38. A moi
Demet
Cinq, quatre, trois deux, un, zéro...Bonne année 2019 !!!!
La terrasse à demi entrouverte, Guven sabre le champagne tandis qu'au loin des feux d'artifices célèbrent le passage de la nouvelle année.
J'explose de joie, applaudissant à tout va alors que l'assemblée s'enlace, s'embrasse, se souhaitant le meilleur pour la nouvelle année qui démarre.
Je le cherche du regard. Je sais qu'il ne doit pas être bien loin mais les corps qui se pressent autour de moi me barrent la vue. Je répond chaleureusement à chacune des embrassades, chacun des sourires, chacune des chorégraphies de joie qui me sont proposées mais mon esprit est ailleurs.
Il y a un an je passais la nouvelle année dans une fête monstrueuse orchestrée par Seckin, entourée de fêtards, de visages plus ou moins familiers. Un bon moment festif mais le coté impersonnel n'a pas laissé un brillant souvenir dans ma mémoire. Je pensais que l'année 2018 verrait ma relation avec Seckin s'orienter vers celle d'un couple épanoui, que je laisserai enfin derrière moi ma vie de célibataire pour emménager avec lui et que nous allions passer au cap supérieur. Comme j'étais aveugle...
Cette année passée m'a tant apportée, professionnellement tout d'abord, m'ouvrant la voie d'un projet fantastique qui m'ouvre des perspectives incroyables au delà même de mes propres frontières. Et surtout la rencontre qui a bouleversé ma vie.
Can.
Je souris bêtement en pensant à tout ce que nous avons traversé ces quelques mois depuis notre première rencontre. Il a tellement profondément changé ma manière d'appréhender les choses...
- tu es bien pensive...
Sa voix, celle que je reconnaitrais entre toutes, à la fois douce, masculine et sexy. Il est derrière moi et, à son intonation je sens qu'il sourit, certainement amusé de me sentir frissonner à son contact. Ses bras m'encerclent et caressent délicatement la peau dénudée de mes bras à mes épaules. Je laisse ma tête basculer contre lui et je ferme les yeux, laissant le plaisir de ce câlin fugace m'envahir. Il m'entraîne le plus discrètement possible dans le couloir...
- Bonne année mon amour.
Je me retourne et lui fait face, un sourire envahissant tout mon visage.
- Bonne année mon amour.
Rien de très original à répéter ces mots sauf peut être de les penser si fort. Nos regards s'attrapent, se toisent et je soupire quand ses lèvres prennent possession des miennes avec ardeur. Je lui rend son baiser qui s'intensifie à chaque seconde. A bout de souffle, nous finissons par nous séparer dans un sourire.
- Wahou c'était...une belle façon d'envisager cette nouvelle année !
- Je suis heureuse, tellement heureuse...
- Oh ? C'est vrai ?
Beste, comme à son habitude d'arriver au meilleur moment nous interrompt, deux coupes de champagne à la main.
- allez les amoureux, on vous attend, vous avez bien le temps de vous bécoter dans les coins comme des ados !
Je lève les yeux au ciel et j'entraîne Can dans mon sillage. La musique nous enveloppe et je me laisse attraper par Beste là où d'autres se trémoussent déjà. Je bouge en rythme, libérée, heureuse, enjouée. Je suis déjà d'un naturel jovial mais ce soir je me sens pousser des ailes. Cette nouvelle année qui s'annonce m'exalte et encore plus après la décision importante que j'ai prise. Comme un soulagement venant clore une période d'incertitude. Comme si, enfin, mon coeur et ma raison étaient sur la même longueur d'ondes. Can s'accorde une seule coupe de champagne et la tend dans ma direction alors qu'il la porte à ses lèvres sans cesser de me regarder. Ses yeux me transpercent et je continue à bouger sous le feu de son regard incandescent. Je profite de ce moment d'amusement couvert d'érotisme, laissant complètement de coté les regards des proches qui nous entourent.
