mains s'agitaient dans les airs.

Je me risquai à reprendre mon souffle lorsque je sentis le wagon remonter, mais ce-dernier entama bien plus rapidement que ce que je ne pensais le virage en pente. Le paysage bascula soudainement et étant du côté droit, le sol me parut bien trop proche et un claquement dans la structure de l'attraction me donna la nausée alors que cette nouvelle courbe finissait enfin.

- C'était quoi ? Criai-je presque.

Mais ma voix était quasiment muette dans les tumultes du « Typhoon » et de la fête.

- C'était quoi, quoi ?

- Ce bruit, là !

Maintenant que le wagon avait ralenti (et qu'il approchait de la dernière montée avant la dernière descente de l'attraction), je pris le temps d'observer le visage de Leila. Contrairement à moi, elle semblait parfaitement bien, presque en extase.

- Je sais pas, fit-elle en hochant les épaules. Mais ça doit pas être grave, c'est pas la première fois que je l'entends à cet endroit-là.

- Ce n'est pas la première fois que tu fais cette attraction ?

- Bien sûr que non !

Elle détourna les yeux des rails un court instant et me gratifia d'un clin d'œil.

- Je t'ai dit que j'adorais les montagnes russes. Je viens ici depuis que je suis en seconde, et je parcours toutes les fêtes foraines et parcs d'attraction de la région.

La réplique me laissa sans voix. D'une certaine manière, j'avais l'impression que ce trait de caractère ne collait pas à Leila, la fille calme, posée et qui prenais des photos de la mort. Elle avait définitivement des mystères qui restaient à percer. Mais en plus de me laisser sans voix, sa réplique me fit rire.

Car jamais je n'aurais imaginé que la fille dont je tomberais amoureux pourrait apprécier autant ce qui causerait ma mort.

- J'ai dit quelque chose de drôle ? Demanda-t-elle sur le point de rire aussi.

- Non, excuse-moi.

Leila souffla, amusée, et je laissai le « Typhoon » nous porter jusqu'à son point culminant ; une longue balade carrée perchée à quinze mètres, qui nous laissait admirer à la fois la ville nocturne, mais aussi le parcours qu'avait parcouru le wagon, juste avant l'ultime descente.

- Sarah m'a dit, lâcha soudain Leila de manière inattendue.

Malgré ma surprise, je ne pus me résoudre à lâcher le ciel des yeux. Là-haut, une étoile semblait briller bien plus fort que les autres. Etait-ce Victoria qui veillait sur nous ? Ça ne me ressemblait pas de penser comme ça, mais c'est pourtant ce que je m'étais dit à cet instant.

- Que t'a-t-elle dit, exactement ?

- Pour ta peur des sensations fortes, dit-elle d'un air solennel. Je suis contente que tu essaies de la surmonter, avec nous. Avec moi.

Un brin rassuré, non pas parce qu'elle aurait su mais par ce que n'aurais pas été celui qui lui dirait en premier, je m'autorisai le premier soupir de la soirée et me relaxai un peu dans mon siège.

- Il y a quelque chose de très important que je vais devoir te dire, une fois que nous serons descendus de là.

- Je crois que moi aussi, répondit Leila après un court silence.

Les bruits de l'attraction me revinrent soudain alors que le wagon effectuait l'un de ses derniers virages. Sur notre droite, nous pouvions maintenant apercevoir toute la fête foraine, et surtout nos amis qui nous observaient depuis les barrières de la file d'attente. Celle-ci semblait d'ailleurs bien plus remplie qu'une minute plus tôt. Je plissai les yeux pour tenter de déchiffrer les visages des membres du club mais ceux-ci étaient trop loin pour que je voie quoi que ce soit. Je n'avais néanmoins aucun mal à imaginer leur soulagement que je sois encore en vie, mais également leur stress que l'attraction ne soit pas encore finie.

Ne vous inquiétez pas... pensai-je alors. Je ne vais pas mourir là-dessus.

Et en effet, ce ne fut pas le cas.

