21 - Deux Digressions
Digression 1 : Un documentaire plein d'émotions
Avec l'actualité sur la PMA, le mois de juin 2018 fut riche en documentaires et en débats autour de la parentalité et, par extension, de l'homoparentalité. Avec Mr Ours, nous avons eu le plaisir d'en visionner quelques-uns, dont "Roman d'une Adoption" réalisé par Anne Gintzburger, qui passait en seconde partie de soirée sur France 2.
Ce documentaire s'attèle à suivre pendant plusieurs années, et de manière intimiste, deux couples lancés en pleines démarches : le premier hétéro, le second homo. Autant dire qu'on s'est très vite identifié à eux, qu'importe leur orientation, mais que notre attention s'est surtout portée vers l'aventure que vivait le second. Plusieurs fois, les scènes nous ont pris à la gorge et il a été difficile de ne pas pleurer. Les deux histoires, bien que se déroulant en parallèle, aboutissent à des résultats différents : l'un des couples adopte un nourrisson, l'autre se perd dans l'attente et les soupçons d'homophobie à leur encontre.
L'une des scènes nous a même convaincus de ne pas conseiller tout de suite le visionnage du documentaire à nos parents. Philippe, le mari de François, se retrouve seul face à la caméra, au bord des larmes, et se lance dans des explications poignantes à propos de l'injustice qu'il ressent : "Je n'adopte pas un fantôme. Faut qu'on arrête de nous abîmer. Moi, je ne veux pas qu'on abîme mon couple, je ne veux pas qu'on abîme François."
https://youtu.be/i4pE9_AADqA
Malgré la détresse qui se dégage de ce couple, leur détermination reste solide, et pendant un temps, on s'est demandé si nous n'allions pas passer par ce genre de sentiments. Puis, on a pris du recule, on a relativisé et on s'est vite rendu compte que leur histoire n'est pas la nôtre :
1°) Philippe et François ont une quinzaine d'années de plus que nous et ils ont décroché deux fois l'agrément. La première fois en célibataire avant la loi sur le Mariage Pour Tous, même si le documentaire ne l'explique pas. La seconde fois, en tant qu'hommes mariés. Ils ont connu l'avant, l'après, et essuient en quelque sorte les premiers plâtres. Ça me désole, d'ailleurs !
2°) Ils n'habitent pas dans le même département que nous. Ainsi, notre dossier ne sera pas jugé par les mêmes personnes, par le même Conseil de Famille.
3°) Leur cheminement est plus complexe encore que le nôtre. Je ne sais pas si c'est à cause du montage, mais les deux hommes semblent avoir décroché leur premier agrément en ayant quelques lacunes. Dans un premier temps, ils veulent adopter des enfants jeunes à l'étranger, et devant les verrous qu'ils rencontrent se voient obligés de demander une révision de leur agrément. D'une certaine façon, cet évènement nous rassure sur notre capacité à recevoir l'agrément. Nous avions l'impression que les assistantes sociales et la psychologue attachaient une importance capitale à cette recherche de renseignements. Peut-être est-ce spécifique à leur département, mais le sentiment qui nous vient est le suivant : "Ils ont réussi à décrocher l'agrément malgré ça, alors pourquoi pas nous ?"
Digression 2 : Des enfants atypiques pour des couples atypiques
Vous en avez peut-être entendu parler ! Récemment, des propos rapportés par la responsable du service adoption du département de Seine-Maritime ont mis en lumière la discrimination dont étaient victime les couples de mêmes sexes. Je cite :
- Eux-mêmes (les couples homosexuels) sont un peu atypiques par rapport à la norme sociale, mais aussi la norme biologique. Donc si leur projet supporte des profils d'enfants atypiques : un enfant dont personne ne veut. Puisqu'il y a des gens qui ne veulent pas adopter d'enfant trop cassé, trop perturbé psychologiquement, trop grand... vous voyez, handicapé... Donc ces enfants-là, ils ont des perturbations qui ne sont pas recherchées par... et c'est normal... par les couples euuuh... voilà. C'est pas l'idée qu'ils ont. Et donc en fait, si les couples homosexuels ont un profil, des attentes ouvertes, ils peuvent très bien adopter un enfant. Ils ne seront pas prioritaires, mais ils ne seront pas exclus du tout de l'adoption.
- Par contre, rétorque la journaliste, le petit bébé de trois mois qui va bien, à priori, c'est quand même compliqué.
- Il y aura des parents qui correspondent aux critères requis par l'organisme qui place l'enfant en vue d'adoption, ou par le Conseil de Famille.
- Mais ça ne sera pas un couple homosexuel.
- Ben non, répond la responsable, mal à l'aise.
Je vous laisse juger du problème par vous même. Vous imaginez bien qu'aussitôt, les réseaux sociaux, les politiques et la presse se sont emparés du sujet. Cette petite bombe médiatique jouera peut-être en notre faveur. Du moins, savoir qu'une personne qui tient ces propos fait couler autant d'encre et se retrouve mise à pied fait souffler un léger vent d'espoir sur notre situation.
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