Can
Ses yeux droits dans les miens, son corps qui ondule telle une sirène devant moi, je me perds dans un océan de désir. Elle n'est pas seulement incroyablement belle et sexy, elle est tout ce que j'ai toujours désiré. L'année qui vient de s'achever a été bien plus riche que toutes les autres réunies. Sa rencontre a fait se confondre mon fantasme avec la réalité bien plus époustouflante même si elle n'a pas non plus épargné mon coeur.
Dès que mes yeux ont croisé les siens sur le trottoir du Lucca j'ai su que j'étais perdu. Le virus s'est imprégné au plus profond de moi et je suis tombé raide pour elle et son univers. Je m'y suis brulé les ailes et j'y ai laissé des plumes mais même mes insomnies et mes angoisses de la perdre ne m'ont pas fait lâcher prise. Chaque unique moment à ses cotés, chaque réveil dans ses bras, chaque sourire, chaque réconciliation m'ont poussé un peu plus à tomber pour elle, inévitablement.
Avant elle je n'avais connu qu'une succession de relations divertissantes mais dont je me lassais aussitôt sans jamais ressentir le besoin de l'autre.
Sans quitter sa silhouette du regard, je sirote l'unique coupe de champagne que je m'accorde ce soir.
- tu es un sacré veinard mon fils...
J'échappe un petit rire étouffé. Mon père garde toujours l'oeil alerte...
- Tu crois ?
- Oh oui, crois-en mon expérience, on ne rencontre qu'une seule fois son âme soeur...peut être deux avec beaucoup de chance...
Il pose sa main sur mon épaule et me la pince affectueusement.
- Ne gâche pas cette chance, ne laisse rien ni personne te détourner de l'amour véritable. Beaucoup de choses s'achètent, les opportunités professionnelles manquées peuvent se rattraper mais pas l'amour.
Je n'imaginais pas que mon père puisse se révéler philosophe. D'habitude, c'est plutôt avec ma mère que je tiens ce genre de conversation. Dommage que çà n'arrive pas plus souvent finalement. Il n'est pas un grand bavard des sentiments, il parle peu et n'est pas démonstratif mais nul besoin. Je me suis toujours senti aimé et soutenu dans son regard, porté par son amour et sa confiance en mes capacités. Aujourd'hui il vit seul, s'accordant occasionnellement le droit d'une aventure, il ne me le dira jamais mais sa seule véritable âme soeur restera ma mère. Il n'a pas réussi à la retenir et je pense qu'il aimerait que je ne fasse pas les mêmes erreurs que lui...mais est-ce seulement possible de se servir de l'expérience de ses aïeux ?
Chacun trace sa propre route. Les conseils peuvent nous aiguiller mais jamais ils ne m'ont fait modifier mon cap.
- elle est si...
- Belle ?
- Si elle n'était que ça...-
- Elle t'aime mon fils, la manière dont elle te cherche du regard, la douceur de ses yeux quand elle te parle...tu es un sacré veinard.
- Elle m'en fais voir tu sais...mais elle est si merveilleuse...
Il trinque à ma dernière gorgée de champagne alors que Demet se rapproche de nous essoufflée et pleine de son innommable sourire.
- Bonne année Guven ! Bonne année Can !
Elle attrape mon bras sur lequel elle se repose et reprend son souffle après sa session danse effrénée avec Beste. Mon père lui propose un verre qu'elle accepte volontiers dans un sourire.
- Du champagne ?
- Oh c'est gentil mais je vais freiner sur l'alcool, çà ne me réussit pas et j'ai vraiment très soif...
Deux heures plus tard...
Demet
Mon appartement a retrouvé le calme. Les quelques personnes venues faire le service ont rangé le plus gros et viennent de partir. Can m'attend dans l'encadrement de la porte de ma chambre, son regard énigmatique me donne des frissons. Je ne suis même pas sûre qu'il me sourit.
Je crois qu'il est temps que nous ayons une petite discussion.
Je prends sa main et l'entraîne à l'intérieur, prenant soin de refermer la porte derrière nous, comme si notre intimité pouvait être perturbée alors que nous sommes seuls dans l'appartament.
Alors que nous asseyons sur le bord du lit, ma main tenant toujours la sienne, je remarque un cil sur sa joue droite. Je lui demande de faire un voeux.