Le wagon bifurqua sur la gauche et moins d'une seconde plus tard, une sensation de bien-être me traversa tandis que nous dévalions la dernière pente. Le vent s'engouffrait dans mes cheveux et offrait une sensation très agréable, comme si tout le négatif se faisait souffler d'un seul coup pour ne laisser que le positif. Je ne sentais pas mon cœur battre à tout rompre, j'étais étrangement calme, sans même fermer les yeux. Les rails défilèrent à une vitesse folle devant moi mais pas une fois je ne détournai le regard et bientôt, le wagon ralentit petit à petit jusqu'à s'immobiliser complètement à l'endroit où nous avions embarqué.

- C'était super...

Leila parut aussi étonnée que moi de m'entendre dire ça.

L'assistant nous aida à descendre et fit rapidement monter les suivants. Je ne fis pas attention à leur sexe ou leur âge car mes yeux étaient rivés sur le couloir de sortie que les barrières en métal formaient. C'est fini.

J'ai combattu mon destin, et j'ai gagné.

Avant même que je ne pose les pieds sur le sol de la fête, Leila me dépassa à toute vitesse et courut vers les autres. Etonné, je la suivis du regard sans bouger, apercevant en même temps les visages émus de mes amis. Tim et Samuel semblaient sur le point de pleurer, tandis que Mathilde, elle, était carrément en larmes. Sarah gardait un air inexpressif mais elle souriait presque à pleine dent, chose assez rare pour le souligner.

Sans plus attendre, j'avançai à mon tour.

Je sautai de la plateforme sur laquelle reposait le « Typhoon » et entamai ma marche de gloire. En face, Leila venait de rejoindre les autres et ils étaient maintenant en train de créer un arc de cercle devant la sortie.

- Trois...

C'était Sarah qui avait commencé le décompte.

- Deux...

Leurs cinq voix s'étaient déjà accordées.

- Un...

Je ne remarquai même pas que je souriais.

- Joyeux anniversaire !

Ils se mirent subitement à applaudir et je sentis des regards étrangers se poser sur moi, probablement des inconnus interpellés par le vacarme. Mais au lieu d'y faire attention, je m'élançai au pas de courses vers mes amis, prêt à partager ma joie d'être encore en vie. A mi-chemin, je sentis quelque chose bouger dans ma poche de pantalon et la sensation désagréable que ce quelque chose s'échappait faillit me faire déraper. Je me rattrapai cependant et fit volte-face pour récupérer ce qui venait de chuter.

Devant moi, mon téléphone duquel pendait le strap bleu foncé rebondit sur le sol en même temps que le strap jaune. Celui de Victoria. C'est quand je me penchai pour les ramasser que le craquement retentit. Un bruit métallique résonna dans la fête et couvrit la musique.

Je levai alors la tête, juste à temps pour voir le wagon sortir du circuit et foncer sur moi à toute vitesse.


***


Pourquoi suis-je debout ?

C'est la première question qui me vient à l'esprit, bien avant de me demander pourquoi les objets que je voulais ramasser sont en suspension dans l'air, ou encore pourquoi un wagon bleu du « Typhoon » se trouve à moins de deux mètres de mon visage, complètement immobile.

- Tu t'es relevé sans même le remarquer. Sans doute par réflexe.

Tout à gauche de mon champ de vision, la matière s'agite, devient sombre et s'ouvre pour laisser passer une femme mystérieuse vêtue de noir. Toute sa tenue est couleur des ténèbres ; son voile orné de roses noires, sa longue robe ou encore ses gants. Ses cheveux aussi sont couleur de jais, alors que seuls ses yeux bleus apportent de la lumière à son visage ridé.

- Pourquoi ?

J'aurais eu envie de le crier mais pourtant, quelque chose en moi m'en empêche.

- Pourquoi es-tu en train de mourir ? Suppose la femme.

Ses talons noirs la dirigent devant moi, entre moi et le wagon. Elle semble immense, bien qu'elle ne doive pas dépasser le mètre soixante-dix en réalité.

- Je me suis battu ! Dis-je d'une voix plaintive. J'aurais dû vivre !

- Tu t'es battu, oui. Mais tu t'es battu par Colère, pas par envie de vivre. Tu t'es battu car ton amie est morte. C'était un combat désespéré, duquel tu savais que tu ne t'en sortirais pas.

- C'est faux !

Cette-fois, j'ai réussi à hurler. Néanmoins, l'atmosphère étouffante autour de moi semble absorber totalement ma voix.

- Je ne serais jamais monté là-dessus en désespoir de cause ! Je n'aurais pas dû mourir !