- C'est fait
- Souffle
Il s'exécute et comme par magie le cil s'envole. Son voeux va se réaliser.
Passé cette parenthèse enfantine, je toussote et retrouve un ton plus sérieux, plus solennel. Je ne suis pas douée pour les grandes déclarations. Moi, celle qui flanche pour les moments de romantisme je ne suis pas douée pour les offrir. Mais après tout ses efforts pour me prouver son amour, toutes ses attentions, toutes les fois où il a été là pour moi alors que je le rejetais. Il a été jusqu'à sacrifier son amour propre pour moi. Celui qu'on m'a présenté comme un coeur d'artichaut s'est jeté à mes pieds et moi j'ai fait quoi ? Je me suis laissée prendre au jeu, au début oui. Et puis quand les battements de mon coeur se sont emballés, quand le jugement de notre entourage professionnel s'en est mêlé, quand j'ai commencé à ne plus contrôler la direction que prenait notre relation j'ai paniqué. J'ai été incapable de maîtriser les angoisses de l'enfance et j'ai vrillé, misérablement, laissant Can de coté, pensant que ça me passerait...mais Can est tout sauf une passade, aujourd'hui il est mon tout.
- J'ai des choses à te confier...
- Hummmm un secret inavouable ?
Son regard moitié charmeur, moitié amusé me fait déjà chavirer.
Reste concentrée Demet.
- Presque
Il retrouve une posture sérieuse, prêt à m'écouter.
- D'abord, je voulais m'excuser Can...
- T'excuser ?
Il a un mouvement de recul, intrigué.
- Oui, pour tout ce que je t'ai fait traverser, je n'ai vraiment pas été facile à vivre...
- Je suis encore là tu vois
Oh oui il est encore là et justement...
- Tu te souviens la première fois qu'on s'est rencontrés ?
- Le jour de la présentation de l'équipe, avec Faruk et les autres ?
- Non, avant...
De nouveau un mouvement de recul. Puis une étincelle dans ses yeux et un sourire à peine dissimulé.
- Ce soir là, devant le Lucca. J'étais avec Beste. Ma soirée romantique avec Seckin s'était transformée en soirée groupie. Il était aux platines et j'étais désespérée de perdre mon temps, de devoir encore le partager. J'étais en colère et fatiguée quand mon attention a été attiré par ta silhouette, ton attitude, ta présence...et enfin ton regard. Même si çà n'a duré que quelques secondes, alors que je montais dans le taxi, je n'ai jamais pu l'oublier ce regard, ton regard...
Il reste silencieux et je fais une pause, reprenant mon souffle.
- Peu de temps après, j'ai rencontré Faruk pour le projet d'Erkençi Kus. J'avais trois projets sur la table et il a été le seul à vouloir me rencontrer en personne, comme s'il ne voulait que moi pour le rôle...
Can sourit.
- Il m'a parlé de la série, qu'il croyait beaucoup en mon partenariat avec l'acteur retenu pour jouer le premier rôle masculin, que nous aurions une parfaite alchimie. Il m'a demandé si j'avais déjà entendu parler de toi et j'ai répondu que non...et...il m'a tendu une photo...
Je baisse les yeux, j'ai du mal à soutenir son regard. J'aperçois à certains moment sa paupière qui vacille, nerveusement peut être ?
- Je t'ai reconnu instantanément et...je lui ai dis que je voulais le rôle, sans plus réfléchir...il a du me prendre pour une folle.
- Demet...
- Laisse moi finir Can, si tu m'interromps je n'arriverais pas à te dire tout ce que j'ai à te dire...
- Ok.
- Dès les premières fois où nous nous sommes vus, quand nous avons commencé à travailler sur les scènes, qu'on passait aussi du temps ensemble en dehors j'ai ressenti quelque chose de différent...c'est peut être très fleur bleue dit comme çà mais ça m'a autant attiré vers toi que poussé à te fuir...tu comprends c'était si puissant...j'ai lutté de toute mes forces pour te repousser, j'avais peur que ce sentiment me consume et plus je m'obstinais plus je m'en voulais de te faire souffrir. J'étais tellement en colère contre moi même Can...