- Tu en étais pourtant persuadé, et je vais te le prouver.

Elle sourit légèrement, de manière bienveillante. Et associé à son ton calme, elle s'apparente à une personne âgée prête à donner moult leçons de vie.

- Axel Taure, tu es une bonne personne. Tu ne supportes pas de voir les êtres aimés souffrir. Alors dis-moi. Dis-moi pourquoi tu n'as pas partagé tes sentiments avec l'être aimé quand tu étais là-haut, dans l'attraction.

Je tente d'ouvrir la bouche pour répondre mais aucun son n'en sort.

- C'est moi qui vais répondre dans ce cas, poursuit la femme. Tu ne lui as pas dit que tu l'aimais car tu savais que tu allais mourir. Tu ne lui as pas dit pour ménager sa souffrance à l'instant où tu disparaîtrais. Ai-je tort ?

Encore une fois, mes lèvres s'agitent mais je demeure silencieux. La larme qui coule le long de ma joue gauche en dit bien plus.

- Je ne vais pas te blâmer. Je ne suis pas là pour ça.

Je relève piteusement la tête.

- Est-ce que je peux au moins savoir comment c'est arrivé ?

La femme regarde à droite et à gauche, comme pour s'assurer qu'il n'y a personne mise à part nous. Pourtant, il y en a du monde, dans la fête, mais ça ne semble pas la déranger.

- Trois boulons mal vissés. Cela semble improbable mais c'est le cas. La rampe qu'ils étaient censés soutenir a cédé peu après le passage de ton wagon, mais de manière si infime qu'il était impossible de le voir d'en bas. Le suivant a fini de la décaler et a donc déraillé.

Réalisant soudain qu'il y a des gens dans le wagon, je lève les yeux une nouvelle fois et observe le jeune couple effrayé au-dessus de moi. Ils ne doivent avoir que deux ou trois ans de plus que moi, et malgré l'état second dans lequel je me trouve, je ne peux m'empêcher de m'imaginer à leur place, en compagnie de Leila. Cette vision aurait pu être plaisante si ces deux inconnus n'avaient pas l'air si effrayés et si le wagon était sur des rails.

- Ne t'en fais pas pour eux. Ils auront des blessures qui les forceront à rester à l'hôpital quelques temps mais rien de mortel. « Un miracle », diront les médecins.

Cette mystérieuse femme a beau dire cela, je ne peux m'empêcher de penser que cet accident bouleversera toute leur vie.

- Je ne suis pas venue pour eux, ajoute-t-elle. Si je suis là à cet instant...

- C'est pour moi.

Son sourire s'élargit un peu plus, lui donnant l'air plus jeune.

- Je ne suis pas en train d'halluciner, pas vrai ?

- Absolument pas.

Je soupire un instant. Même si la possibilité d'halluciner me paraissait peu probable, j'imagine que ça m'aurait tout de même soulagé un petit peu.

- Dans ce cas... Qui êtes-vous ?

Soudain, la femme semble se renfrogner un peu, las.

- Tout le monde me pose toujours cette question... Souffle-t-elle. Je ne sais pas réellement moi-même et de toute évidence, aucune de mes réponses ne te satisfera.

Dommage, pensé-je. Mais ce n'est pas le plus important.

- Est-ce que je vais revoir Victoria ?

- Je n'ai pas le droit de te répondre.

Son visage se ferme alors quelques secondes, mais elle finit par sourire de nouveau.

- Tu le sauras bien assez tôt.

- Merci...

Tout d'un coup, mes paupières deviennent lourdes et je sens mon corps s'ankyloser.

- Il est l'heure... observe la femme, haut au-dessus de moi. Prêt à partir ?

Sans réfléchir, je hoche la tête de haut en bas, mon regard oscillant de mon téléphone et des straps toujours en suspension au wagon se rapprochant au ralenti de mon visage.

- Bien.

Alors qu'elle se penche en avant, une odeur douce et mélancolique arrive à mes narines. Ses lèvres se scellent aux miennes et je me sens partir, tandis que deux immenses ailes noires se déploient derrière elle, jusqu'à recouvrir tout mon univers.


Puis le temps reprend son cours et les objets en suspension chutent. Le téléphone, les straps, et le wagon.



Bạn đang đọc truyện trên: Truyen247.Pro