- Demet...
Je ferme les yeux. Ses mains sont à plat sur ses cuisses et lorsque je les rouvre ma main se pose sur la sienne, je veux qu'il me laisse terminer.
- Ce que je n'avais pas compris c'est qu'il est encore plus dur d'être loin de toi...alors j'ai fini par accepter que mes failles et mes faiblesses ne pouvaient pas dicter ma façon de vivre indéfiniment. Beste, mon frère, Anil...ils m'ont tous poussé à m'ouvrir à toi. Tu es la première personne à qui j'ai confié de tels secrets Can...j'avais besoin de te retrouver. Mais je ne peux plus continuer ainsi, plus maintenant.
Sa main tressaille, ses pupilles se dilatent et sa main libre frotte nerveusement sa cuisse.
- Demet...
- Je suis éperdument amoureuse de toi, je ne supporte plus de voir toutes ces filles qui te sourient, te tournent autour dans l'espoir d'un baiser, d'un rencard ou pire...savoir qu'au détour d'une rencontre tu pourrais te détourner de moi parce que je n'ai pas voulu de toi...je t'aime Can...
Mes mains et ma voix tremblent, je rougis et j'ai l'impression que mon coeur va bondir à l'extérieur de mon corps. Je n'ai jamais de ma vie fait une telle déclaration. Mon visage est chaud et j'ai pourtant des sueurs froides. A la fois privée d'oxygène et soulagée d'un grand poids. Peu importe ce qui va se passer à partir de cet instant, j'ai été honnête et j'ai enfin mis mon coeur à nu.
Can, silencieux, pose ses mains contre mes joues, son regard alterne de mes yeux à mes lèvres plusieurs fois durant les quelques secondes où nous nous dévisageons, hypnotisés. Je force un sourire alors que je sens mon visage crispé, paralysé. Il me répond par la même expression timide de celui qui vient de comprendre...
Nos visages se rapprochent, nos lèvres se frôlent avant de céder, inexorablement à l'appel du désir. Un baiser doux, sensuel, plein de soulagement, plein de promesses d'un avenir que j'espère à deux. Le temps de nos lèvres scellés n'est pas mesurable. C'est le manque d'oxygène qui fini par nous séparer. Nos fronts collés, les yeux encore fermés nous reprenons notre souffle.
- Je suis à toi Demet, rien qu'à toi, exclusivement à toi...
J'ouvre les yeux et lui souris, je sens les larmes sur le point de couler et ma gorge se serrer. Quel incroyable moment pour démarrer l'année 2019...
- Ne pleure pas s'il te plait...
Il attrape ma main et l'embrasse, plusieurs fois, doucement, sensuellement , des baisers humides au creux de mes paumes et des doigts mordillés. Tellement Yaman...
- Moi non plus je n'aime pas les regards qui te dévorent, sur le plateau, dans la rue, lors des cérémonies, des shootings ou lorsque tu sors avec tes amis, sans moi. Il y a deux jours j'ai cru mourir de jalousie...
Il reprend mes lèvres, cette fois ci avec beaucoup plus d'intensité, une férocité nouvelle, une pulsion animale. Je lui rend la même fièvre et me laisse emporter, allongée sur le lit les pieds dans le vide alors qu'il me surplombe, prenant appuis sur ses avant bras pour ne pas m'écraser. Il abandonne à peine ma bouche un instant.
- Tu es à moi Demet, à moi...tu entends ?
- Entièrement...
- Exclusivement...
- Indéfiniment.
Ces quelques mots me font frissonner de plaisir.
Le ton de sa voix, rauque et excitée, douce et sensuelle, le pouvoir de ses mots.
Je suis à lui depuis bien longtemps, il était temps que je l'accepte.
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Bonjour à toutes ! J'espère que tout le monde va bien et que vous aurez apprécié ce chapitre...
J'attends avis, vos impressions et je voulais toutes vous remercie pour vos messages très gentils tout au long des jours où vous lisez ce chapitre, c'est vraiment sympa.
Gros bisous à toutes
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